Utilisateur:Sofiane-a-99/Brouillon2

Depuis le 16 février 2019, début des manifestations de grande ampleur en Algérie suivies par la mobilisation de la diaspora dans quelques grandes villes occidentales (notamment Paris, Montréal et Londres) contre le pouvoir en place et visant d'abord la volonté d'Abdelaziz Bouteflika de se représenter pour un cinquième mandat puis d'allonger la durée du quatrième, de nombreux chants se sont démarqué comme les hymnes des manifestantes et manifestants. La liste fournie ici n'a pas prétention à l'exhaustivité, et la traduction exacte des paroles initialement en arabe algérien peut faire l'objet de discussions.

"La Casa Del Mouradia" - USM Alger, Ouled El Bahdja ("Les Enfants de la Radieuse"), 2018

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Les stades de football en Algérie constituent des espaces d'expression des classes populaires et particulièrement de la jeunesse algérienne, et font office de lieux de socialisation politique, de politisation. Les chants de l'Union Sportive de la Médina d'Alger (USMA) sont particulièrement réputés pour leur forte teneur politique et leur reflet de la société algérienne, plus exactement le reflet qu'ils offrent de l'état d'esprit de la jeunesse algérienne. En 2018, le chant "Babour Ellouh (بابور اللوح)", en français : "Bateau de bois" ou "Radeau", témoignait de la volonté croissante parmi la jeunesse algérienne de prendre le chemin de l'émigration (25000 migrants clandestins algériens quittant le pays en 2018, 3000 morts en mer depuis 2009 selon les autorités nationales).

"La Casa Del Mouradia" fait référence aux 4 mandats de Bouteflika ainsi qu'à l'éventualité d'un cinquième, en les traitant un par un, après avoir exprimé dans son refrain l'état de la jeunesse algérienne, son état d'esprit marqué par la désillusion et l'usage de drogues ("C'est l'aube et le sommeil ne vient pas, Je consomme à petites doses [...] On en a assez de cette vie"). Y est exprimée l'idée d'un pouvoir clanique, assimilé à une bande mafieuse (le terme de "عصابة", "clan, meute, gang" étant récurrent dans la qualification populaire du régime algérien), à travers la référence à la série La Casa de Papel qui a pour personnages principaux une bande de braqueurs qui font main-basse sur les réserves de la Banque Nationale, ainsi qu'en évoquant une Algérie qui "s'est amaigri, la faute aux intérêts personnels". Le premier mandat d'Abdelaziz Bouteflika est présenté comme résultant uniquement de la terreur de la Décennie Noire ("Le premier mandat on dira qu'il est passé, ils nous ont eu avec la décennie [noire]").

Le quatrième mandat est considéré, à travers les paroles, comme celui de la "marionnettisation" du pouvoir : le président de la République Abdelaziz Bouteflika est qualifié de "poupée", est dit "mort[e]" tandis que les affaires du pouvoir "sui[vent leur] cours".

Traduction libre des paroles (de l'arabe algérien au français) :

La Casa Del Mouradia (paroles et traduction)
Arabe algérien Français
ساعات الفجر و ما جاني نوم

راني نكونسومي غير بشوية

شكون السبة و شكون نلوم

ملينا المعيشة هاديا

ساعات الفجر و ما جاني نوم

راني نكونسومي غير بشوية

شكون السبة و شكون نلوم

ملينا المعيشة هاديا

فالأولى نقولو جازت، حشاوهانلا بالعشرية

La Casa Del Mouradia فالثانية الحكاية بانت

فالثالثة البلاد شيانت مالمصالح الشخصية

فالرابعة البوبية ماتت و مازالت القضية

فالأولى نقولو جازت، حشاوهانلا بالعشرية

La Casa Del Mouradiaفالثانية الحكاية بانت

فالثالثة البلاد شيانت مالمصالح الشخصية

فالرابعة البوبية ماتت و مازالت القضية

ساعات الفجر و ما جاني نوم

راني نكونسومي غير بشوية

شكون السبة و شكون نلوم

ملينا المعيشة هاديا

ساعات الفجر و ما جاني نوم

راني نكونسومي غير بشوية

شكون السبة و شكون نلوم

ملينا المعيشة هاديا

و الخامسة راي تسويفي بيناتهم راي مبنية

و الباسي راو أرشيفي ب لا فوا تاع الحرية

فيراجنا الهدرة بريفي يعرفوه كي يتقيا

مدرسة و لازم سيفي بيرو محو الأمية

و الخامسة راي تسويفي بيناتهم راي مبنية

و الباسي راو أرشيفي ب لا فوا تاع الحرية

فيراجنا الهدرة بريفي يعرفوه كي يتقيا

مدرسة و لازم سيفي بيرو محو الأمية

C’est l’aube et le sommeil ne vient pas

Je consomme à petites doses

Quelle en est la raison ?

Qui dois-je blâmer ?

On en a assez de cette vie

C’est l’aube et le sommeil ne vient pas

Je consomme à petites doses

Quelle en est la raison ?

Qui dois-je blâmer ?

On en a assez de cette vie

Le premier [mandat], on dira qu’il est passé

Ils nous ont eu avec la décennie [noire]

Au deuxième, l’histoire est devenue claire

La Casa d’El Mouradia [quartier où se trouve le palais présidentiel]

Au troisième, le pays s’est amaigri

La faute aux intérêts personnels

Au quatrième, la poupée est morte et

L’affaire suit son cours…

Le premier [mandat], on dira qu’il est passé

Ils nous ont eu avec la décennie [noire]

Au deuxième, l’histoire est devenue claire

La Casa d’El Mouradia [quartier où se trouve le palais présidentiel]

Au troisième, le pays s’est amaigri

La faute aux intérêts personnels

Au quatrième, la poupée est morte et

L’affaire suit son cours

C’est l’aube et le sommeil ne vient pas

Je consomme à petites doses

Quelle en est la raison ?

Qui dois-je blâmer ?

On en a assez de cette vie

C’est l’aube et le sommeil ne vient pas

Je consomme à petites doses

Quelle en est la raison ?

Qui dois-je blâmer ?

On en a assez de cette vie

Le cinquième [mandat] va suivre

Entre-eux l’affaire se conclut

Et le passé est archivé

La voix de la liberté…

Dans notre virage la discussion est privée

Ils nous connaissent quand il déferle

L’école… et la nécessité du c.v

Un bureau pour l’analphabétisme

Le cinquième [mandat] va suivre

Entre-eux l’affaire se conclut

Et le passé est archivé

La voix de la liberté…

Dans notre virage la discussion est privée

Ils nous connaissent quand il déferle

L’école… et la nécessité du c.v

Un bureau pour l’analphabétisme

C’est l’aube et le sommeil ne vient pas

Je consomme à petites doses

Quelle en est la raison ?

Qui dois-je blâmer ?

On en a assez de cette vie

C’est l’aube et le sommeil ne vient pas

Je consomme à petites doses

Quelle en est la raison ?

Qui dois-je blâmer ?

On en a assez de cette vie


"Allô le Système!" - Raja Meziane, 2019

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Chanson Rap de l'artiste algérienne Raja Meziane, elle cumule plus de 20 millions de vues sur YouTube à la mi-avril 2019, et est doublement prisée par les manifestantes et manifestants. D'une part pour sa teneur politique, d'autre part pour le symbole qu'elle peut constituer : celui de la voix d'une femme dans le contexte de révolte, les femmes constituant une immense partie de la mobilisation populaire et occupant traditionnellement l' "arrière" des mouvements de protestations en Algérie (de la Guerre de Libération aux manifestations de 2019), qui plus est dans un registre hip-hop dominé par le masculin. Cette chanson a été quant à elle été mise en ligne le 4 mars 2019, et s'inscrit donc directement dans la vague protestataire.

Le clip met en scène Raja Meziane elle-même s'adressant directement, par l'intermédiaire d'une ligne téléphonique publique, au "Système" qui ne semble pas se manifester au bout du fil, le tout entrecoupé d'images des manifestations à travers le pays.

L'artiste évoque le ras-le-bol et le dégagisme généralisé qui s'est développé au sein de la population algérienne, en mettant en avant la diversité des profils au sein de la protestation populaire ("Jeune, vieux, chômeurs et même vendeurs à la sauvette"), et dépeint la paralysie socio-économique du pays ("le pays a fait faillite [...] le peuple saute dans des radeaux"). L'idée de "hogra" (expression maghrébine désignant le "mépris" conjugué à la violence) transparaît à travers le texte, qui évoque l'éternisation au pouvoir et une forme de mépris envers la population de la part du "Système" : "vous pensez que vous êtes éternels, vous nous avez enterré vivants et gardé des morts au pouvoir", référence directe à l'état de santé d'Abdelaziz Bouteflika.

La corruption et le caractère oligarchique du pouvoir en place est au coeur de la chanson, évoquant le Club des Pins, complexe de villas sur le littoral qui fait figure d'emblème du népotisme et du clientélisme en Algérie : "Vous ne vous préoccupez que de vos enfants, avez élevé les murs du Club des Pins et vous vous y cachez [...] 1000 milliards [de rente] partis en fumée et vous en voulez encore, trayez la vache, les rentes du pétrole gardée puis partagées entre vous".

Enfin, le titre lui-même met en exergue le caractère nébuleux du pouvoir algérien, à travers l'expression de "Système" qui insiste sur l'organisation systémique du pouvoir politique, économique et militaire en Algérie, par opposition à l'idée que le système soit incarné par des personnalités. Ainsi, les revendications des manifestantes et manifestants suivent cette logique de mettre fin à ce qu'ils et elles considèrent comme un système plutôt que simplement viser certaines têtes qui ne seraient que la façade de ce dit "système".

Allô le Système (traduction)
Paroles en Anglais fournies sur Youtube Traduction en français à partir de l'anglais et de l'arabe
The flood is at your door

The crowd is coming out

Young, old, jobless and even the street hustlers

The coffres are empty

The country is bankrupt

The knife pierced the marrow

It has been for too long

You have crushed the education , a whole generation is Lost

The society is blocked

The culture is absent

People leave the country in makeshift boats

You think you'e eternal

L'inondation est à votre porte

La foule est de sortie

Les enfants du peuples sont sortis, chômeurs et mêmes vendeurs à la sauvette,

Les caisses sont vides,

Le pays a fait faillite,

Le couteau a percé l'os,

Cela a duré trop longtemps,

Vous avez ruiné l'éducation, une génération entière est perdue,

La société est paralysée,

La culture absente,

Le peuple saute dans des radeaux

Et vous pensez être éternels

You have buried us alive and left deads in power

We have become the laughing stock of all

People are starving and you're partying

You care for no one but your kids

Hidden behind your walls you're frightened

1000 billion dollars gone up in smoke and you still want more

Oil rents well kept and shared among you

And you crushed us again, today we are not salent anymore

Today we no longer fear

We want a Republic, people's democracy, not a monarchy

People have suffured enough

They're sick of you

We are the flood

You'd best leave us alone bunch of thugs !


Allo, allo, system do you hear me ? you plug your ears as usual ?

Allo, listen to me, you puppet of this system

I told you at the 4th mandate

Just leave me alone, I will not be part of it

You took it all and there is not much left to take

But you still want a 5th one

You thought the youth was asleep

Now we are in the streets to say stop and you are shaking

You hope for the mess

This time we win, you lose, but you will never quit

You vowed to leave the country to fire and blood and run away

We know you well, we have not forgotten, we will not forgive

You have corrupteur history and betrayed the revolution

The witnesses are still there and despise you

I pray for the country to recouvre and for you to get what you deserve !

Vous nous avez enterré vivants et laissé des morts au pouvoir,

Nous sommes devenus la risée de tous,

Les gens sont affamés tandis que vous festoyez,

Ne vous souciez de personne si ce n'est de vos enfants,

Avez élevé les murs du Club des Pins et vous vous y cachez,

1000 milliards de dollars [de rente] et vous en voulez toujours plus, vous trayez la vache (l'Algérie)

Les rentes du pétrole bien gardées et partagées entre vous,

Et vous nous avez encore écrasé, aujourd'hui nous ne sommes plus silencieux,

Aujourd'hui nous n'avons plus peur

Nous voulons une République, une démocratie du peuple, pas une monarchie

Les gens ont assez souffert

Ils en ont marre de vous

Nous sommes l'inondation

Vous feriez mieux de nous laisser tranquilles bande de d'escrocs !


Allô, allô, le Système, m'entendez vous ? Ou bouchez-vous vos oreilles comme d'habitude ?

Allô, écoutez moi, profiteurs ("chiyate", le "lèche-bottes") de ce système

Je vous ai dit, du temps du 4ème mandat :

Laissez-moi tranquille, je n'y participerai pas

Vous avez tout pris et n'avez pas laissé grand chose

Et voulez tout de même toujours un 5ème

Vous pensiez que la jeunesse dormait

Désormais nous sommes dans les rues y mettre fin et vous tremblez

Espérez le chaos

Cette fois nous gagnons et vous perdez, mais vous ne vous retirerez jamais

Vous avez fait le serment de laisser le pays à feu et à sang avant de vous enfuir

Nous vous connaissons, nous n'avons pas oublié, nous ne pardonnerons pas,

Vous avez corrompu l'Histoire et trahi la Révolution

Les témoins sont toujours là et vous exècrent

Si Dieu le veut le pays recouvrera et vous obtiendrez ce que vous méritez !


"La Liberté" - Soolking feat. Ouled El Bahdja, 2019

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Le titre "La Liberté", du rappeur algérien Soolking, est apparu dès sa sortie comme un hymne de la "Révolution du Sourire", se classant parmi le Top10 mondial de la plateforme Deezer les jours suivants, et cumulant 17 millions de vues en une semaine sur Youtube. Ce single est produit en collaboration avec Ouled El Bahdja, groupe de supporters lui-même issu de l'USM Alger, et devient un symbole, notamment un symbole de la mobilisation de la diaspora algérienne à l'étranger, qui compte 2 à 5 millions d'individus en France seulement, étant chantée en français et en arabe algérien.

Le clip, sobre, met en scène Soolking écrivant une lettre, lettre au pouvoir algérien, au coin du feu : l'imagerie du clip et le corps de la chanson mettent ainsi tous deux en avant le caractère pacifique de la protestation en Algérie, marquée par le mot d'ordre "سلمية" ("silmiyya", "pacifique"). Le refrain insiste sur les formules de courtoisie, de politesse : "Excuse-moi d'exister, excuse mes sentiments, donne-moi ma liberté, je te l'demande gentiment".

Le texte évoque également le frein psychologique que constituait le souvenir de la Décennie Noire, ou "Années de Braise" (سنوات الجمر), qualifiée officiellement de "Tragédie Nationale" en Algérie : "Ils ont cru qu'on était morts, ils ont dit 'bon débarras!', ils ont cru qu'on avait peur de ce passé tout noir". En effet, le souvenir de la Guerre Civile qui a déchiré le pays plus d'une décennie quelques années après les soulèvements d'Octobre 1988 a profondément marqué la société algérienne, et ce traumatisme national a fait taire toute contestation de masse depuis le début des années 2000, exceptée celle du Printemps noir kabyle en 2001. Par cette ligne, Soolking met en relief cet aspect de la politique algérienne : le poids du passé dans l'affirmation du régime d'Abdelaziz Bouteflika qui a basé sa légitimité sur la stabilité post-guerre civile. De nombreux observateurs ont mis en avant ce qui a été qualifié de "chute du mur de la peur" lorsque la masse algérienne a investi les rues à partir de février 2019.

Les protestations de 2019 sont également un changement majeur dans la capacité de projection dans l'avenir du pays, qui transparaît tout au long du texte de Soolking ("j'écris ça ce soir, pour un nouveau matin, j'écris pour y croire").

Enfin, on relève la référence à Matoub Lounès, chanteur engagé algérien d'expression kabyle assassiné en 1998, une référence assez rare pour un artiste arabophone, qui vient conforter une volonté d'unité face au régime entre arabophones et berbérophones, une division que les manifestants et manifestantes accusent d'avoir été manipulée par le pouvoir.

La Liberté (paroles)
Paroles en français Outro en arabe dialectal
Paraît que le pouvoir s'achète

Liberté, c'est tout c'qui nous reste Si le scénario se répète On sera acteurs de la paix Si faux, vos discours sont si faux Ouais, si faux, qu'on a fini par s'y faire Mais c'est fini, le verre est plein En bas, ils crient, entends-tu leurs voix? La voix d'ces familles pleines de chagrin La voix qui prie pour un meilleur destin Excuse-moi d'exister, excuse mes sentiments Et si j'dis que j'suis heureux avec toi, je mens Excuse-moi d'exister, excuse mes sentiments Rends-moi ma liberté, je te l'demande gentiment

Libérez li rahi otage, libérez lmerḥouma, kayen khalel f lqada'

Libérez ceux qui sont otages, nous, c'est tout c'qu'on a

On a que la liberta

W ḥna homa l'ibtila', ah ya ḥoukouma, w nnar hadi ma tetfach

Ceci est notre message, notre ultima verba

Soolking w Ouled El Bahdja

La liberté, la liberté, la liberté

C'est d'abord dans nos cœurs

La liberté, la liberté, la liberté

Nous, ça nous fait pas peur

La liberté, la liberté, la liberté

C'est d'abord dans nos cœurs

La liberté, la liberté, la liberté

Nous, ça nous fait pas peur

Ils ont cru qu'on était morts, ils ont dit "bon débarras"

Ils ont cru qu'on avait peur de ce passé tout noir Il n'y a plus personne, que des photos, des mensonges Que des pensées qui nous rongent, c'est bon, emmenez-moi là-bas Oui, il n'y a plus personne, là-bas, il n'y a que le peuple Che Guevara, Matoub, emmenez-moi là-bas J'écris ça un soir pour un nouveau matin Oui, j'écris pour y croire, l'avenir est incertain Oui, j'écris car nous sommes, nous sommes main dans la main Moi, j'écris car nous sommes la génération dorée

[1] , [2] , [3] , [4].

Notes et références

modifier
  1. « Les stades algériens ont toujours été un espace d’expression de la jeunesse », sur Nova (consulté le )
  2. « Immigration: le nombre d'algériens migrants clandestins a triplé en 2018 », sur Observ'Algérie, (consulté le )
  3. Akram Belkaïd, « Lignes quotidiennes, par Akram Belkaïd: L'hymne du 22 Février : La Casa Del Mouradia (paroles) », sur Lignes quotidiennes, par Akram Belkaïd, (consulté le )
  4. « La chanson de Raja Meziane «Allo le système» fait le buzz sur la toile (vidéo) », sur DIA, (consulté le )

Annexes

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Articles connexes

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