Étoile symbiotique
Une étoile (variable) symbiotique, ou plutôt un système d'étoiles symbiotiques, est un système binaire composé d'étoiles dont la luminosité varie. Leur cycle de vie les fait passer par une phase semblable à une nova très lente (accroissement de la luminosité de 9 à 11 magnitudes)[1] durant quelques dizaines d'années avant de revenir à leur luminosité initiale.
Ce type de système présente un transfert de matière de l'une des composantes à l'autre, par vent stellaire ou éjection coronale. Il est composé d'une géante rouge de type Mira et d'une naine blanche.
C'est la proximité et la masse de ces étoiles qui les classent comme étant symbiotiques.
Exemples d'étoiles symbiotiques : V1016 Cygni, HM Sagittae et RR Telescopii.
Présentation générale
modifierUne étoile symbiotique est une système binaire[2],[3],[4] en interaction[5],[6],[7]. La composante froide du système est une étoile évoluée[3] de type spectral tardif[3],[4], à savoir une géante[2] rouge-jaune ou une variable de type Mira[4]. Sa composante chaude est un objet compact : il s'agit le plus souvent d'une naine blanche[2],[4] et, plus rarement, d'une étoile à neutrons[8]. Leur interaction mutuelle, par des mécanismes d'accrétion, est à l'origine de leur spectre électromagnétique complexe qui est enregistré à toutes les longueurs d'onde, de celle des ondes radio à celle rayons X[2]. L'objet compact accrète une fraction du vent stellaire de la géante[4]. L'accrétion augmente la température et la luminosité du vent stellaire neutre qui s'ionise, donnant naissance à une nébuleuse dite symbiotique[4].
Désignation
modifierLes étoiles symbiotiques sont ainsi désignées à la suite de l'astronome américain Paul W. Merrill (-)[9],[10],[11],[12] : en , lors d'une conférence de l'Association américaine d'astronomie, il présente un article sur l'étoile BF Cygni qu'il qualifie de « symbotic star » (« étoile symbiotique ») afin de souligner la coexistence apparemment impossible de deux spectres, l'une correspondant à un objet très chauds et l'autre à un objet très froid[9].
Critères
modifierLes critères suivants sont retenus afin de classer un objet comme étoile symbiotique[13] :
- la présence de bandes d'absorption caractéristiques d'une étoile géante de type tardif, telles TiO, H2O, CO, CN, VO ;
- la présence de fortes raies d'émission HI et HeI ainsi que des raies d'émission d'ions dont le potentiel d'ionisation est supérieur à 35 eV ;
- la présence de lignes à 6 825 Å, même si aucune caractéristique de l'étoile froide n'est trouvée.
Classifications
modifierIl existe plusieurs classifications des étoiles symbiotiques.
Types D et S
modifierL'astronome australienne B. Louise Webster (-) et David A. Allen ont proposé l'une d'elles en [14],[15],[16]. Elle divise les étoiles symbiotiques en deux types : S et D[14],[15]. Une symbiotique de type D présente un excès d'infrarouge dû à la poussière[14],[15]. Elle consiste en un système binaire dont la composante froide est une étoile géante rouge, variable de type Mira, thermiquement pulsée[14],[15]. Elle présente, dans le proche infrarouge, une grande variabilité liée à la période de la Mira[14],[15]. Une symbiotique de type S présente un continu stellaire froid[14],[15]. Elle consiste en un système binaire dont la composante froide est un étoile géante rouge normale[15]. Elle ne présente qu'une faible variabilité voire pas de variabilité[14]. En , Allen a proposé d'ajouter un troisième type : D'. Les étoiles symbiotiques de type D' sont celles qui présentent de la poussière et dont le donneur est une étoile géante froide de type spectral F (« jaune-blanc ») ou G (« jaune »)[15].
Types α, β et δ
modifierUne symbiotique de type α (« alpha ») émet des rayons X superdoux. L'énergie des photons est inférieure à 1 keV. L'émission provient probablement de la surface de la combustion de la naine blanche dans un état quasi stationnaire.
Une symbiotique de type β (« bêta ») émet des rayons X mous. L'énergie maximale des photons est inférieure à 2 keV. L'émission provient probablement de la collision des vents : celui de la geant rouge et celui de la naine blanche
Une symbiotique de type δ (« delta ») émet des rayons X durs fortement absorbés. L'énergie maximale des photons est supérieures à 3 keV. L'émission pourrait provenir de la couche limite.
Une symbiotique de type β / δ présente les deux comportements β et δ[17].
Histoire
modifierL'étoile Z Andromedae semble être la première dont le caractère symbiotique a été observé[12]. Le Catalogue Henry Draper note son type spectral particulier[12]. En , l'astronome canadien Harry Hemley Plaskett (-) la décrit comme ayant un spectre composite, stellaire et nébulaire[12],[18]. En , les astronomes américains Paul W. Merrill et Milton L. Humason (-) rapportent qu'un petit nombre d'étoiles — R Aquarii, T Coronae Borealis, CI Cygni, RW Hydrae et AX Persei — présentent un spectre combinant celui d'une étoile[N 1] et celui d'une nébuleuse [N 2],[12],[19]. En , se tient le premier colloque de l'Union astronomique internationale dédié aux étoiles symbiotiques[20],[21]. En , l'astronome David A. Allen (-) en publie le premier catalogue[12],[20],[22].
Notes et références
modifierNotes
modifierRéférences
modifier- ↑ Bryan, Greg L. et Kwok, Sun, « Energy distributions of symbiotic novae », The Astrophysical Journal, vol. 368, , p. 252–260 (DOI 10.1086/169688, Bibcode 1991ApJ...368..252B)
- Contini, Angeloni et Rafanelli 2009, sec. 1, p. 759.
- Marchiano et al. 2023, résumé, p. 1.
- Sekeráš et Skopal 2015, sec. 1, p. 1, col. 1.
- ↑ Gutiérrez‐Moreno, Moreno et Costa 1999, sec. 1, p. 571, col. 1.
- ↑ Merc, Gális et Wolf 2019, résumé, p. 598.
- ↑ Skopal et Cariková 2015, sec. 1, p. 1, col. 1.
- ↑ Marchiano et al. 2023, sec. 1, p. 1.
- Gutiérrez-Moreno 1988, sec. 2, p. 13.
- ↑ Kwok 1984, p. 66, col. 2.
- ↑ Lucy et al. 2024, sec. 1, p. 2, col. 2.
- Luthardt 1992, sec. 1, p. 38.
- ↑ Mathew et al. 2017, p. 2.
- Kamath et Ashok 1999, sec. 1, p. 199, col. 1.
- Stoyanov et al. 2020, sec. 1, p. 1462, col. 1.
- ↑ Webster et Allen 1975.
- ↑ Wetuski et al. 2021, sec. 1, p. 5619, col. 2.
- ↑ Plaskett 1928.
- ↑ Merrill et Humason 1932.
- Gutiérrez-Moreno 1988, sec. 1, p. 12.
- ↑ Friedjung et Viotti 1982.
- ↑ Allen 1984.
Voir aussi
modifierBibliographie
modifier- [Contini, Angeloni et Rafanelli 2009] (en) M Contini, R. Angeloni et P. Rafanelli, « The symbiotic star CH Cygni : the broad Lyα emission line explained by shocks », Astronomy & Astrophysics, vol. 496, no 3, , p. 759-763 (OCLC 8675251025, DOI 10.1051/0004-6361/20079283, Bibcode 2009A&A...496..759C, arXiv 0807.1473, S2CID 56153067, lire en ligne
[PDF]).
- [Gutiérrez-Moreno 1988] (en) Adelina Gutiérrez-Moreno, « Planetary nebulae and symbiotic stars », ASP conference series, vol. 1, , p. 12-21 (Bibcode 1988ASPC....1...12G, lire en ligne
[PDF]).
- [Gutiérrez‐Moreno, Moreno et Costa 1999] (en) A. Gutiérrez‐Moreno, H. Moreno et E. Costa, « Spectroscopic observations of some S‐type symbiotic stars », Publications of the Astronomical Society of the Pacific, vol. 111, no 759, , p. 571-586 (OCLC 9975155116, DOI 10.1086/316357, JSTOR 10.1086/316357, Bibcode 1999PASP..111..571G, S2CID 250791570, lire en ligne
[PDF]).
- [Haït 2022] Jean-François Haït, « Étoiles symbiotiques : un destin explosif », La Recherche, no 569, (lire en ligne
).
- [Kogure et Leung 2007] (en) Tomokazu Kogure et Kam-Ching Leung, The astrophysics of emission-line stars, New York, Springer, coll. « Astrophysics and space science library » (no 342), (réimpr. ), 1re éd., XIV-537 p., 15,5 × 23,5 cm (ISBN 978-0-387-34500-0 et 978-1-4419-2236-6, EAN 9780387345000, OCLC 470647663, BNF 41092500, DOI 10.1007/978-0-387-68995-1, Bibcode 2007ASSL..342.....K, S2CID 118514209, SUDOC 116783699, présentation en ligne, lire en ligne).
- [Kamath et Ashok 1999] (en) U. S. Kamath et N. M. Ashok, « JHK photometry of symbiotic stars », Astronomy and Astrophysics Supplement Series, vol. 135, no 2, , p. 199-202 (OCLC 8675419052, DOI 10.1051/aas:1999171, Bibcode 1999A&AS..135..199K, S2CID 53137098, lire en ligne
[PDF]).
- [Kwok 1984] (en) Sun Kwok, « A star that has risen from the dead », Astronomy, vol. 12, no 8, , p. 66-70 (lire en ligne
[PDF]).
- [Lucy et al. 2024] (en) A. B. Lucy, J. L. Sokoloski, G. J. M. Luna, K. Mukai, N. E. Nuñez, D. A. H. Buckley, H. Breytenbach, B. Paul, S. B. Potter, R. Manick, D. A. Howell, C. Wolf et C. A. Onken, « A new way to find symbiotic stars : accretion disc detection with optical survey photometry », arXiv, , p. 1-34 (OCLC 1515666847, DOI 10.48550/arXiv.2412.00855, Bibcode 2024arXiv241200855L, HAL hal-04843896, S2CID 274436287, lire en ligne
[PDF]).
- [Luthardt 1992] (en) R. Luthardt, « Symbiotic stars », Reviews in Modern Astronomy, vol. 5, , p. 38-57 (DOI 10.1007/978-3-642-77543-7_4, Bibcode 1992RvMA....5...38L, lire en ligne
[PDF]).
- [Mathew et al. 2017] (en) Blesson Mathew, Warren A. Reid, R. E. Mennickent et D. P. K. Banerjee, « Discovery of a possible symbiotic binary in the Large Magellanic Cloud », Research Notes of the American Astronomical Society, vol. 1, no 1, , art. no 23, 4 p. (OCLC 7243270069, DOI 10.3847/2515-5172/aa9bed, Bibcode 2017RNAAS...1...23M, arXiv 1711.09205, S2CID 119390663, lire en ligne
[PDF]).
- [Merc, Gális et Wolf 2019] (en) Jaroslav Merc, Rudolf Gális et Marek Wolf, « New online database of symbiotic variables : symbiotics in X-rays », Astronomische Nachrichten, vol. 340, no 7, , p. 598-606 (OCLC 8297498216, DOI 10.1002/asna.201913662, Bibcode 2019AN....340..598M, S2CID 209946912).
- [Marchiano et al. 2023] (en) Paula Esther Marchiano, María Laura Arias, Michaela Kraus, Michalis Kourniotis, Andrea Fabiana Torres, Lydia Sonia Cidale et Marcelo Borges Fernandes, « A mini atlas of H-band spectra of southern symbiotic stars », Galaxies, vol. 11, no 4, , art. no 80, 12 p. (OCLC 9915413518, DOI 10.3390/galaxies11040080, Bibcode 2023Galax..11...80M, S2CID 197860538, lire en ligne
[PDF]).
- [Munari 2019] (en) Ulisse Munari, « The symbiotic stars », Cambridge Astrophysical Series, vol. 54, , p. 77-91 (DOI 10.1017/9781108553070.008, Bibcode 1909.01389).
- [Sekeráš et Skopal 2015] (en) Matej Sekeráš et Augustin Skopal, « Mass-loss rate by the Mira in the symbiotic binary V1016 Cygni from Raman scattering », The Astrophysical Journal, vol. 812, no 2, , art. no 162, 8 p. (OCLC 9092224959, DOI 10.1088/0004-637X/812/2/162, Bibcode 2015ApJ...812..162S, arXiv 1510.08356, S2CID 118383477, lire en ligne
[PDF]).
- [Skopal et Cariková 2015] (en) Augustin Skopal et Zuzana Cariková, « Wind mass transfer in S-type symbiotic binaries, I : focusing by the wind compression model », Astronomy & Astrophysics, vol. 573, , art. no A8, 5 p. (OCLC 8675260692, DOI 0.1051/0004-6361/201424779, Bibcode 2015A&A...573A...8S, arXiv 1410.7674, S2CID 260663884, lire en ligne
[PDF]).
- [Stoyanov et al. 2020] (en) K. A. Stoyanov, K Iłkiewicz, G. J. M. Luna, J. Mikołajewska, K. Mukai, J. Martí, G. Latev, S. Boeva et R. K. Zamanov, « Optical spectroscopy and X-ray observations of the D-type symbiotic star EF Aql », Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, vol. 495, no 1, , p. 1461-1467 (DOI 10.1093/mnras/staa1310, Bibcode 8874719233, arXiv 2005.03379, S2CID 218537893, lire en ligne
[PDF]).
- [Wetuski et al. 2021] (en) Joshua Wetuski, R. I. Hynes, T. J. Maccarone, C. Heinke, M. A. P. Torres, P. G. Jonker Christopher, T. Britt, D. Steeghs et G. Nelemans, « X-ray observations of two candidate symbiotic binaries in the galactic bulge », Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, vol. 506, no 4, , p. 5619-5628 (DOI 10.1093/mnras/stab2139, lire en ligne
[PDF]).
Publications historiques
modifier- [Friedjung et Viotti 1982] (en) Michael Friedjung et Roberto Viotti (éd. et préf.), The nature of symbiotic stars (actes du 70e colloque de l'Union astronomique internationale, tenu à l'Observatoire de Haute-Provence du au ), Dordrecht, Boston et Londres, D. Reidel, coll. « Astrophysics and space science library » (no 95), (réimpr. ), 1re éd., XIX-310 p., 17 × 24,4 cm (ISBN 978-90-277-1422-0 et 978-94-009-7836-2, EAN 9789027714220, OCLC 8305532, DOI 10.1007/978-94-009-7834-8, Bibcode 1982ASSL...95.....F, S2CID 123872917, SUDOC 024563781, présentation en ligne).
- [Merrill et Humason 1932] (en) Paul W. Merrill et Milton L. Humason, « Bright line of ionized helium, λ4686, in three stellar spectra with titanium bands », Publications of the Astronomical Society of the Pacific, vol. 44, no 257, , p. 56 (OCLC 9975286777, DOI 10.1086/124191, Bibcode 1932PASP...44...56M, lire en ligne
[PDF]).
- [Merrill 1958] (en) Paul W. Merrill, « Symbiosis in astronomy : introductory report », dans Étoiles à raies d'émission (actes du VIIIe colloque international d'astrophysique, tenu à Liège du au ), Liège, université de Liège, coll. « Congrès et colloques » (no 7), , 1re éd., 518-[9] p. (OCLC 489945039, SUDOC 012814199), p. 436-448 (Bibcode : 1958LIACo...8..436M, lire en ligne
[PDF]).
- [Webster et Allen 1975] (en) B. Louise Webster et David A. Allen, « Symbiotic stars and dust », Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, vol. 171, no 1, , p. 171-180 (OCLC 8092087160, DOI 10.1093/mnras/171.1.171, Bibcode 1975MNRAS.171..171W, S2CID 120418421, lire en ligne
[PDF]).
- [Plaskett 1928] (en) Plaskett, « The composite stellar and nebular spectrum of Z Andromedae », Publications of the Dominion Astrophysical Observatory Victoria, vol. 4, , p. 119-160 (OCLC 1014598067, DOI 1928PDAO....4..119P).
Catalogues
modifier- [Allen 1984] (en) David A. Allen, « A catalogue of symbiotic stars », Publications of the Astronomical Society of Australia, vol. 5, no 3, , p. 369-421 (OCLC 8272361368, DOI 10.1017/S1323358000017215, Bibcode 1984PASA....5..369A, S2CID 116916027, résumé, lire en ligne
[PDF]) — recherche sur la base de données Simbad du Centre de données astronomiques de Strasbourg.
- [Belczyński et al. 2000] (en) K. Belczyński, J. Mikołajewska, U. Munari, R. J. Ivison et M. Friedjung, « A catalogue of symbiotic stars », Astronomy and Astrophysics Supplement Series, vol. 146, no 3, , p. 407-435 (OCLC 8675280118, DOI 10.1051/aas:2000280, Bibcode 2000A&AS..146..407B, arXiv astro-ph/0005547, S2CID 119372406, résumé, lire en ligne
[PDF]) — recherche sur la base de données Simbad du Centre de données astronomiques de Strasbourg.
Articles connexes
modifierLiens externes
modifier- (en) « symbiotic binary stars », IVOA Vocabulary : unified astronomy thesaurus (IVOA rendering), IOVA, .
- (en) « symbiotic star », notice d'autorité no 20110810110006689, Oxford Reference, OUP.
- Les étoiles symbiotiques sur http://www.cosmovisions.com