Conflit sociocognitif

Le conflit sociocognitif peut se définir selon Willem Doise et Gabriel Mugny comme « la confrontation entre des avis divergents qui est constructive dans l’interaction sociale »[1]. C’est avant tout un conflit cognitif provoquant un déséquilibre cognitif pour résoudre un problème. Selon Jean-Pierre Astolfi, « le conflit cognitif se développe lorsqu’apparaît, chez un individu, une contradiction ou une incompatibilité entre ses idées, ses représentations et ses actions »[2].

Le conflit sociocognitif est un élément moteur des théories psychosociales et sociocognitives de l'apprentissage et du développement. C’est un concept fondamental du courant socioconstructiviste « néopiagétien » représenté par Lev Vygotski et Jerome Bruner qui soutient que les apprentissages se font par les expériences, les découvertes mais aussi et surtout par les interactions sociales. Il apparaitrait vers 7-8 ans, lors du stade appelé « les opérations concrètes » de Jean Piaget, lorsque les enfants sont capables de procéder à des opérations mentales de plus en plus complexes, et par conséquent de se confronter à un problème dans le cadre de l’interaction sociale.

Les apports du conflit sociocognitif sur les apprentissages sont abordés par Philippe Carré et Pierre Caspar, qui considèrent : « que l’interaction sociale favoriserait globalement les apprentissages »[3]. Pour Anne-Nelly Perret-Clermont, « c’est essentiellement l’interaction sociale qui est en mesure de générer l’évolution de l’apprenant »[4]. D’après les travaux de Roger Mucchielli, « les individus participant à un travail de groupe apprennent davantage que les individus à capacité égale travaillants seuls »[5]. Aussi, le conflit sociocognitif permettrait de favoriser la dynamique de groupe, d’améliorer le sentiment d’auto-efficacité, de renforcer l’implication et in fine, d’impacter la dimension conative de l’individu.

Cependant le conflit sociocognitif peut être inefficace lorsque « les relations sont asymétriques, lorsque les décisions sont unilatérales, lorsqu’un leader est imposé ou lorsque la communication n’est pas possible »[6]. Aussi, d’après Alamsa, J.F. (1995)[Qui ?], les conflits sociocognitifs seraient moins bien identifiés et traités lorsqu’ils ont lieu entre l’enseignant et les apprenants. L’approche des dysfonctionnements cognitifs, quelle que soit leur origine — acquise, développementale ou dégénérative — influence nécessairement le processus du conflit sociocognitif et sa portée.

Références modifier

  1. Willem Doise et Gabriel Mugny, Le développement social de l'intelligence, FeniXX réédition numérique, (ISBN 978-2-402-12726-4, lire en ligne)
  2. Jean-Pierre Astolfi, Eliane Darot et Yvette Ginsburger-Vogel, Mots-clés de la didactique des sciences: repères, définitions, bibliographies, De Boeck Université, (ISBN 978-2-8041-2556-1, lire en ligne)
  3. Philippe Carré et Pierre Caspar, Traité des sciences et des techniques de la formation, Dunod, (ISBN 978-2-10-076543-0, lire en ligne)
  4. Anne-Nelly Perret-Clermont, La construction de l'intelligence dans l'interaction sociale, P. Lang, (ISBN 978-3-906758-23-7, lire en ligne)
  5. Roger Mucchielli, Les méthodes actives: dans la pédagogie des adultes, ESF sciences humaines., (ISBN 978-2-7101-4155-6, lire en ligne)
  6. Buch, C., Darnon, C., Quiamzade, A., Mugny, G., Butera, F., « Régulation des conflits sociocognitifs et apprentissage », Revue Française de pédagogie (n°163),‎ , pages 105-125