Zone coréenne démilitarisée

Zone démilitarisée entre la Corée du Nord et la Corée du Sud

La zone coréenne démilitarisée, également désignée par le sigle DMZ (de l’anglais demilitarized zone ; en hangŭl : 한반도 비무장 지대 ; en hanja : 韓半島非武裝地帶, RR : Hanbando bimujang jidae), est une étroite bande de terre servant de zone tampon entre la Corée du Nord et la Corée du Sud, créée le lors de la signature de l’armistice de P'anmunjŏm.

Zone coréenne démilitarisée
Image illustrative de l’article Zone coréenne démilitarisée
La zone coréenne démilitarisée est en rouge et la ligne de démarcation militaire en gris. Il est indiqué les quatre tunnels d'agression découverts depuis 1974.

Lieu Péninsule coréenne
Type d’ouvrage Frontière fortifiée
Construction 1953
Architecte Drapeau de la Corée du Nord Corée du Nord
Drapeau de la Corée du Sud Corée du Sud
Longueur 248
Utilisation Depuis 1953
Contrôlé par Drapeau de la Corée du Nord Corée du Nord
Drapeau de la Corée du Sud Corée du Sud
Garnison Nord : Drapeau de la Corée du Nord Armée populaire de Corée

Sud : Drapeau de la Corée du Sud Forces armées de la république de Corée
Drapeau des États-Unis 2e division d'infanterie

Protection Toujours active
Coordonnées 38° 19′ 12″ nord, 127° 12′ 00″ est

Carte

C’est l'un des rares vestiges de la Guerre froide, équivalente à l’ancien rideau de fer.

D'une longueur de 248 km pour une largeur d'environ 4 km à cheval sur la frontière entre les deux pays, elle coupe la péninsule coréenne suivant approximativement le 38e parallèle qui formait la ligne de démarcation intercoréenne avant le conflit. Sa superficie est d'environ 1 000 kilomètres carrés, et elle est inhabitée. Elle est considérée comme un sanctuaire pour la préservation de certaines espèces.

Développement

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Origines

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La ligne a été tracée dès 1945, à la suite de la défaite du Japon[1].

La ligne se transformé progressivement en une ligne de démarcation fermée, puis en une véritable frontière durant l’été [2].

Deux entités étatiques se forment en 1948 : la République de Corée au sud le 15 août, puis la République démocratique populaire de Corée au nord le 9 septembre. Les oppositions se renforcent progressivement et aboutissent à un conflit armé, la guerre de Corée. Elle dure trois ans, du 25 juin 1950 au 27 juillet 1953[3].

Armistice de Panmunjom

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Un armistice est signé à Panmunjom à 1953[1]. Il prévoyait le retrait de toutes les troupes à deux kilomètres de chaque côté de la frontière[2].

Différent territorial

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Depuis 1973, la Corée du Nord rejette la ligne tracée par l'ONU car elle ne serait pas dans le prolongement du 38e parallèle[1].

Rapprochements entre les deux Corées

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Le , deux convois ferroviaires — l’un parti du Nord et l’autre du Sud — ont franchi pour la première fois depuis cinquante-six ans la zone coréenne démilitarisée[4].

Entre 2003 et 2016, l'autoroute Séoul/Kaesong permettait aux Sud-Coréens de traverser la frontière pour se rendre dans la zone industrielle de Kaesong, en Corée du Nord[1].

En , un sommet est organisé entre les deux dirigeants des deux Corées, le nord-coréen Kim Jong-un et le sud-coréen Moon Jae-in[1].

Reprise des tensions

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Après l'échec des discussions, la Corée du Nord annonce ne pas respecté l'accord de . Plusieurs chemins sont fermés et plusieurs barrières antichars sont installés au Nord[1].

Impact social et économique

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La circulation des civils est également restreinte dans un no man's land de plusieurs kilomètres de part et d’autre de la DMZ[5].

Les « villages de paix »

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Kijong-dong en Corée du Nord, vu de Corée du Sud

La Corée du Nord et la Corée du Sud maintiennent des villages de paix en vue de l'autre côté de la DMZ. Dans le Sud, est administré selon les termes de la DMZ. Les villageois sont classés comme citoyens de la république de Corée, mais sont exemptés du paiement des impôts et des autres obligations civiques, telles que le service militaire. Au nord, Kijong-dong présente une série de bâtiments et d'appartements en béton coulé peints de couleurs vives et à plusieurs étages avec éclairage électrique. Ces caractéristiques représentaient un niveau de luxe sans précédent pour les Nord-Coréens ruraux dans les années 1950. La ville était orientée de manière que les toits bleu vif et les côtés blancs des bâtiments soient les caractéristiques les plus visibles vues d'en haut. Cependant, sur la base d'un examen minutieux avec des lentilles télescopiques modernes, il a été affirmé que les bâtiments sont de simples structures en béton dépourvues de fenêtres en verre ou même de pièces intérieures, avec les lumières du bâtiment allumées et éteintes à des heures fixes et des trottoirs vides, balayés par une équipe squelettique de gardiens dans un effort pour préserver l'illusion de l'activité.

Le village de Daeseong-dong est interdit au public[6].

Économie

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Il existe l'aménagement de la zone industrielle de Kaesŏng. C'est un site industriel exploité en commun entre 2004 et en 2016, signe du réchauffement intercoréen. Depuis le refroidissement des relations, le site est actuellement en sommeil[2].

La zone démilitarisée fait l'objet d'un « tourisme mémoriel » autour du traumatisme de la séparation des deux Corée[3]. Des membres de familles séparées par la frontière accrochent par exemple des dessins, des drapeaux, des mots ou des prières sur des rubans sur les clôtures au Sud, et les vestiges d'une locomotive à vapeur détruite lors de la guerre de Corée est exposée[3].

Elle est également un lieu de « tourisme sombre (dark tourism en anglais, aussi appelé tourisme noir ou tourisme macabre) pour désigner une forme de tourisme qui s'y déploie et qui consiste à organiser la visite payante de lieux associés à la mort, à la souffrance, et parfois aux catastrophes (on parle aussi de disaster tourism) »[3],[7].

Environnement

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Malgré les mines, la zone démilitarisée est devenue un sanctuaire pour la conservation de plusieurs espèces animales, notamment d’oiseaux migrateurs[8],[9]. En période hivernale, des milliers de hérons et de grues blanches y séjournent[10] ; les associations de défense des animaux voudraient voir cet espace inscrit en zone protégée au patrimoine mondial de l’UNESCO[11].

La zone couvre 90 000 hectares et une grande diversité écologique. Un millier de plantes et de micro-organismes rares, 650 espèces de vertébrés, reptiles et amphibiens et 52 espèces de mammifères (chats sauvages, lynx, sangliers, cerfs d'eau, bouquetins et ours noirs) y sont dénombrés. Certaines sont en voie de disparition, comme une antilope (Amur goral). Plus de 200 espèces d'oiseaux s'y ébattent et, en hiver, des dizaines de milliers de grues viennent s'y reposer dans leur migration vers le Kyushu. Ces animaux sont protégés de l'homme - mais pas des mines[2].

Vues de la frontière

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Fortification de la frontière

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Description

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La zone fait 248 km de long pour 4 de large. La frontière s'étend jusqu'à la mer Jaune[1]. Au-delà, la zone de contrôle civil règlemente strictement la circulation et la présence des personnes civiles[2].

En , il est estimé qu'un million de mines auraient été posées[12].

Postes-frontières

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L’espace est couvert d’une épaisse forêt ponctuée de part et d’autre d’un chapelet continu de postes militaires particulièrement visible sur les photos aériennes. Il est truffé de souterrains, de batteries de canon, de kilomètres de barbelé, d'antennes et de miradors.

Tunnels d'agression

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Entre 1974 et 1990, les autorités sud-coréennes découvrirent l'existence de quatre tunnels creusés sous la frontière par les Nord-coréens. Ces tunnels ont été dénommés tunnels d'agression[13]. La zone démilitarisée pourrait en réalité en compter une vingtaine[14]. La partie sud-coréenne les appelle les tunnels de l'agression et ils sont aujourd'hui partiellement ouverts aux touristes[6].

Les autorités nord-coréennes dénoncent la construction d’un mur de division en béton, d’une hauteur de 5 à 8 m, dans la zone démilitarisée côté sud. Des déplacements sont organisés pour montrer ce mur de division aux visiteurs étrangers en Corée du Nord. Côté sud, des terrasses permettent aux touristes et aux Sud-Coréens d’observer la zone démilitarisée[10]. Du côté de la Corée du Sud, la DMZ est protégée par une zone tampon de dix kilomètres de profondeur dont l'accès est très réglementé[15].

Troupes frontalières

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La zone est surveillée par 700 000 soldats nord-coréens et 410 000 soldats sud-coréens[10] aidés par la 2e division d’infanterie des États-Unis, avec qui la Corée du Sud a signé un pacte de sécurité.

Traversées de la frontière

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Joint Security Area

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Des soldats nord-coréens dans la zone, au nord de la frontière.

Le seul point de passage existant sur cette frontière est constitué par la Joint Security Area, placée sous contrôle de l'ONU. Il se trouve dans la DMZ, près de la côte ouest de la péninsule, Panmunjeom est le seul lien entre la Corée du Nord et la Corée du Sud[1].

Soldats américains et sud-coréens dans la zone, au sud de la frontière.

Le site est contrôlé par l'ONU[1].

Des franchissements très rares

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Le , un train Korail a traversé la zone démilitarisée au nord sur la nouvelle ligne Donghae Bukbu construite sur la côte est de la Corée. Cependant, la résurrection de cette ligne a été de courte durée, puisqu'elle s'est refermée en à la suite d'un incident au cours duquel un touriste sud-coréen a été tué par balle.

Les et ainsi que le , des soldats nord-coréens font défection et fuient vers le sud en traversant la DMZ. Le premier () est blessé par des tirs provenant de l'armée nord-coréenne[16].

Le vers 21 h 20 (heure locale), un individu venant du Sud a franchi la DMZ vers le Nord, il s'agirait d'une personne venue de Corée du Nord en 2020 selon un représentant du ministère de la Défense de la Corée du Sud[17],[18].

La gare de Dorasan est la seule gare frontalière avec des voies en état de marche entre les deux Corées[6].

Traversées illégales

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La zone démilitarisée est parfois médiatisée lors de défections (par exemple de soldats nord-coréens qui fuient pour rejoindre le sud)[3],[2].

Il a aussi des intrusions accidentelles[19].

Dans la culture populaire

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La Zone coréenne démilitarisée apparaît dans certaines œuvres de fiction :

  • dans le jeu de tir à la première personne World War 3, il est possible de jouer sur la carte nommée "DMZ". Celle-ci reprend l'architecture principale des bâtiments de la zone de sécurité commune de manière assez fidèle tout en prenant quelques libertés nécessaires au gameplay. Cette carte est apparue dans la saison 1 du passe de combat qui comprenait également une apparence d'opérateur inspirée des gardes sud-coréens présents sur le site.
  • le film coréen JSA de Park Chan-wook met en scène un incident diplomatique dans la zone démilitarisée ;
  • la zone démilitarisée est une partie importante de l'intrigue du film de la série James Bond Meurs un autre jour de Lee Tamahori ;
  • dans le film La Chute de la Maison-Blanche d'Antoine Fuqua, des terroristes nord-coréens exigent le retrait des troupes américaines hors de la zone démilitarisée ;
  • dans le roman Envoyée spéciale de Jean Echenoz, les protagonistes traversent la DMZ pour fuir la Corée du Nord ;
  • dans la série Crash Landing on You, l’héroïne atterrit par accident dans la partie nord-coréenne de la zone démilitarisée.
  • dans la bande dessinée Buck Danny, album 49 La Nuit du serpent de Francis Bergèse met en scène un piège et l'exfiltration d'un pilote américain par les tunnels sous la DMZ.

Notes et références

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(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Korean Demilitarized Zone » (voir la liste des auteurs).
  1. a b c d e f g h et i Par l’édition du soir, « À quoi ressemble cette « zone démilitarisée » au cœur de nouvelles tensions entre les deux Corées ? - Edition du soir Ouest-France - 21/06/2024 », sur Ouest-France.fr, (consulté le )
  2. a b c d e et f AXE 1 frontière coréeenne DMZ VERSION COMPLETEE
  3. a b c d et e Hugo Mazzero et Leila Oulkebous, « Visites organisées de la zone démilitarisée entre les deux Corées : un exemple de "tourisme sombre" », sur Géoconfluences, (consulté le )
  4. Dépêche de l'agence Reuters, reproduite sur le site de « l'Express »
  5. « Les effets du TGV sur l’aménagement du territoire sud-coréen » par Marie-Hélène Fabre, DATAR.
  6. a b et c « Zone démilitarisée (DMZ), Corée du Sud - tout ce qu'il faut savoir », sur www.cestee.fr (consulté le )
  7. (en) Young Hoon Kim et Nelson A. Barber, « Tourist’s destination image, place dimensions, and engagement: the Korean Demilitarized Zone (DMZ) and dark tourism », Current Issues in Tourism, vol. 25, no 17,‎ , p. 2751–2769 (ISSN 1368-3500 et 1747-7603, DOI 10.1080/13683500.2021.1991896, lire en ligne, consulté le )
  8. (en) Korea's DMZ a rare chance for conservation, ABC Science Online, 21 juin 2000
  9. @NatGeoFrance, « Loin des regards, la biodiversité prospère à la frontière des deux Corées », sur National Geographic, (consulté le )
  10. a b et c « Ces murs qui divisent », Le Point, 10 janvier 2008, p. 50
  11. Analyse du professeur Hiroyoshi Higuchi de l’université de Tokyo
  12. par Alexandre Kerbellec, « Visiter la Zone Démilitarisée (DMZ) de Corée – Nihonkara », (consulté le )
  13. (en) « Inside North Korea's Third Tunnel of Aggression » (consulté le ).
  14. (en) « Korea Demilitarized Zone Incidents », sur Global Security (consulté le ).
  15. Philippe Pons, Le Monde, « Et au milieu passe une frontière », 27 avril 2018 p. 12
  16. « Corée du Nord : un nouveau soldat rejoint le Sud par la zone démilitarisée », Le Figaro,‎ (lire en ligne, consulté le )
  17. « Corée du Nord : une personne est entrée clandestinement depuis le Sud », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  18. « Corées : l'homme passé clandestinement du sud au nord serait un ex-transfuge, selon Séoul », RTL,‎ (lire en ligne, consulté le )
  19. « À la Une en Asie - Pourquoi les tensions montent dans la zone démilitarisée entre les deux Corées », sur RFI, (consulté le )

Annexes

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Articles connexes

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Bibliographie

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  • Alexendra Novosseloff et Franck Neisse, Des murs entre les hommes, éditions La Documentation française, 2007.
  • Alexandra Novosseloff, « Des murs du XXe siècle, entre enfermement et repli sur soi : les nouvelles fractures de la mondialisation », Diplomatie magazine, no 41,‎ , p. 31-36.
  • Valérie Gelézeau, « Le mur coréen et les mots pour dire la Corée : de la frontière spatiale à la "méta-nation" », Raison présente, Nouvelles Éditions Rationalistes, 2017, Un monde emmuré, p. 21-31.
  • Valérie Gelézeau, « La frontière coréenne et le « problème » nord-coréen », Critique, nos 848-849,‎ 2018/ 1-2, p. 64-74

Liens externes

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