Petronella D'Acierno

guérisseuse et entrepreneuse suisse active dans le domaine du tourisme de santé.

Petronella D'Acierno, née le à Borno (Val Camonica) ou Zurich et morte le à Heiden, est une guérisseuse et entrepreneuse suisse active dans le domaine du tourisme de santé.

Petronella D 'Acierno
Biographie
Naissance
Décès
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Nationalité
Activités

Biographie

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Origines et enfance

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Petronella D'Acierno naît le à Borno. Dans le registre de l'état civil, elle est inscrite sous le nom de Petronella Mabellini[1]. Après le décès de son père biologique Wydler[1], sa mère Maria Elisabetha Wydler se remarie avec Mosé Mabellini[2].

Adolescente, elle est envoyée à Lisbonne chez une tante car elle ne s'entend pas avec son beau-père. Elle ne fréquente pas l'école là-bas, mais voyage avec elle en Abyssinie. Là-bas, elle termine sa scolarité et y apprend la langue arabe. C'est là qu'elle découvre son talent pour les soins de santé et reçoit une formation[1],[2],[3].

Elle fréquente régulièrement la cour de l'empereur Ménélik II, où sa tante a peut-être obtenu un emploi. Vers 1896, elle retourne à Naples avec sa tante. En raison de cette longue absence, elle doit réapprendre l'italien[1].

Parcours professionnel

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Au début, Petronella D'Acierno travaille comme femme de ménage et s'occupe de logements et de maisons à Zurich. Vers 1920, elle déménage à Seebach et trouve un emploi en tant qu'ouvrière auxiliaire à la Turmac AG, une nouvelle usine de production de cigarettes située au 32-34, Friesstrasse. Son emploi y est confirmé pour l'année 1922[1],[2].

En parallèle, elle pratique la chiromancie et conseille ses clients après le travail devant l'usine. Elle recommande le laxatif Pagliano pour nettoyer les intestins, puis conseille une alimentation saine et un mode de vie équilibré, interdisant café, tabac et alcool, et utilise des remèdes naturels à base de plantes[1].

Lorsque Robert Burrus, directeur de Turmac[4], tombe gravement malade, il fait appel à Petronella D'Acierno en urgence. Il se rétablit alors rapidement, établissant ainsi sa réputation de « doctoresse miracle » à Seebach[1],[2].

Guérisseuse à domicile

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Lorsque ses activités de guérison commencent à bien fonctionner, elle quitte son emploi à la Turmac et reçoit ses clients dans sa maison au 57, Schärenmoosstrasse. Elle leur prescrit le sirop Pagliano, un puissant laxatif censé purifier l'intestin. Ce remède lui vaut le surnom de « tante Pagliano ». Gagné par la notoriété de son produit, chaque femme au foyer de Seebach possède une boîte rouge dans son armoire à pharmacie[1].

Petronella D'Acierno ne facture pas ses conseils, mais place une caisse pour des dons volontaires. Les nécessiteux ne paient que s'ils le peuvent. Malgré cela, elle subvient aux besoins de sa famille et économise un peu d'argent. Même le bureau des impôts de Seebach remarque que ses revenus ne peuvent plus être considérés comme un simple revenu d'appoint[1].

Entre 1919 et 1922, elle se tourne vers l'invention technique et dépose six brevets, dont un pour un lit d'hôpital et un matelas avec dispositif de réglage pour les patients souffrant de plaies[2].

La réputation de guérisseuse grandit, et le pharmacien Schalch a du mal à fournir assez de Pagliano pour répondre à la demande croissante[1].

Le Pagliano, créé en 1838 à Florence par Girolamo Pagliano de Naples selon une recette arabe, est fabriqué à Barcelone par son neveu dans le Laboratorios J. Uriach & Co. SA. Il contient du séné, de la résine d'arbre, de la racine de jalap, de la confiture de prunes et de l'agar-agar. Son effet laxatif est principalement dû au séné[1],[2],[3].

Interdiction d'exercer et déménagement à Heiden

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En 1926, Petronella D'Acierno reçoit une lettre recommandée d'un bureau cantonal lui interdisant, conformément à la loi sur la santé en Suisse, de poursuivre ses activités de guérisseuse dans le canton de Zurich, sous peine de poursuites. Surprise, elle montre la lettre au pharmacien Schalch d'Oerlikon, qui lui conseille de continuer son travail là où c'est autorisé. Ainsi se termine brusquement son séjour à Seebach[1].

Elle quitte alors Zurich-Seebach avec ses enfants, ce qui a un grand écho médiatique, et s'installe rapidement à l'auberge « Neubad » à Heiden, où elle crée une entreprise familiale[1],[2],[3].

En 1865, la région d'Appenzell est surnommée le « coin des docteurs suisses » et gagne rapidement une renommée européenne pour sa médecine[5]. En 1871, elle cesse d'exiger une autorisation pour l'exploitation de cabinets médicaux et la distribution de remèdes, attirant ainsi de nombreux guérisseurs pratiquant la médecine populaire[2].

Grâce à une législation plus souple, elle reconstruit sa vie à Heiden. Connaissant ses limites, elle envoie les cas critiques chez un médecin. Ses patients de Seebach, Oerlikon, Schwamendingen et Zurich peuvent venir la consulter, ce qui lui permet de retrouver rapidement sa clientèle. Au fil du temps, cette clientèle diminue car les guéris n'ont plus besoin d'aide, tandis que de nouveaux clients locaux affluent[1].

Gestion d'une auberge familiale et acquisition de la Pension Turm
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À Neubad, Petronella D'Acierno gère une auberge avec l'aide de ses fils, Ribelle et Michelangelo, en cuisine, et de ses filles au service. L'élégance et la grâce de ses filles aînées, Grazia, Esther et Irma, attirent de nombreux jeunes clients qui préfèrent la salle de réception avec elles et apprécient une « eau de vie » à base de houblon[1].

Rapidement, Petronella D'Acierno acquiert une excellente réputation, et l'auberge devient vite trop petite. C'est pourquoi en 1930, elle reprend la Pension Turm des Osterwalder, avec 40 chambres d'hôtes, au centre du village[1]. En 1933, elle transfère officiellement sa résidence à Heiden[2].

Chaque traitement commençant avec le laxatif Pagliano, il était essentiel d'avoir des installations sanitaires performantes. Le pharmacien Schalch continue de lui en fournir par la poste. Dans ce nouveau centre, elle propose des chambres à 6 francs par jour, relançant ainsi le tourisme de santé à Heiden. Elle y offre grâce à son fils Michelangelo des massages, des cataplasmes, des ventouses, des exercices physiques, des traitements par l'air et par l'eau, du thé et une alimentation saine (grâce à Grazia, Esther et Irma), en utilisant des médecines naturelles[1],[2],[3]. Elle publie ses recettes dans des brochures, témoignages de curistes à l'appui[2].

Vers 1950, pendant l'épidémie de poliomyélite, Jakob Hohl, chef de gare de Heiden, voit des personnes arriver incapables de marcher et repartir sans leurs béquilles après leur cure[1].

Retraite

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Avec ses filles Grazia, Esther, et Irma, Petronella dirige le centre de cure jusqu'en 1956, puis confie la gestion à son fils Michelangelo et prend sa retraite à 79 ans. Elle continue à traiter des patients au Pöstli à Schmittebüel jusqu'à ses 85 ans[1].

Vie privée

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En 1897, Petronella D'Acierno s'installe à Zurich, ou elle y apprend l'allemand[1], avec son fiancé Vincenzo Antonio Martino D'Acierno, originaire de la région de Naples, qu'elle épouse en 1898[1].

Le couple a neuf enfants, nés en Suisse jusqu'en 1916 [2],[3]. Irma (1908), Spartaco alias Peter (1911), et Jone (1916) vont à l'école de Buhn à Seebach[1]. Après le départ de son mari pour l'Italie en 1905, elle subvient seule à leurs besoins. Sept atteignent l'âge adulte [2],[3].

Elle soutient un groupe de jeunes antifascistes actifs à Heiden depuis la fin des années 1930, qui offre un hébergement et de la nourriture à des réfugiés juifs[2].

Petronella D'Acierno le à Heiden à l'âge de 85 ans[2].

Héritage familiale

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Après son décès, sa fille cadette, Irma Sonderegger, dirige d'abord le cabinet, puis la vente par correspondance de médicaments. Ce commerce, qui existe depuis les années 1930 et dont le fichier client comporte quelque 100'000 adresses en 1967, cesse dans les années 1970, notamment en raison des difficultés à s'approvisionner en sirop Pagliano[2].

Désormais considéré comme historique, le Pagliano est représenté par une boîte originale exposée au musée pharmaceutique de l'Université de Barcelone. Une exposition au musée ethnographique d'Appenzell en 2005 lui est dédiée[1].

Plus tard, Esther et Ribelle A. retournent à Seebach. Ils continuent à habiter la maison de la Schärenmoosstrasse 57, qui est renommée en 1950 au nom de sa sœur Esther, et ils y restent bien après 1950. Max Broggi, un autre membre de l'OGS, mentionne qu'un descendant de la tante Pagliano est enterré à Rümlang[1].

Œuvres

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  • (all) Krankheits-Erscheinungen und wie sie durch Naturmittel geheilt werden können, 1927/1928
  • (all) Gesundheit ist Macht, eine lehrreiche Broschüre,

Références

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  1. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v w et x (de) « Pagliano-Tante » Accès libre, sur www.ogs-seebach.ch (consulté le )
  2. a b c d e f g h i j k l m n o et p Heidi Eisenhut (trad. Eric Godel), « Petronella D'Acierno » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne, version du .
  3. a b c d e et f Heidi Eisenhut, « Petronella D'Acierno » Accès libre, sur Hommage 2021 (consulté le )
  4. (de) Lea Sager, « Mich überraschte die Vielfalt der spannenden Lebensgeschichten dieser Frauen : Eine Kantonsschulklasse wählt die zwei mutigsten Ausserrhoderinnen für die Ausstellung «Hommage 2021» in Bern » Accès libre, sur Appenzeller Zeitung, (consulté le )
  5. (de-CH) « "Kräuter und Säfte": Schweizer Wunder-Medizin » Accès libre, sur SWI swissinfo.ch, (consulté le )

Voir aussi

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Bibliographie

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  • (all) Peter Witschi, « Geschichte einer Heillandschaft », Kräuter und Kräfte. Heilen im Appenzellerland, Walter Irniger,‎ , p. 13-46
  • (all) Renate Bräuniger, « Die Fremde, Vielgereiste – Naturärztin Petronella d'Acierno (1877-1962) », Kräuter und Kräfte. Heilen im Appenzellerland, 19. und 20., Renate Bräuniger,‎ , p. 590-596

Fonds d'archives

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  • Archives d'État d'Appenzell Rhodes-Extérieures, Hérisau.

Liens externes

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