Violences contre les Juifs en Europe centrale et orientale (1944-1946)

Les violences contre les Juifs en Europe centrale et orientale qui commencèrent durant les derniers moments de la Seconde Guerre mondiale, à la suite de la retraite des troupes d'occupation allemandes et de l'arrivée victorieuse de l'armée rouge, étaient liées en partie à l'anarchie de l'après-guerre et au chaos économique exacerbé par les politiques staliniennes imposées dans les territoires des républiques soviétiques et des nouveaux pays satellites.

Les attaques antisémites sont devenues fréquentes dans les villes soviétiques dévastées par la guerre, dans les marchés, dans les magasins vides, dans les écoles et même dans les entreprises d'État[1]. Des lettres de protestations furent envoyées à Moscou par le comité antifasciste juif, qui était impliqué dans la recherche de preuves sur la Shoah[1], depuis nombreuses villes russes, ukrainiennes ou biélorusses.

Histoire

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Selon le colonel David Dragunsky, les autorités soviétiques ne tentèrent pas de remédier aux années de propagande antisémite hitlérienne, des éléments antisémites qui avaient été parmi les collaborateurs des Nazis en Union Soviétique furent souvent mis à la tête des entreprises d'État. Solomon Mikhailovich Mikhoels, président du Comité antifasciste juif (CAJF) assassiné à Minsk en , écrit que les maisons juives ne furent pas rendues à leurs propriétaires. À Berdytchiv, Mohyliv-Podilskyï, Balta, Jmerynka, Vinnytsia, Khmilnyk, Stara Rafalivka (en) et de nombreuses autres villes, les Juifs furent obligés de rester dans les anciens ghettos nazis afin d'assurer leur propre sécurité[1].

Le Comité antifasciste juif fut la cible directe des autorités soviétiques dans la campagne dite « contre les cosmopolites sans racine » de la fin des années 1940 et lors de la nuit des poètes assassinés[2],[3].

Le présidium du CAFJ se réunit à la fin du mois d' avec le commandant d'une unité partisane juive de Biélorussie. En réponse à une question portant sur l'attitude des non-Juifs face aux Juifs à Minsk, il déclare « Cette attitude n'a pas été bonne. Il y a eu de nombreux incidents antisémites... Une bataille pour les logements a commencé... Il existe des difficultés en ce qui concerne l'emploi [1] ».

Quelques mois après l'assassinat de Mikhoels, d'autres figures juives furent arrêtées. Sa mort marqua le début dans tout le pays d'une vaste répression contre les Juifs accusés d'espionnage et de crimes économiques. Une campagne contre le sionisme fut lancée à l'automne 1948. À la fin de la décennie, les Juifs disparurent des hautes sphères du parti dans les Républiques socialistes[4]. Cela ouvre la voie au complot des blouses blanches de 1952-53 qui est accompagné de la publication de textes antisémites dans les médias[5], et de centaines d'interrogatoires où la torture fut employée[6].

La plupart des villes et villages d'Union soviétique n'ont jamais reconnu l'implication des auxiliaires de police locaux dans la Shoah[7],[8],[9]. La grande majorité des 300 000 membres de la Schutzmannschaft dans les territoires soviétiques occupés par l'armée allemande (les membres de la Défense du territoire biélorusse qui prit part à des actions de pacification au cours desquelles environ 30 000 Juifs furent assassinés[10], et les membres des bataillons de la Ukrainische Hilfspolizei qui étaient responsables de l'extermination de 150 000 Juifs dans la seule région de Volhynie[11]) purent reprendre leur ancienne vie sans être inquiétés[12],[13]. Khrouchtchev déclare que les Juifs n'étaient pas les bienvenus en Ukraine[14].

Pays satellites

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Au moment de la prise de pouvoir par les Soviétiques en Pologne, « seule une petite partie des morts [Juifs] pouvait être attribuée à l'antisémitisme », selon Jan T. Gross[15]. La plupart d'entre eux avaient été tués lors de l'insurrection anti-communiste qui faisait rage contre le gouvernement pro-soviétique[16]. Les violences antisémites de Pologne de 1944-1946 firent au moins 327 victimes juives[17] dont 104 dans la seule ville de Kielce.

En Roumanie, des centaines de Juifs qui revenaient des camps furent tués[18],[19].

Des manifestations anti-juives, parfois concentrées sur des accusations de meurtre rituel, eurent lieu dans une dizaine de lieux en Hongrie[20], comme à Kunmadaras (deux ou quatre victimes) et Miskolc.

En Slovaquie, à Topolcany, 48 Juifs furent gravement blessés en . Un certain nombre de Juifs furent assassinés à Kolbasov en décembre. Selon les témoignages, 13 incidents antisémites, appelés émeutes du Congrès des Partisans, eurent lieu entre le 1er et le , dont le plus important fut celui de Žilina, où 15 personnes furent blessées. Des manifestations antisémites eurent lieu à Bratislava en et en , avec des émeutes antisémites en certains endroits[21].

À Kiev, en Ukraine, du 4 au , environ cent Juifs furent battus, trente-six d'entre eux durent être hospitalisés et cinq moururent de leurs blessures[22]. À Rubtsovsk, en Russie, de nombreux incidents antisémites eurent lieu en 1945.

Notes et références

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(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Anti-Jewish violence in Central and Eastern Europe, 1944–46 » (voir la liste des auteurs).
  1. a b c et d Shimon Redlich, Kirill Mikhaĭlovich Anderson, I. Alʹtman, War, Holocaust and Stalinism: A Documented Study of the Jewish Anti-Fascist Committee in the USSR, Psychology Press, 1995, p. 38–44, 97, 229, 459.
  2. Zhores Medvedev, Сталин и еврейская проблема: новый анализ [Stalin and the Jewish Question: New Analysis], Mouscou, Prava Cheloveka, 2003, p. 148. (ISBN 5-7712-0251-7).
  3. Benjamin Pinkus, The Soviet Government and the Jews 1948-1967: A Documented Study, Cambridge: Cambridge University Press, 1984, p. 183–184. (ISBN 0-521-24713-6).
  4. Zvi Y. Gitelman, The Black Years and the Gray, 1948-1967. A Century of Ambivalence: The Jews of Russia and the Soviet Union, 1881 to the Present, Indiana University Press, 2001, p. 144–154.
  5. Jonathan Brent, Vladimir P. Naumov, Stalin's Last Crime: The Plot Against the Jewish Doctors, 1948-1953, New York: HarperCollins, 2003, p. 4. (ISBN 0-06-019524-X).
  6. Simon Sebag-Montefiore, Stalin: The Court of the Red Tsar, New York: Vintage Books, 2005, p. 636. (ISBN 1-4000-7678-1).
  7. Meredith M. Meehan, Auxiliary Police Units in the Occupied Soviet Union, 1941-43: A Case Study of the Holocaust in Gomel, Belarus, United States Naval Academy: 44, 2010
  8. Alexandra Goujon, Memorial Narratives of WWII Partisans and Genocide in Belarus, France: Université de Bourgogne: 4, 28 août 2008
  9. John-Paul Himka, Joanna Beata Michlic, Bringing the Dark Past to Light. The Reception of the Holocaust in Postcommunist Europe, University of Nebraska Press: 16. (ISBN 0803246471).
  10. Eugeniusz Mironowicz, Okupacja niemiecka na Białorusi [German occupation of Belarus], Historia Białorusi od połowy XVIII do XX w. [History of Belarus, mid 18th century until the 20th century] (in Polonais et Belarus). Związek Białoruski w RP, Katedra Kultury Białoruskiej Uniwersytetu w Białymstoku, 2014
  11. Alexander Statiev, The Soviet Counterinsurgency in the Western Borderlands, Cambridge University Press, 2010, p. 69.
  12. Martin Dean, Collaboration in the Holocaust: Crimes of the Local Police in Belorussia and Ukraine, 1941-44, Palgrave Macmillan, 2003, p. 60. (ISBN 9781403963710).
  13. Andrea Simon, Bashert: A Granddaughter's Holocaust Quest, Atonement. Univ. Press of Mississippi, 2020, p. 225. (ISBN 1578064813).
  14. Benjamin Pinkus, The Jews of the Soviet Union: The History of a National Minority. Anti-Semitism, p. 219. (ISBN 0521389267).
  15. Jan T. Gross, After Auschwitz: The Reality and Meaning of Postwar Antisemitism in Poland". In Jonathan Frankel. Studies in Contemporary Jewry, Oxford University Press, 2005 (ISBN 0-19-518224-3).
  16. August Grabski, Central and Eastern European Online Library (CEEOL), page 11, note 7, in Stefan Grajek, Po wojnie i co dalej? Żydzi w Polsce, w latach 1945−1949, traduit de l’hébreu par Aleksander Klugman, Żydowski Instytut Historyczny, Varsovie, 2003, p. 95. Kwartalnik Historii Żydów, Recenzje (Jewish History Quarterly; Reviews), p. 240
  17. David Engel, Patterns Of Anti-Jewish Violence In Poland, 1944-1946, Yad Vashem Studies, Vol. XXVI, Yad Vashem, 1998, p. 32.
  18. Minicy Catom Software Engineering Ltd. (1946-07-04), Institute for Global Jewish Affairs – Global Antisemitism, Anti-Israelism, Jewish Studies, Jcpa.org, 8 avril 2010
  19. Jean Ancel, The Return of the Survivors from Transnistria, in David Bankier, ed., The Jews Are Coming Back, Yad Vashem, 2005, p. 241.
  20. Peter Kenez, Antisemitism in Post World War II Hungary - violence, riots; Communist Party policy | Judaism | Find Articles at BNET, Findarticles.com, 2001
  21. Ivica Bumova, PhD, Protizidovske vytrznosti v Bratislave v historicksom kontexte, Studie Pamat Naroda, 28 (27 / 100)
  22. Amir Weiner, Making Sense of War: The Second World War and the Fate of the Bolshevik Revolution, Princeton University Press, 2008, p. 19