Utilisateur:Dr ARONA COUMBA NDOFFENE DIOUF/Brouillon

DEVELOPPEMENT DURABLE : LE FAUX DEBAT POUR DES PAYS EN VOIE D’EMERGENCE

Le débat qui est entretenu actuellement durant les conférences internationales autour de la politique propagandiste sur le développement durable, couramment présenté par les partisans de la mondialisation comme un projet harmonieux, ne devrait nullement être une préoccupation urgente des politiques des pays en voie d’émergence.

Aujourd’hui, toute l'attention est portée sur les signes dits « perceptibles » à tous les coins de rue. Question défendue à mots couverts par des soi-disant écologistes véreux, pendant que leurs pays continuent leur déploiement minier et forestier, envahissant les pays en voie d’émergence dont les ressources naturelles sont offertes en pâture à leurs compagnies minières, pétrolières et immobilières sans réprimande. C'est dire que le débat sur « les valeurs environnementales » tant suscitées en masque un, plus profond, qui est celui de la réelle cause qui a contraint nos pays africains à se développer devant leur économie capitaliste et narcissique.

Il est cependant nécessaire de présenter une analyse globale dans laquelle ma position devrait être comprise comme une alerte aux gouvernants des pays en voie de développement, dont la majorité se trouve dans le continent africain. Loin de moi l’idée de nier les enjeux positifs et les résultats comparatifs sur les implications qu’il devrait livrer aux populations présentes et à venir, en termes de construire un monde meilleur du point de vue environnemental et de la préservation équitable des ressources naturelles pour le monde de demain.

« Développement durable »... et pour qui ?

Composé de  deux mots que leurs sens éloignent en énonciation antithétique, le terme « développement durable » est un oxymore traduit incorrectement de l’anglais « sustainable development » ou développent soutenu.

Les politiques de « développement durable », comme définis par leurs créateurs, doivent s’appuyer sur la « conservation optimale » des ressources découvertes, estimées et vérifiables. Mais le premier paradoxe de cette approche est qu'elle présume comprendre, expliquer et « mesurer » aujourd’hui toutes les quantités de stocks de ressources épuisables et non renouvelables. Dans ce cas, plus ces ressources sont utilisées dans le présent moins elles seront disponibles dans le futur. Ensuite, cela suppose de définir un arrangement précis entre les bénéficiaires des ressources dans le présent et ceux des générations futures. En quoi les décideurs qui planifient la distribution des stocks, devraient-ils être en mesure de savoir quel est le taux optimal d'extraction ou de production des ressources pour la consommation du présent et celle des futures ? En vue des extractions et productions des générations futures, ces planificateurs devraient en plus être en mesure de prévoir la mise en place d'un calendrier optimal qui tiendra compte de la consommation de toutes les générations futures et celles des générations successives jusqu'à la fin des temps. Comme si les planificateurs d’aujourd’hui devraient être capables de prévoir et de déterminer toutes les évaluations espérées sur une échelle du temps en quelque sorte figée ne tenant pas compte ni de passé ni d'avenir.

Nous pouvons nous apercevoir, sans grande difficulté, que ce concept de « développement durable » est erroné et peut inspirer n'importe quel auteur de science-fiction.

On peut même aboutir à une absurdité logique si l'on pousse le raisonnement à ses extrémités. Si un Etat décrète que telle ressource épuisable ne devrait plus être utilisée afin de « protéger les droits des générations futures », ce décret, s'il est cohérent, vaut également pour toute génération future à l'égard des générations « encore plus futures qu'elle ». En sorte qu'aucune ressource épuisable d'aucune sorte ne devrait jamais être utilisée par aucune génération. La vérité est que tout emploi d'une ressource épuisable a peut-être un impact sur les générations futures, et qu'on est incapable d'évaluer cet impact. En toute probabilité, le progrès technique relativise cet impact.

Un faux débat commandité par les « Maitres »

L’Occident rejoue une version historique de ce qui s’est produit en Afrique il y a moins d’un demi-siècle. Incapable de susciter un développement réel dans ses ex-colonies et de leur garantir des intérêts économiques dans une mondialisation sauvage et inéquitable, il s'est encore replié sur des questions identitaires mal orientées et très polémiques. En effet, les débats sur le développement durable et les changements climatiques soulèvent les passions, à la fois chez ceux qui perçoivent une anticipation de la question, tout comme chez ceux qui voient dans ces réactions un réflexe qu'ils estiment « ségrégationniste ».

Cette opposition, entretenue par un capitalisme réifié, relève d'un faux débat qui masque la nature profonde de la crise qui affecte les économies occidentales déficitaires. Ce débat n’est pas une priorité pour nos pays africains qui se cherchent encore.

« Développement » ou « Emergence »

        La chute de l’Euro a engendré dans le continent une difficulté de ses nations à instituer des intérêts communs. Leur réaction immédiate, il faut le dire, et le plus facile d’ailleurs, est de susciter un tôlé sur l’immigration pour imputer cette crise aux étrangers venus de l'extérieur. Un fléau qui date d’avant la civilisation industrielle. Les migrants d’aujourd’hui assurent la continuité des durs labeurs de leurs ancêtres qui ont enrichi les métropoles. La réelle menace à l'intégrité de l’Europe est son incapacité incontestablement fatale à pouvoir retenir les populations migrantes venues de ses anciennes colonies pillées, en leur assurant des stratégies idoines pour provoquer leur émergence vers le « développement », fût-il assorti de l'étiquette  durable ».

Les faits indiquent que, aujourd’hui, les priorités de l’Occident s’accordent pour soutenir leur « développement » en créant des politiques environnementales qui peuvent améliorer la croissance de leurs économies par des innovations technoscientifiques qui la nourrissent. Ceci signifie bien sûr un développement économique déjà enclenché et évident. Et que les pays qui portent la politique de cette « croissance du capital », qui prévaut sur toutes les autres politiques, se trouvent en mesure d’influer sur les actions des gouvernements africains non développés, les convoquant à participer, à soutenir leur développement, sous réserve de sanctions économiques ou d’autres formes malicieuses de chantage.

Ainsi, pour se soustraire aux  sanctions des partenaires financiers « nourriciers » et soi-disant maintenir une « prospérité » abstraite, certains gouvernements africains vont concéder quantité d’efforts fiscaux et juridiques et ratifier avec eux des chartes environnementales inadaptées à leur condition. Un tel choix entraverait le plein déploiement de la logique de leur émergence économique. C’est leur servir de « décor économique » devant une défectuosité morale.

Dans ce cas, tout Etat africain averti devrait faire attention aux nouvelles normes et réglementations dictées par les politiques environnementales de ces capitalistes déloyaux. Ils sont capables de rétrécir les pouvoirs étatiques des dirigeants africains en leur imposant une plus grande pression fiscale qui plomberait leurs économies, faute de quoi,  ils mettraient simplement fin à l’aide au développement des pays qui ne respecteront pas les quotas fixés par les pouvoirs occidentaux.

Ces mesures sont illustrées de manière dramatique par les coûts de leur « développement durable » et du mode de vie énergivore qui y est associé. Paradoxalement, cela n'empêche pas les gouvernements occidentaux de favoriser l'exploitation minière et forestière en Afrique, Asie et Amérique du Sud, de même que la prolifération des pipelines de pétrole et de gaz de schiste qui comme autant de  veines installées par leurs entreprises. Ils s’assurent pour cela du  concours de dirigeants prétendument faibles ou corrompus pour prioriser les intérêts du capital et mousser « l'acceptabilité sociale » de leurs projets devant des populations démunies peu préoccupées des risques et autres impacts écologiques.

Une nouvelle politique de domination économique

        Les dirigeants africains devraient s’interroger sur les conditions réelles de leur incapacité d'agir politiquement en commun pour réprimander les pressions du capitalisme mondialisé qui pénètre avec d'autant plus d'aisance dans le continent. Plutôt que de créer les conditions d'une véritable souveraineté continentale, ils semblent considérer que les grands accords et discours médiatiques durant les sommets et visites des leaders occidentaux sont les véritables vecteurs qui dessineront ce que sera l’Afrique de demain.

        Si les pays d’Afrique entendent se faire imposer une « politique environnementale » avec laquelle ils pensent entrer dans le cercle des « émergents » du 21e siècle, cette entreprise ne saurait prendre la forme caricaturale de pictogrammes illustrant les vêtements proscrits par leurs parrains occidentaux. En effet, le danger qui les menace n'est pas différent de celui qui menace l'entièreté de la planète de ses obus météoriques meurtriers. Plutôt que de discuter vainement des « valeurs environnementales », ne vaudrait-il pas mieux que les dirigeants africains s'interrogent sur les voies et moyens de leur « émergence économique » qui les concerne tous aujourd'hui ? Certes, cela veut dire s'interroger sur les conditions d’émergence appropriées qui devraient être instituées, en lieu et place de celle du tout-à-l'Occident, avec les questionnements sur un partenariat gagnant-gagnant que cela suppose. Mais cela ne pourra se faire qu'en houspillant la domination économique des pays développés. Revendiquer une harmonisation de l'« humanitude » et le respect des cultures et de la nature.

En ce sens seulement, naitra la véritable Afrique qui serait en mesure de se ressaisir de son passé humiliant et de se projeter dans l'avenir en abolissant la domination et de vivre le début de sa véritable indépendance.

A suivre.

Dr Arona Coumba NDoffène Diouf

Récipiendaire de la Médaille

2014 USA-Trans-Atlantic Leadership in Science Award

adioufnd@gmail.com