Yves Michaud (philosophe)
Yves Michaud, né le à Lyon, est un philosophe, théoricien et critique d'art, professeur des universités français.
Directeur École nationale supérieure des beaux-arts | |
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Chevalier de la Légion d'honneur () Prix des Rencontres philosophiques d'Uriage (d) () Officier des Arts et des Lettres |
Penseur de l'empirisme hérité de David Hume et du septicisme de John Locke, Yves Michaud est un philosophe engagé dans l'enseignement supérieur et du partage démocratique des savoirs. Cet auteur prolifique et éclectique combine à son écriture érudite anti-cartésienne et pessimiste, des saillies et mots d'esprit polémiques par lesquels il commente volontiers l'actualité politique ou artistique.
Biographie
modifierParcours académique
modifierIssu d'un milieu modeste lyonnais, il est admis à l'École normale supérieure en . Il suit les cours de Louis Althusser, qui lui recommande de suivre ceux du sociologue Alain Touraine, du psychologue Ignace Meyerson et de l'ethnologue Georges Balandier[1]. Il est reçu premier à l'agrégation de philosophie en 1968. En 1981, il soutient à l'université Paris-Sorbonne sa thèse de doctorat en philosophie « Empirisme, analyse et philosophie chez David Hume », préparée sous la direction de Suzanne Bachelard[2].
Professeur des Universités
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Après avoir été maître-assistant à l'université Montpellier III (1970-1981), il enseigne la philosophie dans différentes universités, Berkeley, à l'université d'Édimbourg, à l'université de Rouen (1981-1985), à São Paulo, enfin Professeur des Universités à l'université Panthéon-Sorbonne de Paris. Après avoir été nommé directeur de l'École nationale supérieure des beaux-arts de 1989 à 1997, il est à nouveau professeur à l'université de Rouen, et membre de l'Institut universitaire de France à partir de 2004[3].
Université de tous les savoirs
modifierYves Michaud est un des concepteurs de l'Université de tous les savoirs (UTLS) et des forums de la démocratie et du savoir[note 1]. Créée sous la tutelle de Jean-Jacques Aillagon, dans le cadre de la Mission 2000 en France[4] pour marquer le passage au XXIe siècle, comme une grande encyclopédie vivante faite de 366 leçons magistrales ou conférences données au Conservatoire national des arts et métiers, une pour chaque jour de l’année 2000, ouverte à tous.
Esthétique et philosophie politique
modifierLes domaines de prédilection de Yves Michaud sont l'esthétique (en particulier l'art contemporain) et la philosophie politique anglaise (Locke, Hume), sa spécialité étant la question de la violence sociale et de sa résolution dans l'espace politique démocratique.
Esthétique
modifierObservateur attentif de la scène artistique et de ses évolutions, Yves Michaud écrit de nombreux textes de catalogues consacrés aux artistes qu'il estime et défend depuis les années 1970, tel que Claude Viallat[5], Stéphane Bordarier[6], Joan Mitchell[7], conduit des interviews tel que celui de Sam Francis[8] ou encore les artistes femmes, tel que Monique Frydman, Agnès Thurnauer[9] ou Etel Adnan. Proche de la galerie Jean Fournier, il en défend les artistes et son esthétique abstraite. Dans le même temps il tente de présenter et de comprendre les débats face au rejet de l'art contemporain dans différents essais à partir de "La Crise de l'art contemporain"[10] publié en 1997 puis réédité en 2011. Il tente de saisir alors l'ensemble de la situation contemporaine[11] dans ce qu'il nomme la fin de l'esthétique du Grand Art dans «L'art, c'est bien fini». Essai sur l'hyper-esthétique et les atmosphères en 2021[12]. Il apparait alors en totale contradiction entre son action engagée auprès des artistes et les conclusions qu'il tire de ses observations[13]. Il est rédacteur en chef des Cahiers du Musée national d'art moderne du centre Georges-Pompidou de 1986 à 1990. Il dirige et a créé la collection Rayon Art aux éditions Jacqueline Chambon de 1988 à 2003 [14]. Il est nommé, par le ministre Jack Lang, directeur de l'Ecole Nationale d'Arts de Paris de 1989 à 1996[15].
Il est invité d'honneur du Festival international du livre d'art et du film de Perpignan en 2011[16],[17].
De plus, il est directeur de collection "Poésie" aux éditions Gallimard[3].
Sa collection de peintures a été déposée au musée de Ceret en 1997.
Engagements politiques
modifierSoucieux de mettre en pratique sa philosophie empirique, dans la tradition de Hume et de Locke dont il se réclame, il intervient dans le débat public sur les questions de violence faites aux enfants et aux femmes avec véhémence[18]. Républicain intransigeant, il est proche du parti socialiste, mais il déplore la médiocrité de ses dirigeants[19],[20],[21],[22]. Il se réclame d'une « gauche libertaire » et fut proche de François Hollande, qu'il décrit néanmoins comme « un pur opportuniste »[20]. Il tient alors également sur le site du quotidien Libération un blog intulé "Traverses", consacré à des questions de société et d'actualité[23]. Puis son blog migre vers la Revue Front Populaire de Michel Onfray, qu'il quitte finalement pour un blog indépendant : "Impressions-réflexions par Yves Michaud, réflexions à partir de ce que je lis, vois, rencontre, aime, déteste.[24]".
Marqué par les évènements de 2015, en 2017, il publie Citoyenneté et loyauté dont les propos sarcastiques sur l'immigration font polémique. Il déclare : «Le migrant est un touriste qui ne veut pas repartir - sauf le jour où il aura des papiers qui lui permettront de retourner dans son pays d'origine… comme vacancier» ; prend position sur les cités de banlieue, hors la loi ; sur l'accueil des réfugiés, les prisons, la déchéance de nationalité, le statut des binationaux, les largesses coupables de l’État-providence : «L’État de droit protège mieux ceux qui l'attaquent et le bafouent que ceux qu'il est censé protéger ». Enfin, il propose l'établissement d'une « peine de mort civile »[25].
Décorations
modifierPrincipales publications
modifierOuvrages
modifierYves Michaud est l'auteur d'une cinquantaine de livres dont :
- La Violence, Paris : PUF, 1973.
- Violence et politique, Gallimard, Paris,1978,réimpr. 1999
- Hume et la fin de la philosophie, PUF, Paris,1983 ; réimpr. 1999
- La Violence, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1986 ; nouv. éd. 1998
- Locke, 1986 ; réimpr. 1998
- Enseigner l'art ? : analyses et réflexions sur les écoles d'art, Nîmes, 1993 ; nouv. éd. 1999 (ISBN 2-87711-209-8)
- La Crise de l'art contemporain, 1997 ; réimpr. 2005
- Humain, inhumain, trop humain, 2001 ; nouv. éd. 2002
- Humain, inhumain, trop humain : réflexions philosophiques sur les biotechnologies, la vie et la conservation de soi à partir de l'œuvre de Peter Sloterdijk, suivi de Le Diable dans les détails, nouvelle éd. revue et augmentée, Paris, Climats, 2006
- Changements dans la violence : essai sur la bienveillance et sur la peur, 2002
- L'Art à l'état gazeux : essai sur le triomphe de l'esthétique, 2003
- Université de tous les savoirs : le renouvellement de l'observation dans les sciences, 2004
- Chirac dans le texte, la parole et l'impuissance, 2004
- Précis de recomposition politique : des incivismes à la française et de quelques manières d'y remédier, Paris, Climats, 2006
- L'Artiste et les Commissaires : quatre essais non pas sur l'art contemporain mais sur ceux qui s'en occupent, Paris, Hachette, 2007
- Qu'est-ce que le mérite ?, Bourin éditeur, 2009
- Face à la classe : Sur quelques manières d'enseigner (Avec Sébastien Clerc), Gallimard, coll. « Folio actuel (inédit) » (no 142), , 368 p. (ISBN 978-2-070-43931-7)
- Ibiza mon amour : enquête sur l'industrialisation du plaisir, Nil, , 351 p. (ISBN 2841115208)
- Le Nouveau Luxe, Stock, 2013 (ISBN 978-2-234-06478-2)
- Narcisse et ses avatars, Grasset et Fasquelle, 2014 (ISBN 978-2-246-81050-6)
- Contre la bienveillance, Stock, 2016 (ISBN 978-2234081185)
- Citoyenneté et loyauté, Kero, 2017 (ISBN 9782366582321)
- Parler de religion en classe (en collaboration avec Sébastien Clerc), Belin Éducation, coll. « Guide de l'enseignement », 2018 (ISBN 979-10-358-0216-5)
- Aux armes, citoyens, dialogue avec Denis Lafay, Acteurs de l'économie & Éditions de L'Aube, 2018 (ISBN 978-2-8159-2678-2)
- Ceci n'est pas une tulipe : Art, luxe et enlaidissement des villes, Fayard, 2020 (ISBN 978-2-2137-1690-9)
- « L'art c'est bien fini » : Essai sur l'hyper-esthétique des atmosphères, Gallimard, coll. « NRF essais » 2021 (ISBN 978-2-07-074998-0)
- Etel Adnan. Les anges, le brouillard, le Palais de la nuit, Gallimard, « Coll Art et Artistes», 2023 (ISBN 978-2-072997-273)
- Qu'est-ce que l'architecture ?, Gallimard, coll. « Folio actuel (inédit) » (no 709), , 418 p. (ISBN 978-2-072-98361-0)
Articles
modifierYves Michaud est l'auteur de plus de 200 articles et préfaces d'exposition.
- « Retours sur un projet inachevé », Perspective, 4 | 2007, 564-566 [mis en ligne le 31 mars 2018, consulté le 31 janvier 2022. URL : http://journals.openedition.org/perspective/3563 ; DOI : https://doi.org/10.4000/perspective.3563].
- Avec Éric Michaud, Michael R. Orwicz, Neil McWilliam et Laurence Bertrand Dorléac, « Art, État et idéologies aux XIXe et XXe siècles », Perspective, 1 | 2012, 41-55 [mis en ligne le 30 décembre 2013, consulté le 31 janvier 2022. URL : http://journals.openedition.org/perspective/484 ; DOI : https://doi.org/10.4000/perspective.484].
Notes et références
modifierNotes
modifier- ↑ À partir de 2001, une association est créée, UTLS-la suite, pour proposer gratuitement au grand public des conférences données par les plus grands scientifiques, chercheurs et intellectuels venus faire part de l’état de leurs recherches les plus actuelles. L'association est soutenue par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, le ministère de l’Éducation nationale ainsi que plusieurs régions : Île-de-France, Provence-Alpes-Côte d'Azur, Aquitaine, Bourgogne, Auvergne, Nord-Pas-de-Calais. L'association a cessé son activité le .
Références
modifier- ↑ in Erwan Desplanques et Jacques Morice, Yves Michaud : “La véritable audace, dans l’art aujourd’hui, c’est de passer à d’autres formes”, in Télérama, 20 mars 2009 a lire sur https://www.telerama.fr/scenes/yves-michaud-la-transgression-aujourd-hui-ne-va-pas-tres-loin-il-s-agit-d-une-audace-ritualisee-et-encadree,40623.php
- ↑ in Yves Michaud, variétés du déplacement, Le Monde, publié le 28 decembre 2005,Paris, a lire sur le monde.fr https://www.lemonde.fr/savoirs-et-connaissances/article/2005/12/28/yves-michaud-varietes-du-deplacement_725387_3328.html
- à lire sur https://www.canal-u.tv/intervenants/michaud-yves-027027678
- ↑ Voir sur labyrinthe.revues.org.
- ↑ in Cat. Claude Viallat, Peintures, Musée Sara Hilden, Suomi, Finland
- ↑ in Stéphane Bordarier: Peintures, 1996-2004 Actes Sud, Arles, 2006.
- ↑ in Joan Mitchell, Galerie Jean Fournier, Paris 1984
- ↑ in Yves Michaud, Mon art, mon métier, ma magie… Conversations avec Sam Francis, L'atelier Contemporain 2013
- ↑ in, Yves Michaud et Catherine Panchout, Les pionnières Tome 2 ; les authentiques, dans les ateliers d'artistes du XXIe siècle, Flammarion, Paris, 2020
- ↑ La crise de l'art contemporain, Utopie, démocratie et comédie, PUF 1997.
- ↑ inJérôme Glicenstein, « Yves Michaud, « L’Art, c’est bien fini », Essai sur l’hyper-esthétique et les atmosphères », Marges, 34, Paris, 2022, pp 190-191.
- ↑ «L'art, c'est bien fini». Essai sur l'hyper-esthétique et les atmosphères, Gallimard, Paris, 2021
- ↑ in Carole Talon-Hugon, Yves Michaud, « L’Art c’est bien fini ». Essai sur l’hyper-esthétique et les atmosphères, Paris, Gallimard, 2021, Nouvelle revue d'esthétique,Cairn, 16/12/2022 à lire sur https://doi.org/10.3917/nre.030.0167
- ↑ à voir la présentation d'Yves Michaud sur le site de l'atelier contemporain, https://www.editionslateliercontemporain.net/mot/yves-michaud-133
- ↑ in site de l'école des beaux-arts de Paris à lire sur https://www.enda.fr/intervenant/yves-michaud/
- ↑ « SOFIA, Dossier de presse FILAF 2012 »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?).
- ↑ « Une conversation avec Ferran Adrià, l'artiste du restaurant El Bulli », sur traverses.blogs.liberation.fr, .
- ↑ De 2003 à 2009, Yves Michaud a été, en compagnie de Max Gallo et de Jean-Louis Bourlanges, l'un des intervenants permanents de l'émission L'Esprit public, diffusée chaque dimanche matin sur France Culture et présentée par Philippe Meyer. Il y présentait un point de vue libéral. Il affirme au cours d'un interview en qu'il en aurait été congédié le en raison de ses prises de position dans l'affaire Polanski,Pauline Bock, « Pédocriminalité, inceste : le "marqueur" Finkielkraut », sur Arrêt sur images, (consulté le ).
- ↑ Il aurait signé en l'appel des intellectuels appelant à voter pour Ségolène RoyalAppel, dans le Nouvel Observateur, le .
- « Yves Michaud contre " la tyrannie des bons sentiments " » : entretien, parismatch.com, .
- ↑ « Des intellectuels appellent à voter Royal », La Dépêche du midi, .
- ↑ Yves Michaud : « Tout communautarisme va contre le contrat social », L.Express, ,ce qu'il démentira en 2018« Yves Michaud », sur Facebook.com (consulté le ).
- ↑ Voir sur traverses.blogs.liberation.f.
- ↑ à lire sur https://yvesmichaudblog.wordpress.com/
- ↑ Robert Maggiori, « Yves Michaud sonne l’alarme citoyenne », sur Libération (consulté le )
- ↑ Décret du 13 juillet 2009 portant promotion et nomination.
Voir aussi
modifierEntretiens
modifier- « Les sens des savoirs », entretien dans Labyrinthe, atelier interdisciplinaire, numéro 6, printemps-été 2000, p. 9-30
- Revue permanente de philosophie et politique, entretien sur trois de ces ouvrages, 2003
- « Traverses », blog sur le quotidien Libération
- L'heure bleue, « Ceci n'est pas une tulipe », France Inter,
Liens externes
modifier- Ressources relatives à la recherche :