Utilisateur:Leonard Fibonacci/Mandéisme
- Jean HADOT (professeur à l'Université libre de Bruxelles), Encyclopaedia universalis
Le mandéisme désigne la religion pratiquée par une secte dont les derniers survivants, quelques milliers, se trouvent actuellement près des rives du golfe Persique, dans la région de Bassora[1]. Cette secte eut son heure de gloire au début du xxe siècle : de nombreux savants y virent un élément d'explication des origines chrétiennes, tandis que d'autres, refusant d'admettre son influence sur le christianisme, pensèrent à l'inverse qu'elle avait été fortement marquée par l'empreinte chrétienne. La fièvre suscitée par cette « question mandéenne » est retombée, mais le problème de ses rapports avec le christianisme est loin d'être résolu.
1. Textes et doctrines
modifier- Jean HADOT (professeur à l'Université libre de Bruxelles), Encyclopaedia universalis
La secte mandéenne a été révélée en 1652 par un missionnaire carme, qui décrivait ses membres sous le nom de « chrétiens de saint Jean ». Au cours du xviie siècle, de nombreux voyageurs allèrent sur place recueillir des renseignements. Mais la véritable étude scientifique commença seulement au milieu du xixe siècle, avec la parution d'éditions de textes, de traductions et d'une grammaire de la langue mandéenne. Le premier travail d'ensemble sur le sujet est celui de W. Brandt (1889), et la contribution la plus importante, celle de M. Lidzbarski, qui consacra sa vie aux études mandéennes et dont les publications sont à l'origine de tous les travaux récents. Parmi ces derniers, il faut citer particulièrement les recherches de E. S. Drower-Stevens, qui, en publiant certains textes nouveaux, s'est efforcée de donner de la secte une description aussi complète que possible.
D'après l'étymologie que les critiques attribuent à leur nom, les « mandéens » (mandaya) seraient les hommes de la connaissance (manda). Malgré l'explication de E. S. Drower-Stevens, pour qui ce nom viendrait de mandi, qui sert à désigner le sanctuaire des mandéens, il semble préférable de s'en tenir à l'ancienne interprétation, qui correspond à l'ensemble de la doctrine contenue dans les ouvrages mandéens. Les mandéens se désignent eux-mêmes d'un autre nom, celui de nasoraia (« nazaréens »), qui évoque la secte judéo-chrétienne des nazaréens aux premiers siècles du christianisme et qu'il faut traduire par « observants ». Un troisième nom leur est attribué, celui de sabaya (« baptistes »), qui souligne l'importance prise dans cette secte par les rites du baptême. C'est de cette appellation que les auteurs musulmans se servent de préférence.
On dispose actuellement de l'ensemble des écrits mandéens, qui constituent un dossier considérable et parmi lesquels il convient de mentionner trois grandes compilations. Le Ginzâ (Trésor), appelé aussi Sidrâ Rabba (Grand Livre), reste le document le plus i […]
2. Problème des origines et rapports avec le christianisme
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Le véritable problème posé par le mandéisme est celui de ses origines. Est-il né en Mésopotamie ou en Palestine ? Bien que l'ensemble de ses écrits n'ait été constitué qu'après la naissance de l'islam, c'est-à-dire au viiie siècle, la secte apparaît comme beaucoup plus ancienne. Elle est attestée avec sûreté dès le ive siècle et assez probablement aux environs de l'an 200. Cela semble prouvé par les textes, du moins par leurs parties les plus primitives et aussi par le fait que le manichéisme est né au sein d'une secte baptiste, qui est presque certainement le mandéisme.
Mais peut-on remonter plus haut dans le temps et, surtout, envisager que le mandéisme est né en Palestine plutôt qu'en Babylonie ? Plusieurs faits semblent l'indiquer. Tout d'abord, l'écriture mandéenne est très proche du nabatéen, c'est-à-dire de l'écriture des nomades de la vallée du Jourdain. D'autre part, le vocabulaire contient un grand nombre de mots araméens d'origine « occidentale », c'est-à-dire palestinienne. Surtout, les doctrines de la secte comportent un grand nombre d'éléments qui semblent inséparables de l'histoire du peuple juif et du sol palestinien. C'est le cas, en particulier, pour l'importance donnée au Jourdain, considéré comme le fleuve du salut, et à la ville de Jérusalem, envisagée comme le centre de la révélation et du combat entre la lumière et les ténèbres. Si l'on ajoute à cela le fait que les mandéens se donnent le nom de « nazaréens », on peut conclure qu'on se trouve dans une ambiance juive et palestinienne.
Faut-il aller jusqu'à admettre que les mandéens sont les disciples attardés, mais fidèles de Jean-Baptiste ? Le problème est difficile, parce que les textes qui mettent le plus en relief la personne de Jean-Baptiste semblent compter parmi les plus récents. Aussi plusieurs auteurs pensent-ils que les mandéens ne se sont couverts de l'autorité du Baptiste qu'à l'époque où ils ont dû constituer un corpus spécifiqu […]
Notes et références
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Bibliographie
modifierA. J. H. W. Brandt, Die mandäische Religion, ihre Entwicklung und geschichtliche Bedeutung, Utrecht, 1889, réimpr. Maarsen (Pays-Bas), 1973
J. J. Buckley, « Why Once is not enough : Mandacan Baptism as an example of a Repeated Ritual », in Hist. of Rel., vol. XXIX, no 1, Chicago, 1989
E. S. Drower-Stevens, The Mandaeans of Iraq and Iran, Oxford, 1937
M. Lidzbarski, Das Johannesbuch der Mandäer, Giessen, 1916
Mandäische Liturgien, Berlin, 1920
Ginzā Der Schatz oder der Grosse Buch der Mandäer, Göttingen, 1925
A. Loisy, Le Mandéisme et les origines chrétiennes, Nourry, Paris, 1934
H.-C. Puech, « Le Mandéisme », in Histoire générale des religions, t. III, Quillet, Paris, 1946
R. Reitzenstein, Das mandäische Buch des Herrn der Grösse und die Evangelien-Ueberlieferung, Heidelberg, 1919
K. Rudolph, « La Religion mandéenne », in Histoire des religions, t. II, Encyclopédie de la Pléiade, Gallimard, Paris, 1972
R. Stahl, Les Mandéens et les origines chrétiennes, Paris, 1930.