Histoire de la clarinette modifier

Étymologie modifier

Le centre national de ressources textuelles et lexicales considère comme origine la plus probable du mot clarinette un dérivé du mot provençal clarin, désignant un hautbois primitif, dont le nom dérivait encore du mot « clar » (clair) auquel a été ajouté le suffixe -ette pour le différencier du clarino[1].

Selon Paul Rougnon, clarinette dérive de clarinet : « Au début du XVIIIe siècle, on connaissait le clarinet qu'on appelait aussi hautbois de forêt. Clarinet a dû engendrer clarinette[2] ».

Le dictionnaire historique de la langue française reprend le clarin provençal comme source étymologique, en ajoutant qu'« une autre origine possible, avec une valeur diminutive, par dérivation de clarine, « clochette à son clair au cou des animaux », est moins probable[3] ». La première mention de « clarin » est attestée en 1508, celle de « clarinette » en 1753[3].

Du chalumeau à la clarinette modifier

gravure : première clarinette
La clarinette de Johann Christoph Denner.
photo : clarinette à 4 clefs
Ancienne clarinette à 4 clefs.

Fichiers audio
Registre du chalumeau
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Registre du clairon
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Gamme chromatique
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partition : ambitus
Registres de la clarinette, notes lues pour les clarinettes en clef de sol[4].

Toute la famille des clarinettes tire son origine du chalumeau français du Moyen Âge, « vieil instrument encore employé par Gluck dans l’Orfeo (1764) et dans l’Alceste italienne (1766)[5] ».

François-Auguste Gevaert note que « le nom français de l'instrument est employé par les vieux compositeurs italiens sous le déguisement graphique de salmó, et par les maîtres allemands qui l'écrivent Chalumau et Chalamaus. En allemand, de même qu'en néerlandais, le mot Schalmei désigne le hautbois primitif[5] ». Aujourd'hui encore, le registre grave de la clarinette est appelé registre du chalumeau.

C'est à Johann Christoph Denner (16551707), un facteur de Nuremberg, que l'on devrait l'invention de la clarinette. Vers 1690[6], « après dix années d'essais infructueux »[7] il ajouta au chalumeau français le pavillon et deux clés d'importance majeure. L'ajout de la « clé de 12e[note 1]», également désignée « clé de registre », permit de tirer parti de l'aptitude de l'instrument au quintoiement, que les musiciens les plus doués pouvaient provoquer par une modification de la position de l'embouchure. Le registre atteint est alors celui dit du clairon et sa sonorité se rapproche de la clarine, petite trompette du XVIIIe siècle, qui donna son nom à la clarinette.

À cette époque, l'instrument était manipulé via huit trous bouchés par les doigts, ce qui permettait à l'instrumentiste de jouer la gamme depuis le fa grave jusqu'au sol médium. La gamme ne se poursuivait sur le registre supérieur qu'à partir du do, et se faisait donc avec un défaut de deux notes sur la gamme : le la et le si étaient absents de la gamme. La deuxième clef, celle « du la », étend vers le haut le registre du chalumeau.

Le si est obtenu par « quintoiement[8] » d'une note plus grave (le mi) grâce au pavillon prolongeant la clarinette et l'ajout d'une clef actionnée par l'auriculaire de la main gauche alors inoccupé. Il fait donc partie du registre du clairon. La gamme (diatonique) est alors complète et le changement de registre se passe sans discontinuité.

Dans l'état, l'instrument ne disposant pas d'une gamme chromatique complète, il restait prisonnier de quelques tonalités particulières. Pour y remédier, les musiciens disposaient de différents modèles de clarinettes, réalisés chacun pour une tonalité spécifique[9]. Les altérations pouvaient cependant être obtenues par des doigtés fourches ne permettant pas une grande virtuosité, et à la sonorité peu satisfaisante.

Entre 1740 et 1850, il a existé une famille de clarinettes anciennes, appelée clarinette d'amour, réalisées dans différentes tonalités (en sol, en fa, en ré...) et dotées de 3 à 5 clés, qui possédait un pavillon en forme de poire, appelé pavillon d'amour, à l'instar du hautbois d'amour, un bocal courbé et une perce réduite.



Les évolutions vers la clarinette moderne modifier

photo : clarinette à quarts de tons
Différentes vues d'une clarinette à quarts de tons de Fritz Schüller (1883-1977).

En 1810, Heinrich Bärmann (1784-1847) proposa le retournement du bec[10], positionnant ainsi l'anche sur la lèvre inférieure du musicien. Ceci adoucit et garantit la sonorité. Iwan (ou Ywan) Müller[11],[note 2] y apporta en treize clés supplémentaires offrant enfin la gamme chromatique complète. Ces nouveautés permirent d'abandonner peu à peu la collection d'instruments dédiés aux tonalités distinctes dont disposaient les musiciens pour interpréter les différentes pièces.

La clarinette fut amenée à son degré de perfectionnement actuel par le facteur d'instruments français Louis Auguste Buffet en collaboration avec le clarinettiste Hyacinthe Klosé[12],[note 3]. Tous deux adoptèrent le principe des anneaux mobiles que l'Allemand Theobald Boehm avait imaginé pour la flûte : le système Boehm (1843). Aujourd'hui, le système Boehm est utilisé par les clarinettistes du monde entier, aux exceptions des Allemands et des Autrichiens, qui se servent pour la plupart du système concurrent : le système Oehler[note 4]. Un autre système à treize clés mis au point par Eugène Albert au XIXe siècle, le système Albert, est encore utilisé de nos jours en Europe centrale et en Turquie.

Une clarinette utilisant le système Boehm, peut disposer de près de 22 éléments mobiles utiles, auxquels il faut ajouter les paliers, les axes, les vis et les ressorts (ressort à aiguille, ressort à lame). L'ensemble dépasse la centaine de pièces mécaniques, et participe à la manipulation de 17 tampons obturant autant d'orifices inaccessibles avec les doigts.

Le clarinettiste allemand Fritz Wurlitzer (père de Herbert Wurlitzer) a mis au point en 1949 une variante de la clarinette française, qu'il a qualifiée de clarinette système Boehm réformé. C'est une clarinette avec un système de doigté français, dont le son est très proche de celui de la clarinette allemande à travers une perce (diamètre et profil interne du tube constituant le corps de la clarinette) différente, et un autre type de bec[13]. Ce type de clarinette trouve encore des amoureux dans certains pays.

Le nombre de clés annoncé par les facteurs correspond au nombre de points de commande intentionnelles (les anneaux n'en font donc pas partie puisqu'ils sont actionnés en même temps qu'un trou est bouché). La clarinette Boehm comporte donc 17 clés, parfois 18 avec la clef de renvoi soldièse/mibémol main gauche. Il existe deux variantes du système Oehler comportant respectivement 19 et 27 clés.

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  2. Paul Rougnon 1935, p. 220.
  3. a et b Dictionnaire historique de la langue française 1992, p. 430.
  4. D'après la méthode complète pour clarinette de H. Klosé (ou méthode Klosé).
  5. a et b François-Auguste Gevaert 1885, p. 9.
  6. Les débuts de la clarinette.
  7. Gourdet 1967, p. 48.
  8. Candé 1983, p. 119 : « en forçant le souffle on obtient la douzième (quinte de l'octave du son fondamental et non l'octave comme sur les flûtes). Cela est la particularité [acoustique] des tuyaux cylindriques fermés (l'anche se comporte comme une extrémité fermée) où les divisions de la colonne d'air ne peuvent donner que la série des harmoniques impairs. ».
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  10. Heinrich Bärmann retourne le bec de la clarinette en 1810, Historique de la clarinette par Jean-Christian Michel.
  11. (en) Frise historique de la clarinette, 1812.
  12. (en) Frise historique de la clarinette, 1840.
  13. Eric Hoeprich, The Clarinet, Yale University Press, 2008, p. 211


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