Poilu (violoncelle)
Le « Poilu », dit aussi le « violoncelle des tranchées », est un violoncelle de fortune construit durant la Première Guerre mondiale et joué par le musicien mobilisé Maurice Maréchal. L'instrument est aujourd'hui conservé au musée de la Musique à Paris[1].
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Histoire
modifierEn plein conflit mondial, deux artisans mobilisés au 274e régiment d'infanterie, Antoine Neyen (1877-1915) et Albert Plicque (1885-1915), construisent pour leur camarade musicien Maurice Maréchal un violoncelle « de campagne », avec du bois de récupération[2], venant peut-être en partie de caisses de munitions[3]. Réalisé alors que le régiment se trouve au repos à Ourton dans le Pas-de-Calais, l'instrument est daté du 30 juin 1915 et suit le régiment dans un fourgon de ravitaillement, au-dessus des boîtes de conserve ou « déguisé en quartier de bœuf dans un sac à viande »[4].
Du fait de cette histoire particulière, le violoncelle qui accompagne Maurice Maréchal porte le surnom de « Poilu »[5] ou de « violoncelle des tranchées »[6] en résonance avec le surnom des soldats et avec le théâtre des opérations sur le front de la Grande Guerre. Avec son propriétaire, l'instrument connaît ainsi l'enfer de Verdun[7].
Il est joué jusqu'en octobre 1916 au moins par Maurice Maréchal en diverses occasions, pour les soldats[4], lors d'offices religieux[8], pour les officiers et plus particulièrement devant le général Mangin, mélomane averti[9], au cours de séances de quatuor à cordes en compagnie d'autres instruments de musiciens au front, Lucien Durosoir au premier violon, Henri Lemoine au second violon et André Caplet à l'alto[10] auxquels se joint Henri Magne au piano pour former le quintette Mangin[11]. Il porte sur sa table d'harmonie les signatures de plusieurs généraux français : Foch, Joffre, Mangin, Gouraud, Pétain[3].
Après la guerre, Maurice Maréchal garde le violoncelle chez lui à Paris. Il décide peu avant sa mort en 1964 d'en faire don au public[3].
Postérité
modifierLe Poilu est aujourd'hui conservé au musée de la Musique à Paris[1], où il est qualifié par le conservateur Jean-Philippe Echard de « Joconde » du lieu, et est considéré comme « l'instrument le plus emblématique de la Première Guerre mondiale »[6]. Une des copies de ce violoncelle a été réalisée par le luthier Jean-Louis Prochasson en 2011[4] pour la violoncelliste Emmanuelle Bertrand, qui se produit avec lors de certains concerts[12].
L'instrument a inspiré une nouvelle de littérature jeunesse d'Hervé Mestron[13],[14], et plusieurs spectacles en musique[12],[15].
Notes et références
modifier- « Violoncelle, dit le "Poilu" », sur collectionsdumusee.philharmoniedeparis.fr (consulté le )
- Charles d'Hérouville, Le violoncelle Neyen et Plicque : mémoire d'un Poilu, (ISBN 979-10-94642-50-4, OCLC 1309311863, lire en ligne)
- « Le "Poilu", un violoncelle fabriqué dans les tranchées, renaît dans un concert à la Cité de la Musique », sur Franceinfo, (consulté le )
- « Violoncelle, dit « le Poilu » », sur pad.philharmoniedeparis.fr
- Brigitte François-Sappey, Bruits de guerre 1914-1918, article de Diapason no 629 de novembre 2014, p. 24.
- « «Le violoncelle des tranchées», artefact musical de la Grande Guerre », La Croix, (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le )
- Julien Arbois, Histoires insolites de la Grande Guerre, City Edition, (ISBN 978-2-8246-4996-2, lire en ligne)
- Caroline Jouret, « Histoires 14-18 : Maurice Maréchal, un violoncelliste dans la guerre », sur France 3 Bourgogne-Franche-Comté, (consulté le )
- « 14-18 : Quand la musique part en guerre », sur philharmoniedeparis.fr, (consulté le )
- Pierre Gervasoni, « L’archet à la place du fusil chez les « poilus » », Le Monde, (lire en ligne)
- « Maurice Maréchal et son « Poilu » 1. L'homme et son instrument, destins au front. Saleux », sur pad.philharmoniedeparis.fr
- Chrystel Chabert, « La belle histoire du "violoncelle de guerre" racontée par Emmanuelle Bertrand et Christophe Malavoy », sur Franceinfo, (consulté le )
- « 'Mots de guerre', écrire au cycle 3, autour de la Grande Guerre - », sur www.ac-grenoble.fr (consulté le )
- Hervé Mestron, « Le violoncelle poilu », sur Éditions Syros, (consulté le )
- « Métropole lilloise - La musique au cœur des tranchées ou « Le Violoncelle poilu » », sur La Voix du Nord, (consulté le )
Bibliographie
modifier- Charles d'Hérouville, Le Violoncelle Neyen et Plicque - Mémoire d'un Poilu, Paris, Éditions de la Philharmonie, , 112 p. (ISBN 979-10-94642-50-4)
- Maurice Maréchal et Lucien Durosoir, Deux musiciens dans la Grande Guerre, Tallandier, 2005, 358 p.
- Stéphane Audoin-Rouzeau (dir.), Esteban Buch (dir.), Myriam Chimènes (dir.) et Georgie Durosoir (dir.), La Grande Guerre des musiciens, Symétrie, (ISBN 978-2-914373-54-8).
- Georgie Durosoir, « Le sergent Caplet (1915-1918). Lettres d’André Caplet à Lucien Durosoir (1915-1922) », dans Denis Herlin et Cécile Quesney, André Caplet : compositeur et chef d'orchestre, Paris, Société française de musicologie, (ISBN 978-2-853-57269-9), p. 115-158.
Liens externes
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