Prieuré de Rauzet

prieuré situé en Charente, en France

Le prieuré de Rauzet ou de Rozet[1] est un ancien prieuré de l'ordre de Grandmont, ordre monastique austère et peu connu, aujourd'hui disparu. Il est situé à Combiers, en Charente, en bordure de la forêt d'Horte et du département de la Dordogne et a fait l'objet d'une restauration entre 1991 et 2009. Il ne reste plus aujourd'hui de l'ancien prieuré que la chapelle et un bâtiment monastique, une partie de l'ancienne cuisine au sud et l'ancienne aile occidentale en partie sur les fondations anciennes, reconstruite en grange[N 1].

Prieuré de Rauzet
Vue aérienne de l'église en 2009.
Vue aérienne de l'église en 2009.
Présentation
Nom local Église de Rozet
Culte Catholique romain
Type Prieuré
Début de la construction XIIIe siècle
Style dominant roman
Protection Logo monument historique Inscrit MH (1987)
Logo monument historique Classé MH (1992)
Site web grandmont.rauzet.free.frVoir et modifier les données sur Wikidata
Géographie
Pays Drapeau de la France France
Région Nouvelle-Aquitaine
Département Charente
Ville Combiers
Coordonnées 45° 30′ 41″ nord, 0° 23′ 39″ est
Géolocalisation sur la carte : Charente
(Voir situation sur carte : Charente)
Prieuré de Rauzet
Géolocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
Prieuré de Rauzet

Histoire

modifier

Fondation

modifier

Le prieuré a été construit au XIIe siècle par les frères ermites de l'ordre de Grandmont, ordre monastique fondé en Limousin par les disciples de l'ermite Étienne de Muret après sa mort en 1124.

Cet ordre est un des seuls exemples de vie érémitique communautaire en Occident (avec les chartreux), mode de vie plus répandu dans le monachisme du christianisme oriental.

Lorsque l'ordre de Grandmont, installé dans les monts d'Ambazac dans le Limousin, prend un peu d'ampleur au XIIe siècle, les frères fondent de petites structures, ou celles, dans les environs afin de retrouver leur pauvreté d'origine. C'est à la fin de ce siècle qu'ils viennent à Rozet, lieu isolé dans la forêt d'Horte, à la limite des diocèses d'Angoulême et de Périgueux, dans la zone d'influence des seigneurs de Villebois et de La Rochebeaucourt.

Les archives concernant cette fondation ont totalement disparu, mais des indices architecturaux font remonter les premières constructions au tout début du XIIIe siècle[2].

Le prieuré n'avait aucune charte, mais possédait quelques domaines, étangs, au moins un moulin, et des droits sur la forêt de La Rochebeaucourt. Le vœu de pauvreté était poussé à l'extrême. Il était dirigé par un moine convers, afin de dégager les clercs et le prêtre de toute tâche matérielle[3].

La règle était l'hospitalité, et les pèlerins, nombreux dans la région[N 2], étaient accueillis[4].

Évolution du statut

modifier

Le statut initial de l'ordre avait légèrement évolué au XIIe siècle, lorsque les frères ermites avaient essaimé de Grandmont pour venir s'installer à Combiers, car les dons étaient nombreux et l'extrême pauvreté initiale n'était plus tout à fait la même. Cependant, Rauzet est resté fidèle à cette simplicité[2].

Comme tous les monastères fondés au Moyen Âge, l'âge d'or a été du XIIIe au XIVe siècle, en particulier grâce à Henri II d'Angleterre qui a soutenu cet ordre[4].

D'après Martin-Buchey, le prieuré aurait été rattaché à l'abbaye de Grosbot, cistercienne, se trouvant aussi dans la forêt d'Horte et distante seulement de 3 km[5]. Cependant, aucune charte des archives de cette abbaye cistercienne n'indique un lien entre les deux sites[N 3].

Guerres, pillages et destructions

modifier

L'église connut des périodes de crise pendant la guerre de Cent Ans puis les guerres de religion.

L'ordre des Grandmontains fut supprimé en 1772, puis le site fut vendu comme bien national à la Révolution. Transformée en dépendance agricole, l'église servait de grange et des chênes poussaient sur le toit, jusqu'en 1991 où l'ensemble a été racheté par la Société civile immobilière de Rauzet et l'association de sauvegarde, l'ASEG Rauzet[4].

Architecture

modifier

L’église

modifier

L'église (25,10 m x 6,50 m) est un superbe exemple d'architecture grandmontaine. Elle se caractérise par son architecture simple et ne possède qu'une simple nef assez haute. Elle est voûtée d’un berceau brisé, et n'a pas de fenêtre dans les gouttereaux. Elle est toutefois bien éclairée, grâce aux trois baies du chœur à l'est et une fenêtre à l'ouest, qui font converger la lumière vers l'autel, disposition typique des églises grandmontaines, toujours aveugles sur les côtés.

Dans le côté nord de l'église, un portique qui vient d'être dégagé par l'ASEG Rauzet était vraisemblablement destiné à abriter les pèlerins et les paroissiens[4]. C'est là que se trouve une porte d'apparat faisant communiquer avec l'intérieur de l'église. Elle est de plein cintre, avec des colonnettes sur les côtés.

La porte des frères convers au sud a aussi été restaurée. On y trouve aussi un armarium, dans lequel était rangés les objets du culte et les livres liturgiques.

La voûte du chœur en arc brisé a été reconstruite par l'ASEG Rauzet, simple et semi-circulaire, sans colonne ni pilastre. Le chœur est légèrement plus large que la nef, ce qui est une spécificité grandmontaine[2]. Les trois baies du chœur et la fenêtre ouest ont reçu des vitraux réalisés par l'atelier de vitrail de Ruffec (Ph. Riffaud, F. Theallier).

Il y avait aussi une double piscine dans le mur sud du chœur dans deux niches couvertes en plein cintre et dont les eaux sacrées s'écoulaient sous l'église. On trouve aussi un deuxième armarium dans le mur nord. L'intérieur de la nef était surmontée d'une moulure en tore qui faisait la séparation avec la voûte du toit[6].

Les bâtiments monastiques

modifier

Les fouilles archéologiques ont permis de retrouver les vestiges du réfectoire, du cellier, de la salle capitulaire et du cloître[4].

Le soin apporté à la construction des bâtiments qui formaient un quadrilatère autour de la cour du cloître est caractéristique.

Sur le mur extérieur oriental de l'église, une trace permet de conclure que le bâtiment attenant était voûté. La cuisine monastique était au sud-ouest, dans le bâtiment existant. Cette cuisine et ce bâtiment avaient été transformés en maison d'habitation, ou logis, lors de l'abandon du prieuré.

Le cloître, les habitations des frères, étaient tous du côté sud de l'église, qui faisait office de lien entre le monde monacal et le monde extérieur. Les eaux usées s'écoulaient vers l'est, vers le vivier et le ruisseau de Rozet.

Rozet a aussi une fontaine de dévotion, dite de Mardi Gras[2]. Le cimetière était au chevet de l'église. Des inhumations ont eu lieu dans l'ancien cloître lorsque la chapelle est devenue succursale paroissiale.

Protection

modifier

L'association de sauvegarde, l'ASEG Rauzet, fondée en 1986 par un couple de passionnés d'architecture, a pour but de restaurer et sauvegarder le site. L'association a acheté le site en 1991, et grâce à des dons, a pu restaurer l'église dès 1993 et entreprendre des recherches archéologiques. En particulier, les murs et le chevet de l'église ont été restaurés. La clé de voûte a été remise en place en 2008 et le toit a été terminé en 2009[7],[2].

Le sol de la parcelle cadastrale E 282, correspondant à l’église, fait l’objet d’une inscription au titre des monuments historiques depuis le . L'église, ainsi que le sol non bâti de plusieurs terrains attenants (parcelles 60 et 283), font l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis le [8].

En 2007, un gîte d'étape est créé dans l'aile ouest qui était devenue une grange. L'église retrouve ainsi sa vocation d'accueil[9].

Notes et références

modifier
  1. Il semble qu'elle servait de cellier; par analogie, certains mentionnent un bâtiment pour les hôtes et pèlerins.
  2. Un chemin secondaire de Saint-Jacques-de-Compostelle partait d'Angoulême vers Dirac, Dignac, Villebois, Le Peyrat, Gurat. D'autres chemins reliaient le Limousin et le Périgord à la Saintonge, en particulier la voie Périgueux-Angoulême par l'abbaye de Brantôme qui passait près de Rozet.
  3. L'information de ce rattachement reste donc à prouver. Les cisterciens sont spirituellement proches des grandmontains, et l'abbaye était aussi géographiquement très proche du prieuré. À Aussac-Vadalle, le prieuré grandmontain Notre-Dame de Ravaud était de la même manière voisin de Sainte-Quitterie, prieuré cistercien.

Références

modifier
  1. Carte IGN
  2. a b c d et e Rauzet, prieuré de l'Ordre de Grandmont
  3. Ce qui fut souvent source de tension dans l'existence de cet ordre, car contraire à l'organisation des autres ordres, où c'est un père de chœur qui doit diriger un monastère. À Grandmont, ce sont souvent des fils de la petite noblesse qui sont convers, et donc parfois prieurs, ce qui est encore une particularité de l'ordre, car ils sont formés de par leur origine à la gestion d'un domaine. Ce sont eux qui prennent les décisions, et non les moines de chœur.
  4. a b c d et e Joël Guitton et al., Les chemins de Saint-Jacques en Charente, éditions Sud Ouest, , 254 p. (ISBN 978-2-8177-0053-3, présentation en ligne), p. 213
  5. Jules Martin-Buchey, Géographie historique et communale de la Charente, édité par l'auteur, Châteauneuf, 1914-1917 (réimpr. Bruno Sépulchre, Paris, 1984), 422 p., p. 140
  6. Site de l'ASEG Rauzet
  7. ASEG Rauzet
  8. « Église de Rozet ou de Rauzet », notice no PA00104324, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
  9. « En Charente, Rauzet, prieuré de l’ordre de Grandmont, renoue avec le pèlerinage et la tradition hospitalière », sur www.saint-jacques.info (consulté le )
  • M. Larigauderie-Beijeaud,« De Fontvive à Grosbot, une abbaye fille d’Obazine en Angoumois », Bulletin de la Société scientifique, historique et archéologique de la Corrèze, t. 134, 2012, p. 129-163.
  • M. Larigauderie-Beijeaud, "« L’abbaye cistercienne Notre dame de Grosbot (Charente), recueil de textes (1121-1791) », Bulletin de l’association pour la sauvegarde du patrimoine religieux de la Charente, n°8, 1998.
  • M. Larigauderie-Beijeaud, « Rauzet dans le contexte seigneurial et grandmontain », « Rauzet dans le contexte seigneurial et grandmontain », Bulletin de la société archéologique et historique de la Charente, 2014, t. 170, p. 51-62.[1]
  • M. Larigauderie-Beijeaud, « Une mention du moulin de Rauzet », Echos grandmontains, grandmontine news n° 16, 2006.[2]

Voir aussi

modifier

Sur les autres projets Wikimedia :

Articles connexes

modifier

Bibliographie

modifier
  • Les églises oubliées du département de la Charente, Germain Gaborit, in Mémoires de la Société archéologique et historique de la Charente (1958), 1959, p.19
  • Jean Becquet, Le bullaire de l'Ordre de Grandmont, , 327 p. (présentation en ligne)

Liens externes

modifier