Yves Simon (philosophe)

philosophe français
Yves Simon
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Voir et modifier les données sur Wikidata (à 58 ans)
South BendVoir et modifier les données sur Wikidata
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University of Notre Dame Archives (d)Voir et modifier les données sur Wikidata

Yves René Marie Simon, né le (Cherbourg, France), décédé le 11 mai 1961 à South Bend (Indiana, U.S.A) est un philosophe politique français, parfois qualifié de « philosophe de la France libre » en référence à son soutien à la Résistance sous le gouvernement de Vichy. Enseignant à Notre Dame University de South Bend dans l'Indiana aux États-Unis dès 1938, il développe une théorie du gouvernement démocratique sur la base des principes de la philosophie de Thomas d'Aquin[1].

Biographie modifier

Yves Simon est né à Cherbourg, dans une famille d'industriels spécialisés dans le machinisme agro-alimentaire[2]. Il est le plus jeune fils d'Auguste et de Blanche Berthe Porquet de la Ferronière. Auguste est directeur technique dans l'entreprise familiale et la famille vit dans une aisance matérielle certaine. En 1909, les deux plus vieux frères de Yves contractent la tuberculose. Le plus vieux des frères ne survivra pas; l'autre retrouvera la santé, mais passera de nombreuses années en sanatorium. Lorsqu'il se trouve capable de quitter le sanatorium, il va s'engager comme volontaire lors de la Première Guerre mondiale. Il y trouve la mort dans les combats.

En 1920, à 17 ans, Simon va étudier à Paris au Lycée Louis le Grand. Le programme comprend l'étude du latin, du grec, de la littérature française, de l'histoire et de la philosophie[3]. C'est à cette époque qu'il s'attache à la pensée philosophique. Au bout d'un an il abandonne le Lycée Louis le Grand, pour suivre des cours de philosophie à la Sorbonne et l'Institut Catholique de Paris. Simon obtient une Licence en Lettres de la Sorbonne en 1922 et un Diplôme d’Études Supérieures de Philosophie de l'Institut Catholique en 1923. À l'Institut Catholique, Simon rencontre l'éminent philosophe thomiste, Jacques Maritain, qui enseignait à l'Institut à cette époque. De Maritain, Simon apprend que la philosophie n'est pas “un simple exercice de culture”, mais doit être prise au sérieux en tant que recherche de la vérité et de la sagesse — une leçon que Simon retiendra. Simon et Maritain devinrent de grands amis et collègues. Yves Simon enseigne à l'Institut Catholique de Lille de 1930 à 1938. Il se marie à Paule Louise Dromard en 1930, de laquelle il aura 6 enfants. Il achève sa thèse sur l'ontologie de la connaissance en 1934 et la publie avec un ouvrage sur la connaissance morale. En 1938, sur les recommandations de Waldemar Gurian[4] et d'Étienne Gilson, il est engagé à l'Université Notre-Dame de South Bend (Indiana) aux États-Unis comme Visiting Professor. La survenue de la Seconde Guerre mondiale l'empêchant de rentrer en France, il reste à Notre-Dame jusqu'en 1948.

Cette année-là, il rejoint le Committee on Social Thought de l'Université de Chicago, université dans laquelle il reste comme professeur jusqu'à sa mort. Appelé au programme du Committee par John U. Nef, Mortimer Adler et le président de l'Université Robert Hutchins, il y rencontre John U. Nef, Mircea Eliade et Leo Strauss[5].

Yves Simon meurt prématurément le à South Bend (Indiana) des suites d'un cancer [6]. Il a laissé de nombreux documents inachevés, et nombre de ses publications ont été posthumes. Son fils Anthony O. Simon est devenu directeur de l'Institut Yves R. Simon, affecté à cette tâche. Les écrits laissés par Simon se trouvent actuellement à l'Université Notre-Dame[7].

Pensée modifier

Simon s'est intéressé à plusieurs disciplines, mais son activité intellectuelle s'est concentrée sur l'apport du thomisme ou de la tradition scolastique aux questions politiques. Par ailleurs, il était en 1955 l'un des nombreux contributeurs à la traduction de l'œuvre de Jean de Saint-Thomas (1589-1644) en anglais. Il faut noter que son ouvrage de référence, The Philosophy of Democratic Government, est un ouvrage issu d'une série de conférences données en Walgreen Lectures en 1948. Au printemps 1949, Leo Strauss prononça lui aussi des Walgreen Lectures publiées en 1953 sous le titre Natural Right and History. En , c'est au tour de Jacques Maritain d'être invité (ce qui donnera l'ouvrage Man and the State). En 1951, c'est Erich Voegelin qui donnera des conférences publiées ensuite sous le titre The New Science of Politics. Il est remarquable que le seul compte-rendu un peu étendu de La philosophie du gouvernement démocratique de Yves Simon soit dû à la plume de Leo Strauss[8].

Son nom reste attaché à son travail en philosophie morale et politique. Il défendait ainsi la position traditionnelle de Thomas d'Aquin sur l'action morale et les vertus. Grand défenseur de la thèse que le thomisme était compatible avec la démocratie libérale occidentale, il pensait que les Catholiques français avaient fait erreur en soutenant que la foi catholique supposait l'adhésion à la monarchie, à la manière de certains théoriciens proches de l'Action Française.

Bibliographie modifier

  • Yves Simon. Introduction à l'ontologie du connaitre. (Thèse). Paris. Desclée de Brouwer, 1934. (Dubuque, Iowa: William C. Brown Reprint Library, 1965). 232 pages.
  • Yves Simon. Critique de la connaissance morale. Paris: Desclée de Brouwer, 1934). 166 pages.
  • Yves Simon. La Campagne d’Éthiopie et la pensée politique française. Paris: Desclée de Brouwer, 1937. 128 pages.
  • Götz Briefs, Le prolétariat industriel. Traduit de l'allemand par Yves Simon. DDB, 1936.
  • Yves Simon. Trois Leçons sur le travail. Paris: Pierre Tequi, 1938. 72 pages.
  • Yves Simon. Nature and Functions of Authority. Milwaukee, Wisconsin: Marquette University Press, 1940. 75 pages.
  • Yves Simon (ed.), La civilisation américaine. Avant-propos de Yves R. Simon. Chapitres traduits par Yves Simon. Desclée de Brouwer, 1950. 270 pages.
  • Yves Simon, Philosophie du gouvernement démocratique ; traduction de l'américain par Clément Hubert ; préface de Florian Michel. Paris, Desclée de Brouwer, 2015. 365 pages. (ISBN 978-2-220-06705-6). Traduction de : Philosophy of Democratic Government. Chicago: University of Chicago Press, 1951; Phoenix Books, 1961. 324 pages.
  • Yves Simon. A General Theory of Authority. (Posthume). Notre Dame, Indiana: University of Notre Dame Press, 1962. IX, 167 pages.
  • Yves Simon. The Tradition of Natural Law: A Philosopher's Reflections. (Posthume). Edited by Vukan Kuic. (New York:' Fordham University Press, 1965). XXII; 194 pages.
  • Yves Simon, Freedom and Community. (Posthume). Edited by Charles P. O'Donnell. (New York: Fordham University Press, 1968). XXII, 201 pages.
  • Yves Simon. Freedom of Choice.(Posthume). Edited by Peter Wolff. (New York: Fordham University Press, 1969). XX, 167 pages.
  • Yves Simon. The Great Dialogue of Nature and Space. (Posthume). Edited by Gerald J. Dalcourt. (Albany, New York: Magi Books, 1970). XXII, 206 pages.
  • Yves Simon. Work, Society, and Culture. (Posthume). Edited by Vukan Kuic. (New York: Fordham University Press, 1971). XIV, 234 pages.
  • Bibliographie générale par Anthony O. Simon sur Persée. Source : Revue Philosophique de Louvain, 1969. N° 94, pp. 285-305.

Sur Yves Simon modifier

  • Jacques Maritain, Yves Simon, correspondances(1927-1940). T1. Tours, CLD Éditions. Édition de Florian Michel. 2008. 471 pages. (ISBN 978-2-85443-518-4).
  • Jacques Maritain, Yves Simon, correspondances(1941-1961). T2. Tours, CLD Éditions. Édition de Florian Michel. 2012. 573 pages.
  • Anthony O. Simon, Acquaintance with the Absolute. The Philosophy of Yves R. Simon. Fordham University Press, 1998.
  • Walter Nicgorsky. Yves Simon: A Philosopher's Quest for Science and Prudence. in Political Philosophy in the Twentieth Century: Authors and Arguments. Édité par Catherine H. Zuckert. Cambridge University Press, 2011.
  • Vukan Kuic. Yves R. Simon: Real Democracy. Roman & Littlefield, 1999. 168 pages.
  • Florian Michel, La pensée catholique en Amérique du Nord - Réseaux intellectuels et échanges culturels (1920-1960. Paris, Desclée de Brouwer, 2010. 630 pages. Spécialement le chapitre 4 : "la bataille de Chicago".
  • Florian Michel, « L’américanisation d’un intellectuel français : le cas d’Yves Simon (1903-1961) », in Transatlantica [En ligne], 1, 2014, mis en ligne le 02 , consulté le . Consultable sur Revues.org.

Notes et références modifier

  1. cf.Theory of Democratic Government, ouvrage originellement issu des conférences pour la CHARLES R. WALGREEN FOUNDATION et paru aux University of Chicago Press en 1951.
  2. L'entreprise familiale existe toujours et se trouve aujourd'hui à Equeurdreville sur la base navale de Cherbourg, après avoir déménagé de son siège historique situé dans le quartier du Maupas. Fondée en 1856 par Laurent SIMON, le grand-père de Yves Simon, elle a pris le nom de "SIMON Frères" en 1896. Lire l'historique de l'entreprise, ainsi que la page spécifique sur Wikimanche
  3. Il semble qu'il ait été un élève assez médiocre, en particulier en latin. Cf. Lettre de Simon à Maritain du 28/08/1932. Citée in Florian Michel, L’américanisation d’un intellectuel français : le cas d’Yves Simon (1903-1961), Transatlantica , 1 | 2014.
  4. Fondateur de la Review of Politics.
  5. Leo Strauss donnera un compte-rendu du livre de Simon, Philosophy of Democratic Government. Compte-rendu publié dans What is Political Philosophy ?
  6. McMorrow, G. J. "Yves Rene Marie Simon." New Catholic Encyclopedia, Gale, 2003. Consulté le 8 novembre 2017.
  7. « Yves R. Simon, 1903-1961. »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), Jacques Maritain Center
  8. Compte-rendu publié dans le recueil What is Political Philosophy ?. Traduction française, O. Sedeyn, P.U.F, 1992. Réédition, P.U.F. Quadrige, 2010

Liens externes modifier