Utilisateur:Patrick.Delbecq/Brouillon

Historique modifier

Depuis l'Antiquité on conçoit que le son se déplace rapidement, mais pas instantanément. Le phénomène de l'écho a nourri les premières réflexions : si la propagation du son était instantanée, on ne pourrait distinguer le son initial du son réfléchi sur une paroi ; et si le retard était dû à la paroi, il ne dépendrait pas, comme on le constate, de la distance. On constata aussi que cette vitesse ne dépend pas des qualités du son : fort ou faible, grave ou aigu, le retard est toujours le même. Enfin, le phénomène de l'écho fait également penser à la réflexion de la lumière sur un miroir, ou aux ondes à la surface de l'eau frappée par une pierre[1],[2].

En 1635 Mersenne évalue la vitesse du son dans l'air à 230 toises (soit 448 m) par seconde. Cette valeur est citée par Gassendi, qui montre que les sons graves et aigus se propagent à la même vitesse[3],[4]. Cependant, Mersenne n'est pas sûr que le son réfléchi se propage à la même vitesse, trouvant pour celui-ci 162 toises (315 m) par seconde. Il n'indique pas son mode opératoire[5],[6].

En 1638, dans ses Discorsi, Galilée explique le son par des « plissements » de l'air, qui se communiquent de proche en proche sans déplacement d'ensemble, tandis que ses contemporains ne conçoivent que la transmission par une particule matérielle se déplaçant à grande vitesse sur toute la trajectoire du son[7].

En 1687, dans ses Principia, Newton précise cette notion. Il applique au son, considéré comme mouvement d’une perturbation consistant en une succession de compressions et de détentes de l’air, les principes du calcul infinitésimal pour déterminer, le premier, la vitesse du son à partir des caractéristiques de l'air[8]. On procède à plusieurs expériences au cours du siècle suivant[9]. Néanmoins, les valeurs mesurées sont toujours très supérieures à celle que l'on obtient avec sa formule[10].

En 1701 dans son Acoustique, Sauveur explique la vibration de l'air dans les tuyaux des instruments de musique à vent. Comme cette vibration dépend de la vitesse de propagation du son, elle constitue un autre moyen de l'établir. L'accord des tuyaux est bien connu des facteurs d'instruments, les lois de la vibration des cordes et des diapasons, qui peut s'observer à des cadences bien inférieures, fournit des bases de comparaison, et la méthode des battements un moyen de mesure précis. Le calcul donne les mêmes résultats[11].

En 1727 dans sa Dissertatio physica de sono, puis en 1738 dans sa Dissertation de igne, Euler ne parvient à expliquer la différence entre mesures et théorie de Newton qu'au prix d'un artifice de calcul.

En 1738, l'Académie des sciences française charge MM. de Thury, Maraldi et l'abbé de la Caille d'organiser des nouvelles expériences[12],[13]. Ils firent leurs opérations sur une ligne de 14 636 toises [soit 28,5 km] entre la tour de Montlhéry et la pyramide de Montmartre. La mesure du son est effectuée en tirant des coups de canon la nuit et en mesurant à distance la durée entre la perception de la lumière émise par la flamme à la bouche du canon et la perception du son. Ils conclurent que :

  1. le son parcourt 173 toises [337,2 m] en une seconde de temps, de jour et de nuit, par un temps serein ou par un temps pluvieux ;
  2. s'il fait un vent dont la direction est perpendiculaire à celle du son, celui-ci a la même vitesse qu'il aurait par temps calme ;
  3. mais si le vent souffle dans la même ligne que parcourt le son, il le retarde ou l'accélère selon sa propre vitesse ;
  4. la vitesse du son est uniforme, c'est-à-dire que dans des temps égaux et pris de suite, il parcourt des espaces semblables ;
  5. l'intensité ou la force du son ne change rien à sa vitesse.

Newton jouit d'un immense prestige au XVIIIe siècle. Ce prestige paralyse la recherche théorique, tandis que les mesures effectuées, de plus en plus précises, montrent invariablement un important écart, par excès, avec le résultat obtenu par sa théorie. Dans l'article vitesse du son de l'Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, volume 54, il est relevé que « Depuis Newton, qui le premier eut le talent de développer cette théorie, on a été généralement d'accord qu'elle donne la vitesse du son considérablement trop petite »[14],[15].

En 1808 Biot mesure la vitesse du son dans les solides.

En 1816, Laplace montre que l'hypothèse de Newton selon laquelle le son serait un processus isotherme est erronée, et qu'il s'agit d'un processus adiabatique[16]. La correction qu'il apporte permet de trouver une valeur théorique compatible avec les mesures expérimentales.

En 1822, Arago et Prony sont chargés par le Bureau des longitudes de réaliser de nouvelles expériences, auxquelles participe Gay-Lussac, afin de corriger les résultats de l'expérience de 1738, jugée peu fiable, bien que restée célèbre[9]. Ils utilisent des coups de canons croisés entre Villejuif et Montlhéry, tirés en même temps. De cette manière, les expérimentateurs espèrent limiter les perturbations dues à l'hygrométrie, à la vitesse du vent, à la pression et à la température. De plus, des chronomètres plus précis sont utilisés. Les expériences ont lieu dans la nuit du 21 au 22 juin 1822. Ils obtiennent la valeur de 340,88 m/s à une température de 15,9 °C. Après correction, la vitesse à °C dans l'air sec est de 330,8 m/s. La vitesse obtenue en 1738 recalculée dans les mêmes conditions est estimée à 332,9 m/s. La formule de Laplace donne 331,4 m/s.

En 1826 Colladon et Sturm confirment la valeur prévue pour l'eau à 0,5 % près à la suite d'expériences menées par Colladon dans le lac Léman[17],[18]. Colladon utilise un mécanisme qui frappe une cloche immergée et déclenche simultanément un signal lumineux sur un premier bateau. Sur un deuxième bateau très éloigné, le son est perçu à l'aide d'un tube doté d'un pavillon immergé et la durée entre la perception du signal lumineux et la perception du son est chronométrée.

Les publications s'intéressent aussi à des sujets moins techniques. Dès le XVIIe siècle, Mersenne avait posé la question « un boulet pourrait-il atteindre une personne avant qu'il ait entendu le son du canon qui l'a lancé ? »[5]. Les projectiles atteindront une vitesse initiale supersonique à la fin du XIXe siècle. Au milieu du siècle suivant, la question se posera pour l'aviation, avec le franchissement de ce qu'on appelle le mur du son.

Au XXe siècle, la mesure de la vitesse du son dans un matériau sert à calculer son module d'élasticité, tandis qu'en milieu naturel, elle sert à évaluer la température moyenne de lieux inaccessibles, comme les profondeurs océaniques.[réf. nécessaire]

  1. Liénard 2001, p. 85
  2. François Bernier, Abrégé de la philosophie de Gassendi, Paris, (lire en ligne), p. 368sq, 379.
  3. Taillet, Villain et Febvre 2013, p. 726
  4. Bernier 1678, p. 379.
  5. a et b Léon Auger, « Le R. P. Mersenne et la physique », Revue d'histoire des sciences et de leurs applications, vol. 2, no 1,‎ , p. 33-52 (DOI 10.3406/rhs.1948.2729, lire en ligne)
  6. (la) Marin Mersenne, Harmonicorum libri, in quibus agitur de sonorum natura, causis et effectibus, Paris, (lire en ligne).
  7. François Baskevitch, « L’élaboration de la notion de vibration sonore : Galilée dans les Discorsi », Revue d'histoire des sciences, vol. 60, no 2,‎ , p. 387-418 (DOI 10.3917/rhs.602.0387, lire en ligne, consulté le )
  8. François Baskevitch, « L’air et le son dans l’Encyclopédie, un curieux silence », Recherches sur Diderot et sur l'Encyclopédie, no 44,‎ (lire en ligne)
  9. a et b De la vitesse du son, A. Bravais, Ch. Martins, Annales de chimie et de physique, Crochard (Paris), 1845, p. 10
  10. La formule de Newton donne un écart de 16% avec la mesure de la vitesse du son mesurée de nos jours. Chapitre 1 : brève histoire de l’acoustique [PDF], Claude Gabriel, p. 38.
  11. Léon Auger, « Les apports de J. Sauveur (1653-1716) à la création de l'Acoustique », Revue d'histoire des sciences et de leurs applications, vol. 1, no 4,‎ , p. 323-336 (DOI 10.3406/rhs.1948.2670, lire en ligne).
  12. Dictionnaire Technologique, ou nouveau dictionnaire universel des arts et métiers, et de l'économie industrielle et commerciale], Volume 19, Thomine et Fortic, 1831, p. 383
  13. Jean Antoine Nollet, Leçons de Physique Expérimentale, t. 3, (lire en ligne), p. 421.
  14. Article Vitesse du son de l'Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers
  15. L’air et la physique des sons avant l’Encyclopédie, site recherche sur Diderot et l'Encyclopédie
  16. Taillet, Villain et Febvre 2013, p. 12 et 387 (Lire en ligne
  17. Jean-Daniel Colladon et Charles Sturm, « Mémoire sur la compression des liquides », Annales de chime et de physique, t. 36,‎ , p. 236sq (lire en ligne).
  18. [PDF] Jean-Daniel Colladon - savant et industriel genevois, pp. 5 et 6, Site officiel de la ville de Genève