Sauroctonus

Genre éteints de thérapsides
Sauroctonus
Description de cette image, également commentée ci-après
Vue d'ensemble de PIN 156/5, le crâne lectotype de Sauroctonus progressus, exposée au musée paléontologique de Moscou, en Russie.
Classification
Règne Animalia
Embranchement Chordata
Sous-embr. Vertebrata
Classe Synapsida
Ordre Therapsida
Sous-ordre  Gorgonopsia
Famille  Gorgonopsidae

Genre

 Sauroctonus
Bystrov, 1955

Espèces de rang inférieur

  • S. progressus (type) Hartmann-Weinberg, 1938
  • S?. parringtoni von Huene, 1950

Synonymes

Sauroctonus (littéralement « tueur de lézard ») est un genre éteint de thérapsides gorgonopsiens ayant vécu durant la fin du Permien moyen (Capitanien) dans ce qui est aujourd'hui la Russie européenne. Les premiers fossiles, ayant été découverts au Tatarstan, furent d'abord considérés comme provenant d'une nouvelle espèce du genre sud-africain Arctognathus, étant nommée A. progressus en 1938. Le taxon sera désigné ainsi jusqu'en 1940, où il sera réattribué au genre Inostrancevia par Ivan Efremov, avant d'être classé de manière définitif dans un genre distinct érigé par Alexeï Bystrov en 1955. Les fossiles les plus complets connu de S. progressus comprennent des éléments crâniens et postcrâniens actuellement tous répertoriés au Tatarstan. Ces éléments montrent que l'animal est un gorgonopsien de taille plutôt moyenne.

Des restes assez complets répertoriés en Tanzanie ont été attribué à une deuxième espèce, S. parringtoni, ce qui en ferait de ce genre l'un des rares gorgonopsiens connus à avoir vécu à la fois en Afrique et en Russie. Cependant, il s'avère que cette assimilation est erronée, car étant principalement basée sur des ressemblances superficielles, laissant ce dernier en attente d'une étude plus approfondie afin de déterminer les relations avec d'autres représentants du groupe. De plus, les études publiées depuis place S. progressus dans un regroupement de gorgonopsiens d'origines russes, placés aux côtés des genres Suchogorgon, Pravoslavlevia et Inostrancevia, en raison de certaines caractéristiques crâniennes partagés.

Historique des recherches modifier

S. progressus modifier

En 1938, la paléontologue soviétique Alexandra Paulinovna Hartmann-Weinberg décrit des restes fossiles de gorgonopsiens ayant été découverts au Tatarstan, en actuelle Russie. L'un des fossiles décrit dans son article est un crâne incomplet mais bien conservé, catalogué PIN 156/5. Hartmann-Weinberg considère ce spécimen comme appartenant à une nouvelle espèce du genre sud-africain Arctognathus, le désignant sous le nom d'Arctognathus progressus. L'épithète spécifique progressus est nommé incorrectement en raison de sa supposé proximité morphologique avec les cynodontes, qui ont un grand nombre de caractéristiques progressives et plus proches des mammifères que les autres gorgonopsiens[1]. Il s'est très vite avéré que l'espèce n'est pas plus lié à ces mêmes cynodontes que les autres gorgonopsiens, et en 1940, soit deux ans seulement après la publication de son article, un des employés d'Hartmann-Weinberg, le réputé Ivan Efremov, reclasse le taxon comme une nouvelle espèce du genre Inostrancevia, le renommant pour le coup Inostrancevia progressus[2]. C'est en 1955 qu'Alexeï Bystrov propose un genre distinct pour l'espèce, qu'il nomme Sauroctonus, et désigne le spécimen PIN 156/5 comme le lectotype du taxon[3], une proposition qui sera très vite reconnue ultérieurement[4],[5],[6],[2],[7],[8],[9]. Le nom générique Sauroctonus vient du grec ancien σαῦρος / saûros « lézard » et κτόνος / ctonos « tueur », pour donner littéralement « tueur de lézard », en référence à son régime alimentaire carnivore[3],[10]. Tous les spécimens connus proviennent de la localité type d'où le premier crâne connu a été découvert. Parmi ceux-ci figure PIN 156/6, un spécimen contenant un crâne écrasé, une partie antérieur du squelette postcrânien et des nombreux os isolés[2],[10].

S.? parringtoni modifier

Le spécimen GPIT/RE/7113, précédemment attribué à une deuxième espèce du genre Sauroctonus.

Tous les restes confirmés de Sauroctonus ne sont actuellement répertoriées que dans le territoire russe et appartiennent à l'espèce S. progressus, principalement représentés par du matériel crânien[2],[10],[8]. En 1950, un squelette relativement complet, ayant été découvert dans la formation d'Usili en Tanzanie, catalogué GPIT/RE/7113, est décrit par le paléontologue allemand Friedrich von Huene comme un représentant de l'espèce Scymnognathus parringtoni[N 1], étant nommé en l'honneur de Francis Rex Parrington (en)[11],[10]. En 1970, le squelette est réidentifié par la paléontologue française Denise Sigogneau-Russell comme un spécimen d'Aelurognathus, étant renommé Aelurognathus parringtoni[4]. C'est à partir de 2007 que la paléontologue Eva V. I. Gebauer la reclasse comme un représentant africain du genre Sauroctonus[6], une affirmation qu'elle confirmera à nouveau en 2014[7]. Cependant, cette affiliation est formellement rejetée en 2018, car les nouvelles classifications basées sur les traits anatomiques crâniennes montrent que les gorgonopsiens dérivés sont séparées en deux clades d'origine russe et africain, laissant GPIT/RE/7113 comme un incertae sedis au sein de ce dernier groupe[8].

D'autres spécimens furent attribués à cette espèce, mais aucune affiliation concrète ne fut élaborée à ce jour. Par exemple, le crâne bien conservé catalogué SAM-PK-K10034, mentionné brièvement dans une étude concernant la vision nocturne des synapsides non mammaliens, est désigné sous le nom de S. cf. parringtoni[12].

Description modifier

Diagramme reconstituant PIN 156/5, le crâne lectotype de S. progressus.

Le crâne de Sauroctonus mesure 22,5 cm de long, indiquant qu'il devrait être un gorgonopsien de taille moyenne. Le crâne est étroit postérieurement avec des orbites de petite taille. La fosse temporale est allongée, les arcs crâniens sont étroits et l'os dentaire est modérément élevé[13]. Tout comme Viatkogorgon, Sauroctonus possède également des tubérosités palatines hautes qui ont de nombreuses dents, les os peu sculptés et des incisives à peine plus grandes que les dents postcanines[8]. Il y a d'ailleurs 4 à 6 dents postcanines sur les maxillaires[14],[2].

Classification modifier

Reconstitution par Dimitri Bogdanov d'un S. progressus.

La position taxonomique de Sauroctonus a changé durant mainte reprise au fil des décennies. En 1974, le paléontologue russe Leonid Petrovitch Tatarinov classe Sauroctonus au sein de la famille des Gorgonopsidae, et dans la sous-famille des Cynariopinae, aux côtés de divers genres africains tels que Cynariops, Scylacognathus ou Scylacops[5]. Dans un livre publié en 1989, Sigogneau-Russell laisse Sauroctonus comme un gorgonopsien indeterminée[13]. Mikhaïl Ivakhnenko classe toujours Sauroctonus au sein des Gorgonopsidae en 2003, sans pour autant l'attribuer à une quelconque sous-taxon[14]. Dans sa thèse de 2007, Gebauer considère Sauroctonus comme un Gorgonopsidae basal[6]. Ces changements répétitifs de classification ont laissé Sauroctonus dans une position incertaine parmi les gorgonopsiens, certains le voyant comme proche des genres africains, tandis que d'autres le considèrent comme appartenant à une lignée à par entière[8].

C'est à partir de 2018 que les paléontologues Christian Kammerer et Vladimir Masyutin reclassent de manière définitive Sauroctonus dans un regroupement de gorgonopsiens russes, aux côtés des genres Inostrancevia, Pravoslavlevia et Suchogorgon, notamment pour certaines caractéristiques crâniennes partagées, plus précisément pour le contact étroit entre les ptérygoïde et le vomer[8]. Cette classification sera immédiatement suivie par les prochaines études[9],[15].

Ci-dessous, le cladogramme du taxon Gorgonopsia selon Kammerer & Rubidge (2022)[15], qui suit en grande partie les cladogrammes précédemment établis depuis 2018[8],[9] :

 Gorgonopsia 

Nochnitsa




Viatkogorgon



Clade russe

Suchogorgon




Sauroctonus




Pravoslavlevia



Inostrancevia





Clade africain

Phorcys



Eriphostoma



Gorgonops




Cynariops




Lycaenops




Smilesaurus



Arctops





Arctognathus



Rubidgeinae










Paléobiologie modifier

L'une des caractéristiques les plus reconnaissables parmi les gorgonopsiens est la présence de longues canines ressemblant à des sabres sur la mâchoire supérieure et inférieure. Une étude publié en 2020 montre que plusieurs prédateurs préhistoriques possédant cette morphologie comparable auraient eu diverses techniques de mise à mort de proies possibles. Chez les gorgonopsiens, Sauroctonus s'avère avoir eu une ouverture de la mâchoire réduite, contrairement à son proche parent Inostrancevia, indiquant qu'il n'aurait pas été aussi spécialisé à la chasse que les autres représentants du groupe[16].

Paléoécologie modifier

S. progressus est connu de la localité de Sjomin Ravine, situé dans la république du Tatarstan, au nord-est de la Russie européenne. Ce site fossilifère, ayant été découvert en 1938 et datant de la fin du Permien moyen (Capitanien), est principalement représentée par des argiles et limons avec des couches séparées de grès polymictique fin, qui contient des fossiles de tétrapodes, représentés par des os isolés et des squelettes fragmentaires, ainsi que par des restes de flore rares. En dehors de S. progressus, les principaux tétrapodes identifiés dans la zone incluent le thérapside dicynodonte Idelesaurus (en), le reptiliomorphe Chroniosuchus, le temnospondyle Dvinosaurus et même des sauropsides, incluant le paréiasaure Scutosaurus et l'archosauriforme Eorasaurus (en)[17].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Le genre Scymnognathus est aujourd'hui considéré comme un synonyme junior de Gorgonops[6].

Références modifier

  1. (en) A. P. Hartmann-Weinberg, « Gorgonopsians as time indicators », Problems of Paleontology, vol. 4,‎ , p. 47-123
  2. a b c d et e (en) Michael J. Benton, Mikhail A. Shishkin, David M. Unwin et Evgenii N. Kurochkin, The age of dinosaurs in Russia and Mongolia, Cambridge, Cambridge University Press, , 696 p. (ISBN 978-0-521-55476-3, lire en ligne)
  3. a et b (en) A. P. Bystrov, « A gorgonopsian from the Upper Permian beds of the Volga », Voprosy Paleontologii,‎ , p. 7-18
  4. a et b Denise Sigogneau-Russell, Révision systématique des gorgonopsiens sud-africains, Paris, Éditions du Centre national de la recherche scientifique, , 416 p. (OCLC 462558622)
  5. a et b (en) Leonid P. Tatarinov, Theriodonts of the USSR, vol. 143, Nauka, , 1–226 p..
  6. a b c et d (en + de) E. V. I. Gebauer, « Phylogeny and Evolution of the Gorgonopsia with a Special Reference to the Skull and Skeleton of GPIT/RE/7113 », Eberhard-Karls University of Tübingen,‎ (lire en ligne [archive du ] [PDF]).
  7. a et b (en) Eva V. I. Gebauer, « Re-assessment of the Taxonomic Position of the Specimen GPIT/RE/7113 (Sauroctonus parringtoni comb. nov., Gorgonopsia) », dans Christian F. Kammerer, Kenneth D. Angielczyk, Jörg Fröbisch, Early Evolutionary History of the Synapsida, Springer Dordrecht, , 337 p. (ISBN 978-94-007-6840-6, OCLC 876724249, DOI 10.1007/978-94-007-6841-3_12, S2CID 127528869), p. 185-207. Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  8. a b c d e f et g (en) Christian F. Kammerer et Vladimir Masyutin, « Gorgonopsian therapsids (Nochnitsa gen. nov. and Viatkogorgon) from the Permian Kotelnich locality of Russia », PeerJ, vol. 6,‎ , e4954 (PMID 29900078, PMCID 5995105, DOI 10.7717/peerj.4954 Accès libre).
  9. a b et c (en) Eva-Maria Bendel, Christian F. Kammerer, Nikolay Kardjilov, Vincent Fernandez et Jörg Fröbisch, « Cranial anatomy of the gorgonopsian Cynariops robustus based on CT-reconstruction », PLOS ONE, vol. 13, no 11,‎ , e0207367 (PMID 30485338, PMCID 6261584, DOI 10.1371/journal.pone.0207367 Accès libre, Bibcode 2018PLoSO..1307367B)
  10. a b c et d (en) « Sauroctonus », sur Paleofile
  11. (de) F. von Huene, « Die Theriodontier des ostafrikanischen Ruhuhu-Gebietes in der Tübinger Sammlung », Neues Jahrbuch für Geologie und Paläontologie, vol. 92,‎ , p. 47–136
  12. (en) K. D. Angielczyk et L. Schmitz, « Nocturnality in synapsids predates the origin of mammals by over 100 million years », Proceedings of the Royal Society B, vol. 281, no 1793,‎ (PMID 25186003, PMCID 4173690, DOI 10.1098/rspb.2014.1642 Accès libre)
  13. a et b (en) Denise Sigogneau-Russell, Theriodontia I: Phthinosuchia, Biarmosuchia, Eotitanosuchia, Gorgonopsia, vol. 17 B/I, Stuttgart, Gustav Fischer Verlag, coll. « Encyclopedia of Paleoherpetology », (ISBN 978-3437304873), p. 127.
  14. a et b (en) M. F. Ivakhnenko, « Eotherapsids from the East European placket », Paleontological Journal, vol. 37, no S4,‎ , p. 339–465
  15. a et b (en) Christian F. Kammerer et Bruce S. Rubidge, « The earliest gorgonopsians from the Karoo Basin of South Africa », Journal of African Earth Sciences, vol. 194,‎ , p. 104631 (DOI 10.1016/j.jafrearsci.2022.104631, Bibcode 2022JAfES.19404631K, S2CID 249977414)
  16. (en) Stephan Lautenschlager, Borja Figueirido, Daniel D. Cashmore, Eva-Maria Bendel et Thomas L. Stubbs, « Morphological convergence obscures functional diversity in sabre-toothed carnivores », Proceedings of the Royal Society B, vol. 287, no 1935,‎ , p. 1-10 (ISSN 1471-2954, PMID 32993469, PMCID 7542828, DOI 10.1098/rspb.2020.1818 Accès libre)
  17. (en) M. S. Vdovets, V. V. Silantiev et V. V. Mozzherin, « A National Geopark in the Republic of Tatarstan (Russia): a Feasibility Study », Geoheritage, vol. 2, no 1,‎ , p. 25-37 (DOI 10.1007/s12371-010-0010-0, S2CID 128952446, lire en ligne)

Voir aussi modifier

Sur les autres projets Wikimedia :

Annexes modifier

Liens externes modifier