Utilisateur:Leonard Fibonacci/SourceQ

Friedrich Schleiermacher est le premier a avoir proposé en 1832 de voir dans le texte que Papias de Hiérapolis attribue à l'apôtre Matthieu, non pas l'évangile selon Matthieu que nous connaissons, mais un recueil de paroles de Jésus écrit en araméen[1]. En effet, selon Eusèbe de Césarée, Papias avait écrit dans son livre intitulé « Exégèses des discours du Seigneur » que « Matthieu composa les dires [du Seigneur] en dialecte hébraïque et chacun les interprétait comme il pouvait[2] »[3].

On y saisit des formules christologiques tout à fait archaïques, « Jésus n'est pas appelé « Messie » (ou Christ), mais « fils de l'Homme ». (p. 9) »

39. Les écrits de Papias

De Papias, on présente, au nombre de cinq, des livres qui sont intitulés les Exégèses des discours du Seigneur. De ces livres, Irénée fait mention comme des seuls qui aient été écrits par Papias, en disant textuellement :

" Papias, lui aussi auditeur de Jean et compagnon de Polycarpe, homme ancien, a témoigné par écrit dans le quatrième de ses livres. En effet, il existe cinq livres composés par lui. "

Voilà ce que dit Irénée. Pourtant, Papias, dans la préface de ses livres, ne se montre pas lui-même comme ayant jamais été l'auditeur ou le spectateur des saints apôtres, mais il apprend qu'il a reçu ce qui regarde la foi par ceux qui les avaient connus. Voici ses propres paroles : " Pour toi, je n'hésiterai pas à ajouter à mes explications ce que j'ai bien appris autrefois des presbytres et dont j'ai bien gardé le souvenir, afin d'en fortifier la vérité. Car je ne me plaisais pas auprès de ceux qui parlent beaucoup, comme le font la plupart, mais auprès de ceux qui enseignent la vérité; je ne me plaisais pas non plus auprès de ceux qui font mémoire de commandements étrangers, mais auprès de ceux qui rappellent les commandements donnés par le Seigneur à la foi et nés de la vérité elle-même. Si quelque part venait quelqu'un qui avait été dans la compagnie des presbytres, je m'informais des paroles des presbytres : ce qu'ont dit André ou Pierre, ou Philippe, ou Thomas, ou Jacques, ou Jean, ou Matthieu, ou quelque autre des disciples du Seigneur; et ce que disent Aristion et le presbytre Jean, disciples du Seigneur. Je ne pensais pas que les choses qui proviennent des livres ne fussent aussi utiles que ce qui vient d'une parole vivante et durable. "

Ici, il est convenable de remarquer que Papias compte deux fois le nom de Jean : il signale le premier des deux avec Pierre et Jacques et Matthieu et les autres apôtres, et il indique clairement l'évangéliste; pour l'autre Jean, après avoir coupé son énumération, il le place avec d'autres en dehors du nombre des apôtres : il le fait précéder d'Aristion et le désigne clairement comme un presbytre. Ainsi, par ces paroles mêmes est montrée la vérité de l'opinion selon laquelle il y a eu en Asie deux hommes de ce nom, et il y a, à Ephèse, deux tombeaux qui maintenant encore sont dits ceux de Jean. Il est nécessaire de faire attention à cela, car il est vraisemblable que c'est le second Jean, si l'on ne veut pas que ce soit le premier, qui a contemplé la révélation transmise sous le nom de Jean.

Papias, celui dont nous parlons maintenant, reconnaît avoir reçu les paroles des apôtres par (l'intermédiaire de) ceux qui les ont fréquentés; il dit d'autre part avoir été lui-même l'auditeur d'Aristion et de Jean le presbytre en effet, il les mentionne souvent par leurs noms dans ses écrits pour rapporter leurs traditions.

Il n'était pas inutile que ces choses fussent dites par nous ; et il est bon d'ajouter, aux paroles de Papias que nous avons rapportées, d'autres récits encore dans lesquels il raconte des choses extraordinaires et d'autres qui seraient venues jusqu'à lui par le moyen de la tradition. Il a déjà été rappelé, dans ce qui précède, que l'apôtre Philippe avait séjourné à Hiérapolis avec ses filles. Nous devons maintenant indiquer comment Papias, qui vivait en ces temps, rapporte avoir appris une histoire merveilleuse des filles de Philippe. Il raconte la résurrection d'un mort arrivée de son temps; et encore un autre fait extraordinaire concernant Justus, surnommé Barsabas, qui aurait bu un poison mortel et n'aurait éprouvé aucun désagrément par la grâce du Seigneur. Ce Justus est celui qu'après l'ascension du Sauveur les saints apôtres placèrent avec Matthias, après avoir prié pour que le sort complétât leur nombre, en vue de remplacer le traître Judas, ce que le livre des Actes raconte en ces termes : " Et ils placèrent deux hommes, Joseph, appelé Barsabas et surnommé Justus, et Matthias, et ils prièrent en disant... "

Le même Papias ajoute d'autres choses qui seraient venues jusqu'à lui par une tradition orale, certaines paraboles étranges du Sauveur et certains enseignements bizarres, et d'autres choses tout à fait fabuleuses. Par exemple, il dit qu'il y aura mille ans après la résurrection des morts et que le règne du Christ aura lieu corporellement sur cette terre. Je pense qu'il suppose tout cela, après avoir compris de travers les récits des apôtres, et qu'il n'a pas saisi les choses dites par eux en figures et d'une manière symbolique. En effet, il paraît avoir été tout à fait petit par l'esprit, comme on peut s'en rendre compte par ses livres; cependant il a été cause qu'un très grand nombre d'écrivains ecclésiastiques après lui ont adopté les mêmes opinions que lui, confiants dans son antiquité : c'est là ce qui s'est produit pour Irénée et pour d'autres qui ont pensé les mêmes choses que lui.

Dans son propre ouvrage il transmet encore d'autres explications des discours du Seigneur, dues à Aristion dont il a été question plus haut, et des traditions de Jean le presbytre : nous y renvoyons ceux qui aiment à s'instruire. Maintenant nous sommes obligés d'ajouter, aux paroles que nous avons précédemment rapportées , la tradition qu'il expose en ces termes au sujet de Marc, qui a écrit l'Évangile :

" Et voici ce que disait le presbytre : Marc, qui était l'interprète de Pierre, a écrit avec exactitude, mais pourtant sans ordre, tout ce dont il se souvenait de ce qui avait été dit ou fait par le Seigneur. Car il n'avait pas entendu ni accompagné le Seigneur; mais, plus tard, comme je l'ai dit, il a accompagné Pierre. Celui-ci donnait ses enseignements selon les besoins, mais sans faire une synthèse des paroles du Seigneur. De la sorte, Marc n'a pas commis d'erreur en écrivant comme il se souvenait. Il n'a eu en effet qu'un seul dessein, celui de ne rien laisser de côté de ce qu'il avait entendu et de ne tromper en rien dans ce qu'il rapportait. "

Voilà ce que Papias rapporte donc de Marc. Sur Matthieu, il dit ceci :
" Matthieu réunit donc en langue hébraïque les logia (de Jésus) et chacun les interpréta comme il en était capable. "

Le même Papias se sert de témoignages (tirés) de la première épître de Jean et de la première épître de Pierre. Il expose aussi une autre histoire au sujet de la femme accusée de nombreux péchés devant le Seigneur, que renferme l'Évangile selon les Hébreux. Il était nécessaire que nous ajoutions cela à ce qui avait été dit.

Notes et références

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  1. Patterns in Meaning, publié par James McConkey Robinson, p. 13.
  2. « Matthieu réunit donc en langue hébraïque les logia (de Jésus) et chacun les interpréta comme il en était capable. » cf. Papias de Hiérapolis cité par Eusèbe de Césarée, Histoire ecclésiastique, III, 39.
  3. Patterns in Meaning, publié par James McConkey Robinson, p. 13.