Mille premiers jours

Le concept des 1 000 premiers jours est un concept scientifique et médical qui se réfère à une période particulièrement importante de la vie pour l’enfant et ses parents. Elle s'étend de la conception (fécondation de l'ovule par le spermatozoïde) jusqu’à l’âge de deux ans, « au seuil de l’école maternelle ».

En terme développemental, cette période est cruciale pour le développement harmonieux et optimal de l'enfant, tant sur les plans physique, et cognitif qu'émotionnel et psychique ; c'est durant cette phase que les bases de socialité et que le capital santé du futur futur individu s'établissent et se consolident. Des carences nutritionnelles et/ou affectives graves, certaines infections ou intoxications (saturnisme infantile ou in utero par exemple) ou des stress important durant cette période peuvent avoir des effets graves et irréversibles (pour toute la vie future), voire des conséquences épigénétique transmissibles à une ou plusieurs des générations suivantes.
Un bon suivi, et d'éventuelles interventions précoces peuvent prévenir de nombreux problèmes « évitables » de santé et améliorer les résultats scolaires et sociaux. Dans le domaine de la santé maternelle et infantile, comprendre et soutenir les mille premiers jours est donc essentiel. Des plans d'actions visent à sensibiliser les parents et les proches de l'enfant, les professionnels de la santé, et les décideurs politiques à cet enjeu, afin de préventivement et prospectivement favoriser la santé publique[1].

Les 1 000 premiers jours est aussi le nom d'un rapport contenant les recommandations d'une Commission des 1 000 premiers jours, présidée par Boris Cyrulnik[1], et le nom d'une politique publique française qui en est issue, conçue autour des besoins de l’enfant et de ses parents. Depuis 2021, ce chantier des 1 000 premiers jours est piloté par le ministère des solidarités et de la santé et mené avec ses partenaires de la Sécurité sociale, de Santé publique France, ainsi que des agences régionales de santé (ARS) et des directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail des solidarités (DREETS).

Éléments de définition

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Les 1 000 premiers jours sont la période allant de la conception au second anniversaire de l'enfant, que l'on sait être cruciale pour la santé et le développement physique, cognitif et émotionnel de l'enfant à court, moyen et très long terme[1].

Les 1 000 premiers jours incluent donc :

  • la période dite périnatale (comprise entre la 22e semaine d'aménorrhée et le 7e jour révolu suivant la naissance) qui est également essentielle pour de la survie du fœtus puis du nouveau-né[2],[3] car correspondant à la mise en place de toutes les fonctions métaboliques et physiologiques vitales pour la vie présente et future de l'individu en développement[4] ;
  • le début de la petite enfance (premières années de la vie de l'enfant, généralement jusqu'à l'âge de 8 ans).

Une meilleure prise en compte de cette période cruciale présente plusieurs enjeux majeurs :

  • l'importance des 1 000 premiers jours justifie que des efforts soient fait pour assurer une nutrition et des soins de santé adéquats à la mère, puis au bébé, afin de prévenir les retards de développement, les carences nutritionnelles et les séquelles de certaines maladies infantiles. Une attention particulière portées à cette période pourra dans la plupart des cas fortement réduire certains risques de maladies chroniques à l’âge adulte (dont le diabète et les maladies cardiovasculaires)[4] ;
  • cette période est celle d'un développement cérébral, neuronal, affectif et cognitif particulièrement intense et rapide (200 000 nouvelles connexions neuronales par minute selon un visuel du ministère de la Santé)[5], à aucun autre moment de la vie le cerveau se développe autant. Des stimulations suffisantes et précoces, associées à une alimentation équilibrée dans un environnement sécurisé favorisent le développement cognitif et les capacités d’apprentissage, au profit de meilleures performances scolaires et de compétences sociales accrues pour les années à venir. C’est le moment de poser avec le tout petit des bases importantes pour lui et pour l’adulte et la personne âgée qu’il deviendra ;
  • le bien-être émotionnel de l’enfant, des parents (de la mère notamment) et de la fratrie est aussi un facteur clé ; pour Umberto Siméoni (2020), « agir sur le stress psychosocial, la qualité de l’environnement, le sommeil, la nutrition, l’activité physique, et soutenir l’acquisition d’un bien-être durable à cette période de la vie est ainsi probablement le meilleur investissement dans le domaine de la santé »[4]. Un soutien psychologique et social adéquat et sans discontinuité, renforcé aux étapes clé que sont « l’Entretien Prénatal Précoce, le séjour à la maternité, le retour à domicile et les premières semaines »[4], peut prévenir ou limiter les troubles de santé mentale, et favoriser des relations parent-enfant plus positives. Des politiques de soutien à la parentalité incluant les congés maternité et paternité, des possibilités de répit parental et des services de crèche de qualité, un soutien spécifique aux parents en situation de handicap, l'appui de référents de parcours périnatalité, des moyens de prise en charge des détresses parentales psychologiques en cas de dépression post-partum notamment, etc.) peuvent y contribuer[4] ;
  • l'équité et l'inclusion sont deux autres enjeux pour la réussite des 1 000 premiers jours, au profit plus tard d'une réduction des inégalités de santé et d’éducation. Aider précocement les enfants issus de milieux défavorisés à surmonter les obstacles pour à atteindre leur plein potentiel peut contribuer à une société plus équitable et inclusive. Les personnes ayant bénéficié d'un bon soutien émotionnel quand elles étaient enfant sont plus résilientes face aux aléas de la vie ;
  • dans le domaine de l'économie de la santé, investir dans la prévention pour que les 1 000 premiers jours se déroulent au mieux, doit générer d'importantes économies et des retombées économiques positives à long terme. Les enfants en bonne santé et bien développés sont plus susceptibles de devenir des adultes productifs et en bonne santé dans une une société plus saine, équitable, heureuse et prospère[4].

Histoire du concept

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Le concept des 1 000 premiers jours, est proche du principe de l’origine précoce de la santé (parfois représenté par l'acronyme anglophone Dohad : Developmetal Origins of Health and Disease) voulant que les principales maladies chroniques, non transmissibles et « évitables », de l’adulte : obésité, diabète, certaines maladies cardio-vasculaires et respiratoires, troubles neuropsychiques dits « de civilisation » ont des origines épigénétiques, environnementales et/ou précoces dans la vie, dans une période qui conditionne probablement aussi la sensibilité et la vulnérabilité et nombre de nos comportements sociaux. Ces idées ont émergé à la fin des années 1980, après que les scientifiques aient découvert ou confirmé que la période intra-utérine et les premières années de développement de l'enfant ont des impacts durable et pour partie irréversibles sur tous les aspects de la santé future de l'individu[4].

On sait maintenant avec certitude que l’environnement précoce [y compris des gamètes (testicule, ovaire)], puis intra-utérin, puis la nutrition (qualité, carence ou excès), ainsi que la qualité des interactions sociales et celle des soins quand ils sont nécessaires, jouent un rôle crucial dans le développement physique, cognitif et émotionnel de l’enfant, puis de l'adolescent et de l'adulte[6].
Ces découvertes ont conduit à reconnaitre les 1 000 premiers jours comme une fenêtre critique pour la prévention des maladies chroniques et la promotion de la santé à long terme[4].

Le concept des 1 000 premiers jours a été progressivement adopté par de nombreuses institutions internationales, dont l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’UNICEF, qui ont souligné son importance pour le développement de l’enfant[7]. En France, le gouvernement a fait des 1 000 premiers jours une priorité politique, avec la création d’une commission d’experts présidée par le neuropsychiatre Boris Cyrulnik en 2019. Le rapport de cette commission, remis en 2020, a identifié les facteurs favorables au développement de l’enfant et proposé des leviers d’action pour améliorer l’accompagnement des familles tout au long de ces 1 000 premiers jours.

En France

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Les 1 000 premiers jours est le nom d'une politique publique française (et de ses campagnes de communication). Son objet est de mieux répondre aux besoins des enfants et de leurs parents à cette époque. Elle est conçue sur les recommandations du rapport de la Commission des 1 000 premiers jours, présidée par Boris Cyrulnik, remis en septembre 2020 au secrétaire d'État à l'Enfance et aux Familles[1].

Selon le ministère de la Santé (2021), le chantier des 1 000 premiers jours:

« invite à décloisonner les approches, à créer de la continuité entre le temps de la grossesse, celui de la naissance et des premières semaines et celui des premières années, à encourager les échanges et la coordination entre des différents professionnels et les différents services des 1 000 premiers jours, notamment entre le secteur de la santé et le secteur social des modes d’accueil du jeune enfant et du soutien à la parentalité.
Pour les parents, il vise à faire de cette période un temps privilégié pour faire le point sur leur santé et leurs priorités, reconnaitre et pouvoir exprimer leurs propres attentes et inquiétudes ; ceci afin de pouvoir disposer d’une information fiable, des ressources et des soutiens lorsque cela est nécessaire, pour faire du mieux possible avec leurs propres moyens et capacités, quelles que soient les circonstances. <vr>Le chantier des 1 000 premiers jours s’insère dans les stratégies et programmes nationaux et locaux. Ce n’est pas un nouveau plan mais une volonté d’articulation, autour des jeunes enfants et de leurs (futurs) parents, des plans et programmes nationaux et locaux. Tels que la stratégie nationale de santé 2018-2022, le plan priorité prévention, le plan national santé environnement et les projets régionaux de santé. Mais aussi la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, la stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance ou le plan de lutte contre les violences faites aux enfants et les mesures issues du Grenelle contre les violences conjugales. »

Ce chantier mobilise les Cpam, les CAF et la Caisse nationale des allocations familiales pour renforcer les modes d'accueil du jeune enfant (dont en horaires atypiques) les solutions de répit parental, expérimenter des groupes de naissance et de parents, avec les Agences régionales de santé (volontaires) qui expérimentent le Référent Parcours périnatalité, avec les Commissaires à la lutte contre la pauvreté (l'engagement no 1 de la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté est l’égalité des chances dès les premiers pas), avec le Service d’accompagnement à la parentalité des personnes en situation de handicap. Des appels à projets régionaux sont lancés par les Agences Régionales de Santé (ARS) et les directions régionales de l’économie, de l’emploi et des solidarités (DREETS) aider les projets émergents[1]. Les plans régionaux santé environnement intègrent aussi des actions allant dans ce sens.

Prospective

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Selon le pédiatre suisse Umberto Simeoni (spécialiste de la très petite enfance, au Dohad Lab ; dfme ; chuv & université de Lausanne), ce concept « amène ainsi à privilégier les facteurs d’environnement affectant les adolescents et futurs parents (pères et mères), la grossesse et la toute première enfance, et à favoriser un nouveau bien-être dans un style de vie choisi, favorable à leur santé et, de ce fait, à celle de l’enfant sa vie durant »[4].

Notes et références

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  1. a b c d et e Ministère de la santé (2021) Présentation des 1 000 premiers jours |url=https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/1000premiersjours-presentation-24.08.21.pdf.
  2. « WHO | Maternal and perinatal health », sur www.who.int (consulté le ).
  3. « Dictionnaire médical de l'Académie de Médecine », sur dictionnaire.academie-medecine.fr (consulté le ).
  4. a b c d e f g h et i Umberto Simeoni, « Le développement et les 1000 premiers jours : une opportunité de prévention précoce en santé: », Spirale, vol. N° 92, no 4,‎ , p. 42–44 (ISSN 1278-4699, DOI 10.3917/spi.092.0042, lire en ligne, consulté le ).
  5. Ministère de la Santé (2021) Visuel : 1000 premiers jours (PDF, voir p3/17).
  6. Le Grand Forum des Tout-Petits, Catherine Salinier-Rolland et Umberto Simeoni, « De la conception de l’enfant jusqu’à l’âge de 2 ans, les 1 000 premiers jours de vie sont une période clé en matière de prévention », Contraste, vol. 46, no 2,‎ , p. 13–38 (ISSN 1254-7689, DOI 10.3917/cont.046.0013, lire en ligne, consulté le ).
  7. UNICEF (oct 2023) From the first 1000 days to a resilient future ; Environmental and Climate Education for Early Childhood in Latin America and the Caribbean ; ISBN: 978-92-806-5521-6 ; Panama City |url= https://www.unicef.org/lac/media/44501/file/From%20the%20first%201000%20days%20to%20a%20resilient%20future.pdf.

Voir aussi

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Articles connexes

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Liens externes

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  • [PDF] Le plan périnatalité 2005-2007, présenté par le Ministre de la Santé le , donne des objectifs en matière de grossesse, d'accouchement et de période néonatale en France

Vidéographie

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Bibliographie

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  • Dayan J, Andro G & Dugnat, M. (2003). Psychopathologie de la périnatalité.
  • Dugnat, M. (2002) Santé mentale et psychiatrie périnatales: renouveler l'approche de la prévention. Dialogue, (3), 29-41.
  • Dugnat, M. (2004). Résistance à la prévention, reconnaissance de la périnatalité psychique. L'Information Psychiatrique, 80(8), 611-618.
  • Mamelle N, Claris O, Maria B, Mares P & Pinquier D (2002). La santé périnatale en péril: résultats du réseau sentinelle AUDIPOG 2001. Archives de pédiatrie, 9(9), 976-978.
  • Geay C & Rousseau M Colloque « Périnatalité et santé-environnement » 4 octobre 2016, dans le cadre du Projet Femmes enceintes, Environnement et Santé conduit de 2011 à 2017 par l’APPA, la Mutualité Française Hauts-de-France en partenariat avec les Ordres de sages-femmes. .

Manuels étudiants

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  • Missonnier, S., Blazy, M., Boige, N., Presme, N., Tagawa, O., & Jaillardon, C. (2012). Manuel de psychologie clinique de la périnatalité. Paris: Elsevier Masson.

Infographie

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