Emmanuel-Théodose de La Tour d'Auvergne (cardinal)

Emmanuel-Théodose de La Tour d'Auvergne, cardinal de Bouillon ( - ) fut d'abord prieur de Turenne et de Paunat, puis nommé abbé de Beaulieu en 1658 dont il se démet en 1664 après avoir réuni l'abbaye avec la congrégation de Saint-Maur. Il devient en 1683 abbé de Cluny et cardinal avec le titre de cardinal-prêtre au titre de San Lorenzo in Panisperna (1670-1676) puis cardinal-évêque d'Albano, de Porto e Santa Rufina puis d'Ostie.

Emmanuel-Théodose de La Tour d'Auvergne
Image illustrative de l’article Emmanuel-Théodose de La Tour d'Auvergne (cardinal)
Le cardinal de Bouillon, Hyacinthe Rigaud (1659–1743), 1707, musée Hyacinthe-Rigaud, Perpignan.
Biographie
Nom de naissance Emmanuel-Theódose de la Tour d’Auvergne de Bouillon
Naissance
Château de Turenne
Père Frédéric Maurice de La Tour d'Auvergne-Bouillon
Mère Éléonore de Bergh
Décès (à 71 ans)
Rome
Cardinal de l'Église catholique
Créé
cardinal

Par le pape Clément IX
Titre cardinalice Cardinal-prêtre de S. Lorenzo in Panisperna
Cardinal-prêtre de S. Pietro in Vincoli
Cardinal-évêque d' Albano
Cardinal-évêque de Porto e Santa Rufina
Cardinal-évêque d' Ostie-Velletri
Évêque de l'Église catholique
Ordination épiscopale
Par le card. Flavio Chigi
Abbé de Cluny
Autres fonctions
Fonction religieuse
Grand aumônier de France

(en) Notice sur www.catholic-hierarchy.org

Biographie

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Issu de la Maison de la Tour d'Auvergne, il est le fils de Frédéric Maurice de La Tour d'Auvergne, duc de Bouillon, prince de Sedan, et de son épouse, Eléonore de Bergh.

Son père, Frédéric-Maurice de La Tour d'Auvergne, renonce à la principauté de Sedan rattachée à la France en 1642, à la suite de la conjuration de Cinq-Mars.

Sa famille garde, à Paris, les privilèges des princes étrangers.

Une série de gravures conservées à la Bibliothèque nationale de France rappelle les événements auxquels il a été associé. En 1679, il célèbre à Fontainebleau le mariage de Marie-Louise d'Orléans et Charles II d'Espagne. En 1680, il célèbre à Châlons le mariage de Louis de France (1661-1711) et de Marie-Anne de Bavière. Devenu cardinal, il ondoye à Versailles le petit-fils de Louis XIV, Philippe V d'Espagne.

Le cardinal, en disgrâce, subit des années d'exil. Il décide de passer à l'ennemi lors de la guerre de succession d'Espagne, en 1710. Bien que le cardinal s'explique de son attitude dans une lettre où il semble suivre la procédure de diffidatio médiévale, il fut néanmoins poursuivi pour félonie et condamné à la confiscation de tous ses biens et fonctions. Sur le plan symbolique, le jugement s'attaque à ses ancêtres les plus importants : à Cluny, les travaux sur le tombeau du couple ducal défunt furent interrompus, les statues de Guillaume le Pieux et de Godefroy de Bouillon détruites. Un tableau qui représentait le projet définitif fut même « totalement lavé, effacé et déchiré ». Les statues du duc Frédéric Maurice et de sa femme sont également retirées, mais remises au duc régnant, ainsi que leurs sarcophages. À la basilique de Saint-Denis, des armes et des devises familiales figurant sur le tombeau de Turenne, qui avaient été apposées à l’insu et contre la volonté du Roi, furent enlevées. Enfin, le Parlement de Paris retira au duc Godefroy Maurice le rang de prince étranger, et interdit à la famille de se prévaloir d’aucune ascendance de comtes auvergnats ni de ducs aquitains, mais qu’elle devait de surcroît renoncer au complément de nom « d’Auvergne » et au blason correspondant. Les titres des Bouillon furent effacés des registres ecclésiastiques. Comme l'écrit Martin Wrede, « Il est difficile d’imaginer des mesures plus drastiques : pas de perte de biens matériels mais sur le plan social, à travers le capital symbolique, un prince souverain issu de la plus ancienne lignée généalogique de toute la chrétienté était redevenu un obscur seigneur »[1].

Il fait appel à Pierre Le Gros le jeune pour édifier un Monument de Frédéric Maurice de La Tour, duc de Bouillon, et de la duchesse de Bouillon, ses parents, que Le Gros finit à Rome avant 1707. Arrivé à l'abbaye de Cluny en 1709, le tombeau n'y fut pas installé, car le cardinal avait grossièrement insulté le Roi-Soleil et avait été déclaré félon. Au temps de la démolition de l'abbaye (pendant la révolution), les sculptures encore en caisses, furent sauvées par l'intervention d'Alexandre Lenoir, qui les voulait pour son Musée des monuments français. Les figures principales et le Bas-relief d'une bataille se trouvent aujourd'hui à l'Hôtel-Dieu de Cluny[2]. Ces pièces de sculpture sont classées monument historique depuis un arrêté du 17 juin 1901[3],[4].

Hyacinthe Rigaud a réalisé son portrait entre 1707 et 1709[5]. Cette oeuvre de très grande taille (2,74 m X 2,17 m) est visible au Musée Hyacinthe Rigaud de Perpignan[6].

Emmanuel-Théodose de La Tour d'Auvergne, créé cardinal par le pape Clément IX le , cumulait les fonctions d'abbé de Cluny, de Saint-Ouen de Rouen, de Saint-Vaast d'Arras, de Saint-Martin de Pontoise, de Saint-Philibert de Tournus (1660), de Saint-Pierre de Beaujeu, de Vicogne.

Après avoir été évêque d'Ostie, il fut fait le évêque d'Albano.

Il fut grand aumônier de France de 1671 à 1700.

Écartelé : au 1, d’azur semé de fleurs de lys d’or à la tour d’argent brochant qui est La Tour ; au 2, d’or aux trois tourteaux de gueules, qui est Boulogne, au 3, coticé d’or et de gueules qui est Turenne ; au 4, de gueules à la fasce d’argent qui est Bouillon ; sur le tout d’or au gonfanon de gueules frangé de sinople Auvergne.[7]

Notes et références

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  1. Martin Wrede, « Autonomie nobiliaire, mémoire familiale et pouvoir du souverain sous Louis XIV », Revue historique, 2013/3 (n° 667), p.  575-600.
  2. L. Lex - P. Martin, Le Mausolée du duc de Bouillon à Cluny (Saöne et Loire), Paris, Plon, , 14 p. (lire en ligne)
  3. Brigitte Fromaget, « Monument funéraire : mausolée de Frédéric Maurice de La Tour d'Auvergne, duc de Bouillon, et d'Eléonore de Bergh, son épouse », sur pop.culture.gouv.fr (consulté le )
  4. Béatrice de Chancel-Bardelot, « Mausolée de la Maison de Bouillon », sur agorha.inha.fr, (consulté le )
  5. Signé et daté 1709 sur le cadre
  6. Stephan Perreau, « Emmanuel Théodose de La Tour d'Auvergne », sur hyacinthe-rigaud.com (consulté le )
  7. Popoff 1996, p. 50.

Annexes

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Bibliographie générale

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  • Charles Loriquet, Le cardinal de Bouillon, Baluze, Mabillon et Théodore Ruinart dans l’affaire de l’histoire générale de la Maison d’Auvergne, Reims, 1870
  • B. Fillon, « Benoît Audran. Compte de la gravure du mausolée des ducs de Bouillon (1709) et billet d’enterrement de sa femme () », dans Nouvelles archives de l’art français, 1872, p. 296-300.
  • Arthur de Boislisle et Jules Guiffrey, « La statue de Turenne et le mausolée des ducs de Bouillon à Cluny (1704-1707) », dans Nouvelles archives de l’art français, deuxième série, 1882, tome III, p. 339-348.
  • L. Lex et P. Martin, « Le mausolée du duc de Bouillon à Cluny », dans Réunion des sociétés des beaux-arts des départements, 1890, p. 474-483.
  • G. Guigue, « Nouvelles pièces sur le mausolée de la maison de Bouillon préparé pour être érigé dans l’abbaye de Cluny (1710) », dans Nouvelles archives de l’art français, troisième série, tome VI, 1890, p. 321-343.
  • A. Castan, « Le sculpteur Pierre Legros deuxième du nom et le mausolée de la maison de Bouillon à Cluny », dans Réunion des sociétés des beaux-arts des départements, 1891, p. 370-386.
  • Félix Reyssié, Le cardinal de Bouillon (1643-1715), Paris, 1899.
  • Arthur de Boislisle, « La désertion du cardinal de Bouillon », dans Revue des questions historiques, tome LXXXIV, 1908, p. 420-471 et tome LXXXV, 1909, p. 61-107 et p. 444-491.
  • Louis Lefèvre, « Le cardinal de Bouillon à Saint-Martin de Pontoise », dans Mémoires de la Société historique du Vexin, tome XL, 1930, p. 69-96.
  • M. J. Harvey, « Death and Dynasty in the Bouillon Tomb Commissions », dans Art Bulletin, , 74, p. 272-296.
  • Jean Thévenet, « Le cardinal de Bouillon, enfant de Turenne, rebelle de Louis XIV », dans Lemouzi, , no 129, p. 33-45.
  • Marguerite Guély, « De la gloire de Turenne à la disgrâce du cardinal de Bouillon, son neveu (1675-1711) ou le rôle des mausolées dans l’histoire des vicomtes de Turenne, ducs de Bouillon », dans Nécropoles, cimetières, arts et pratiques funéraires. Actes du LXIIIe congrès de la fédération des sociétés savantes du centre de la France, Guéret, 14, 15 et , Guéret, 2005, p. 77-90.
  • Michel Popoff et préface d'Hervé Pinoteau, Armorial de l'Ordre du Saint-Esprit : d'après l'œuvre du père Anselme et ses continuateurs, Paris, Le Léopard d'or, , 204 p. (ISBN 2-86377-140-X).

Bibliographie sur le portrait de 1707 conservé au musée Hyacinthe-Rigaud à Perpignan

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  • H. Gallet de Santerre, « Le cardinal de Bouillon, le peintre Rigaud et le Cordon du Saint-Esprit », dans Bulletin de l’Académie des Sciences et Lettres de Montpellier, t. 13, 1982, p. 35-39.
  • Marie-Claude Valaison, Le cardinal de Bouillon, Perpignan, 1990.
  • Ariane James-Sarazin, « Le portrait du cardinal de Bouillon par Hyacinthe Rigaud », dans La revue des Musées de France. Revue du Louvre, , Paris, RMN, p. 60-70.

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