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Guido Reni, Adam et Eve au paradis, 1620-1625, Musée des Beaux-Arts de Dijon, Inv. CA 42
Artiste Guido Reni
Titre Adam et Eve au paradis
Date 1620-1625
Technique Huile sur toile
Dimensions 277,5 x 196 cm
Lieu de conservation Musée des Beaux Arts de Dijon, France

Adam et Eve au Paradis est une oeuvre du peintre bolonais du XVII ème siècle, Guido Reni, également connu sous le nom "Le Guide." Peinte entre 1620 et 1625, cette huile sur toile mesure 277,5 centimètres de hauteur sur 196 centimètres de largeur. Elle est actuellement conservée au sein du Musée des Beaux-Arts de Dijon, en France.

Description modifier

Le Guide s’est ici appuyé sur la tradition iconographique de le Tentation d’Adam. Il a représenté le couple au sein du jardin d’Eden, qui se dévoile par le biais de l'arbre central, qui divise la composition, et par les buissons et le ciel bleu en arrière plan. Adam et Eve sont nus et de part et d’autre de l’arbre. Eve, représentée en contrapposto tend de sa main la pomme à Adam, tandis que l’autre agrippe une branche. L’homme n’ayant pas encore gouté au fruit défendu, a déjà le sexe caché par une feuille, un symbole qui annonce sa chute prochaine. L’homme et la femme sont tous deux accompagnés d’un animal : derrière Adam se trouve un lion, debout, sur ses quatre pattes, en mouvement, et qui semble, par cette posture, déranger de la situation. Du côté d’Eve, une panthère, couchée, presque sereine, a le regard tourné en direction du spectateur.

Historique de l'oeuvre modifier

La première mention écrite de l’œuvre du Guide est tirée de l’ouvrage de La Description du cabinet de tableaux de Mr Meyers[1] à Rotterdam de 1714. Cette information, découverte en 1974 par Jan Gerrit Van Gelder, nous apprend que le tableau serait issu des collections de Jean Perrault, président à la chambre des comptes en 1679 sous Louis XIV. Après avoir été sur le territoire français puis hollandais, le tableau se retrouve à Viennes dans les collections du prince Eugène de Savoie, comme le montre une gravure de 1730 de Salomon Kleiner. D’après Jan Gerrit Van Gelder, Eugène de Savoie l’aurait acheté lors d’un de ses nombreux voyages à Rotterdam pour 50 000 florins comme l’affirme Johann Basilius Küchelbecker[2]. A la mort du prince en 1736, Vittoria de Carignao hérite des collections. Le tableau du Guide est vendu à Charles Emmanuel III, roi de Sardaigne. Il est conservé au palais de Turin. Par la suite, il est pris par les troupes napoléoniennes en 1799. Il arrive à Paris le 21 ou 22 mai 1799. Il est exposé au Louvre dès 1800 avant d’être envoyé à Dijon en 1809. Il est donc exposé au musée des Beaux-Arts de Dijon. Il est cependant mis en réserve dès 1939 et n’est pas ré-accroché après la guerre. Les historiens doutent en effet de son caractère authentique et ce n’est qu’à partir des années 1970, que celui-ci retrouve sa place en tant que chef-d’œuvre malgré les hésitations de Cesare Garboli et Edi Baccheschi[3], deux historiens de l’art, qui n’avaient seulement qu’un aperçu de l’oeuvre qu’à travers des photographies. Il est aujourd’hui exposé au sein de la galerie des Peintures du XVI-XVIII ème siècles.

Analyse de l'oeuvre modifier

Adam et Eve au Paradis : Reprise d'une tradition iconographique. modifier

Albrecht Dürer, Adam et Eve, 1504, gravure.

Guido Reni a choisi de reprendre la tradition iconographique de la Tentation d'Adam. En effet, cette représentation symétrique, opposant Adam et Eve de part et d'autre de la toile, et séparé par l'Arbre de la connaissance du bien et du mal est devenu une référence picturale. Pour s'inscrire au sein de cette tradition iconographique, il semble s'être inspiré de l'artiste Albrecht Dürer. En effet, ce tableau rappelle sans aucun doute la gravure de 1504 de l’artiste Albrecht Dürer. Nous retrouvons des similarités flagrantes au niveau des deux compositions : Adam et Eve sont de part et d'autre de la toile, séparé par l'arbre au centre, qui coupe la composition en deux. Chez Dürer, la forêt est massive presque désordonnée, tandis que Guido Reni a proposé une composition plus épurée en raison de son influence classique. Guido Reni semble également s'être inspiré de l'artiste allemand pour les figures. En effet, ils s'inspirent tout deux de la statuaire antique. Pour Adam, Dürer a choisi d’utiliser l’Apollon du Belvedère comme modèle. Ils abordent tout deux ce léger contrapposto, avec la tête tournée vers la gauche. Quand à Eve, Dürer a choisi la Venus Médicis. Nous ne savons pas si Guido Reni s'est inspiré, comme Dürer, de statues en particulier cependant nous retrouvons bien les références à l'antiquité : Eve a le corps blanc comme le marbre et sa position en contrapposto nous rappelle les statues. Adam, quand à lui, aborde le corps et les muscles similaires à ceux des sculptures antiques, à l’image des athlètes

La représentation d'un jardin d'Eden idéale modifier

Une atmosphère lyrique se dégage également de l’oeuvre. Cet effet est produit par le paysage et la position des personnages. Le paysage, dans un premier temps, est composé d’un arbre centrale, de buissons réguliers en arrière plan et d’un ciel bleu clair nuageux. Il s’agit d’un paysage verdoyant, idéalisé, qui évoque, par sa simplicité de construction, le calme, s’opposant donc à la symbolique plus profonde de la toile. Nous observons son influence classique grâce à ses caractéristiques : le tableau est symétrique et les plans qui se succèdent parallèlement offrent un statisme à l’oeuvre à l’image des oeuvres classiques. L’espace est également fermé et les personnages sont à l’intérieur du cadre. Les formes sont linéaires. Nous pouvons en effet distinguer chaque formes et chaque figures.La manière dont le peintre a traité la végétation et le choix des couleurs nous rappellent les toiles du Titien. En effet, nous retrouvons ce bleu clair accompagné de nuages et ces détails au niveau des feuilles comme nous pouvons le voir notamment dans la version d’Adam et Eve du Titien.  

Le musée des Beaux-Arts de Dijon a proposé plusieurs hypothèses concernant la symbolique du lion et de la panthère. Si nous nous appuyons à l’ouvrage de Cesare Ripa, Iconologia, le lion pourrait représenter le symbole de la vertu, tandis que la panthère signifierait la tromperie. Nous pouvons également penser que le lion représente l’orgueil et la panthère la luxure.  

La représentation de la grâce et de la beauté idéale modifier

Guido Reni, Apollon et Marsyas, 1618, Musée des Augustins, Toulouse

La Tentation d’Adam s’inscrit dans la recherche de la beauté idéale et de la grâce. Cette oeuvre que les historiens ont daté vers 1620, se situe alors que l’artiste est affirmée, à l’apogée de sa carrière. Il s’est en effet, comme nous avons déjà pu le souligner, installé définitivement à Bologne, suite à ses nombreux voyages à Rome, et à fondé, au sein de sa ville natale, son propre atelier. Ce déménagement se lie par la même occasion à son émancipation artistique. En effet, après avoir apprit au côté des Carraches, s’être inspiré du Caravage, il trouve sa propre signature. Il idéalise les figures de ses tableaux, rejetant tous signes de vulgarités. Les hommes sont androgynes, doté d’une jeunesse éternelle, musclés et les femmes adoptent les corps et les postures des statues antiques. Ce tableau représente cette recherche du beau et de la grâce. Eve est représenté à l'image d'une statue Antique, avec une peau blanche à l'image du marbre et des courbes. Adam adopte une posture plus droite, un visage androgyne et un corps particulièrement musclé. Il ressemble particulièrement à Apollon du tableau Apollon et Marsyas de Guido Reni. Marguerite Guillaume et Alain Roy[4] ont par ailleurs pensé qu'ils étaient pendants en raison d'une affiliation de ces deux thèmes réalisés par le maître Raphael à la Chambre des Signatures au Vatican. Cependant, les différentes dimensions des deux toiles ne peuvent confirmer cette hypothèse.

Références modifier

  1. N.S, Description du cabinet de tableaux de Mr. Meyers à Rotterdam, Rotterdam, Fritsch & Bohm, , 26 p. (lire en ligne), "Adam, à qui Eve présente la pomme, un lion et un tigre. Ce tableau est digne d’occuper une place dans le Cabinet d’un roi. C’est sans contredit le plus beau qui soit sorti d’Italie de la Façon. Il a le surprenant ; ce qui ne se trouve pas ordinairement dans les ouvrages, & qu’on lui a si justement reproché. Il est coloré merveilleusement, dessiné d’un grand gout, et enfant tel que le premier Homme aurait pu être. Il vient du cabinet de Mr. Perrault. » p.14
  2. Agnes Husslein-Arco, M.L. von Plessen, Prince Eugene, General-Philosopher and Art lover, Hirmer Verlag, , 336 p., p.173
  3. Garboli, Baccheschi, L’Opera completa di Guido Reni, 1971, p.116, L’Opea completa di Guido Reni, Milano, Rizzoli Editore, , 118 p., p.116
  4. Guillaume (Marguerite) et Roy (Alain), « Deux oeuvres de Guido Reni à Dijon », Revue de l'Art, n°19,‎ , p.111-112

Bibliographie modifier

Blumer M-L, 1936, Catalogue des peintures transportées d'Italie en France de 1796 à 1814, Bulletin de la Société de l'Histoire de l'Art français, p.300, n°281.  

Garboli C. Baccheschi E, 1971, L’Opera completa di Guido Reni, Milan, Classici del Arte.

Guillaume M, 1980, Catalogue raisonné du Musée des Beaux-Arts de Dijon : peintures italiennes, Ville de Dijon

Guillaume (Marguerite) et Roy (Alain), "Deux oeuvres de Guido Reni à Dijon", Revue de l'Art, n°19, 1973, p.111-112, reprod. p.110

Lavice A, 1870, Catalogue détaillé et raisonné des peintures et sculptures exposées dans les galeries publiques et particulières et dans les églises (de France), Paris, p.315.

Magnin J, 1933, La peinture au Musée de Dijon, 3e éd. revue et complétée, Besançon, p.180.

Male E, 1984, L’Art religieux au XVII ème siècle, Paris, Librairie Armand Colin.

N.S 1714, Description du Cabinet de tableaux de Mr. Meyers  à Rotterdam, Rotterdam, Fritsch et Bohm, 26 p.

N.S, 1818, Notice des tableaux, statues, bustes, bas-reliefs, vases, bronzes, antiquités, dessins, estampes, etc. exposés au Musée de Dijon, Dijon : Frantin imp., n°290 p.82.

N.S, 1834, Notice des objets d'arts exposés au Musée de Dijon, Dijon , Victor Lagier libraire, n°308.

N.S, 1842, Notice des objets d'arts exposés au Musée de Dijon et catalogue général de tous ceux qui dépendent de cet établissement, Dijon, Victor Lagier, n°335.

N.S, 1860, Notice des objets d'art exposés au Musée de Dijon, Dijon, Lamarche, n°387.

Pepper S, 1988, Guido Reni, l’Opera completa, Novara, Istituto Geografico de Agostini.

Rebatet M, 1939, Les Musées de province : le Musée de Dijon", Le Dessin, p.37.

Ripa C, 2011, Iconologia, Paris, Alain Baudry et Cie

Roy A. 1980, Les envoies de l’Etat au musée de Dijon 1803-1815, Paris, Edition Orphys

Spear R, 1997, The Divine Guido, Religion, Sex, Money and Art in the world of Guido Reni, New Haven and London, Yale University Press, 430 p.

Starcky E, Barthélémy S, Cariel R, 2002, Le musée des Beaux-Arts de Dijon, Paris, RMN, Musée des Beaux- Arts de Dijon, p. 62.