Le président américain Donald Trump
Le président américain Donald Trump a contribué à la diffusion du terme "Fake News" lors de sa campagne présidentielle.

Introduction aux fake news - Blog QAPS juin 06, 2018

Il nous arrive parfois de douter face à une information qui nous est présentée tant elle semble farfelue ou difficile à relier avec nos connaissances. Pourtant, dans cette agrégation de vraies et de fausses informations, la véracité des faits ne se vérifie pas toujours à leur probabilité de réalisation. Par ailleurs, pouvez-vous affirmer avec certitude que le président actuel des Etats-Unis d’Amérique a eu une relation de 10 mois avec une ancienne top model de playboy ? Il nous arrive parfois de douter face à une information qui nous est présentée tant elle semble farfelue ou difficile à relier avec nos connaissances. Pourtant, dans cette agrégation de vraies et de fausses informations, la véracité des faits ne se vérifie pas toujours à leur probabilité de réalisation. Par ailleurs, pouvez-vous affirmer avec certitude que le président actuel des Etats-Unis d’Amérique a eu une relation de 10 mois avec une ancienne top model de playboy ?Ou encore que Mark Zuckerberg compte vraiment fermer Facebook ? Qu’un « train de caca » a été bloqué en Alabama ? Et enfin qu’une adolescente américaine a avorté en live en vue de récolter des bitcoins de donation pour un planning familial ?

Mais avant de vous donner des réponses toutes faites à ces questions, nous vous invitons à vous questionner sur votre sens critique mais également à en apprendre davantage sur le phénomène des « Fake News ». Car comme vous le savez, une personne avertie en vaut deux…


Que savez-vous sur le sujet ?

Avant d’entrer dans le vif du sujet, nous avons retenu les témoignages de trois personnes résidant en Belgique afin d’examiner leur perception des fake news. Nous leur avons donc posé cette question : « Que signifie le terme « fake news » pour vous ? » Pour Clément, 19 ans, « les fake news à la télé, c’est l’exagération d’un sujet, c’est quand on juge trop vite, qu’on n’a pas assez de recul, et puis on se rend compte que ce n’était pas ça. C’est aussi lié aux préjugés. Par exemple, s’il y a un attentat on va tout de suite dire que c’est des musulmans. Sur Youtube, le but des fake news c’est aussi d’avoir le plus de « vues », on fait un truc aguicheur, et puis en fait c’était pas vrai. C’est aussi du bouche-à-oreille, quand tu exagères ou que tu mens pour attirer l’attention et te rendre intéressant ». Pour Gwendy, 25 ans, «je pense que c’est comme les rumeurs : ça fait parler les gens, ça fait de l’audience. Même si c’est faux, les gens en parlent quand même et réagissent, et c’est d’ailleurs le but recherché. Plus il y a de réactions, mieux c’est. C’est un peu comme si on voulait l’avis des gens, si ça se passait réellement. Et beaucoup se feront prendre dans le panneau parce qu’ils ne vérifient pas la source. ». Pour Martine, 64 ans, « Ce sont des informations tronquées ou fausses pour manipuler l’opinion publique et ce dans des domaines divers : la politique, la culture, etc. C’est manipuler les masses pour qu’elles prennent position en faveur ou en défaveur d’une personne afin de servir des intérêts obscurs ». Face à ces croyances, affirmations, ou ébauches de définitions nous remarquons des avis semblables mais aussi divergents sur certains points. Mais qu’en est-il vraiment ?


Savez-vous ce que sont les fake news ?

En 2017, l’Institut Reuters a publié un rapport sur ce sujet. Cette étude nous apprend que nous mélangeons souvent trois idées sur les fake news, à savoir que les fake news sont : des informations créées de toutes pièces dans un but lucratif ou pour porter atteinte à autrui, des informations qui sont en grande partie vraies mais qui sont présentées d’une certaine façon afin de servir un intérêt particulier, ou encore des informations servant à gêner des personnes ou avec lesquelles ces dernières ne sont pas d’accord. Une définition intéressante à retenir est celle du Cambridge Dictionary : « Les fakes news sont des histoires fausses qui ont l’apparence de nouvelles, disséminées sur internet ou utilisant d’autres médias, et créées soit pour influencer les opinions politiques, soit en tant que blagues ». Une autre définition pertinente est celle de l’Oxford Institute for the Study of Computational Propaganda qui décrit les fake news comme étant « des informations fallacieuses, trompeuses ou incorrectes, prétendant être de réelles informations concernant la politique, l’économie ou la culture ». Au vu de ces définitions et de cette exploration du terme des fake news, nous retenons qu’il s’agit d’un néologisme faisant allusion par extension au terme français de « désinformation » ou encore d’« informations fausses » et qui consiste à présenter une réalité déformée ou un fait fabriqué comme étant vrai dans le but d’en augmenter la propagande.


Fake news, retour sur leur histoire

Les fake news ont toujours existé mais connaissent un boom récent avec l’arrivée des nouvelles technologies. Cela vous surprendra peut-être, mais au Moyen Age par exemple, existaient déjà de fausses « sculptures antiques », de fausses reliques ou encore des documents factices. L’art de tromper et de dissimuler était même enseigné aux jeunes princes ! Bien plus tard, l’apparition de la presse a entrainé avec elle la propagation de fausses nouvelles, dont certaines avaient comme objectif de faire tomber les personnalités du moment. La propagande du début du XXème siècle véhiculait également des mensonges destinés aux masses populaires. Nous avons pu observer, notamment, avec la première guerre mondiale, le développement de la presse écrite qui a favorisé la diffusion d’un grand nombre d’informations fausses. Par exemple, un journal de Munich accusait les prisonniers de guerre français de recevoir du poison dans leurs colis aux fins de s’en servir pour tuer le bétail allemand. C’était, en fait, une excuse pour ouvrir les colis des soldats et de puiser dans leur contenu. Toujours à la même époque, l’armée allemande aurait commis de nombreux meurtres et des actes de violence envers les civils belges. En alléguant que ces derniers étaient des francs-tireurs. Ils trouvaient ainsi un justificatif aux atrocités qu’ils commettaient. Les journaux alliés de l’époque dénoncèrent ces actes sous une appellation pouvant être fallacieuse de « Viol de la Belgique » car elle était de nature à renforcer la coalition entre la Belgique et les pays alliés. Néanmoins, par la suite, les faits d’atrocité commis par l’armée allemande furent confirmés. Un autre exemple de fake news de guerre mêlant fausse information et censure était la publication de photos de champs de bataille où seuls les cadavres ennemis étaient montrés à la France. Toujours dans le courant du XXe siècle, les scientifiques craignaient que l’arrivée de la radio et de la télévision privilégie le profil des candidats politiques au détriment du programme qu’ils avaient à défendre, et ce en donnant d’eux une image plus flatteuse grâce à des aménagements de la vérité les concernant. Une autre crainte partagée par les observateurs était aussi que ces nouvelles technologies favorisent les critiques négatives ou encore la diffusion de fausses informations aux dépens de réels arguments. Néanmoins, ces craintes n’ont pas empêché la diffusion de la première « fake news » en 1938 à la radio. L’artiste et présentateur Orson Welles a tellement bien raconté et adapté « La Guerre des mondes » sur la chaine américaine Columbia Broadcasting System (CBS) que de nombreux auditeurs ont cru à une réelle invasion d’extraterrestres. Cette fausse information n’a cependant jamais eu l’impact qu’elle aurait souhaité étant donné que seule une minorité écoutait la radio à ce moment-là.


Et aujourd’hui alors ?

Quant à l’intensification actuelle du phénomène « fake news », elle est rendue possible en grande partie grâce aux nouvelles méthodes de communication et aux nouvelles technologies. L’information se partage alors beaucoup plus rapidement compte tenu de l’intensité des échanges faits au sein des réseaux de partage existants. D’ailleurs, une récente étude publiée par Science portant sur les fakes news partagées via Twitter, a mis en évidence la rapidité avec laquelle les fakes news se propagent comparativement à de vraies informations. Les résultats de cette étude sont d’autant plus étonnants qu’ils affirment que les vraies informations se diffusent 6 fois moins vite que les fausses informations. Fait interpellant quand on sait que les sites ou comptes réputés diffuseurs de fakes news comptabilisent moins d’abonnés que les sites partageant de vraies informations.


Alors... qui est touché par les fake news ?

Face à cette indigestion d’informations en tous genres et de tous horizons, nous avons une tendance naturelle à nous croire moins crédules qu’autrui (effet de la troisième personne que nous aborderons dans un prochain billet) alors que l’exposition à des fake news touche tout le monde et presque continuellement. En effet, nous sommes sans cesse bombardés d’informations fausses, que ce soit sur internet, sur les réseaux sociaux, à la radio, à la télévision ou encore dans la presse écrite. Or, énormément de personnes utilisent les réseaux sociaux afin de s’informer. En 2016, 70% des Américains utilisaient Internet pour s’informer, et 62% d’entre eux utilisaient Facebook. Ces derniers seraient d’ailleurs utilisés par 40% des Français pour s’informer (Harsin, 2018). De plus, un des problèmes que l’on peut constater dans les médias est qu’ils cherchent à tout prix à obtenir du pouvoir en imposant leurs propres idéologies. Certains appellent ce phénomène « l’ère de la post vérité ».


Mais d’où viennent les Fake News ?

Elles peuvent avoir différentes sources qui sont difficilement identifiables au premier abord. Il se peut qu’elles naissent des suites d’une mauvaise retranscription ou d’une incompréhension de la part d’un journaliste. Elles peuvent également trouver leur origine dans une volonté de propagande pure et dure. Les fakes news peuvent aussi être élaborées pour répondre à la soif de profits d’un particulier ou de plus « gros poissons ». Quoi qu’il en soit, elles naissent en vue de faire perdre la capacité critique des individus et de les plonger dans une ingestion constante d’articles hybrides où le vrai côtoie le faux. Dès lors, des mythes de l’ère numérique se forment et fomentent des croyances populaires qui engendrent des conséquences directes sur notre société. Comme illustration de ces propos, nous pouvons rappeler la fausse information sur les vaccins provenant d’une étude aux Royaume-Unis de 1998 qui établissait un lien entre l’autisme et le vaccin sur les enfants. Pour rappel, celle-ci a eu pour effet délétère d’augmenter le taux de certaines maladies chez les enfants qui n’avaient pas été vaccinés. Néanmoins, il revient que les fake news sont souvent créées à des fins politiques, financières, ou encore cherchent à répondre à des intérêts particuliers. La manifestation de « fake news » peut être utilisée à des fins stratégiques, et peut même aller jusqu’à permettre à un candidat de remporter des élections présidentielles en discréditant son adversaire. Les élections de 2016 aux Etats-Unis en sont un parfait exemple. Les croyances en ces « fake news » largement diffusées sur Facebook ont eu tendance à favoriser Donald Trump par rapport à Hillary Clinton pour le poste de président, d’autant plus que l’actuel président des Etats-Unis a énormément joué sur son image à travers les réseaux sociaux. Le recours à Facebook n’est pas étonnant puisqu’un nombre considérable d’Américains adultes, potentiels électeurs, utilisent ce réseau social. D’autres n’hésitent pas à utiliser les « fake news » pour tester la crédulité des internautes. C’est le cas d’un auteur chilien qui a volontairement répandu une fausse rumeur concernant les Minions, ces personnages emblématiques des films « Moi, Moche et Méchant ». Il a affirmé sur Facebook que les réalisateurs de cette saga s’étaient inspirés de l’Allemagne nazie pour créer leurs personnages.

Cette information est partie du Chili et est arrivée jusque chez nous, alors que certains éléments pouvaient facilement se vérifier. Par exemple, « Minion » ne se traduit pas en français par « sbire » puisqu’il se traduit en allemand par « handlanger », qui signifie « homme de main » ou « acolyte ». 

Au début de cet article, nous vous avons cité un certain nombre d’informations vraies et d’informations fausses. En ce qui concerne leur véracité, nous ne vous laisserons pas davantage dans le suspens et nous vous encourageons à vérifier si vous aviez vu juste. Alors que Donald Trump semble avoir réellement eu une relation adultère avec la top model en 2006, cette dernière aurait vendu ses droits de parler en public de la relation pour 150 000 dollars. En ce qui concerne la présumée fermeture du site Facebook, annoncée par son créateur lui-même dans une vidéo mise en ligne, elle serait complètement fausse. En effet, la vidéo, bien qu’elle semble authentique, est en réalité un montage que vient d’ailleurs de corroborer sa date de publication, à savoir le 1er avril 2018. Quant à l’Etat d’Alabama, les pauvres autochtones ont réellement subi pendant 2 mois les effluves toxiques et nauséabond provenant d’excréments d’autres Etats. Ce cas de figure improbable s’explique par le fait que les Etats du Sud servent régulièrement de décharges pour toutes sortes de déchets provenant des Etats du Nord en raison de leur statut économique plus faible. Enfin, l’article qui prétendait qu’une jeune youtubeuse avait annoncé dans une vidéo sa volonté d’avorter en direct pour récolter des dons afin d’aider les plannings familiaux, est totalement fausse. La satire avait sans doute pour objet une légère critique envers le système de financement américain en ce qui concerne la question de l’avortement. Mais en sommes, quelles conséquences ont les fake news sur nous, mais aussi sur le monde qui nous entoure? Cette soupe à l’information, parfois tout aussi fausse que vraie, finit par embuer notre discernement, qu’elle nourrisse simplement l’appétit des amateurs de farces ou qu’elle participe à l’influence du choix politique. Il est donc important d’éveiller tout un chacun aux conséquences délétères que peuvent avoir ces fake news. On sous-estime trop souvent l’influence qu’elles peuvent exercer sur notre système cognitif, sur notre santé, au niveau des groupes sociaux, dans la manipulation politique ou encore dans certains enjeux économiques. Au regard de ce qui vous sera présenté dans les prochains billets, nous vous invitons, par conséquent, à vous sensibiliser à la problématique des fakes news afin de savoir où s’arrête le vrai pour laisser place au faux…


Source : Dorian Luczak, Ombeline Guillaume, Rebecca Flandre[1]

  1. « Introduction aux fake news », sur Introduction aux fake news (consulté le )