Zkara

Tribu marocaine de l'Atlas (Moyen-Atlas) d'origine berbère zénète arabisée

Les Zkara ou Zakraoui ou Izkrawiyen (en berbère : Izkrawiyen ⵉⵣⴽⵔⴰⵡⵉⵢⵏ, Azakrawi ⴰⵣⴽⵔⴰⵡⵉ) sont une tribu d'origine berbère zénète de l'Atlas marocain, établie au nord-est du Maroc, dans la région de l'Oriental, à 25 km au sud-ouest d'Oujda, dans la commune de Mestferki, non loin de la frontière entre le Maroc et l'Algérie (Moyen-Atlas).

Cette tribu berbère est connue pour avoir été accusée à tort d'être anti-musulmane par un auteur français du nom d'Auguste Moulieras[1].

"Zakraoui" vient du berbère "Azakraw (ⴰⵣⴽⵔⴰⵡ)" qui signifie "Activisme"[2].

“Zkara” est le pluriel du mot berbère “Zakrawi”, qui vient du verbe “Zakraw” ou “Azakraw”. “Zakraw” signifie “~Activer (dans le sens de l'activisme)”, et “Zakrawi” signifie “Activiste”. C'est un mot très proche du verbe “Asakraw” ou “Sakraw”, qui signifie “Faire” en berbère. Pour dire “(Il) fait”, le mot “Sakraw” se conjugue en “Skar”. De la même manière, pour dire “(Il) active (dans le sens de l'activisme)” le mot “Zakraw” se conjugue “Zkar”. En arabe, le pluriel de “Zakrawi” a donné “Zkara”, et en berbère “Izkrawiyen”, qui signifie "Les Activistes”.

Il y a des synonymes du mot Zakrawi dans les langues berbères.

Il y a d'autres tribus au Maroc qui portent aussi le nom de Zkara, mais qui n'ont rien à voir avec cette tribu.

Histoire

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Carte ethnolinguistique du nord du Maroc, montrant le territoire historique des Zkara, au sud-ouest d'Oujda

Les Zkara souffraient auparavant d'une réputation de tribu berbère isolée et dure, en raison de rivalités ancestrales avec des tribus arabes voisines, mais aussi à la suite d'écrits colonialistes au début du XXe siècle visant à rallier le statut autonome des Zkara au protectorat français et à démontrer (à tort) qu'ils sont des berbères anti-musulmans. Ces rivalités dûes au mépris de la part des Berbères à l'égard des Arabes venants s'installer capricieusement sur leurs terres, en prenant comme pretexte l'Islam et leur reprochant leur non-arabisation, qui est prétendument perçue comme non-islamisation.

Plusieurs articles ont été écrits à cet effet en France et aux États-Unis sur cette tribu berbère à partir de 1905[3],[4], en particulier par un certain Auguste Moulieras, militaire français né en Algérie et écrivain fervent défenseur du colonialisme et de l'orientalisme, qui sera radié quelques années après la publication d'un écrit instrumentalisé sur les Zkara.

En 1907, les Zkara ont aussi combattu quelque peu la France, lors de la pacification du Maroc contre les forces coloniales françaises qui avaient repris l'occupation d'Oujda quelques années après la bataille d'Isly (1844) et après l'expédition contre les Beni-Snassen (1859).

Récemment un chercheur français a présenté une thèse[5] et plusieurs articles[6] sur les Zkara visant à rétablir la vérité sur leur histoire et l'instrumentalisation colonialiste établie à leur égard au début du XXe siècle.

Les Zkara organisent tous les ans leur Wahda ou Moussem à Mestferki (Région des Zkara – Atlas), qui est une fête populaire sur leurs terres, entourée de chants et de danses traditionnels (Ahidous, Fantasia et repas). Ils sont aujourd'hui majoritairement arabophones, ce qui prouve qu'ils sont musulmans.

Extrait du livre "Une tribu zénète anti-musulmane au Maroc : Les Zkara" de Auguste Mouliéras.

"Fatigués, harassés par une journée entière de lutte meurtrière, les soldats du Prophète soutinrent mollement le premier choc de ces troupes fraîches qui ne demandaient que plaies et bosses, heureuses qu'elles étaient de s'enivrer à leur tour de l'odeur de la poudre et de se désengourdir les bras en sabrant d'estoc et de taille. Il faut dire aussi que les Beni bou-Zeggou et les Beni-Yaâla, qui avaient été entraînés très à contrecœur dans cette aventure tragique, ne tenaient précisément pas à fusiller leurs concitoyens, les Ih'addouyin et les Meharech, qui venaient jusque sous leur barbe leur reprocher leur traîtrise envers leurs vieux amis et demi- frères les Zkara. Ce fut alors que la débandade des Musulmans commença, chacun tirant de son côté, chacun maugréant contre ses alliés, autant et peut-être plus que contre les Infidèles, lesquels, en somme, ne faisaient que leur devoir en essayant de ne pas se laisser exterminer. Le résultat de cette sanglante journée fut que les Mahométans eurent 220 hommes tués et un nombre considérable de blessés. Les Zkara déplorèrent la mort de 50 des leurs et ils emportèrent du champ de bataille plus de 200 blessés".

Langue et culture

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Les Zkara parlent l'arabe et le berbère zénète de l'Oriental marocain, un parler berbère proche du berbère rifain (Iznassen, Ikebdanen,etc...).

Les Zkara sont majoritairement musulmans, mais comme toute tribu berbère ont longtemps respecté des traditions ancestrales comme le tatouage berbère chez les femmes et ce jusqu'au milieu du XXe siècle.

Notes et références

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  1. « Une tribu zénète anti-musulmane au Maroc (les Zkara) », sur Gallica, (consulté le ).
  2. Recherche Google - Azkraw [1]
  3. S., « The Zkara, A Christian Tribe in Morocco », Bulletin of the American Geographical Society, vol. 36, no 6,‎ , p. 343–346 (ISSN 0190-5929, DOI 10.2307/198886, lire en ligne, consulté le )
  4. S., The Zkara, A Christian Tribe in Morocco, Bulletin of the American Geographical Society, (lire en ligne)
  5. Ariel Planeix, « L'instrumentalisation historiographique dans les processus de marginalisation des populations rurales au Maroc, le cas des Zkara », Maghreb et sciences sociales, "Marges, normes, éthique", (Ed. Karine Bennafla), IRMC Tunis/L'Harmattan Paris,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  6. Ariel Planeix, « L'"anti-islamisme" des Zkara au regard des situations coloniales et postcoloniales », F. Pouillon & J.C. Vatin, Après l'orientalisme, (Karthala),‎ (lire en ligne, consulté le ).

Bibliographie

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