Utilisateur:Iylia KEILANI/Philoi

Philoi (en grec ancien : φίλοι; forme plurielle de φίλος ou philos) est un terme que l'on pourrait traduire par « ami ». Il s'agit d'un type d'amitié basé sur la valeur typiquement grecque de la réciprocité, par opposition à une amitié qui existe comme une fin en soi.[1]

Principales caractéristiques

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La réciprocité

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Il n'y a pas de traduction exacte pour philoi autre que le mot « ami » (différent de xenos, que l'on peut traduire en « invité-ami », un terme parfois employé pour décrire un étranger pour qui l'on a du respect). Le sens du mot philoi est intrinsèquement lié au concept de réciprocité ; comprenant l'échange de faveurs et de soutien, mais aussi d'un sens du devoir des uns envers les autres.[2] Les Philoi étaient généralement des membres de la famille, ou bien des amis ou d'autres membres de la société avec lesquels il existait des liens d'obligations ou de loyauté.[3]

Le système de valeurs grec

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Dans le système de valeurs de la Grèce antique, il y avait une distinction explicite entre l'ami (philoi ) et l'ennemi (echthroi ); on était constamment conscient de la façon de traiter et d'être traité par les autres. On pouvait classifier chaque membre de la société en trois groupes distincts :

  • les philoi, les personnes envers lesquelles on a des obligations et dont les faveurs sont rendues,
  • les echthroi, ceux à qui l'on est hostile et dont on attend l'hostilité, et
  • les <i id="mwHw">medetoeroi</i>, les étrangers qui ne tombent sous aucune catégorie et à qui personne ne devait rien.[4]

Cette classification était liée à la croyance fondamentale dans le principe de réciprocité, qui a renforcé l'idée que le devoir de l'Homme était d'aider ses amis et d'infliger des dommages à ses ennemis. Il y avait une grande fierté associée non seulement à aider ses philoi mais aussi à nuire à son echthroi. Remplir ces deux devoirs pour renforcer la dichotomie ami-ennemi était importante, et se manifestait dans d'autres aspects de la vie grecque, comme la littérature, le théâtre ou lors de procès.[5]

Les Philoi dans le système judiciaire

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L'importance du rôle du philoi est primordiale dans les tribunaux de la Grèce Antique, en particulier au sein d'une culture qui encourage l'antagonisme entre le philoi et l' echthroi. Les procès visaient à établir une partie gagnante et une partie perdante, et non pas parvenir à un verdict équilibré et impartial.[6] L'importance des témoins dans les tribunaux athéniens, qui n'étaient pas contre-interrogés, a contribué à cela.[7] Les témoins étaient souvent choisis non pas par ceux qui seraient les plus impartiaux, mais plutôt par des philoi proches des personnes impliquées. Ainsi, la dépendance de l'Athénien moyen vis-à-vis de son philoi a imprégné même les procédures et les résultats du procès, et comme le décrit Isée dans Sur l'héritage de Pyrrhos, « Vous savez tous que lorsque nous agissons sans dissimulation et que nous avons besoin de témoins, nous utilisons normalement des parents proches et des amis intimes comme témoins de telles actions. » [8]

Le rôle des femmes

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À l'exception des festivals athéniens, les femmes avaient un rôle limité en dehors de la maison. Elles avaient donc des possibilités limitées d'entretenir des relations avec leurs philoi et echthroi de la même manière que les hommes en Grèce. Par conséquent, les philoi d'une femme ne pouvaient être que des personnes présente dans sa propre maison. [9]

Dans la littérature

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La pratique de l'obligation réciproque entre philoi et la stricte dichotomie ami-ennemi, caractéristique du système de valeurs grec, sont présents chez les héros homériques tels qu'Agamemnon et Achille dans l'Iliade d'Homère.[10] La prépondérance de la guerre, durant laquelle les héros s'affrontent pour prouver leur supériorité met en évidence cette dichotomie :

  • il doit y avoir deux parties opposées explicites et
  • les deux parties doivent agir conformément à leur devoir de se faire du mal, généralement lors d'une manifestation publique. [11]

Dans la philosophie

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Cette définition de philoi est souvent également discutée dans divers ouvrages philosophiques de cette époque, en particulier dans ceux d'Aristote . Dans l'Éthique à Nicomaque, Aristote écrit que « pour être amis, ils doivent être mutuellement reconnus comme se portant garant de bonne volonté et se souhaiter le meilleur l'un pour l'autre »[12], indiquant qu'un philoi ne se caractérise pas nécessairement par l'affection pour une personne, mais par le soin d'une personne envers une autre qui est nécessairement réciproque. Il explique que les gens aiment naturellement ceux qui les traitent bien ou qui, selon eux, en ont l'intention. De plus, il explique que les gens aiment généralement ceux qui détestent les mêmes personnes qu'eux, d'où le besoin d'avoir un philoi de son côté qui nous défendra face à un echthroi. Aristote écrit que « l'amitié est apparentée à l'amour que l'on a pour soi » [13] mais que les philoi existent néanmoins « pour l'usage qu'on peut en faire »[14]. Le rôle du Philoi semble donc servir à la fois des intentions égoïstes et altruistes .

En Macédoine

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Dans l'ancienne Macédoine, philoi était un titre attribué aux amis royaux, qui étaient conseillers du roi (basileus). Ils étaient choisi personnellement par le roi et pouvaient provenir de n'importe quelle cité dans le monde grec. Le titre s'est répandu dans les monarchies hellénistiques après la partition de l'empire d'Alexandre le Grand entre les diadoques. Au sein de l'empire séleucide, on peut retracer des rangs différents parmi les Philoi; comme les Protoi Philoi (premiers amis) et les Timomenoi Philoi (amis honorés). Dans les inscriptions, la phrase le roi, ses amis et l'armée signifie le rôle important des Philoi. Pourtant, « ami » semblait être le rang le plus bas de la noblesse dans les aristocraties séleucides et ptolémaïques. Bien qu'il s'agisse d'un honneur important, il pouvait être remis plus librement aux partisans du roi, y compris à des non-Grecs peu susceptibles de se voir attribuer un rang plus élevé.[15]

Notes et références

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  1. Aristotle and Ross 2005, p. 66
  2. Aristotle and Ross 2005, p. 66
  3. Osborne 1984
  4. Osborne 1984, Section 3.13
  5. Osborne 1984, Section 3.2
  6. Osborne 1984, Section 3.2
  7. Osborne 1984, Section 5.53
  8. Isaeus 2018, p. 87
  9. Osborne 1984, Section 3.18
  10. Homer and Mueller 2009
  11. Osborne 1984, Section 3.5
  12. Aristotle and Ross 2005, p. 66.
  13. Aristotle and Ross 2005, p. 151.
  14. Aristotle and Ross 2005, p. 152.
  15. Bezalel Bar-Kochva, Judas Maccabaeus: The Jewish Struggle Against the Seleucids, Cambridge University Press, (ISBN 0521323525), p. 304–305

Sources

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  • Frank William Walbank, The Cambridge Ancient History, Vol. 8: Rome and the Mediterrean to 133 B.C., 2ème éd., 1989, p. 417 (ISBN 978-052-1234-48-1)
  • Graham Shipley, The Greek World After Alexander, 323-30 B.C., 2000, p. 76 (ISBN 0-415-04618-1)
  • Aristote, Éthique à Nicomaque, traduction par W. D. Ross, 2005, Digireads.com Publishing (ISBN 978-1420926002)
  • Homère, L'Iliade, traduction par Martin Mueller, 2009, Bristol Classical Press, 1.275-284 (ISBN 978-1853997150)
  • James Loeb et Jeffrey Henderson. « SAEUS, 3. On the Estate of Pyrrhus », Loeb Classical Library, p. 87, consulté le 26 mar 2018, permalien : www.loebclassics.com/view/isaeus-iii_estate_pyrrhus/1927/pb_LCL202.71.xml
  • Robin Osborne, The World of Athens: An Introduction to Classical Athenian Culture, Cambridge University Press, 1984, 448 p. ISBN 978-0521698535

[[Catégorie:Empire séleucide]]