Domingo de Soto

théologien dominicain espagnol
Domingo de Soto
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Confessor of the King of Spain (d)
Charles Quint
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Domingo de Soto (né en 1494 à Ségovie - † à Salamanque) était un théologien dominicain espagnol du XVIe siècle, qui fut également philosophe et juriste, et est considéré comme l'un des grands humanistes espagnols. Il fait partie de la célèbre École de Salamanque.

Biographie modifier

Fils d'un jardinier de Ségovie, Domingo de Soto fréquente d’abord la Faculté des Arts de l'Université d'Alcalá de Henares (1513-16), à l’époque encore dominée par l’humanisme érasmien, enseigné notamment par Thomas de Villeneuve, puis poursuit ses études de théologie au Collège de Coqueret de Paris sous l’autorité de John Mair (1516-19), où il fit l’expérience des disputes entre nominalistes et humanistes. De retour à Alcala en 1520, il prononça ses vœux dans l'Ordre des Frères Prêcheurs en 1525 et en 1532 prit le poste de professeur de théologie à l'Université de Salamanque. Il suivit les orientations de saint Thomas d'Aquin et commenta divers livres de physique et de logique aristotélicienne. L’originalité de ses premiers commentaires philosophiques n’a été soulignée que récemment. On y perçoit encore l’influence de l’humanisme et du nominalisme parisien, tout en étant intégré à une vision du monde réaliste. Son cours de philosophie comporte quatre volumes : des Summulae (Burgos, 1529), un commentaire logique In dialecticam Aristotelis (Salamanque, 1554), In Isagoge Porphyrii, Aristotelis Categorias (Venise, 1587) et un De Demonstratione (Salamanque, 1543), et des Quaestiones in Libros Physicorum (Salamanque, 1545 ; 1572). William Wallace a récemment souligné à quel point ce cours de physique était original : Soto fut en effet le premier à utiliser l’exemple d’un corps en chute et d’un projectile pour illustrer un mouvement uniformiter difformis et réviser la doctrine du livre VII de la Physique, environ 80 années avant Galilée[1].

En 1545, Charles Quint l'envoya comme théologien impérial au Concile de Trente, et le choisit ensuite comme confesseur (1548), prenant désormais résidence à Vienne. Au Concile de Soto défendit la doctrine thomiste de la justification contre Lancelotto Politi, et développa ses propres écrits sur la liberté humaine et la Grâce divine (considérant les deux comme constitutifs de l’agir du Chrétien, en accordant cependant à la grâce un prius naturae), de sorte que le mérite humain ne puisse pas lui être conforme (contre la doctrine du meritum de congruo, défendue à l’époque par le franciscain Andrés de Vega). De retour en Espagne, de Soto refusa de devenir évêque de Ségovie, préférant reprendre sa chaire de théologie à l'Université de Salamanque, qu'il occupa effectivement de 1550 à sa mort.

Excellent philosophe et bon connaisseur des questions de l'Amérique, Domingo de Soto participa aux débats relatifs à la dispute ouverte entre Sepúlveda et Las Casas au sujet de la question indigène, connue sous le nom de Justes titres ou Polémique des naturels, et fit partie de la commission de théologiens qui se réunit à Valladolid en 1550-1551 (Controverse de Valladolid). C’est de ces débats que nait son De iustitia et iure libri X (Lyon 1559 ; 1582, qui connut une immense diffusion avec plus de 27 éditions), dans lequel Soto affirme qu’on n’est pas lié à une loi à laquelle on n’aurait pas donné son assentiment rationnel. En 1552, il accède à la catédra de prima de Salamanque en succession de Melchor Cano, qu’il occupe jusqu’à sa mort en 1560. C’est de cette époque que date son commentaire du Quatrième Livre de Sentences de Pierre Lombard (Medina del Campo, 1579 ; Venise, 1569 ; Douai, 1613). Malgré son poids institutionnel, il ne put empêcher l’emprisonnement pour cause d’hérésie de son frère d’ordre et ami Bartolomé Carranza. Il eut de nombreux élèves à Salamanque, le plus connu étant Domingo Báñez qui renouvela largement la pratique des commentaires de saint Thomas.

On le considère comme un des membres de l'École de Salamanque. Ses œuvres ont joui d’une grande diffusion, étant encore rééditées au XVIIe siècle, notamment par le dominicain Cosme de Lerma.

Œuvres modifier

De iustitia et iure, 1568.

Parmi ses nombreuses œuvres de théologie, de droit, de philosophie et de logique, on doit signaler en priorité :

  • « De dominio », (Salamanque, 1534);
  • « De justitia et jure » (De la Justice et du Droit), (Salamanque, 1556);
  • « Ad Sanctum Concilium Tridentinum de natura et gratia libri tres », (Venise, 1547);
  • « Summulae », (Burgos, 1529);
  • « In dialecticam Aristotelis commentarii », (Salamanque, 1544);
  • « An liceat civitates infidelium », (Salamanque, 1553);
  • « De ratione tegendi et detegendi secretum », (Salamanque, 1541);
  • « In quartum Sententiarum », (Salamanque, 1557).

Postérité modifier

Avec Francisco de Vitoria, Domingo de Soto est l'un des grands représentants de l'humanisme espagnol. Francisco de Vitoria et Domingo de Soto sont souvent cités comme des références en matière de questions théologiques et juridiques. Après avoir été négligés pendant plus d'un siècle, on a redécouvert la richesse de ces philosophes et de ces humanistes.

Annexes modifier

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Notes modifier

  1. (en) William A. Wallace, « The Enigma of Domingo de Soto : Uniformiter difformis and Falling Bodies in Late Medieval Physics », Isis, vol. 59,‎ , p. 384-401 (JSTOR 228489),(es) William A. Wallace, « El enigma de Domingo de Soto », Studium, vol. 16,‎ , p. 343-367,(en) William A. Wallace, Prelude to Galileo : Essays on Medieval and Sixteenth-Century Sources of Galileo's Thought, Dordrecht, ,(en) William A. Wallace, « Domingo de Soto's Law of Motion : Text and Context », dans Edith Sylla et Michael McVaugh, Texts and Contexts in Ancient and Medieval Science. Studies on the occasion of John E. Murdoch's seventeenth Birthday, Leiden, Brill, ,(en) William A. Wallace, Domingo de Soto and the Early Galileo. Essays on intellectual history, Aldershot, Ashgate,

Bibliographie modifier

  • Decock, W. (2016), Domingo de Soto: De iustitia et iure (1553-1554). In: S. Dauchy et al. (eds.), The Formation and Transmission of Western Legal Culture. 150 Books that Made the Law in the Age of Printing, 2016, 84-86
  • Pierre Duhem, Dominique Soto et la Scolastique parisienne in Études sur Léonard de Vinci (1909, rééd. 1984), vol. III, chap. XV, Librairie Scientifique A. Hermann et fils, Paris. (ISBN 2-903928-12-6)
  • Pierre Dugas, Histoire de la mécanique (1956), éd. du Griffon, Neufchâtel, Suisse (ISBN 0-486-65632-2)
  • William A. Wallace, The Enigma of Domingo de Soto : Uniformiter difformis and Falling Bodies in Late Medieval Physics, Article dans la revue Isis, Vol. 59, No. 4 (Hiver, 1968), pp. 384-401
  • Santiago Orrego Sánchez, La actualidad del ser en la « Primera Escuela » de Salamanca - con lecciones inéditas de Vitoria, Soto y Cano (L'actualité de l'Être dans la « Première École » de Salamanque - Avec des leçons inédites de Francisco de Vitoria, Domingo de Soto et Melchor Cano), Collection de Pensée médiévale et de la Renaissance, 515 pp., Eunsa, Université de Navarre, Pampelune, 2004 (ISBN 84-313-2173-3)
  • Duhem Pierre. Dominique Soto et la scolastique parisienne. In: Bulletin Hispanique, tome 12, n°3, 1910. pp. 275-302. DOI : 10.3406/hispa.1910.1656 lire en ligne
  • Pierre Eyt, « Histoire et controverse antiluthérienne : Dominique Soto (1495-1560) », ans Bulletin de littérature ecclésiastique, 1967, tome 68, no 2, p. 81-106 (lire en ligne)

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