Émile Meyer

peintre français

Émile Meyer (1858-1914) est un peintre français[1] qui fait partie des artistes ayant exprimé leur art à Montmartre[2]. Il est l’élève de Jules-Élie Delaunay, de Pierre Puvis de Chavannes, de Jean-Jacques Henner, de Jean-Georges Vibert et d'Émile Lévy.

Émile Meyer
Naissance
Décès
(à 55 ans)
Bâle (Suisse)
Activité
Artiste peintre
Maître
Parentèle
Fils d'Alfred Meyer ; Neveu d'Henry Meyer ; Frère de Georges Meyer ; Cousin d'Emmanuel Samson

Biographie modifier

Émile Meyer naît le 22 février 1858 à Montmartre[3], au 24 rue de l’Impératrice[note 1], dans une famille d'artistes d'origine alsacienne[4]. Sa mère Joséphine Boulony est originaire de Haute-Saône et son père, Alfred Meyer, parisien, est peintre, émailleur-céramiste d'art à la Manufacture de Sèvres. Emile est le troisième enfant[note 2] d'une fratrie de dix, parmi lesquels Georges Meyer, qui deviendra peintre également.

Le jeune Émile bénéficie dans sa famille d'un environnement artistique de tout premier ordre. Il est initié dès l'enfance aux arts graphiques par son père, mais également par ses oncles Émile Meyer et Jacques (dit Henri Meyer), respectivement lithographe et illustrateur. Son grand-père Bernard Meyer, dessinateur sur étoffes, et son grand-oncle Emmanuel Meyer (1817-1878), dessinateur également, sont tous deux originaires de Mulhouse, réputé pour ses fabriques d'impression sur étoffes.

La famille quitte Paris et s'installe à Sèvres, où Henri, le frère jumeau d'Émile Meyer, décède en bas âge en 1860. L'enfance d'Émile se déroule au 76 Grande Rue, à Sèvres. En 1870 éclate la guerre franco-allemande, suivie de la Commune en 1871[note 3]. En 1872, Émile et sa famille s'installent à Paris au pied de la butte Montmartre, au 44 rue de Dunkerque, puis dès 1874, au numéro 57 de cette même rue[5], dans l’immeuble d’en face,

Encouragé par ses proches, Émile étudie la peinture auprès d'artistes réputés, Jules-Élie Delaunay, Pierre Puvis de Chavannes, Jean-Jacques Henner, Jean-Georges Vibert[6], et Émile Lévy[7]. Dès ses premiers pas dans la peinture, le jeune Émile exprime un talent vite identifié et reconnu par ses maîtres qui le préparent au concours de l'Ecole des beaux-arts. À l'issue de ce concours, il obtient en 1874 une pension annuelle de 1 200 francs. Celle-ci, octroyée par la banque Fould, lui sera versée durant cinq ans[8]. Il peint cette année-là une toile prometteuse intitulée Cupidon et son reflet. Il a alors seize ans.

En 1880, il expose pour la première fois au Salon des artistes français ses toiles L'amour et la folie, et Portrait de Me M[9]. Tout en continuant de résider chez ses parents, il est incorporé à Blois, au 31ème régiment d’infanterie de ligne. Lorsqu'en 1881 ses parents quittent Paris et viennent s'installer à Nogent-sur-Marne, l'atelier du 57 rue de Dunkerque reste dans la famille, car Émile et son jeune frère Georges y poursuivent leur activité de peintre. Émile peint alors en 1882 Chez Macquart[10], en 1884 M. le marquis de T.[11], et en 1885 La Grande Toilette[12], et Portrait de M. le comte P.[13].

En 1887, en visite chez ses parents, Émile pose son chevalet sur les bords de Marne et peint L'abreuvoir à Nogent-sur-Marne[14]. L'année suivante, il peint Portrait de « Stuart », vainqueur du Derby et du Grand Prix de Paris en 1888[15]. En 1889, il collabore à l'ouvrage paru chez l'éditeur Savine, La Grande Janic, de Madame Paria Korigan. Sous ce pseudonyme se cache le nom de l'épouse de son professeur, le peintre Émile Lévy[note 4].

Émile Meyer reçoit en 1891 du Salon des artistes français une Mention Honorable[16]. Vers 1895, il peint son tableau La Lettre, une œuvre mettant en scène un cardinal lisant une lettre sous l'œil amusé d'un confrère cardinal. Les paysages bretons inspirent Émile qui présente lors de l'Exposition de 1896, du 1er au 5 octobre, son tableau En Bretagne[17], qu’il avait peint deux ans plus tôt. Dans le cadre de l'Exposition Universelle de 1900, il participe à l'exposition décennale des beaux-arts de 1889 à 1900, en présentant une aquarelle intitulée La Daumont de M. le Président de la République[18]. Il reçoit à nouveau à cette occasion une Mention Honorable[19].

En 1905, il réside au 51 rue Caulaincourt à Montmartre, auprès de son frère Georges qui demeure au 61. Son cousin Emmanuel Samson, peintre-sculpteur animalier, rejoindra également ce quartier si prisé des grands noms de la peinture au lendemain de la Grande Guerre.

Durant plusieurs années de production prolifique, il peint notamment son tableau Un grand artiste[note 5], ainsi que de nombreuses toiles reconnues, dont notamment, parmi les plus célèbres : Connaisseur et Cardinal lisant[20], confirmant son goût pour des représentations mettant en scène des cardinaux. En reconnaissance de son talent, il est nommé Officier d’Académie[19]. Son travail est réputé, et s’attire les commentaires flatteurs des critiques d’art[note 6].

Émile Meyer décède à l’occasion d’un séjour en Suisse, au début de l’année 1914. Le journal quotidien L'Homme libre annonce dans son édition du 6 février 1914 : « Nous apprenons la mort du peintre Émile Meyer à l'âge de cinquante-cinq ans. M. Meyer était membre de la commission de restauration des musées nationaux. Il est décédé subitement à Bâle, la semaine dernière. »

Principales œuvres modifier

  • L'amour et la folie, et Portrait de Me M. (1880)
  • Portrait de Me J. Ch. (1881)
  • Chez Macquart (1882)
  • En prairie : chevaux de l'écurie de M. le Comte Potocki ; Portrait de M. Bernard L. (1883)
  • M. le marquis de T. ; Une stalle des écuries de M. le Comte Potocki (1884)
  • La Grande Toilette, Portrait de M. le Comte P. (1885)
  • Le saut de la rivière : concours hippique de Paris 1885 ; Portrait de M. Jules C. (pastel) ; Portrait de Mlle Marie-Renée B. (pastel) (1886)
  • L'abreuvoir à Nogent-sur-Marne ; Portrait de Me. L. (pastel) ; Portrait de Mme L. (pastel) (1887)
  • Dormeuse (pastel) ; Intérieur d'écurie (étude) ; Portrait de « Stuart », vainqueur du Derby et du Grand Prix de Paris en 1888 (1888)
  • Manège montant le sable sur la falaise à Sainte-Adresse, au Havre (1890)
  • La toilette de « Gandin » (1891)
  • En Bretagne (1894)
  • La Lettre
  • Un rouage parisien (1895)
  • La Poule au pot ; Portrait du commandant de La Garenne, officier d'ordonnance du président de la République (1896)
  • Un grand artiste
  • Connaisseur
  • Cardinal lisant

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. La rue de l'Impératrice est une voie de l'ancienne commune de Montmartre. Elle a d'abord été renommée rue Lalande, puis dans un second temps, a été incorporée à la rue Lambert dans le dix-huitième arrondissement de Paris.
  2. Après avoir donné naissance à deux filles, Joséphine Boulony met au monde Émile et son frère jumeau Henri Meyer.
  3. Pendant cette période troublée, l'adolescent voit son père Alfred Meyer se distinguer en organisant la préservation d'œuvres d'art menacées, en particulier celles de la Manufacture de Sèvres, et prend alors pleinement conscience de l'importance de la conservation des œuvres d'art.
  4. Le Journal amusant du 14 décembre 1889 relate : « Un charmant volume, La Grande Janic, vient de paraître chez l'éditeur Savine. C'est une œuvre nouvelle de Madame Paria Korigan, qui cache sous ce pseudonyme le nom du célèbre peintre Émile Lévy, dont elle est la femme […]. La Grande Janic et La Famille Kérouadic complètent cette attachante série, qu'enrichissent de jolies illustrations d'Émile Levy et d'Émile Meyer. »
  5. Le Journal des salons de la Société des artistes français du 30 avril 1905, page 5, dans la rubrique La peinture-Scènes de Genre, publie les lignes suivantes : « Je ne puis faire rentrer dans les scènes religieuses les tableaux où des cardinaux jouent des rôles. Ce sont des vaudevilles où la robe rouge a été employée pour sa note éclatante, exactement comme on place un homard cuit dans une nature morte. La malice vient s'ajouter à la couleur, et la plupart de nos peintres voient les cardinaux comme des personnages comiques. Ainsi, M. Émile Meyer, avec Un grand artiste, représente le cardinal-peintre qui se recule pour juger de l'effet de son tableau et qui semble très satisfait pendant qu'un autre cardinal s'extasie. »
  6. En 1911, le critique d’art Louis Vauxcelles évoque Émile Meyer, « le plus compétent des membres de la Commission de restauration des musées nationaux », dans sa Chronique d’Art extraite du journal L'Aéro, organe hebdomadaire de la locomotion aérienne du 8 janvier 1911, page 4 : « Le peintre Émile Meyer, qui portraiture les chevaux avec une habileté non pareille, et qui vous campe un portait équestre - voir celui du commandant de La Garenne - avec une surprenante maestria. Et ses tableaux de genre sont, eux aussi, faits avec une conscience et une minutie dont peu d'artistes sont capables. En outre, Émile Meyer est un savant chimiste. Je ne crains point d'affirmer que s'il n'est pas et tant s'en faut, le meilleur peintre de la capitale, il en est le meilleur, il en est un des plus forts techniciens. Sur tous les problèmes de pratique picturale, glacis, frottis, jus, pâte et demi-pâte, c'est un oracle, souvent consulté par les plus huppés de ses confrères. »

Références modifier

  1. Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs - Paris - Édition : 1939 - Auteur : Bénézit Emmanuel (1854-1920)
  2. Le Dictionnaires des peintres à Montmartre : peintres, sculpteurs, graveurs, dessinateurs, illustrateurs, plasticiens au XIXe et XXe siècles - Éditeur : André Roussard - 1er janvier 1999
  3. Paris, État civil reconstitué, vue 39/51.
  4. L'Industriel Alsacien - Journal de l'Industrie, du Commerce et de l'Agriculture - 17 décembre 1857
  5. Archives de Paris - Fonds Coutot : Paris et sa région - Liste électorale (Paris, France) - 1891
  6. Catalogue de la trente-troisième exposition municipale des beaux arts ouverte au musée de Rouen - 1er janvier 1893
  7. Base Salon 1673-1914 - Musée d'Orsay
  8. La Petite Presse - Journal quotidien - Rédacteur en Chef : Balathier Bragelonne - 13 décembre 1874, page 3
  9. Le Dictionnaire Véron, ou mémorial de l’art et des artistes de mon temps, par Théodore Véron, 1er janvier 1880, page 430, présente sa toile Le Portrait de Me M. comme : « Un portrait à la physionomie pâle et mélancolique, et tourné de trois quarts. »
  10. Le Dictionnaire Véron du 1er janvier 1882, page 268, écrit à propos de son tableau Chez Macquart : « […] nous présente un intérieur d'atelier d'équarisseur où un homme armé d'un marteau se prépare à assommer un pauvre cheval blanc ayant les yeux bandés. Un autre cheval est déjà étendu mort, au premier plan, au milieu d'une mare de sang. Cette scène hideuse est cependant reproduite avec talent. »
  11. Le Dictionnaire Véron du 1er janvier 1884, page 254, dépeint son tableau M. le marquis de T. en ces termes : « […] fait, en ce moment de la haute école, sur son pur-sang bai, qui avance la jambe droite en cadence, et dont la gauche de derrière suit le même mouvement. Ce beau cavalier, en redingote noire et pantalon bleu avec liséré or ou bande militaire, porte la moustache et s'enlève jusqu'au buste, ainsi que l'intelligente tête de son cheval, sur un beau ciel aux nuages à flocons blonds et ensoleillés, et le reste du corps se détache sur la prairie et sur l'étang où reflète l'azur du ciel. Ce portrait équestre est plein de charme et de style. »
  12. Le Dictionnaire Véron du 1er janvier 1885, page 336, présente sa toile La Grande Toilette de la façon suivante : « […] commence à ennuyer ce pauvre cheval, que trois palefreniers sont en train de laver à grande eau avec leurs éponges. On lui savonne les sabots, on le brosse au chien, et ce n'est pas tout, voici venir un autre seau d'eau pour rincer le pauvre animal qui hennit et voudrait mordre et couper la longe ou bride qui le retient. Anecdote d'écurie, bien présentée.»
  13. Le Dictionnaire Véron du 1er janvier 1885, page 336, présente sa toile Portrait de M. le comte P. de la façon suivante : « […] fait de la haute école, avec son alezan de trois-quart et avançant sa belle jambe droite dans un rythme plein de style. Les traits de M. le comte P. nous échappent à cette hauteur ; mais en revanche, nous admirons ce tableau et groupe équestre s'enlevant en lumière assez vive et tendre sur le sous-bois délicat. Il y a du mérite en cette œuvre de talent. »
  14. Catalogue de l'exposition de la société des amis des arts du département de la Somme - 1887, page 54
  15. Extrait de La Jeune Garde du 9 juin 1889 : « Émile Meyer prend, dès maintenant, une place importante parmi les bons animaliers ; le Portrait de « Stuart », vainqueur du Derby et du Grand Prix en 1888 est une savante étude de cheval. »
  16. Explication des ouvrages de peinture et dessins, sculpture, architecture et gravure des artistes vivants - 1er janvier 1893 - Salon des artistes français
  17. Exposition de 1896 du 1er au 5 octobre sous le patronage de M. le Maire de la Ville du Havre : explications des ouvrages de peinture, sculpture, dessins, gravures et faïences des artistes vivants exposés dans la galerie du musée - Société des amis des arts du Havre - Éditeur : impr. du journal Le Havre (1896)
  18. Le Patriote des Pyrénées du 31 mars 1898 rapporte : « Je ne dirai rien de l'aquarelle de M. Émile Meyer : ce pauvre M. Félix a l'air de revenir de la séance de réception de M. Hanotaux ; ça lui a coupé les jambes comme on dit ; il en est cul-de-jatte, ma parole, posé sur la banquette, et Montjarret à cheval semble bien mécontent. Il y a de quoi. ».
  19. a et b Annuaire de la Curiosité et des Beaux-Arts : Paris, départements, étranger - 1er janvier 1912, page 367
  20. Dans le Journal des artistes du 11 mars 1906, figure sous le titre Aux aquarellistes français, l’article suivant : « Lorsqu'un artiste a touché le succès sur un effet heureux, il est rare qu'on ne l'y confine à perpétuité [...] L'aquarelle à l'œuf d'Émile Meyer, le disciple, je dirais presque le préparateur de Vibert, le bon chimiste-peintre technicien de la couleur, est digne du maître dont il n'a pas oublié les cardinaux qui firent la joie des délicats de la fin du second empire. »