Jef Leempoels

peintre belge

Jef Leempoels ou Joseph Leempoels, né le à Bruxelles et mort le à Ixelles, est un peintre belge réputé de son vivant pour ses portraits mondains et officiels, de même que pour ses scènes de genre et compositions symbolistes.

Jef Leempoels
Jef Leempoels photographié en 1905.
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 67 ans)
IxellesVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activité
Formation
Lieu de travail

Il s'illustre dans d'autres genres comme les natures mortes et les paysages. Ignorant les développements modernistes, son style est décrit comme académique, réaliste et symboliste.

Biographie

modifier

Famille et formation

modifier

Né à Bruxelles, rue des Petits Carmes no 29, le , Jef (Joseph Louis Marie) Leempoels est le troisième des dix enfants de Louis Jean Leempoels (1834-1904), domestique natif de Rotselaar, et de Marie Van Rompay (1841-1922), native de Booischot, conjoints mariés à Bruxelles en 1865 et domiciliés place du Petit Sablon, no 17. La mère de Jef Leempoels est, en 1865, cuisinière chez le duc Engelbert-Auguste d'Arenberg. En 1910, Jef Leempoels épouse à Drogenbos Georgina Van Huele (1882-1965)[1].

Jef Leempoels commence à peindre à l'âge de 19 ans lorsqu'il entre, en 1886, à l'Académie royale des beaux-arts de Bruxelles. Il devient l'élève des principaux peintres belges Jean-François Portaels et Joseph Stallaert, tous deux peintres d'histoire plutôt académiques connus pour leurs peintures orientalistes et classiques[1].

Carrière

modifier
La Dame à l'éventail.

Dès son jeune âge, Jef Leempoels se forge une réputation internationale et remporte plusieurs distinctions. Selon Emmanuel Bénézit, Jef Leempoels occupe une situation considérable parmi les artistes belges[1].

Jef Leempoels expose aux salons de Bruxelles à partir de 1887 et obtient une médaille de seconde classe au Salon d'Anvers de 1894, de même qu'en 1900 à l'Exposition universelle de Paris[1]. Il reçoit une médaille d'or à l'Exposition universelle de Saint-Louis, aux États-Unis, en 1904, pour son tableau Les Destinées humaines (collection privée, château de Reynel, France)[2]. Ce tableau, également appelé Les Mains, en raison des nombreuses mains au premier plan et notamment admiré par Puvis de Chavannes, voyage à travers les États-Unis, puis il est exposé à l'Exposition universelle de 1904 en Louisiane. Il attire beaucoup d’attention et d’intenses spéculations sont formulées dans les médias sur la manière dont le tableau doit être interprété[3]. Le tableau est également exposé à Munich, Bruxelles, Vienne et Paris avant de revenir à Bruxelles. En , tandis que le roi Albert se rend à l'atelier de l'artiste qui achève son dernier portrait officiel, le souverain remarque sur un chevalet son Les Destinées humaines en affirmant que Jef Leempoels aurait été, grâce à sa connaissance profonde de l'humanité, un excellent diplomate[4],[5].

Jef Leempoels remporte également des médailles à Vienne (1895) et à Buenos Aires (Grand Prix à l'Exposition du Centenaire en 1910)[1].

L'artiste est également honoré par le roi qui a acquis plusieurs de ses œuvres, tandis qu'il effectue son service militaire et qui, en 1898, l'élève au rang de chevalier de l'ordre de Léopold[6]. Pour sa part, le gouvernement français le fait, en 1910, chevalier de la Légion d'honneur[7],[8].

Jef Leempoels fréquente des membres de l'aristocratie et de la haute société en Belgique, en France, aux États-Unis, en Argentine et dans d'autres pays en raison de ses portraits mondains très prisés. La monarchie et le gouvernement belges deviennent aussi mécènes de l'artiste. Leempoels peint des portraits des rois belges Léopold II et Albert Ier[9]. Le Premier ministre belge Frans Schollaert lui demande de dessiner un portrait du roi Léopold II sur son lit de mort pour les archives du gouvernement belge. Jef Leempoels représente François-Joseph Ier d'Autriche, Victor-Emmanuel III d'Italie et d'autres monarques, ainsi que de membres éminents de la société européenne[10].

En 1896, Jef Leempoels est membre associé de la Société des Beaux-Arts de Paris, dont il devient sociétaire l'année suivante[8]. Il est également correspondant de l'Académie des beaux-arts de Milan[11].

Pour servir sa clientèle internationale et peindre sur place ses portraits mondains, Jef Leempoels occupe à plusieurs reprises tout au long de sa carrière des ateliers à Ixelles (Bruxelles), Paris, New York et Buenos Aires[10].

Souffrant depuis plusieurs années d'une affection cardiaque, Jef Leempoels meurt à Ixelles, où il réside et possède son atelier personnel au no 172 rue Américaine, le , à l'âge de 67 ans[8].

Champ pictural

modifier

Le champ pictural de Jef Leempoels s'illustre dans de nombreux genres, notamment des portraits, des scènes de genre, des nus, des peintures d'histoire, des paysages, des vedutes et des natures mortes.

Les œuvres de Jef Leempoels sont académiques dans leur exécution. Son style est réaliste et parfois même hyperréaliste[12]. Son souci du détail explique sa production limitée. En 1905, l'artiste affirme ne réaliser que trois à quatre tableaux par an en raison de sa technique précise[13]. Alfred Bastien considère, en 1935, Jef Leempoels comme un maître de l'art incontesté à l'étranger[8].

Réalisme social et vision personnelle

modifier
Ouvriers revenant à la maison.

Tout en peignant de nombreux portraits des diverses composantes de la société, il créé des scènes de réalisme social représentant aussi bien des personnes issues des classes supérieures que des classes populaires, qui montrent un aperçu de ses sujets. Leempoels nourrit une vision idéaliste du rôle de l'artiste et estime que la mission de l'artiste est de rendre le monde meilleur ou plus sage. L’art doit donc posséder plus que la beauté, mais aussi exprimer une idée et adopter une signification philosophique[13]. Cette conception explique certaines de ses peintures aux titres tels que Vision, vision cruelle, pourquoi m'as-tu si souvent fait peur pendant les nuits de mon enfance ? Pourquoi ?.

Amitié.

Les peintures possédant une telle intention philosophique incluent le tableau Les Destinées humaines, ainsi que la composition intitulée Amitié réalisée en 1896 et conservée au Musée national des beaux-arts de Buenos Aires). L'iconographie du tableau est dérivée de la toile de José de Ribera représentant un couple marié intitulé La Femme à barbe (1631, conservé à l'hôpital de Tavera à Tolède). Leempoels a non seulement copié les traits du visage, mais aussi les gestes de la femme et de son mari. Leempoels a actualisé les vêtements des deux personnages, inversé la position du couple et dilué la référence à l'inspiration originale en ne montrant pas de sein nu allaitant l'enfant. La citation par Leempoels de la composition originale de Ribera n'a pas été remarquée par la réception contemporaine. L'œuvre est considérée comme constituant deux portraits masculins. Lorsque le tableau est exposé en 1897 au Salon de la Société Nationale des Beaux Arts, il est décrit par un critique d'art comme deux portraits dans une même toile de deux amis masculins du même âge, dont la « physionomie fait preuve d'une intelligence moyenne » et qui joignent leurs mains comme « signe d'une communion indissoluble de sentiments ». Le regard actuel porté sur la scène peinte souligne la difficulté d'interpréter les représentations du lien masculin telles que celle de Amitié[14].

Conservation

modifier

Les œuvres de Leempoels, dont certaines de ses peintures les plus célèbres comme Les Destinées humaines, sont principalement conservées dans des collections privées. L'emplacement actuel de bon nombre de ses œuvres est inconnu et certaines œuvres ne sont connues que grâce à des reproductions contemporaines en noir et blanc dans des magazines et des catalogues d'exposition. Seules quelques collections de musées conservent des exemples d'œuvres de Leempoels. Cela a peut-être contribué à sa relative obscurité actuelle.

Collections muséales

modifier

Les œuvres suivantes sont conservées dans des musées, mais ne sont pas toutes exposées au public :

  • Réconfortés (Musée des arts anciens de Namur) ;
  • Les Éplorés (Belvédère à Vienne) ;
  • Amitié (MNBA, Buenos Aires) ;
  • L'Ergoteur (MNBA, Santiago du Chili) ;
  • Portrait de Mademoiselle Ana-Maria Heber-Garcia (MNAD, Montevideo) ;
  • Autoportrait, le peintre et sa femme (Broodhuis, Bruxelles) ;
  • Portrait du bourgmestre Adolphe Max (Broodhuis, Bruxelles).

Expositions

modifier

Distinctions

modifier

Références

modifier
  1. a b c d e f g h i j et k E. Bénézit, Dictionnaire critique et documentaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs, t. 3, Paris, Ernest Gründ, , 1227 p. (lire en ligne), p. 77.
  2. Edward Jewitt Wheeler, A painter's Conception of Destiny and Humanity, in: Current Literature, Volume 39, Current Literature Publishing Company, 1905, p. 61.
  3. James W. Buel, Louisiana and the Fair: an exposition of the world, its people and their achievements, Saint Louis, 1904, vol. 7, p. 2611-2612
  4. Rédaction, « Un joli mot du roi », L'Indépendance belge, no 308,‎ , p. 1 (lire en ligne, consulté le ).
  5. 'Destiny and Humanity' by Jef Leempoels in: Henry E. Jackson, 'Great Pictures As Moral Teachers', 1910, The John C. Winston Company, p. 277-290.
  6. a et b Rédaction, « Moniteur du 12 février », La Métropole, no 44,‎ , p. 2 (lire en ligne, consulté le ).
  7. Martin Wolpert and Jeffrey Winter, Modern Figurative Paintings: The Paris Connection, Schiffer Pub., February, 2004, p. 172-173.
  8. a b c d e f g et h Rédaction, « Le peintre Jef Leempoels est mort », La Nation belge, no 103,‎ , p. 1-2 (lire en ligne, consulté le ).
  9. Martin Wolpert and Jeffrey Winter, Modern Figurative Paintings: The Paris Connection, Schiffer Pub., February, 2004, p. 172-173
  10. a et b The Checkered Past of No. 6 West 28th Street.
  11. Martin Wolpert and Jeffrey Winter, Modern Figurative Paintings: The Paris Connection, Schiffer Pub., February, 2004, p. 172-173.
  12. Martin Wolpert and Jeffrey Winter, Modern Figurative Paintings: The Paris Connection, Schiffer Pub., February, 2004, p. 172-173
  13. a et b The Greatest Painter in Belgium, in: The Perry Magazine, Volume 7, Eugene Ashton Perry Perry pictures Company, 1905, p. 215-221
  14. John Potvin, Material and Visual Cultures Beyond Male Bonding, 1870-1914: Bodies, Boundaries and Intimacy, Ashgate, 2008, p. 131-132.
  15. Catalogue, Exposition générale des Beaux-Arts de 1887, catalogue explicatif, Bruxelles, Ad. Mertens, , 117 p. (lire en ligne), p. 87.
  16. Société royale pour l'encouragement des arts, Catalogue du Salon d'Anvers, Anvers, J.E. Buschmann, , 134 p. (lire en ligne), p. 58.
  17. Société royale pour l'encouragement des beaux-arts, Salon de Gand de 1889, Gand, Eug. Vanderhaeghen, , 144 p. (lire en ligne), p. 122.
  18. Société royale pour l'encouragement des arts, Catalogue du Salon d'Anvers, Anvers, J.E. Buschmann, , 142 p. (lire en ligne), p. 49.
  19. Société royale pour l'encouragement des beaux-arts, Salon de Gand de 1892, Gand, Eug. Vanderhaeghen, , 156 p. (lire en ligne), p. 69.
  20. Catalogue, Exposition générale des Beaux-Arts de 1893, catalogue explicatif, Bruxelles, E. Lyon-Claesen, , 174 p. (lire en ligne), p. 69.
  21. Société royale pour l'encouragement des beaux-arts, Salon de Gand de 1895, Gand, Eug. Vanderhaeghen, , 154 p. (lire en ligne), p. 88.
  22. Catalogue, Exposition internationale de Bruxelles, Beaux-Arts, catalogue général, Bruxelles, E. Lyon-Claesen, , 206 p. (lire en ligne), p. 40.
  23. Société royale pour l'encouragement des arts, Catalogue du Salon d'Anvers, Anvers, Jonsten Versaemt, , 112 p. (lire en ligne), p. 58.
  24. Catalogue, Exposition triennale des Beaux-Arts de 1900, Bruxelles, Imprimerie Veuve Monnom, , 116 p. (lire en ligne), p. 51.
  25. Catalogue, Exposition générale des Beaux-Arts de 1903, Bruxelles, Imprimerie Fred. Tilbury, , 262 p. (lire en ligne), p. 66.
  26. Catalogue, Exposition générale des Beaux-Arts de 1907, Bruxelles, Imprimerie Charles Lelong, , 188 p. (lire en ligne), p. 31.
  27. Catalogue, Exposition générale des Beaux-Arts de 1914, Bruxelles, Imprimerie Charles Lelong, , 174 p. (lire en ligne), p. 48.
  28. Rédaction, « Les ordres nationaux », Le Soir, no 107,‎ , p. 6 (lire en ligne, consulté le ).|

Voir aussi

modifier

Articles connexes

modifier

Liens externes

modifier