Utilisateur:Leonard Fibonacci/Kalonikos

Puisque dans le Talmud les citations sur Onqelos font un parallèle entre deux Aquila, dont le moins ancien est Aquila de Sinope, il n'est pas impossible que Kalonimus/Kalonikus soient les pères des deux Aquila et qu'un parallèle soit aussi fait sur le surnom des pères tout comme sur celui des fils.

  • Kalonimus — déformation de Clemens — serait alors Cornelius Clemens marié à une (demi)-sœur de Titus et de Domitien qui seraient les parents d'Aquila de Sinope.
  • Kalonikus serait alors le père (adoptif) de l'Aquila auteur du Targoum Onkelos et le meilleur candidat pour cette identification est Callinicus de Commagène.

Aquila est le fils naturel de Faustinus et Matidia, mais comme indiqué dans la littérature pseudo-clémentine il a été adopté par une princesse syro-phénicienne qui avait une demeure entre Tyr et Sidon. Le mari de cette princesse ne partageait pas sa foi qui reconnaissait Jésus comme Messie, mais cela ne l'a pas empêché d'adopter Aquila et Nicétas, car c'était vraisemblablement un prosélyte du judaïsme, non membre du mouvement de Jésus contrairement à son épouse.

Dans ces conditions, l'épouse de Callinicus de Commagène et la maîtresse de Vespasien avec laquelle il a eu une fille qui était donc la (demi) sœur de Titus et Domitien ont probablement des liens familiaux très proches et c'est de cette famille que viennent les noms des deux Aquila.

Rappelons qu'à la suite de la découverte d'une inscription, les historiens estiment que le père de Callinicus de Commagène, Antiochos IV de Commagène et Iotapa de Commagène étaient seulement demi-frère et soeur.

Bérénice/Véronique

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Dans les sources chrétiennes, notamment les Homélies pseudo-clémentine, la princesse syro-phénicienne ayant une résidence entre Tyr et Sidon a une fille appelée Bérénice. Selon ces sources, c'est elle qui est guérie par Jésus dans les évangiles synoptiques sans être explicitement nommée. Cette même femme est donnée comme étant aussi celle que Jésus d'une « perte de sang » qui durait depuis 7 ou 12 ans. Si elle n'est pas nommée dans les évangiles synoptiques, elle est appelée Bérénice dans d'autres sources, notamment dans les Actes de Pilate. Au IVe siècle, Eusèbe de Césarée relate dans son Histoire ecclésiastique (livre VII, § XVIII) avoir vu lui-même à Panéas (aussi connue sous le nom de Césarée de Philippe), devant la maison de la femme hémorrhoïsse « que les Saints Évangiles nous apprennent avoir trouvé auprès de Notre Sauveur la délivrance de son mal » (Mt 20) se trouvait une statue représentant Jésus « magnifiquement drapé dans un manteau » guérissant cette femme ; à ses pieds était figurée une magnifique plante médicinale, « antidote pour toutes sortes de maladie »[1]. Dans les Actes de Pilate cette hémoroïsse vient témoigner en faveur de Jésus et déclare s'appeler Bérénice[2]. La tradition chrétienne a retenu qu'il s'agissait de sainte Véronique.

Bref aperçu sur les traditions

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Un passage commun aux trois évangiles synoptiques (Marc Mc 5:25-34, Matthieu Mt 9:20-22, et Luc Lc 8:43-48), raconte la guérison miraculeuse d'une femme atteinte d'hémorragies chroniques et qui touche le vêtement de Jésus. Cette femme n'est pas nommée (on parle de la « femme hémoroïsse »)[3].

Au IVe siècle Eusèbe de Césarée rapporte dans son Histoire ecclésiastique (VII 18), que la femme venait de Césarée de Philippe, et qu'on y voit une statue de bronze la représentant agenouillée au pied du Christ.

Dans la version grecque (recension A) des Actes de Pilate, un apocryphe qui date du IVe siècle, elle intervient pour le défendre lors du procès de Jésus sous le nom de Bérénice (Berenikè, ou Beronikè). Mais c'est dans des versions latines de ce texte, dans lesquelles Bérénice devient Véronique (Veronica), qu'apparaît la plus ancienne version de l'histoire du voile de Véronique. Il s'agit d'un épisode mis en appendice, la Cura Sanitatis Tiberii (La guérison de Tibère), dont le plus ancien manuscrit date du VIIIe siècle.

Éxil en Gaule avec Zachée

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Une tradition chrétienne dont le plus ancien témoin connu semble être contenu dans des sermons de Bernard Gui (1261-1331) parle d'une Véronique (Bérénice) qui serait morte à Soulac dans le Bordelais. Elle serait venu en Gaule avec son mari Zachée (le Juste). Après la Grande révolte juive et la prise de Jérusalem (70), Zacchée et Bérénice aurait été exilé à Rocamadour. Il ne faut pas confondre cette princesse appelée Bérénice qui est en fait sainte Véronique (déformation classique du nom) avec Bérénice, la sœur du roi Agrippa II.

Bernard Gui assimile Zachée avec saint Amadour, venu en Gaule et qui s'installa dans une grotte du Quercy (Rocamadour), avec son épouse Véronique (Bérénice) qui serait morte à Soulac dans le Bordelais[4]. Dans ses sermons, Bernard Gui associe saint Martial IIIe siècle, appelé « l'apôtre des Gaules » ou « l'apôtre d'Aquitaine » à saint Amadour qui lui aussi aurait été « l'apôtre d'Aquitaine » deux siècles avant saint Martial. Celui-ci aurait d'ailleurs fondé une église en l'honneur de sainte Véronique à Soulac, lieu traditionnel de sa mort. Cette église a été ensevelie sous les dunes, mais a été dégagée entre 1860 et 1864[5]. Zachée pour sa part serait mort à Rocamadour où a été fondé par la suite le sanctuaire portant son surnom.

Hypothèse Aquila du Pont = Caïus Julius Aquila

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Christian Settipani estime que le tria nomina de Callinicus de Commagène est Caïus Julius Callinicus. C'est en tout cas cohérent avec les noms de son père et de son frère qui tous deux s'appelle Caïus Julius Antiochos (Epiphane) et Caius Iulius Archelaus Antiochus Epiphanes.

Il serait donc cohérent que le fils adoptif de Callinicus soit Caïus Julius Aquila.

Caïus Julius Aquila

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Gaius Julius Aquila, est le chevalier, qui, en l'absence du légat de Mésie, Didius Gallus, commandait la garnison de Panticapée, capitale du Bosphore, après la destitution de Mithridate II, en 44 ap. J.-C. et son remplacement par Cotys Ier. Mithridate le méprisait et pensait le vaincre facilement, en s'alliant avec les Siraques. Mais il sut se montrer habile, et il reçut la préture lorsque Mithridate, livré aux Romains, fut exposé devant les Rostres [6].

Il ne faut pas le confondre avec Védius Aquila, cité comme commandant (et plus loin lieutenant) de la treizième légion, en 69 ap. J.-C.[7].

Éléments biographiques

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Claude, qui a succédé à Caligula en 41, confirme Mithridate II comme roi du Bosphore[8]. Toutefois, pour une raison inconnue, Mithridate est remplacé en 44 apr. J.-C. par son frère cadet Cotys Ier, qui prend possession du royaume appuyé par une armée conduite par Aulus Didius Gallus, le Légat de Mésie[9].

Mithridate le roi détrôné cherche à prendre sa revanche lorsqu'il apprend que le général romain Didius Gallus est absent avec l’élite de son armée et qu’il ne demeure dans le Bosphore que son frère Cotys, « jeune homme sans expérience », avec un petit contingent commandé par le chevalier romain Caius Julius Aquila. Mithridate qui compte sur l'inexpérience de son frère, n'a pas en grande estime les compétences militaires d'Aquila et cherche à reprendre le pouvoir en s'appuyant sur Zorzinès, roi des Siraques. Dans un premier temps il s’empare des États du roi des Dandarides[10] et s'allie à Zorsines, roi des Siraques.

Julius Aquila et Cotys, de leur côté, concluent une alliance avec Eunonès, le roi des Aorses[11] qui, conscient de la puissance romaine, accepte de fournir sa cavalerie pour les combats en rase campagne pendant que les Romains se chargent d’assiéger les villes[12]. Aquila commande la garnison romaine de la garnison de Panticapée, capitale du Bosphore au nord de la mer Noire, qui correspond aujourd'hui à la ville de Kertch en Crimée. Avec ses alliés il prend l’offensive et repoussent les ennemis jusqu'à Soza, ville de la Dandarique, qui est occupée. Les troupes marchent ensuite contre les Siraques, passent le fleuve Panda et investissent la ville d’Uspé, qui résiste dans un premier temps avant d’être prise et mise à sac. Zorsinès abandonne alors la cause de Mithridate ; il livre des otages et vient se prosterner devant la statue de César[13].

Mithridate décide alors de se rendre ; craignant la vengeance de son frère Cotys, il se tourne vers Eunonès, le roi des Aorses, afin qu’il négocie sa reddition. Ce dernier, ému par le prince vaincu, envoie des députés à l’empereur Claude pour solliciter sa clémence[14]. L’empereur romain refuse de le maintenir comme roi vassal et Mithridate est conduit à Rome par Junius Cilo. En récompense, Julius Aquila reçoit la préture alors que Mithridate, le vaincu, est exposé devant les Rostres[15].

Éléments convergents

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  • Le nom Aquila
  • Son tria nomina compatible avec celui de Callinicus
  • Son lien avec le Pont (cf. Actes des Apôtres et autres sources chrétiennes) ;
  • La période, complètement compatible avec ce que nous connaissons par ailleurs ;
  • Les possessions d'Aquila du Pont telles que décrites dans les Actes des Apôtres à Corinthe, Rome et Éphèse sont parfaitement compatibles avec un personnage de ce rang.
  • On peut noter que lorsque le frère d'Aquila du Pont, Clément de Rome, est exilé après l'assassinat de Domitien, il est envoyé en Chersonèse c'est-à-dire en Crimée, là où se trouvait Panticapée la capitale du Bosphore et la garnison commandée par Aquila.

Ce sont des points notables mais cela ne suffit peut-être pas pour affirmer une identification.

Hypothèse Anicetus = Nicetas

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Anicetus et Nicetas sont deux formes du même nom.

Ancien affranchi du roi Polémon II du Pont, Anicetus commande la flotte royale jusqu'à ce que le royaume du Pont devienne une province romaine sous l’empereur Néron en 63.

Dans les Homélies pseudo-clémentine, il est dit que c'est la princesse syro-phénicienne qui a acheté Aquila et Nicétas. Elle peut les avoir acheté à Polémon du Pont. Le fait qu'ils aient été ensuite affranchis est implicite dans le texte.

Là aussi les éléments convergents sont notables, mais insuffisants pour faire d'Anicetus le frère de Caïus Julius Aquila/Aquila du Pont.

Réflexion dépassée

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Puisque Nicetas veut dire “le vainqueur” et que que Kalonikos veut dire “Beau vainqueur”, on peut se demander si le Kalonikos/Kalonikus dont on parle dans le Talmud, ne s'appelle pas Nicetas. Il faudrait vérifier ce que disent exactement les citations qui parlent de Kalonikos, mais il semble que le nom Kalonikos/Kalonikus remplace simplement Kalonimos/Kalonimus dans les citations classiques. Il ne serait pas illogique que dans le tria nomina de Nicetas figure le nom de Clemens, puisque le nom est présent dans la famille.

En poussant un peu plus loin, il n'est pas impossible que le “Kalonimos Kalonikos” du Talmud soit directement le frère d'Aquila appelé Nicetas, puisqu'un de leurs frères est appelé Clemens. Dans ces conditions le père d'Aquila de Synope serait “Kalonimos Kalonikos” dont on parle dans le Talmud, comme étant le père “d'Onqelos, fils de la sœur de Titus” et c'est lui qui se serait marié avec “Domitilla la jeune”.

Un beau vainqueur méritant le surnom de Kalonikus est Julius Aquila. Est-il possible que ce soit le père de l'auteur du Targoum ? Ce serait au contraire plutôt lui l'auteur du Targoum Onkelos.

Toute ces options semblent toutefois exclure que Aquila et Nicetas soient Jean et Jacques de Zébédée, malgré la belle hypothèse de la chercheuse australienne.

  1. Alain Desreumaux, Histoire du roi Abgar et de Jésus, 1993, Brepols,p. 128.
  2. Jean-Pierre Lémonon, Ponce Pilate, éd. Atelier, 2007, p. 240.
  3. En Occident, elle a été identifiée avec un autre personnage des évangiles, Marthe de Béthanie(cf.) 'Encyclopædia Britannica de 1911), dont le deuxième nom pourrait être Bérénice. Selon les sources juive, Marthe de Béthanie est Martha fille de Boethus, une veuve qui a épousé le grand prêtre Jésus de Gamala et qui a payé une somme considérable au roi Agrippa II pour qu'il le désigne comme grand prêtre.
  4. À comparer avec les Zachée et Bérénice qui convertissent les frères de Clément de Rome à la « doctrine de vérité » ce qui les conduit à être des juifs reconnaissant Jésus comme Messie, dans l'Iinéraire de Pierre, que l'on retrouve tant dans les Homélies que dans les Reconnaissances pseudo-clémentines.
  5. Jean-Loup Lemaitre, Hagiographie et histoire monastique, § I. Bernard Gui et les saints du Limousin : la légende aurélienne, 4 - 6.
  6. Tacite, Annales, XII, 15.
  7. Tacite, Histoires, II, 44 et Tacite, Histoires, III, 7.
  8. C'est à cette époque que Mithridate adopte le gentilice de Claudius, qu'il est le seul de sa dynastie à porter.
  9. Dion Cassius, livre LX, chapitre 28, § 7.
  10. La Dandarique est une contrée située au Nord-Ouest de la Colchide, vers la frontière avec les Scythes.
  11. Comme les Siraques, les Aorses sont des peuples sarmates.
  12. Tacite, Annales, livre XII, chapitre 15.
  13. Tacite, Annales, livre XII, chapitres 16 & 17.
  14. Tacite, Annales, livre XII, chapitres 18 & 19.
  15. Tacite, Annales, XII, 15.