Projet de Royaume arabe d'Algérie

Le projet de Royaume arabe d'Algérie est un projet politique porté par Napoléon III et Ismaÿl Urbain visant à transformer l'Algérie, alors conquête française récente, en « royaume arabe » associé. Ce projet a vu le jour entre 1860 et 1870, suite au voyage de Napoléon III en Algérie en 1860[1].

Le concept du « Néo - arabisme » est ainsi lancé par Napoléon III qui envisagea la création d'un « Royaume Arabe » s'étendant d'Alger jusqu'à Bagdad. Ce projet est repris par l'idéologie « panarabe » des années 1940, notamment baathiste et nassériste. Le Néo-arabisme se consolide avec la formation de la ligue . arabe, organisation regroupant 22 pays arabophones et créée en 1945[2]. Les bureaux arabes sont mis à contribution notamment par une politique de dé-berbérisation et la généralisation de l'enseignement de l'arabe à l'écrit[3].

La politique du royaume arabe, motivée par Ismaÿl Urbain, et les Saint-simoniens, veut constituer un royaume associé à la France, avec une identité propre et arabe. L'empereur Napoléon serait le souverain autant des Français que des « Arabes ». Dans ce cadre, certaines mesures sont prises en faveur des indigènes comme le Sénatus-consulte de 1863, qui se veut protecteur des droits tribus avec une réorganisation des de leurs terres face à l'avancée économique de la colonisation. Toutefois certains colons s'opposent à ces dispositions jugées trop favorables pour les indigènes[4]. Toutefois dans la Kabylie orientale, cette politique mène à la destruction du cadre tribal, les terres de zaouia ou celles de statut « melk » (privée) sont qualifiées en terre de statut « arch » (tribales) ce qui aboutit à une dépossession des communautés. La « néo-djemaa » instituée par cette loi est une négation de la djemaa traditionnelle, en plus de promouvoir une politique d'arabisation linguistique de la région de la Kabylie Orientale (de Jijel à Skikda) : berbérophone au XIXe siècle, elle est arabophone au XXe siècle[4].

Cette politique du « royaume arabe » donne une conception jacobine de l'Algérie, pour la première fois il en donne une définition centralisée autour d'une seule langue, l'arabe classique, et refoulant les langues berbères et l'arabe dialectal. Napoléon III marque son attachement à un « rêve arabe », ce qui passe par des réformes comme le décret impérial de 21 Avril 1866 portant sur l'enseignement de la langue arabe en primaire et secondaire. Ces écoles bilingues vont voir leur nombre chuter à partir de la IIIe République (1871) où la place de la langue arabe sera plus marginale. Cet épisode de centralisation d'une identité de l'Algérie autour d'une référence arabe influence la politique linguistique et scolaire post-indépendance pour fonder une identité nouvelle fondée sur la légitimité du postulat : « une religion et une langue » : l'arabe et l'islam[5]. Dans une démarche de « réappropriation identitaire », le premier président Ben Bella, déclare le 5 juillet 1963, un an après l'Indépendance : « Nous sommes des Arabes, dix millions d'Arabes... Il n'y a d'avenir pour ce pays que dans l'arabisme ». Ce discours soulève la colère des Berbères car la pluralité ethno-socioculturelle est niée et la diversité perçue comme un germe de division menaçant l'identité nationale. Les références à la berbérité, à la francité, voire à l'algérianité sont considérée comme « une redoutable volonté de semer la division ». L'unilinguisme arabe repose ainsi sur l'éradication de toute autre langue en Algérie[5], mais cette tentative de linguicide, dans la lignée de la politique coloniale est déjouée par la mobilisation des Berbères dont le point culminant est le Printemps berbère de 1980[6]. La politique de Napoléon III aura des détracteur, notamment dans les milieux coloniaux, comme Warnier qui avancent pour leur démonstration que la population est composé de 500 000 Arabes tout au plus, de 1 200 000 Berbères arabisés et de 1 million de Berbères berbérophones au XIXe siècle en Algérie[7].

Références

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  1. Georges (1899-1980) Auteur du texte Spillmann, Napoléon III et le royaume arabe d'Algérie / par le général Georges Spillmann, (lire en ligne), p. 8-17
  2. Dmoh Bacha, Algerie Culture Identite: Maghreb Algerie Maroc Tunisie, Illindi Publishing, (ISBN 978-1-0955-9126-0, lire en ligne), p. 195
  3. Youcef Allioui, Les Archs, tribus berbères de Kabylie: histoire, résistance, culture et démocratie, L'Harmattan, (ISBN 978-2-296-01363-6, lire en ligne), p. 58
  4. a et b Hosni Kitouni, La Kabylie orientale dans l'histoire: pays des Kutama et guerre coloniale, L'Harmattan, (ISBN 978-2-336-29343-1, lire en ligne), « Le royaume arabe et la naissance du parti colonial », p. 178-184
  5. a et b Chahrazed Dahou, Langues et identité(s) en Algérie: Enquêtes sur les représentations sociolinguistiques auprès de jeunes Algériens., Editions L'Harmattan, (ISBN 978-2-14-013096-0, lire en ligne), p. 13 ; 52 - 58
  6. Mots, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, , 143 p. (ISBN 978-2-84788-056-4, lire en ligne)
  7. Christiane Chaulet-Achour, Abécédaires en devenir: idéologie coloniale et langue française en Algérie, Entreprise algérienne de presse, (lire en ligne)

Voir aussi

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Articles connexes

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