« Édouard Manet » : différence entre les versions

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{{Voir homonymes|Manet}}
{{Infobox Artiste
| nom = Édouard Manet
| autres noms =
| légende = Portrait photographique d’Édouard Manet par [[Nadar]] (1874).
| nom de naissance =
| date de naissance = 23 janvier 1832
| lieu de naissance = [[Ancien 10e arrondissement de Paris]], ([[Monarchie de Juillet|France]])
| date de décès = 30 avril 1883
| lieu de décès = [[8e arrondissement de Paris|Paris 8{{e}}]], ([[Troisième République (France)|France]])
| nationalité = {{drapeau2[[Nationalité française|France|domaine=Gentilé}}Française]]
| autres activités =
| formation =
| maîtres = [[Thomas Couture]]
| élèves = [[Eva Gonzalès]]
| mouvement = [[impressionnismeImpressionnisme]] et [[Réalisme (peinture)|réalisme]]
| récompenses = [[1882]] : [[Ordre national de la Légion d'honneur|chevalier de la Légion d'honneur]] remise par son ami [[Antonin Proust]]
| œuvres principales = * ''[[Le Déjeuner sur l'herbe]]'' (1862)<br>
* ''[[Olympia (Manet)|Olympia]]'' (1863)
| image = Édouard Manet, en buste, de face - Nadar.jpg
| activités = [[Artiste peintre|Peintre]], [[Gravure|graveur]]
| mécènes =
| influencé par =
| influence de =
| compléments =
| signature = Manet autograph.png
}}
'''Édouard Manet''', né le {{Date de naissance-|23|janvier|1832}} à [[Paris]] et mort le {{Date de décès-|30|avril|1883}} dans la même ville, est un [[Artiste peintre|peintre]] et [[Gravure|graveur]] [[Nationalité française|français]] majeur de la fin du {{s-|XIX}}. Précurseur de la [[Art moderne|peinture moderne]], qu'il affranchit de l'[[Art académique|académisme]]<ref group="note">{{citation|Manet figure dans l'[[histoire de l'art]], dans l'histoire de la peinture du {{s-|XIX}}, comme celui qui a modifié les techniques et les modes de représentation picturale, de manière qu'il a rendu possible ce mouvement de l'[[impressionnisme]] qui a occupé le devant de la scène de l'histoire de l'art pendant presque toute la seconde moitié du {{s-|XIX}}. Mais il a aussi opéré des modifications qui, au-delà de l'impressionnisme, ont rendu possible la peinture qui allait venir après.}} - [[Michel Foucault]], ''La Peinture de Manet'', conférence à Tunis, le 20 mai 1971. [http://foucault.info/documents/manet/ Michel Foucault. La peinture de Manet].</ref>, Édouard Manet est à tort considéré comme l'un des pères de l'[[impressionnisme]]<ref group="note">En mai 1874, Manet se tient à l'écart de la [[Première exposition des peintres impressionnistes|première exposition impressionnistes]], de ceux qu'une partie de la presse va railler. Il passe pourtant alors pour leur « chef », désignation dont certains de ses amis vont s'emparer afin de renforcer son autorité. (...) Plutôt que d'adopter l'esthétique émergente, Manet va l'adapter à ses visées, dont le Salon - espace public par excellence - reste le lieu idéal. » ''[https://www.musee-orsay.fr/fr/evenements/expositions/aux-musees/presentation-detaillee/article/manet-inventeur-du-moderne-27127.html?tx_ttnews%5BbackPid%5D=649&cHash=9d21b81c43 Manet, inventeur du Moderne]'', exposition au musée d'Orsay 5 avril - 3 juillet 2011.</ref> : il s'en distingue en effet par une facture soucieuse du réel qui n'utilise pas (ou peu) les nouvelles techniques de la couleur et le traitement particulier de la lumière. Il s'en rapproche cependant par certains thèmes récurrents comme les portraits, les paysages marins, la vie parisienne ou les natures mortes, tout en peignant de façon personnelle, dans une première période, des scènes de genre : sujets espagnols notamment d'après [[Diego Vélasquez|Vélasquez]] et [[odalisque]]s d'après [[Titien|Le Titien]].
 
Il refuse de suivre des études de droit et il échoue à la carrière d'officier de marine militaire. Le jeune Manet entre en [[1850 en arts plastiques|1850]] à l'atelier du peintre [[Thomas Couture]] où il effectue sa formation de peintre, le quittant en 1856. En [[1860 en arts plastiques|1860]], il présente ses premières toiles, parmi lesquelles le ''[[Portrait de M. et Mme Auguste Manet|Portrait de M. et {{Mme}} Auguste Manet]]''.
'''Édouard Manet,''' né le {{Date|23|janvier|1832}} à Paris et mort le {{Date|30|avril|1883}} à Paris, est un [[Artiste peintre|peintre]] et [[Gravure|graveur]] [[Nationalité française|français]] majeur de la fin du {{XIXe siècle}}. Précurseur de la peinture moderne qu'il affranchit de l'académisme<ref group="note">{{citation|Manet figure dans l'histoire de l'art, dans l'histoire de la peinture du {{s|XIX}}, comme celui qui a modifié les techniques et les modes de représentation picturale, de manière qu'il a rendu possible ce mouvement de l'impressionnisme qui a occupé le devant de la scène de l'histoire de l'art pendant presque toute la seconde moitié du {{s-|XIX}}. Mais il a aussi opéré des modifications qui au-delà de l'impressionnisme, ont rendu possible la peinture qui allait venir après.}} - [[Michel Foucault]], ''La peinture de Manet'', conférence à Tunis, le 20 mai 1971. [http://foucault.info/documents/manet/ Michel Foucault. La peinture de Manet].</ref>, Édouard Manet est à tort considéré comme l'un des pères de l'[[impressionnisme]]<ref group="note">En mai 1874, Manet s'est tenu à l'écart de la [[première exposition des peintres impressionnistes|première exposition impressionnistes]], de ceux qu'une partie de la presse va railler. Il passait pourtant alors pour leur « chef », désignation dont certains de ses amis vont s'emparer afin de renforcer son autorité. (...) Plutôt que d'adopter l'esthétique émergente, Manet va l'adapter à ses visées, dont le Salon - espace public par excellence - reste le lieu idéal. » [http://www.musee-orsay.fr/fr/evenements/expositions/au-musee-dorsay/presentation-detaillee/page/3/article/manet-inventeur-du-moderne-27127.html ''Manet, inventeur du Moderne''], exposition au musée d'Orsay 5 avril - 3 juillet 2011.</ref> : il s'en distingue en effet par une facture soucieuse du réel qui n'utilise pas (ou peu) les nouvelles techniques de la couleur et le traitement particulier de la lumière. Il s'en rapproche cependant par certains thèmes récurrents comme les portraits, les paysages marins, la vie parisienne ou encore les natures mortes, tout en peignant de façon personnelle, dans une première période, des scènes de genre : sujets espagnols notamment d'après [[Diego Vélasquez|Vélasquez]] et [[odalisque]]s d'après [[Le Titien]].
 
Ses tableaux suivants, ''[[Lola de Valence]]'', ''La Femme veuve'', ''[[Combat de taureau]]'', ''[[Le Déjeuner sur l'herbe]]'' ou ''[[Olympia (Manet)|Olympia]]'', font scandale. Manet est rejeté des expositions officielles et joue un rôle de premier plan dans la « bohème élégante ». Il y fréquente des artistes qui l'admirent, comme [[Henri Fantin-Latour]] ou [[Edgar Degas]], et des hommes de lettres comme le poète [[Charles Baudelaire]] ou le romancier [[Émile Zola]], dont il peint un portrait, ''[[Portrait d'Émile Zola]]''. Zola prend activement la défense du peintre au moment où la presse et les critiques s'acharnent sur ''Olympia''<ref group="note">{{Citation|Cher Monsieur Zola, je suis heureux et fier d'être défendu par un homme de votre talent [...] Si cela vous allait, je suis tous les jours au Café de Bade de 5 h et demi à 6 h et demi. - Première lettre de celles écrites à Zola, le 7 mai 1866 - O.C. XII p.768-818 }}.</ref>. À cette époque, il peint ''[[Le Joueur de fifre]]'' ([[1866 en arts plastiques|1866]]), le sujet historique de ''[[L'Exécution de Maximilien]]'' ([[1867 en littérature|1867]]) inspiré de la gravure de [[Francisco de Goya]].
Il refuse de suivre des études de droit et il échoue à la carrière d'[[Marine marchande|officier de marine marchande]]. Le jeune Manet entre en 1850 à l'atelier du peintre [[Thomas Couture]] où il commence sa formation de peintre, et qu'il quitte en 1856. Dès [[1860]], il présente ses premières toiles parmi lesquelles le ''[[Portrait de M. et Mme Auguste Manet|Portrait de M. et {{Mme}} Auguste Manet]]''.
 
Son œuvre comprend des marines comme ''[[Clair de lune sur le port de Boulogne]]'' ([[1869 en arts plastiques|1869]]) ou des courses : ''[[Les Courses à Longchamp]]'' en [[1864 en arts plastiques|1864]], qui valent au peintre un début de reconnaissance.
Ses tableaux suivants, ''[[Lola de Valence]]'', ''La Femme veuve'', ''[[Combat de taureau]]'', ''[[Le Déjeuner sur l'herbe]]'' ou ''[[Olympia (Manet)|Olympia]]'', font scandale. Manet est rejeté des expositions officielles, et joue un rôle de premier plan dans la « bohème élégante ». Il y fréquente des artistes qui l'admirent comme [[Henri Fantin-Latour]] ou [[Edgar Degas]] et des hommes de lettres comme le poète [[Charles Baudelaire]] ou le romancier [[Émile Zola]] dont il peint un portrait : ''[[Portrait d'Émile Zola]]''. Zola a pris activement la défense du peintre au moment où la presse et les critiques s'acharnaient sur ''Olympia''<ref group="note">{{Citation| Cher Monsieur Zola, je suis heureux et fier d'être défendu par un homme de votre talent [...] Si cela vous allait, je suis tous les jours au Café de Bade de 5h et demi à 6h et demi- Première lettre de celles écrites à Zola, le 7 mai 1866 - O.C. XII pp.768-818 }}.</ref>. À cette époque, il peint ''[[Le Joueur de fifre]]'' (1866), le sujet historique de ''[[L'Exécution de Maximilien]]'' (1867) inspiré de la gravure de [[Francisco de Goya]].
 
Après la [[guerre franco-allemande de 1870]], à laquelle il participe<ref group="note">La correspondance de Manet pendant le siège de Paris par les Prussiens (et pendant la Commune) montre à quel point, passionné par l'observation des événements, il néglige la peinture. Édouard Manet, ''Correspondance du siège de Paris et de la Commune 1870-1871'', textes réunis et présentés par Samuel Rodary, éd. L’Échoppe, 2014.</ref>, Manet soutient les [[Impressionnisme|impressionnistes]], parmi lesquels il a des amis proches comme [[Claude Monet]], [[Auguste Renoir]] ou [[Berthe Morisot]], laquelle devient sa belle-sœur et dont sera remarqué le célèbre portrait, parmi ceux qu'il fera d'elle, ''[[Berthe Morisot au bouquet de violettes]]'' ([[1872 en arts plastiques|1872]]). À leur contact, il délaisse en partie la peinture d'atelier pour la peinture en plein air à [[Argenteuil (Val-d'Oise)|Argenteuil]] et [[Gennevilliers]], où il possède une maison. Sa palette s'éclaircit, comme en témoigne ''[[Argenteuil (Manet)|Argenteuil]]'' de 1874. Il conserve cependant son approche personnelle faite de composition soignée et soucieuse du réel, et continue à peindre de nombreux sujets, en particulier des lieux de loisirs comme ''Au Café'' ([[1878 en arts plastiques|1878]]), ''La Serveuse de Bocks'' ([[1879 en arts plastiques|1879]]) et sa dernière grande toile, ''[[Un bar aux Folies Bergère]]'' ([[1881 en arts plastiques|1881]]-[[1882 en arts plastiques|1882]]), mais aussi le monde des humbles dans ''Paveurs de la Rue Mosnier'' ou des autoportraits (''[[Autoportrait à la palette]]'', 1879).
Son œuvre comprend aussi des marines comme ''[[Clair de lune sur le port de Boulogne]]'' (1869) ou des courses : ''[[Les Courses à Longchamp]]'' en 1864 qui valent au peintre un début de reconnaissance.
 
Manet parvient à donner des lettres de noblesse aux [[Nature morte|natures mortes]], genre qui occupait jusque-là dans la peinture une place décorative, secondaire. Vers la fin de sa vie (1880-1883), il s'attache à représenter fleurs, fruits et légumes en leur appliquant des accords de couleur dissonants, à l'époque où la couleur pure meurt, ce qu'[[André Malraux]] est un des premiers à souligner dans ''[[Les Voix du silence]]''<ref name="Malraux">{{harvsp|Malraux|1951|p=102|id=Malraux}}.</ref>. Le plus représentatif de cette évolution est ''[[L'Asperge]]'', qui témoigne de sa faculté à dépasser toutes les conventions. Manet multiplie aussi les portraits de femmes (''[[Nana (Manet)|Nana]]'', ''[[La Blonde aux seins nus]]'', [[Berthe Morisot]]) ou d'hommes qui font partie de son entourage ([[Stéphane Mallarmé]], [[Théodore Duret]], [[Georges Clemenceau]], [[Marcellin Desboutin]], [[Émile Zola]], [[Henri Rochefort]]). À partir des années 1880, il est de plus en plus reconnu. Il reçoit la [[Ordre national de la Légion d'honneur|Légion d'honneur]] le {{date-|1 janvier 1882}}. Cependant, victime de [[syphilis]] et de [[Rhumatologie|rhumatismes]], il souffre, depuis 1876, de sa jambe gauche, qu'il faudra finalement amputer.
Après la [[guerre franco-prussienne de 1870]] à laquelle il participe<ref group="note">La correspondance de Manet pendant le siège de Paris par les Prussiens (et pendant la Commune) montre à quel point, passionné par l'observation des événements, il néglige la peinture. Édouard Manet, ''Correspondance du siège de Paris et de la Commune 1870-1871'', textes réunis et présentés par Samuel Rodary, éd. L’Échoppe, 2014.</ref>, Manet soutient les [[Impressionnisme|impressionnistes]] parmi lesquels il a des amis proches comme [[Claude Monet]], [[Auguste Renoir]] ou [[Berthe Morisot]] qui devient sa belle-sœur et dont sera remarqué le célèbre portrait, parmi ceux qu'il fera d'elle, ''[[Berthe Morisot au bouquet de violettes]]'' (1872). À leur contact, il délaisse en partie la peinture d'atelier pour la peinture en plein air à [[Argenteuil (Val-d'Oise)|Argenteuil]] et [[Gennevilliers]], où il possède une maison. Sa palette s'éclaircit comme en témoigne ''[[Argenteuil (Manet)|Argenteuil]]'' de 1874. Il conserve cependant son approche personnelle faite de composition soignée et soucieuse du réel, et continue à peindre de nombreux sujets, en particulier des lieux de loisirs comme ''Au Café'' (1878), ''La Serveuse de Bocks'' (1879) et sa dernière grande toile ''[[Un bar aux Folies Bergère]]'' (1881-1882), mais aussi le monde des humbles ''Paveurs de la Rue Mosnier'' ou des autoportraits (''[[Autoportrait à la palette]]'', 1879).
 
En 1883, Édouard Manet meurt à {{nobr|51 ans}} de la syphilis et d'une [[gangrène]] qu'il a contractée à [[Rio de Janeiro]], et laisse plus de quatre cents toiles, des pastels, des esquisses et des aquarelles. Ses plus grandes œuvres sont visibles dans la plupart des musées du monde, particulièrement au [[musée d'Orsay]] à Paris.
Manet parvient à donner des lettres de noblesse aux natures mortes, genre qui occupait jusque-là dans la peinture une place décorative, et secondaire. Vers la fin de sa vie (1880-1883) il s'attache à représenter fleurs, fruits et légumes en leur appliquant des accords de couleur dissonants, à l'époque où la couleur pure mourait, ce qu'[[André Malraux]] est un des premiers à souligner dans ''Les Voix du silence''<ref name="Malraux">{{harvsp|Malraux|1951|p=102|id=Malraux}}.</ref>. Le plus représentatif de cette évolution est ''[[L'Asperge]]'' qui émoigne de sa faculté à dépasser toutes les conventions. Manet multiplie aussi les portraits de femmes (''[[Nana (Manet)|Nana]]'', 1877, ''Femme blonde avec seins nus'', [[Berthe Morisot]] ou d'hommes qui sont font partie de son entourage : [[Stéphane Mallarmé]], [[Théodore Duret]], [[Georges Clemenceau]], [[Marcellin Desboutin]], [[Émile Zola]] [[Henri Rochefort]]. À partir des années 1880, il est de plus en plus reconnu. Il reçoit la [[Ordre national de la Légion d'honneur|Légion d'honneur]] le {{1er}} janvier 1882. Cependant, victime de [[syphilis]] et de rhumatismes, il souffre, depuis 1876, de sa jambe gauche qu'il faudra amputer.
 
Ni impressionniste, ni réaliste, Manet adresse aux critiques d'art des questions restant sans réponse : {{Citation bloc|S'agit-il du dernier des grands peintres classiques ou du premier des ''révolutionnaires'' ? Fut-il l'enfant terrible du ''grand art'' persistant, l'élève un peu espiègle des maîtres, le restaurateur de la vraie tradition au-delà de celle qu'on enseignait à l'école des Beaux-Arts ? — ou bien le grand précurseur, l'initiateur de la ''peinture pure'' ? Bien évidemment, tout cela à la fois, (répond [[Françoise Cachin]]), et dans des proportions dont seules les alternances du goût sont juges<ref>Françoise Cachin, introduction au catalogue de l'exposition Manet au [[Galeries nationales du Grand Palais]], Paris, avril-août 1983 ; [[Metropolitan Museum of Art]], New York, septembre- novembre 1983{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=219-220|id=CMWB}}.</ref>.}}
Édouard Manet meurt de la [[gangrène]] à 51 ans en [[1883]] et laisse plus de quatre cents toiles, des pastels, esquisses et aquarelles. Ses plus grandes œuvres sont aujourd'hui visibles dans tous les musées du monde, particulièrement au [[musée d'Orsay]] à Paris.
 
Ni impressionniste, ni réaliste, Manet a posé aux critiques d'art des questions restées sans réponses : {{Citation bloc|S'agit-il du dernier des grands peintres classiques ou du premier des ''révolutionnaires'' ? Fut-il l'enfant terrible du ''grand art'' persistant, l'élève un peu espiègle des maîtres, le restaurateur de la vraie tradition au-delà de celle qu'on enseignait à l'école des Beaux-Arts ? — ou bien le grand précurseur, l'initiateur de la ''peinture pure'' ? Bien évidemment, tout cela à la fois, (répond [[Françoise Cachin]]), et dans des proportions dont seules les alternances du goût sont juges<ref>Françoise Cachin, introduction au catalogue de l'exposition Manet au [[Galeries nationales du Grand Palais]] Paris avril-août 1983, [[Metropolitan Museum of Art]], New York, septembre- novembre 1983{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=219-220|id=CMWB}}.</ref>}}
 
== Jeunesse et formation ==
=== Enfance ===
[[ImageFichier:Edouard Manet 077.jpg|thumbvignette|''[[Portrait de M. et Mme Auguste Manet|Portrait de M. et {{Mme}} Auguste Manet]]'', [[1860]], ({{dunité|111.5|91|cm}}), [[Paris]], [[musée d'Orsay]].]]
[[Fichier:Plaque Édouard Manet, 5 rue Bonaparte, Paris 6.jpg|vignette|Plaque au {{numéro}}5 [[rue Bonaparte]] (ancienne rue des Petits-Augustins).]]
Édouard Manet naît le {{Date|23|janvier|1832}} au [[rue Bonaparte|5 rue des Petits-Augustins]]<ref>[http://archives.paris.fr/arkotheque/visionneuse/visionneuse.php?arko=YTo2OntzOjQ6ImRhdGUiO3M6MTA6IjIwMjEtMDItMDMiO3M6MTA6InR5cGVfZm9uZHMiO3M6MTE6ImFya29fc2VyaWVsIjtzOjQ6InJlZjEiO2k6Mzk7czo0OiJyZWYyIjtpOjIzNzE1O3M6MTY6InZpc2lvbm5ldXNlX2h0bWwiO2I6MTtzOjIxOiJ2aXNpb25uZXVzZV9odG1sX21vZGUiO3M6NDoicHJvZCI7fQ==#uielem_move=134%2C-289&uielem_rotate=F&uielem_islocked=0&uielem_zoom=63 Archives de Paris] acte de naissance de l'état civil reconstitué dressé le 26/01/1832, vue 30 / 51</ref>, dans le [[quartier Saint-Germain-des-Prés]] dans une famille de la bourgeoisie parisienne. Son père, Auguste Manet ({{date|31|août|1796}}-{{date|25|septembre|1862}}), était un haut fonctionnaire au [[ministère de la Justice (France)|ministère de la Justice]]<ref name="CMWB 504" />. Selon les biographes, il occupait le poste de chef de cabinet du [[GardeMinistre desde Sceauxla enJustice (France)|garde des Sceaux]]<ref name="Monneret 477">{{harvsp|Monneret|1987a|p=477}}.</ref> ou de secrétaire général du [[Ministère de la Justice (France)|ministère de la Justice]]<ref name="Laclotte-Cuzin 553">{{harvsp|Laclotte|Cuzin|1987|p=553}}.</ref>. La mère d'Édouard, Eugénie Désirée Manet (née Fournier) ({{date|11|février|1811}}-{{date|8|janvier|1885}}), était la fille d’un [[Diplomatie|diplomate]] affecté à [[Stockholm]] et la filleule du [[Charles XIV Jean de Suède|maréchal Bernadotte]]<ref name="Laclotte-Cuzin 553"/>{{,}}<ref name="Monneret 477"/>.
 
Bien qu’élevé dans une famille austère, le jeune Édouard découvre rapidement le [[Art|monde artistique]] grâce à l’influence d’un oncle monarchiste assez excentrique (l'enfant est témoin de ses discussions politiques avec son père, fervent républicain), le [[capitaine (France)|capitaine]] Édouard Fournier, qui fait apprécier les grands maîtres à ses neveux Édouard et Eugène, son frère, dans les galeries du [[musée du Louvre]], les faisant notamment visiter la [[Galerie espagnole]]<ref>{{ouvrageOuvrage|auteurauteur1=Dominique Lobstein|titre=Manet|éditeur=[[Éditions Jean-Paul Gisserot]]|dateannée=2002|passage=8|isbn=|lire en ligne=}}.</ref>.
 
À l’âge de douze ans, Édouard Manet est envoyé au collège Rollin, aujourd’hui [[collège-lycée Jacques-Decour]], situé à l'époque rue des Postes (aujourd'hui [[rue Lhomond]]), dans le [[quartier du Val-de-Grâce]] où loge sa famille, non loin du [[jardin du Luxembourg]]. Il a notamment pour professeur d’[[histoire]] le jeune [[Henri Wallon (1812-1904)|Henri Wallon]], dont l'[[Amendement Wallon|amendement]] allait plus tard constituer la pierre angulaire de la [[Troisième République (France)|Troisième République]]. La scolarité de Manet semble avoir été décevante : le jeune garçon se montre régulièrement dissipé, assez peu appliqué et fait parfois preuve d’insolence. Son camarade [[Antonin Proust]] rapporte par exemple une altercation du futur peintre révolté avec Wallon au sujet d’un texte de [[Denis Diderot|Diderot]] sur la [[mode (habillement)|mode]] : le jeune homme se serait exclamé qu’{{citation|il faut être de son temps, faire ce que l’on voit sans s’inquiéter de la mode<ref name="Proust">[[Antonin Proust]], ''Édouard Manet, Souvenirs'', ''La Revue blanche'', février-mai 1897.</ref>}}.
 
On sait très peu de chose sur la petite enfance de Manet qui est expédiée en quelques pages, en référence à sa famille, aisée dans toutes les biographies depuis celle de Théodore Duret<ref>[https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1117810/f9.image.r=Manet,+%C3%89douard.langFR enfance de Manet par Duret].</ref> jusqu'aux plus récentes qui évoquent rapidement l'environnement familial pour passer à l'adolescence, puis au peintre lui-même : {{Citation|L'artiste perçoit pendant quatre ans 20 000 fr de loyer annuel sur une propriété foncière héritée à la mort de son père en 1862; il n'a pas besoin de gagner sa vie à ce moment-là, encore que sa mère semble avoir pris des mesures pour l'arrêter ''sur la pente ruineuse'' où il s'est engagé<ref name="CRMN 58">{{harvsp|Collectif RMN|2011|p=58|id=CRMN }}.</ref>.}}
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=== Études et apprentissage à l'atelier Couture ===
Manet obtient des résultats convenables au collège Rollin, où il rencontre Antonin Proust dont les souvenirs seront précieux pour la connaissance de l'artiste. Pendant cette période, Proust et Manet vont souvent au Louvre sous la conduite de l'oncle maternel de Manet, le capitaine Édouard Fournier qui encourage le talent de son neveu. Manet quitte le collège Rollin en 1848<ref name="MN 7">{{harvsp|Moreau-Nélaton|1926|p=7|id=MN}}.</ref> et demande à entrer dans la marine, mais il échoue au concours du [[École navale|Borda]]<ref>{{Ouvrage|auteur1=Nathalia Brodskaya|titre=Manet|éditeur=Parkstone International|année=2011|passage=5|isbn=|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=-qPEYo8SYCkC&printsec=frontcover}}.</ref>. Il décide alors de se placer comme [[wikt:pilotin|pilotin]] sur un [[bateau-école]] à destination de Rio de Janeiro.
 
Il embarque le {{Date|9|décembre|1848}}, au Havre sur ''Le Havre et Guadeloupe''<ref name="Bataille 5">{{harvsp|Bataille|1955|p=5}}.</ref>, le voyage dure jusqu'au mois de {{date-|juin 1849}}. Manet revient avec une multitude de dessins ; pendant le voyage, il a fait des portraits et des dessins de tout l'équipage, des caricatures aussi, de ses camarades comme des officiers. Il contracte la syphilis à Rio. À son retour au Havre, il échoue une deuxième fois au concours d'entrée à l'[[École navale]] ; sa famille consent à ce qu'il poursuive une carrière artistique<ref name="T2 11">{{harvsp|Tabarant|1930|p=11|id=T2}}.</ref>.
Manet obtient des résultats convenables au collège Rollin, où il rencontre Antonin Proust dont les souvenirs seront précieux pour la connaissance de l'artiste.Pendant cette période, Proust et Manet vont souvent au Louvre sous la conduite de l'oncle maternel de Manet, le capitaine Édouard Fournier qui encourage le talent de son neveu. Manet quitte le collège Rollin en 1848<ref name="MN 7">{{harvsp|Moreau-Nélaton|1926|p=7|id=MN}}.</ref> et demande à entrer dans la marine, mais il échoue au concours du [[École navale|Borda]]<ref>{{ouvrage|auteur=Nathalia Brodskaya|titre=Manet|éditeur=Parkstone International|date=2011|passage=5|isbn=|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=-qPEYo8SYCkC&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false}}.</ref>. Il décide alors de se placer comme [[wikt:pilotin|pilotin]] sur un [[bateau-école]] à destination de Rio de Janeiro.
 
Il embarque le {{Date|9|décembre|1848}}, au Havre sur le ''Le Havre et Guadeloupe''<ref name="Bataille 5">{{harvsp|Bataille|1955|p=5}}.</ref>, le voyage dure jusqu'au mois de juin 1849. Manet se représente au concours du [[École navale|Borda]] et il échoue de nouveau, mais il revient avec une multitude de dessins. Pendant le voyage, Manet a fait des portrait et dessins de tout l'équipage, des caricatures aussi, de ses camarades comme des officiers. À son retour au Havre, il échoue une deuxième fois au concours d'entrée à l'école navale et sa famille consent à ce qu'il poursuive une carrière artistique<ref name="T2 11">{{harvsp|Tabarant|1930|p=11|id=T2}}.</ref>.
 
Ses voyages en bateau lui inspireront par la suite des paysages marins avec scènes de port (''[[Clair de lune sur le port de Boulogne]]'', 1869 - ''[[Le Départ du vapeur de Folkestone]]'', 1869) ou sujets historiques comme ''[[Le Combat du Kearsarge et de l'Alabama]]'' (1865)<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=219-220|id=CMWB}}.</ref> ou ''[[L'Évasion de Rochefort]]'' (1881).
 
Après son deuxième échec au concours d'officier de marine, Manet refuse de s'inscrire aux [[École nationale supérieure des beaux-arts|Beaux-Arts]]<ref name="Monneret 478">{{harvsp|Monneret|1987a|p=478}}.</ref>. Il entre avec [[Antonin Proust]] dans l’atelier du peintre [[Thomas Couture]], en 1850, où il reste environ six années. Il s'inscrit comme élève de Couture sur le registre des copistes du Louvre. Il perd bien vite confiance en son maître, prenant le contre-pied de ses enseignements<ref>{{harvsp|Bataille|1955|p=6}}.</ref>.
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Image:Copie d'après La Barque de Dante de Delacroix - Edouard Manet (B 830).jpg|Copie d'après ''La Barque de Dante'' de Delacroix, entre 1854 et 1858, musée des beaux-arts de Lyon.
Image:Edouard Manet 080.jpg|''Portrait du Tintoret par lui-même'', d'après le tableau du [[Musée du Louvre|Louvre]], [[1854]] ({{dunité|61|51|cm}}), [[musée des beaux-arts de Dijon]].
Image:Edouard Manet 081.jpg|''[[Vénus d'Urbin]]'', copie d'après le tableau de la [[galerie des Offices]] de [[Florence]], [[1856]] ({{dunité|24|37|cm}}), collection particulière.
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Thomas Couture est l’une des figures emblématiques de l’[[art académique]] de la seconde moitié du {{s|XIX}}, avec un attrait marqué pour le [[Antiquité|monde antique]] qui lui vaut un immense succès avec son chef-d'œuvre ''[[Les Romains de la décadence]]'' au [[Salon de peinture et de sculpture|salon de 1847]]<ref name="Monneret 157">{{harvsp|Monneret|1987a|p=157}}.</ref>. Élève de [[Antoine-Jean Gros|Gros]] et de [[Paul Delaroche|Delaroche]], Couture est alors au sommet de sa gloire ; c'est Manet lui-même qui insiste auprès de ses parents pour s'inscrire dans l'atelier du maître<ref name="Monneret 157"/>.
Après son deuxième échec au concours du Borda, Manet a refusé de s'inscrire aux [[École nationale supérieure des beaux-arts|Beaux-Arts]]<ref name="Monneret 478">{{harvsp|Monneret|1987a|p=478}}.</ref>, et il entre avec [[Antonin Proust]], dans l’atelier du peintre [[Thomas Couture]], en 1850, où il reste environ six ans. Il s'inscrit comme élève de Couture sur le registre des copistes du Louvre. Mais il va perdre assez vite confiance en son maître et il prend le contrepied de ses enseignements<ref>{{harvsp|Bataille|1955|p=6}}.</ref>.
 
Manet consacre l’essentiel de ces six années à l’apprentissage des techniques de base de la [[peinture (art)|peinture]] et à la copie de quelques œuvres de grands maîtres exposées au [[musée du Louvre]], notamment : l’''Autoportrait'' du [[Le Tintoret|Tintoret]], le ''Jupiter et Antiope'' attribué au [[Titien]] ou ''Hélène Fourment et ses enfants'', œuvre de [[Pierre Paul Rubens]]. Il rend également visite à [[Eugène Delacroix|Delacroix]] auquel il demande la permission de copier ''[[La Barque de Dante (Delacroix)|La Barque de Dante]]'', alors exposée au [[musée du Luxembourg]]<ref name="Monneret 477"/>. Mais ce sont surtout ses voyages en Hollande, en Italie, en Espagne, où il visite des musées, qui vont compléter sa formation et nourrir son inspiration.
Thomas Couture est l’une des figures emblématiques de l’[[Peinture académique|art académique]] de la seconde moitié du {{XIXe siècle}}, avec un attrait marqué pour le [[Antiquité|monde antique]] qui lui vaut un immense succès avec son chef-d'œuvre ''[[Les Romains de la décadence]]'' au [[Salon de peinture et de sculpture|salon de 1847]]<ref name="Monneret 157">{{harvsp|Monneret|1987a|p=157}}.</ref>. Élève de [[Antoine-Jean Gros|Gros]] et de [[Paul Delaroche|Delaroche]], Couture est alors au sommet de sa gloire et c'est Manet lui-même qui insiste auprès de ses parents pour s'inscrire dans l'atelier du maître<ref name="Monneret 157"/>.
 
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Manet consacre l’essentiel de ces six années à l’apprentissage des techniques de base de la [[peinture]] et à la copie de quelques œuvres de grands maîtres exposées au [[musée du Louvre]], notamment : l’''Autoportrait'' du [[Le Tintoret|Tintoret]], le ''Jupiter et Antiope'' attribué au [[Titien]] ou ''Hélène Fourment et ses enfants'', œuvre de [[Pierre Paul Rubens]]. Il rend également visite à [[Eugène Delacroix|Delacroix]] auquel il demande la permission de copier ''[[La Barque de Dante]]'', alors exposée au [[Palais du Luxembourg|musée du Luxembourg]]<ref name="Monneret 477"/>. Mais ce sont surtout ses voyages en Hollande, en Italie, en Espagne, où il visite des musées, qui vont compléter sa formation et nourrir son inspiration.
Copie d'après La Barque de Dante de Delacroix - Edouard Manet (B 830).jpg|Copie d'après ''La Barque de Dante'' de Delacroix, entre 1854 et 1858, musée des beaux-arts de Lyon.
Edouard Manet 080.jpg|''Portrait du Tintoret par lui-même'', d'après le tableau du [[Musée du Louvre|Louvre]], [[1854]] ({{dunité|61|51|cm}}), [[musée des beaux-arts de Dijon]].
Edouard Manet 081.jpg|''[[Vénus d'Urbin]]'', copie d'après le tableau de la [[galerie des Offices]] de [[Florence]], [[1856]] ({{dunité|24|37|cm}}), collection particulière.
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Manet complète sa formation par une série de voyages à travers l’[[Europe]] : on trouve trace de son passage aule [[Rijksmuseum Amsterdam|Rijksmuseum]] d’[[Amsterdam]] garde la trace de sa venue en {{date|juillet 1852}}. Il fait aussiséjourne deux séjoursfois en [[Italie]] : le premier, en [[1853]], en compagnie de son frère Eugène et du futur ministre [[Émile Ollivier (homme politique)|Émile Ollivier]], le séjour lui offre l'occasion de copier la célèbre ''[[Vénus d'Urbin]]'' du [[Titien]], à la [[galerie des Offices]] de [[Florence]], et à [[La Haye]], il copie ''[[La Leçon d'anatomie du docteur Tulp|La Leçon d'anatomie]]'' de [[Rembrandt]]<ref>{{harvsp|Monneret|1987a|p=158}}.</ref>. Manet y copie les maîtres, rapportant une copie de la ''[[VenusVénus d'Urbin]]'' d'après [[Titien|Le Titien]] et de ''Tête de jeune homme'' de [[Fra Filippo Lippi]] faites au [[musée des Offices]]. Cette même année 1853, il part ensuite pour [[Rome]]<ref name="CMWB 505">Proust, Ollivier, Duret, cités par {{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=505|id=CMWB}}.</ref>. Au cours du second voyage en Italie, en [[1857]], Manet revient dans la cité des [[Maison de Médicis|Médicis]] pour y croquer des [[fresque]]s d’[[Andrea del Sarto]] au [[cloître]] de l’Annunziata. Outre les [[Pays-Bas]] et l’Italie, l’artiste a encore visitévisite en [[1853]] l’[[Allemagne]] et l’[[Europe centrale]], en particulier les [[musée]]s de [[Prague]], [[Vienne (Autriche)|Vienne]], [[Munich]] ou [[Dresde]].
 
L’indépendance d’esprit de Manet et son obstination à choisir des sujets simples déroute Couture qui pourtant, demande son opinion à son élève sur l'un de ses propres tableaux : ''Portrait de {{Mlle|Poinsot}} Poinsot''<ref name="Monneret 477"/>. Manet s'inspire cependant des portraits de Couture : tableaux aux visages éclairés, peinture énergique dans laquelle pointent déjà des éléments de la vie moderne (costume noir, accessoires de la mode)<ref name="Guégan">Stéphane Guégan, ''Manet, l'héroïsme de la vie moderne'', éd. Gallimard, 2011.</ref>. Manet vient de terminer en [[1859]] ''[[Le Buveur d'absinthe]]'' que Couture ne comprend pas et; les deux hommes se brouillent. Dès ses premiers jours à l'atelier, Manet disait déjà : {{Citation|Je ne sais pas pourquoi je suis ici; quand j'arrive à l'atelier, il me semble que j'entre dans une tombe}}<ref>Rapporté par [[Paul Jamot]], d'après les souvenirs d'Antonin Proust, dans son article « Manet », ''Revue de Paris'', [[1932]].</ref>. En réalité, Manet supportait mal l'enseignement de Couture. [[Antonin Proust]], qui fut son camarade d'atelier, rapporte dans ses souvenirs : {{Citation|Manet avait invariablement le lundi, jour où on donnait la pose pour toute la semaine, des démêléesdémêlés avec les modèles du professeur [...] qui prenaient des attitudes outrées.-Vous ne pouvez donc pas être naturels s'écriait Manet<ref>{{harvsp|Bataille|1955|p=35}}.</ref>}}. Manet quitte l’atelier Couture en [[1856]], et ilpour emménageemménager dans son propre local, [[rue Lavoisier]], avec son ami, [[Albert de Balleroy]].
 
C'est dans cet atelier qu'il peint, en 1859, le portrait intitulé ''L'Enfant aux Cerisescerises''<ref>(ou ''Le Voleur de cerises''), [[Fondation Calouste-Gulbenkian]], [[Lisbonne]].</ref>. L'enfant était alors âgé de {{Uniténobr|15| ans}} lorsque Manet l'avait engagé pour laver ses brosses. Il a été retrouvé pendu dans l'atelier de Manet qui l'avait réprimandé et menacé de le renvoyer à ses parents<ref name="Bataille 7">{{harvsp|Bataille|1955|p=7}}.</ref>. Le peintre, impressionné par ce suicide, s'installe en 1860 dans un autre local [[Rue de la Victoire (Paris) | Ruerue de la Victoire]] où il ne reste pas, puis il déménage encore [[rue de Douai]]. Cette année-là, il fait la connaissance de Baudelaire<ref name="Bataille 7"/> L'épisode dramatique de ''L'Enfant aux cerises'' inspirera plus tard à Charles Baudelaire un poème : [[PetitsLe PoèmesSpleen ende proseParis|La Corde]], qu'il dédie à Édouard Manet<ref>[http://www.unjourunpoeme.fr/poeme/la-corde-a-edouard-manet Un jour un poème, texte de La Corde].</ref>.
 
Manet n'a pas choisi l'atelier de Couture par hasard. En 1850, il se donnait les moyens d'entrer dans la carrière par la grande porte. Couture était alors une personnalité importante, prisé par les amateurs, soutenu par les pouvoirs publics, il avait atteint des prix très élevés dès la fin 1840. La « leçon de Couture » est bien plus importante que l'on a voulu l'admettre. Le long apprentissage de six ans a été de grande portée. {{Citation| Le peintre de mœurs et le peintre politique au réalisme contrôlé, l'ont autant retenu que le goût de Couture pour les figures de la commedia dell'arte et le pittoresque bohémien<ref name="CRMN 21">Stéphane Guégan dans {{harvsp|Collectif RMN|2011|p=21|id=CRMN }}.</ref>.}} Stéphane Guégan note que le premier grand succès de Couture au Salon de 1844 ''L'Amour de l'or'' ([[Musée des Augustins de Toulouse|musée des Augustins]], [[Toulouse]]) est fondé sur la partie gauche du ''Jugement de Pâris'' par [[Marcantonio Raimondi]], tandis que ''Le déjeuner sur l'herbe'' de Manet, s'approprie le côté droit de la même œuvre de Raimondi. Et à l'évidence, Couture fut l'une des voies qui menaitmenaient au ''[[Le Vieux Musicien|Vieux Musicien]]''<ref name="CRMN 22">Stéphane Guégan dans {{harvsp|Collectif RMN|2011|p=22|id=CRMN }}.</ref>. On peut comparer le côté gauche et le côté droit de la gravure de Raimondi<ref>[https://www.google.fr/search?q=Jugement+de+P%C3%A2ris+Marcantonio+Raimondi&sa=X&biw=1550&bih=770&tbm=isch&source=iu&pf=m&ictx=1&fir=kHaglnPptUz3RM%253A%252CE9_ZQUnnUyfRXM%252C_&usg=__Pc6CE8AsX6vDnrhhHtIvVTujY4c%3D&ved=0ahUKEwiu-oO_0O3WAhVElxoKHRKiA4wQ9QEIOzAD#imgrc=kHaglnPptUz3RM: gravure de Raimondi].</ref>.
 
== Les débuts du peintre ==
[[FileFichier:Copie d'après La Barque de Dante de Delacroix - Edouard Manet (B 830).jpg|thumbvignette|uprightredresse=1|''[[La Barque de Dante d'après Delacroix]]'', 1854, par Manet.]]
Manet était grand admirateur d'[[Achille Devéria]]. Lors de sa visite en compagnie d'[[Auguste Raffet]] et de Devéria au [[musée du Luxembourg]], il s'est écrié, en voyant ''La Naissance d'Henri IV'' par Devéria : {{Citation|C'est très beau tout cela, mais il y a au Luxembourg une maîtresse toile, c'est ''[[La Barque de Dante (Delacroix)|La Barque de Dante]]''. Si nous allions voir Delacroix, nous prendrions pour prétexte de notre visite pour lui demander l'autorisation de faire une copie de sa ''Barque''<ref name="Proust 127">{{harvsp|Proust|1897|p=127|id=Proust}}.</ref>.}}
 
[[Henry Murger]] prétendait que Delacroix était froid. En sortant de son atelier Manet dit à Proust {{Citation|Ce n'est pas Delacroix qui est froid: c'est sa doctrine qui est glaciale. Malgré tout, copions la ''Barque''. C'est un morceau<ref name="Proust 127"/>.}} ''[[La Barque de Dante d'après Delacroix]]'' est la seule faite par Manet du vivant d'un artiste<ref name="T1 320">{{harvsp|Tabarant|1947|p=320|id=T1}}.</ref>. Elle est conservée au [[musée des Beaux-Arts de Lyon]]. Une deuxième copie, de taille légèrement différente, se trouve au Metropolitan Museum de New York, plus libre et plus colorée. Elle était restée dans l'atelier de Manet à sa mort<ref name="id=CMWB 45">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=45|id=CMWB}}.</ref>.
Manet était grand admirateur d'[[Achille Devéria]]. Lors de sa visite en compagnie d'[[Auguste Raffet]] et de Dévéria au [[Musée du Luxembourg]], il s'est écrié, en voyant ''La Naissance d'Henri IV'' par Dévéria : {{Citation|C'est très beau tout cela, mais il y a au Luxembourg une maîtresse toile, c'est ''[[La Barque de Dante]]''. Si nous allions voir Delacroix, nous prendrions pour prétexte de notre visite pour lui demander l'autorisation de faire une copie de sa ''Barque''<ref name="Proust 127">{{harvsp|Proust|1897|p=127|id=Proust}}.</ref>.}}
 
Elle était précédée de ''Scène d'atelier espagnol''<ref>{{Harvsp|Rouart|Wildenstein|1975}}, RW25.</ref>. dont beaucoup d'éléments ont été repris de ''Les Petits cavaliers espagnols'' de Vélasquez, copiés par Manet et gravés plus tard sous le titre ''Les Petits cavaliers (gravure)''<ref name="id=CMWB 45" />, [[eau-forte]] et [[pointe sèche]] 1862, dont une version est conservée au [[musée Goya]] de [[Castres]]<ref>[https://www.musees-midi-pyrenees.fr/musees/musee-goya-musee-d-art-hispanique/collections/dessin-et-gravure-francaises/edouard-manet/les-petits-cavaliers/ Petits cavaliers à Castres].</ref>. La période hispanique a commencé pratiquement dès les débuts du peintre. Toutes les œuvres de cette époque n'ont pas été retrouvées, excepté ses premiers ''Cavaliers espagnols'', {{Dunité|45|26|cm}}, conservé au [[musée des Beaux-Arts de Lyon]]<ref>{{Harvsp|Rouart|Wildenstein|1975}}, RW26.</ref>.
[[Henry Murger]] prétendait que Delacroix était froid. En sortant de son atelier Manet dit à Proust {{Citation|Ce n'est pas Delacroix qui est froid: c'est sa doctrine qui est glaciale. Malgré tout, copions la ''Barque''. C'est un morceau<ref name="Proust 127"/>.}} ''[[La Barque de Dante d'après Delacroix]]'' est la seule faite par Manet du vivant d'un artiste<ref name="T1 320">{{harvsp|Tabarant|1947|p=320|id=T1}}.</ref>. Elle est conservée au [[musée des Beaux-Arts de Lyon]]. Une deuxième copie, de taille légèrement différente, sa trouve au Metropolitan Museum de New York, plus libre et plus colorée. Elle était restée dans l'atelier de Manet à sa mort<ref name="id=CMWB 45">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=45|id=CMWB}}.</ref>.
 
Elle était précédée de ''Scène d'atelier espagnol''<ref>{{Harvsp|Rouart|Wildenstein|1975}}, RW25.</ref>. dont beaucoup d'éléments ont été repris de ''Les Petits cavaliers espagnols'' de Vélasquez, copiés par Manet et gravés plus tard sous le titre ''Les Petits cavaliers (gravure)''<ref name="id=CMWB 45" />, [[eau-forte]] et [[pointe-sèche]] 1862, dont une version est conservée au [[musée Goya]] de [[Castres]]<ref>[https://www.musees-midi-pyrenees.fr/musees/musee-goya-musee-d-art-hispanique/collections/dessin-et-gravure-francaises/edouard-manet/les-petits-cavaliers/ Petits cavaliers à Castres].</ref>. La période hispanique a commencé pratiquement dès les débuts du peintre. Toutes les œuvres de cette époque n'ont pas été retrouvées, excepté ses premiers ''Cavaliers espagnols'', {{Dunité|45|26|cm}}, conservé au [[musée des Beaux-Arts de Lyon]]<ref>{{Harvsp|Rouart|Wildenstein|1975}}, RW26.</ref>.
 
=== Période hispanique ===
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Fichier:Édouard Manet - Cavaliers espagnols (RW 26).jpg|''Cavaliers espagnols'' 1859, [[Musée des Beaux-Arts de Lyon]]
Fichier:Édouard Manet - Le Vieux Musicien.jpg|''[[Le Vieux Musicien]]'', 1862 [[National Gallery of Art]] [[Washington (district de Columbia)|Washington]].
Image:Jeune Homme en costume de majo (1863) - Edouard Manet 082(MET, New York).jpg|''[[Jeune Homme en costume de majo]]'', [[1863]], {{Dunité|188|125|cm}}), [[New York|NY]], [[Metropolitan Museum of Art]].
Image:Edouard Manet - Mlle Victorine Meurent in the Costume of an Espada.JPG|''[[Mlle V. en costume d'espada]]'', [[1862]], ({{dunité|165.1|127.6|cm}}), [[New York|NY]], [[Metropolitan Museum of Art]].
Fichier:Edouard Manet 051.jpg|''[[Portrait de Théodore Duret]]'' [[1868]], ({{dunité|43|35|cm}}), [[Petit Palais |Muséemusée du Petit Palais ]] [[Paris]].
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''[[Le Vieux Musicien]]'' s'impose comme l'œuvre la plus monumentale et la plus complexe des débuts de Manet. Des analyses successives ont permis de décrypter les sources composites qui forment la trame visuelle de l'œuvre. Une succession de références picturales se retrouvent dans le rassemblement de bohémiens : figure misérabiliste empruntée à [[Henri Guillaume Schlesinger]], références à [[Frères Le Nain|Le Nain]], [[Antoine Watteau|Watteau]] : Manet puise sans limites pour inventer son réalisme<ref name="CRMN 48"> Stéphane Guégan dans{{harvsp|Collectif RMN|2011|p=48|id=CRMN }}.</ref>.
 
Les deux premiers tableaux à thème espagnol, ''[[Jeune Homme en costume de majo]]'' et ''[[Mlle V. en costume d'espada]]'', qui sont présentés au [[Salon des Refusésrefusés]] de 1863 avec ''[[Le Déjeuner sur l'herbe]]'', déroutent les critiques et suscitent de vives attaques malgré le soutien d'[[Émile Zola]] qui voit là {{Citation|une œuvre d'une vigueur rare et d'une extrême puissance de ton (...) Selon moi, le peintre y a été plus coloriste qu'il n'a coutume de l'être. Les taches sont grasses et énergiques et elles s'enlèvent sur le fond avec toutes les brusqueries de la nature<ref name="id=CMWB 110">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=110|id=CMWB}}.</ref>.}}
 
Le ''Jeune Homme en costume de majo'' est le jeune frère de Manet, Gustave<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=191|id=CMWB}}.</ref>. ''{{Mlle}} V. en costume d'espada'', est un portrait du modèle préféré de Manet, [[Victorine Meurent]] travestie en homme, l'année même où la jeune fille a commencé à poser pour le peintre. C Sur cette toile, Victorine est censée participer en tant qu’[[torero|espada]] à une [[tauromachie]]. Tout est mis en œuvre cependant pour montrer que le tableau est une construction artificielle : Victorine, du fait de la menace représentée par le [[taureau]], ne devrait normalement pas fixer le spectateur avec autant d'insistance. L'ensemble de la scène est tout simplement un prétexte visant à représenter la modèle dans des habits masculins. Ce qui est conçu comme une provocation par Émile Zola lors de son exposition avec ''[[Jeune Homme en costume de majo]]'', et ''Le Déjeuner sur l'herbe''
 
{{Citation|Les trois tableaux de Monsieur Manet ont un peu l'air d'une provocation au public qui s'offusque de la couleur trop éclatante. Au milieu, une scène de ''Bain'', à gauche, un ''Majo'' espagnol,; à droite une demoiselle de Paris en costume ''espada'' agitant son manteau pourpre dans le cirque d'un combat de taureaux. M. Manet adore l'Espagne, et son maître d'affection paraît être Goya, dont il imite les tons vifs et heurté, la touche libre et fougueuse. Il y a des étoffes étonnantes dans ces deux figures espagnoles : le costume noir du majo et le lourd burnous écarlate qu'il porte sur son bras, les bas de soie rose de la jeune parisienne déguisée en ''espada''; mais sous ces brillants costumes, manque un peu la personne elle-même, les têtes devraient être peintes autrement que les draperies, avec plus d'accent et de profondeur<ref name="CMWB 112">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=112|id=CMWB}}.</ref>.}}
 
Charles F. Suckey relève que {{Citation|les contradictions du tableau et [souligne] les détails absurdes, caractéristiques de nombreuses toiles [de Manet], attirent l'attention sur le fait que l'art est avant tout un assemblage de modèles et de costumes. ''{{Mlle|Victorine}} Meurant en costume d'espada'' en est un exemple : un modèle féminin posant en toréador est ridicule en termes de réalisme<ref>Stuckey, ''Manet'', [[Metropolitan Museum Ofof Art]], 1981-1983, p.100.</ref>.}}
 
Mais {{Mlle}} Meurent n'est pas la seule femme travestie en costume d'homme. La même année, Manet a peint une ''[[Jeune femme couchée en costume espagnol]]'', ([[New Haven]], [[Yale University Art Gallery]]) dont le modèle un peu épais serait la maîtresse de [[Nadar]], ou celle de Baudelaire, mais dont on ne connaît pas l'identité exacte. Elle est également vêtue d'un costume espagnol d'homme, ce qui correspond aux codes érotiques de l'époque où le costume masculin était d'usage constant dans la galanterie<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=99}}.</ref>. [[Félix Bracquemond]] en a gravé une eau-forte en 1863 en inversant le sujet. Manet a également produit une aquarelle du même tableau même ''Femme couchée''([[New Haven]], [[Yale University Art Gallery]])<ref name="CMWB 101">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=101|id=CMWB}}.</ref>.
 
Manet ne visita l'Espagne qu'en 1865, il ne s'est peut-être familiarisé avec les coutumes de [[Madrid]] et les détails de la corrida qu'à travers le ''Voyage en Espagne'' de [[Théophile Gautier]], ou les détails de la [[corrida]] donnés par [[Prosper Mérimée]]<ref name="CMWB 113">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=113|id=CMWB}}.</ref>. Il avait en outre, dans son atelier, une collection de costumes qu'il utilisait comme accessoires et qui lui étaient fournis par un marchand espagnol du [[passage Jouffroy]]. Comme le remarque Beatrice Farwell, on retrouve le costume de ''{{Mlle}} V'' dans d'autres tableaux de Manet : ''[[le Chanteur espagnol]]'' et le ''[[Jeune Homme en costume de majo]]''<ref>{{harvsp|Farwell|1969|p=197-202}}.</ref>.
 
La période hispanique de Manet ne s'arrête pas seulement à des personnages en costume espagnol. On trouve des traces d'inspiration soit de Goya, soit de Velázquez, (selon les critiques), dans le ''Portrait de Théodore Duret''. Il a rencontré Duret à [[Madrid]] en 1865, dans un restaurant<ref name="Monneret1987a 115">{{harvsp|Monneret|1987|p=115|id=Monneret1987a}}.</ref>. {{Citation | l'hispanisme de ce tableau saute aux yeux et évoque plus Goya que Velázquez. C'est dans l'ouvrage de [[Charles Blanc]] qu'il a pu trouver une inspiration possible avec la reproduction du ''Le Jeune homme en Gris'' d'après Goya<ref group="note">Une gravure d'après Goya intitulée ''Le Jeune homme en gris'' 1805-1806, est reproduite dans ''L'Histoire des peintres de toutes les écoles'' de Charles Blanc.</ref>, dont on retrouve la position inversé et même la canne. Manet a évidemment fait une allusion délibérée [...] pour rappeler à [[Théodore Duret]] la peinture qu'ils virent ensemble à Madrid<ref name="CMWB 288">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=288|id=CMWB}}.</ref>.}} Georges Mauner y voit même une allusion à [[Manuel la Peña]], marquis de Bondad portrait peint par [[Francisco de Goya|Goya]] en 1799<ref name="CMWB 289">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=289|id=CMWB}}.</ref>.
 
==== L'influence de Velázquez ====
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Image:Edouard Manet 001.jpg|''[[Le Buveur d'absinthe]]'', [[1858]]-[[1859]] ({{dunité|180.5|105.6|cm}}), [[Copenhague]], [[Ny Carlsberg Glyptotek]].
Image:Edouard Manet 044.jpg|''[[Lola de Valence]]'', [[1862]] ({{dunité|123|92|cm}}), [[Paris]], [[musée d'Orsay]].
Image:Edouard Manet 061.jpg|''[[Le Chanteur espagnol]]'', [[1860]] ({{dunité|147.3|114.3|cm}}), [[New York]], [[Metropolitan Museum of Art]].
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Après quelques années employées à copier de grands tableaux, c’est au [[Salon de Parispeinture et de sculpture|Salon]] de [[1859]] que Manet se décide à dévoiler officiellement sa première œuvre, intitulée ''[[Le Buveur d'absinthe]]''. La toile, de facture [[Réalisme (peinture)|réaliste]], dénote l’influence de [[Gustave Courbet]], mais constitue surtout un hommage à celui que Manet a toujours considéré comme « le peintre des peintres »<ref group="note">Lettre à [[Zacharie Astruc]], septembre 1865.</ref>, [[Diego Vélasquez]] : {{Citation|j'ai, dit-il essayé de faire un type de Paris en mettant dans l'exécution la naïveté du métier que j'ai trouvée chez Vélasquez<ref name="Monneret 478"/>.}}
 
Cependant, ''Le Buveur d'absinthe'' si peu académique est refusé au Salon de 1859. Le jury ne comprend pas cette œuvre qui illustre d'une certaine manière le ''Vin des chiffonniers'' de [[Charles Baudelaire|Baudelaire]] « buvant et se cognant au mur comme un poète<ref name="Monneret 478"/>.» De même Thomas Couture considère que le seul buveur d'absinthe est ici le peintre<ref name="Monneret 478"/>. Manet apprend ce refus en présence de Baudelaire, de Delacroix et d'Antonin Proust., et il pensecroyant que c'est Thomas Couture qui en est responsable {{Citation| Ah! il m'a fait refuser! Ce qu'il a dû en dire devant les bonzes de son acabit (...)<ref>{{harvsp|Proust|1947|p=134}}.</ref>.}}
Le jeune artiste bénéficie pourtant de plusieurs soutiens remarqués, avec notamment [[Eugène Delacroix]]<ref name="CMWB 506">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=506|id=CMWB}}.</ref>, qui assure sa défense auprès du jury, et surtout [[Charles Baudelaire]]<ref name="Monneret 478"/>, qui venait de faire sa connaissance et s’employait à le faire connaître dans la société parisienne.
 
Manet, à ce moment-là, est fasciné par l’[[art]] espagnol et d'abord par [[Diego Vélasquez|Vélasquez]]<ref group="note">« La peinture espagnole sera riche en leçons pour Manet. L'influence de Goya sera palpable avec les lumières et les contrastes forts de couleur. Celle de Vélasquez apparaît dans ''Le Fifre'', refusé au Salon de 1866, qui représente une figure sur un fond unifié » Insecula »[http://www.insecula.com/contact/A008571.html Édouard Manet].</ref>, qu’il associe au réalisme, par opposition à l’art [[Italie|italianisant]] des [[PeintureArt académique|Académiques]]. Déjà bien avant son premier voyage en Espagne en [[1865]], Manet consacre plusieurs toiles à ce qu’il désigne lui-même comme des « sujets espagnols » : danseuse ''[[Lola de Valence]]'', et le [[Guitariste|guitarero]] du ''[[Le Chanteur espagnol|Chanteur espagnol]]''.
 
''Le Chanteur espagnol'' lui vaut son premier succès. Il est accepté au [[Salon de peinture et de sculpture|Salon de Paris]] en [[1861]] avec le [[Portrait de M. et Mme Auguste Manet|portrait de ses parents]]<ref name="CMWB 63">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=63|id=CMWB}}.</ref>. Les critiques Jean Laran et Georges Le Bas rapportent qu'il fit l'admiration d'[[Eugène Delacroix]] et de [[Jean-Auguste-Dominique Ingres|Ingres]] et que ce fut sans doute grâce à l'intervention de Delacroix que le tableau obtint la mention « honorable »<ref name="CMWB 64">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=64|id=CMWB}}.</ref> Il plaît aussi à Baudelaire et à [[Théophile Gautier]] qui déclare dans ''Le Moniteur universel'' du {{Date|3|juillet|1861}} : {{Citation| Il y a beaucoup de talent dans cette figure de grandeur naturelle peinte en pleine pâte, d'une brosse vaillante et d'une couleur très vraie<ref>{{harvsp|Tabarant|1947|p=59}}.</ref>.}}
 
Les diverses influences pour ce tableau ont fait l'objet de discussions nombreuses. Selon Antonin Proust, Manet aurait déclaré lui-même :{{Citation|En peignant cette figure, je pensais aux maîtres de [[Madrid]], et aussi à [[Frans Hals|Hals]]<ref name="CMWB 64"/>.}} Les historiens d'art ont également évoqué l'influence de [[Francisco de Goya|Goya]] (en particulier de l'eau forte : ''Le Chanteur aveugle''), [[Bartolomé Esteban Murillo|Murillo]], [[Diego Vélasquez]] ainsi que celle de [[Gustave Courbet]] dans sa tendance réaliste<ref name="CMWB 64"/>.
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Le tableau fut également admiré par un groupe de jeunes artistes : [[Alphonse Legros]], [[Henri Fantin-Latour]], [[Edgar Degas]] et d'autres. Cette rencontre avec les jeunes peintres fut décisive, car elle désigna Manet comme le chef de file de l'avant-garde<ref>{{harvsp|Tabarant|1947|p=42}}.</ref>.
 
==== L'influence de Goya et la Tauromachietauromachie ====
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Fichier:Édouard Manet - La corrida.jpg|''[[La Corrida (Manet)|La Corrida]]'', ({{dunité|48|108|cm}}), [[New York]], [[The Frick Collection|Frick Collection]].
Fichier:Edouard Manet 063.jpg|''[[Combat de taureau]]'', [[1865]]-[[1865]] ({{dunité|90|110|cm}}), [[Paris]], [[musée d'Orsay]].
Image:Edouard Manet 073 (Toter Torero).jpg|''[[L'Homme mort]]'', [[1864]]-[[1865]] ({{dunité|75.9|153.3|cm}}), [[Washington (district de Columbia)|Washington]], [[National Gallery of Art]].
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Une des toiles de Manet les plus connues, traitant de [[tauromachie]], est son ''[[L'Homme mort|Homme mort]]'', daté de [[1864]].
L’œuvre, à l’origine, n’est en fait qu’une partie d’une composition plus vaste destinée au Salon de la même année, et intitulée ''Épisode d’une [[corrida|course de taureaux]]'' : le peintre, mécontent des critiques acerbes de [[Théophile Thoré-Burger]]<ref>{{harvsp|Thoré-Burger|Bürger|1870|p=98}}.</ref> et des caricatures que [[Bertall]] en a fait dans « Le Journal amusant », découpe ''l'Épisode'' en deux parties qui formeront deux toiles autonomes : ''L'Homme mort'' et ''[[La Corrida (Manet)|La Corrida]]''<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=195|id=CMWB}}.</ref> conservée à la [[The Frick Collection|Frick Collection]] à [[New York]]<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=196|id=CMWB}}.</ref>.
 
Manet découpe ''La Corrida'' de façon à garder trois [[torero]]s à la barrière (le premier titre choisi pour cette œuvre était d'ailleurs ''Toreros en action''), mais s'il voulait garder les hommes en pied, il fallait qu'il coupe pratiquement tout le taureau. L'artiste décida plutôt de couper les pieds du torero de gauche et de rogner sur la foule dans les gradins<ref>{{harvsp|Bois|1994|p=114}}.</ref>.
 
Lorsque Manet a réalisé ''Épisode d’une [[corrida|course de taureaux]]'', il n'était encore jamais allé en [[Espagne]]. C'est à la suite de ce voyage qu'il exprime son admiration pour la [[corrida]] dans une lettre adressée à [[Charles Baudelaire|Baudelaire]] le {{Date|14|septembre|1865}} : {{Citation | Un des plus beaux, des plus curieux, et des plus terribles spectacles que l'on puisse voir, c'est une [[corrida|course de taureaux]]. J'espère, à mon retour, mettre sur la toile l'aspect brillant, papillotant et en même temps dramatique de la corrida à laquelle j'ai assisté<ref>{{harvsp|Tabarant|1947|p=373}}.</ref>.}} C'est sur ce même thème, qu'il a réalisé plusieurs grands formats : ''[[Le Matador saluant]]''<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=240}}.</ref> que [[Louisine Havemeyer]] acheta à [[Théodore Duret]]<ref>{{harvsp|Havemeyer|1961 et 1993|p=222-224}}.</ref>, et ''[[Combat de taureau]]''<ref name="CMWB 237">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=237|id=CMWB}}.</ref> actuellement conservé au [[musée d'Orsay]] à [[Paris]]. [[Étienne Moreau-Nélaton]] et [[Adolphe Tabarant]]<ref>{{harvsp|Tabarant|1930|p=69}}.</ref>, s'accordent à dire que le frère de Manet, Eugène, a servi de modèle pour le personnage du [[Le Matador saluant|matador saluant]], et qu'il s'agit bien d'un [[torero]] applaudi par la foule après la mort du taureau<ref name="MN 2">{{harvsp|Moreau-Nélaton|1926|p=76|id=MN2}}.</ref>.
 
Manet commence le ''[[Combat de taureau]]'', à son retour de voyage en Espagne, en 1865. Dans son atelier de Paris, rue Guyot (aujourd'hui rue Médéric), il est possible qu'il ait utilisé à la fois des croquis faits sur place en [[Espagne]] (croquis que l'on n'a pas retrouvés à l'exception d'une aquarelle), mais aussi des gravures de ''[[La Tauromaquia (Goya)|La Tauromachietauromaquia]]'' de [[Francisco de Goya]] qu'il possédait<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=239|id=CMWB}}.</ref>. Manet vouait une grande admiration au peintre espagnol qui l'a encore influencé sur d'autres sujets que la tauromachie notamment pour ''[[L'Exécution de Maximilien]]''.
 
=== Peinture religieuse ===
<gallery widths="180" heights="175">
Fichier:MANET Photo Prof.jpg|''[[Le Christ Jardinier]]'', vers 1858-1859.
Fichier:Édouard Manet - Un moine en prière.jpg|''Un Moine en prière'' (1864-1865), [[Boston]], [[Muséemusée des beauxBeaux-arts deArts (Boston)|musée des beaux-arts]].
Fichier:Édouard Manet - Le Christ mort et les anges.jpg|''Le Christ mort et les anges'' (1864), [[New York]], [[Metropolitan Museum of Art]].
Fichier:Jesus Mocked by the Soldiers.jpg|''Jésus insulté par les soldats'', vers 1864-1865, Art Institute of Chicago.
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Manet à l'opposé de l'art saint-sulpicien, s'inscrit dans la lignée des maîtres italiens comme [[Fra Angelico]], ou hispaniques comme [[Francisco de Zurbarán|Zurbaran]], pour traiter avec réalisme les corps dans ses tableaux religieux, qu'il s'agisse du corps supplicié assis au bord du tombeau du ''Christ soutenu par les anges'' (1864, New York, Metropopolitan Museum of Art) reprenant la composition classique de l'iconographie chrétienne du ''[[Christ aux plaies]]'' comme celle du ''[[Le Christ mort soutenu par deux anges (Mantegna)|Christ mort soutenu par deux anges]]''<ref group="note">Itinéraires de la fortune moderne de Mantegna en Franceby Alessandro Del Puppo [https://uniud.academia.edu/AlessandroDelPuppo/Papers/307924/Itineraires_de_la_fortune_moderne_de_Mantegna_en_France Itinéraires de la fortune moderne de Mantegna en France (Alessandro Del Puppo) - Academia.edu].</ref> ou d'un « homme de chair et d’os, de peau et de barbe, et pas un pur et saint esprit en robe de bure » dans ''Un moine en prière''(vers 1864)<ref>[http://artamateur.wordpress.com/2011/04/01/manet-le-romantisme-modernise/ Manet, le romantisme modernisé ? - Lunettes Rouges].</ref>. Il expose également au Salon de 1865 un ''Jésus insulté par les soldats''.
 
Ces œuvres lui valurent des quolibets de [[Gustave Courbet]] ou de [[Théophile Gautier]] mais elles furent saluées par [[Émile Zola]] : « Je retrouve là Édouard Manet tout entier, avec les partis-pris de son œil et les audaces de sa main. On a dit que ce Christ n’était pas un Christ, et j’avoue que cela peut être ; pour moi, c’est un cadavre peint en pleine lumière, avec franchise et vigueur ; et même j’aime les anges du fond, ces enfants aux grandes ailes bleues qui ont une étrangeté si douce et si élégante. »<ref>Émile Zola
Édouard Manet, étude biographique et critique, [[Georges Charpentier|G. Charpentier]] et [[Éditions Fasquelle|E. Fasquelle]], éditeurs, 1893 ({{p.|367}}) [[:s:Édouard Manet/Les œuvres|Edouard Manet/Les Œuvres - Wikisource]].</ref>.
 
Cette période d’Édouard Manet (autour des années 1864-1865) rejetée par la critique parce que non conforme à l'image d'un Manet laïque et rebelle, a été mise en relief dans une salle de l'exposition du [[musée d'Orsay]] ({{date-|5 avril }}- {{date-|17 juillet 2011}}). {{Citation|La composante religieuse de l'art de Manet a autant révolté ses ennemis qu'embarrassé ses amis<ref name="LT 400-402">{{harvsp|Loyrette Tinterow|1994,-1995|p=400-402|id=LT}}.</ref>.}} En 1884, lors de l'exposition posthume à l'école des beaux-artarts en hommage à Manet, premier des modernes, Antonin Proust écarta les deux grands christs ''Jésus insulté'' et le ''Christ mort''<ref name="CMWB 227">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=227|id=CMWB}}.</ref>. L'ancien ministre Gambetta fit une exception pour ''Un moine en prière'', en raison de son ostentation confessionnelle moins marquée. {{Citation|L'image d'un Manet résolument laïque, aussi rebelle aux poncifs esthétiques qu'aux superstitions de l'église s'est ensuite transmise à l'histoire de l'art, gardienne du temple, notamment en son versant moderne. Pouvait-on admettre au {{s|XX}} que le peintre d'Olympia ait tâté de la Bible au milieu des années 1860, alors qu'agissait à Rome {{souverain2|Pie IX}}, un des papes les plus répressifs de l'histoire de la chrétienté? Une telle position, entre amnésie confortable et cécité volontaire ignore superbement la complexité d'un peintre étranger à nos clivages, esthétiques, comme idéologiques<ref name="CRMN 159">Guégan dans {{harvsp|Collectif RMN|2011|p=159|id=CRMN }}.</ref>.}} Manet, comme Baudelaire, a pourtant manifesté un attachement, Bien que peu orthodoxe, au Dieu des Écritures. Il avait déjà regroupé ses grands tableaux religieux lors d'une exposition particulière en 1867 [[place de l'Alma]]. Une sélection qui signifiait son refus de la «  spécialité,  » fléau dont Gautier et Baudelaire ne cessaient de dénoncer les ravages<ref name="CRMN 159"/>.
 
Les tableaux religieux de Manet réalisés pendant sa période hispanique, étaient bien davantage liés à la culture italienne. De ses séjours, en 1853 et 1857, Manet avait ramené des copies de [[Raphael]], d'[[Andrea del Sarto]], [[Benozzo Gozzoli]], [[Fra Angelico]] en premier lieu. Ses nombreuses sanguines pour le ''moine'' et le ''Christ jardinier'' et les gravures pour le ''Christ aux anges'' et ''Jésus insulté'' en sont la preuve la plus marquante<ref name="CRMN 162-168">Guégan dans {{harvsp|Collectif RMN|2011|p=162-168|id=CRMN}}.</ref>. Plus précisément, l'inspiration italienne se retrouve dès les tout débuts du peintre: Le ''Moine de profil'', 1853-1857, sanguine sur [[papier vergé]], {{Dunité|34.2|22|cm}}, Bibliothèque Nationale de France, ''Saint-Bernard agenouillé tenant un livre'', d'après ''[[La Crucifixion]]'' de [[Fra Angelico]], [[Florence]], Couvent de San Marco, 1857, crayon noir et mine de plomb {{Dunité|28.8|21.2|cm}}, Musée d'Orsay Paris, ''Deux religieux agenouillés Saint Jean Galbert et Saint Pierre martyr'' d'après ''[[La Crucifixion]]'' de [[Fra Angelico]], [[Florence]], Couvent de San Marco, 1857, crayon noir et mine de plomb {{Dunité|28.8|21.2|cm}} Musée d'Orsay<ref name="CRMN 142">{{harvsp|Collectif RMN|2011|p=142|id=CRMN }}.</ref>.
 
Les tableaux religieux de Manet réalisés pendant sa période hispanique, étaient bien davantage liés à la culture italienne. De ses séjours, en 1853 et 1857, Manet avait ramené des copies de [[Raphaël]], d'[[Andrea del Sarto]], [[Benozzo Gozzoli]], Fra Angelico en premier lieu. Ses nombreuses sanguines pour le ''moine'' et le ''Christ jardinier'' et les gravures pour le ''Christ aux anges'' et ''Jésus insulté'' en sont la preuve la plus marquante<ref name="CRMN 162-168">Guégan dans {{harvsp|Collectif RMN|2011|p=162-168|id=CRMN}}.</ref>. Plus précisément, l'inspiration italienne se retrouve dès les tout débuts du peintre: Le ''Moine de profil'', 1853-1857, sanguine sur [[papier vergé]], {{Dunité|34.2|22|cm}}, Bibliothèque Nationale de France, ''Saint-Bernard agenouillé tenant un livre'', d'après ''[[La Crucifixion]]'' de Fra Angelico, [[Florence]], Couvent de San Marco, 1857, crayon noir et mine de plomb {{Dunité|28.8|21.2|cm}}, Musée d'Orsay Paris, ''Deux religieux agenouillés Saint Jean Galbert et Saint Pierre martyr'' d'après ''La Crucifixion'' de Fra Angelico, Florence, Couvent de San Marco, 1857, crayon noir et mine de plomb {{Dunité|28.8|21.2|cm}} Musée d'Orsay<ref name="CRMN 142">{{harvsp|Collectif RMN|2011|p=142|id=CRMN }}.</ref>.
== Entrée dans la vie mondaine : gloire et scandales ==
 
== Entrée dans la vie mondaine : gloire et scandales ==
[[Image:MANET - Música en las Tullerías (National Gallery, Londres, 1862).jpg|thumb|''[[La Musique aux Tuileries]]'', [[1862]] ({{dunité|76|118|cm}}), [[Londres]], [[National Gallery (Londres)|National Gallery]].]]
[[ImageFichier:Manet, EdouardMANET - YoungMúsica Flautist,en orlas TheTullerías Fifer(National Gallery, 1866Londres, (21862).jpg|thumb|rightvignette|''[[LeLa JoueurMusique deaux fifreTuileries]]'', [[18661862]] ({{dunité|16176|97118|cm}}), [[ParisLondres]], [[muséeNational d'OrsayGallery]].]]
[[Fichier:Manet, Edouard - Young Flautist, or The Fifer, 1866 (2).jpg|vignette|''[[Le Joueur de fifre]]'', [[1866]] ({{dunité|161|97|cm}}), [[Paris]], [[musée d'Orsay]].]]
[[Fichier:Édouard Manet, en buste, de face - Nadar.jpg|vignette|alt=Portrait d'homme barbu, regard face, visage légèrement tourné vers sa droite, chevelure épaisse, bien mis.|Manet, avant 1870.]]
=== La Musique aux tuileries ===
Édouard Manet, d'après la description qu'en fait [[Antonin Proust]], était un jeune homme plein d’assurance, volontiers amical et sociable. C’est pourquoi l’époque de ses premiers succès est aussi celle de son entrée remarquée dans les cercles intellectuels et [[Aristocratie|aristocratiques]] parisiens.
 
« Il se forma autour de Manet une petite cour. Il allait presque chaque jour aux [[jardin des Tuileries|Tuileries]] de deux à quatre heures.(…) [[Charles Baudelaire|Baudelaire]] était là son compagnon habituel. On regardait curieusement ce peintre élégamment vêtu qui disposait sa toile, s'armait de sa palette, et peignait<ref>{{harvsp|Proust|1947|p=170}}.</ref> » La description de Proust donne une idée assez juste de Manet qui était bien un des [[dandy]]s en haut de forme de son tableau, habitués de son atelier, des [[jardin des Tuileries|Tuileries]] et du [[café Tortoni de Paris]], café élégant du boulevard, où il prenait son déjeuner<ref name="CMWB 122">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=122|id=CMWB}}.</ref>, avant d'aller aux Tuileries. « Et quand il revenait chez Tortoni de cinq à six heures, c'était à qui le complimenterait sur ses études qu'on se passait de main en main<ref>{{harvsp|Proust|1947|p=176}}.</ref>. »
 
Avec ''[[La Musique aux Tuileries]]'' ([[1862]]) Manet brosse le tableau de l'univers élégant dans lequel il évoluait. Le tableau dépeint un concert donné au [[jardin des Tuileries]] et dans lequel le peintre représente des personnes qui lui sont proches.
 
On distingue, de gauche à droite, un premier groupe de personnages masculins parmi lesquels son ancien compagnon d'atelier [[Albert de Balleroy]], [[Zacharie Astruc]] (assis), [[Charles Baudelaire]] debout, et derrière Baudelaire, à gauche : [[Henri Fantin-Latour|Fantin-Latour]]<ref name="CMWB 122" />. Parmi les hommes, Manet a placé son frère [[Eugène Manet]], [[Théophile Gautier]], [[Champfleury (écrivain)|Champfleury]], le baron [[Isidore Taylor|Taylor]], [[Aurélien Scholl]]<ref name="Monneret 478"/>. La première dame habillée en blanc en partant de la gauche est {{Mme|Lejosne}}, femme du commandant [[Hippolyte Lejosne]] chez lequel Manet a fait la connaissance de Baudelaire. Ceux qui fréquentaient Lejosne étaient tous des amis de Manet<ref>{{harvsp|Monneret|1987a|p=437}}.</ref>. À côté de {{Mme}} Lejosne, se trouve {{Mme}} Offenbach.
 
Le peintre s’est lui-même représenté sous les traits du personnage barbu le plus à gauche de la composition. À sa droite, assis contre le tronc, on reconnait {{Citation|celui que Manet appelait le Mozart des Champs Élysées : [[GioacchinoGioachino Rossini]]<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=123|id=CMWB}}.</ref>.}}
 
Le tableau fut jugé sévèrement par Baudelaire qui n'en parla pas en 1863<ref name="CMWB 126"/> et il fut vivement attaqué par [[Paul de Saint-Victor]] : {{Citation|Son concert aux Tuileries écorche les yeux comme la musique des foires fait saigner l'oreille<ref name="CMWB 126">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=126|id=CMWB}}.</ref>.}} [[Hippolyte Babou]] parle de la « manie de Manet de voir par taches (…) la tache-Baudelaire, la tache-Gautier, la tache-Manet<ref>''Les dissidents de l'exposition. {{M.}} Édouard Manet'', Revue libérale II, 1867, {{p.}}284 et suivantes.</ref>. »
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''La Musique aux Tuileries'' est en fait le premier modèle de toutes les peintures impressionnistes et post-impressionnistes qui représentent la vie contemporaine en plein air. Il a inspiré dans les décennies suivantes : [[Frédéric Bazille]], [[Claude Monet]], et [[Auguste Renoir]]<ref name="CMWB 126"/>. Sa postérité sera immense. Toutefois, à cette époque, Manet n'est pas encore le peintre de plein air qu'il deviendra par la suite. L'image de cette élégante société du [[Second Empire]] qu'il a groupée sous les arbres est certainement un travail d'atelier<ref name="CMWB 126" />. Les personnages qui sont de véritables portraits sont peut-être peints d'après des photographies<ref>{{harvsp|Richardson|1958|p=20 }}.</ref>.
 
Plus de dix années plus tard, au [[printemps]] [[1873]], Manet réalisera une toile d’une facture similaire à celle de ''La Musique aux Tuileries'', intitulée ''[[Bal masqué à l'opéra]]'' et où figurent plusieurs de ses connaissances. L’[[Opéra Le Peletier|opéra]] en question, situé rue Le Peletier dans le [[9e arrondissement de Paris|{{IXe}} arrondissement]], devait d’ailleurs être réduit en cendres par un [[incendie]] la même année. Un autre rendez-vous mondain parisien de l'époque, les courses hippiques de [[Hippodrome de LongchampParisLongchamp|Longchamp]], inspirent au peintre un tableau : ''[[Les Courses à Longchamp]]''.
 
Pour la première fois dans l’histoire du [[Salon de peinture et de sculpture|Salon officiel et annuel de Paris]], on permet en [[1863]] aux artistes refusés d’exposer leurs œuvres dans une petite salle annexe à l’exposition principale, où les visiteurs peuvent les découvrir : c’est le fameux [[Salon des Refusésrefusés]]. Édouard Manet, en y exposant trois œuvres controversées, s’impose comme une figure de l’avant-garde.
 
=== ''Le Bain'', ou ''Le Déjeuner sur l’herbe'' (1862, Salon des Refusés de 1863) ===
[[Image:Édouard Manet - Le Déjeuner sur l'herbe.jpg|thumb|''Le Bain'' ou ''[[Le Déjeuner sur l'herbe]]'', [[1863]] ({{dunité|208|264|cm}}), [[Paris]], [[musée d'Orsay]].]]
[[Fichier:Olympia Bertall.JPG|thumb|Olympia caricature de [[Bertall]]]]
 
=== ''Le Bain'', ou ''Le Déjeuner sur l’herbe'' (Salon des Refusés de 1863) ===
[[Fichier:Édouard Manet - Le Déjeuner sur l'herbe.jpg|vignette|''Le Bain'' ou ''[[Le Déjeuner sur l'herbe]]'', [[1863]] ({{dunité|208|264|cm}}), [[Paris]], [[musée d'Orsay]].]]
[[Fichier:Olympia Bertall.JPG|vignette|Olympia caricature de [[Bertall]]]]
{{article détaillé|Le Déjeuner sur l'herbe}}
Antonin Proust rapporte que l'idée du tableau est venue au peintre à Gennevilliers : {{Citation| Des femmes se baignaient, Manet avait l'œil fixé sur la chair de celles qui sortaient de l'eau : - Il paraît qu'il faut que je fasse un nu. Eh bien, je vais leur en faire un [...] dans la transparence de l'atmosphère, avec des personnes que nous voyons là-bas. On va m'éreinter. On dira ce qu'on voudra [...]<ref>{{harvsp|Bataille|1955|p=73}}.</ref>.}} Manet n'était pas satisfait de la figure de l'homme en jaquette de ''La Musique aux Tuileries''. Cet homme, il voulut l'insérer dans un cadre mythologique, champêtre, près d'un nu qu'il voulut clair ; l'air «  transparent  ». ; le nu lui-même serait une femme<ref>{{harvsp|Bataille|1955|p=74}}.</ref>.
 
ParmiL'œuvre lesest troisrefusée [[peinture]]sau exposéesSalon de 1863. C'est pourquoi, le peintre l'expose au Salon, des refusés de la compositionmême centraleannée dusous le titre ''[[Le Bain''<ref>{{Lien web |titre=Le Déjeuner sur l'herbe|Déjeuner sur- l’herbe]]'Edouard Manet {{!}} Musée d'Orsay |url=https://www.musee-orsay.fr/fr/oeuvres/le-dejeuner-sur-lherbe-904 |site=www.musee-orsay.fr |consulté le=2023-04-28}}</ref>. Cette toile suscite les réactions les plus vives par rapport aux autres qu'il avait envoyées. Dans cette œuvre, Manet confirme sa rupture avec le [[classicisme]] et l’[[PeintureArt académique|académisme]] qu'il avait commencée avec ''[[La Musique aux Tuileries]]''. La polémique vient moins du style de la toile que de son sujet : si le [[La représentation du nu dans(genre l'artartistique)|nu féminin]] est déjà répandu et apprécié, à condition d’être traité de façon pudique et éthérée, il est encore plus choquant de faire figurer dans la même composition deux hommes tout habillés. Une telle mise en scène exclut la possibilité d’une interprétation [[Mythologie|mythologique]] et donne au tableau une forte connotation [[Sexualité|sexuelle]]. Le critique [[Ernest Chesneau]], résumant ce malaise, affirme ne pouvoir « trouver que ce soit une œuvre parfaitement chaste que de faire asseoir sous bois, entourée d’étudiants en béret et en paletot, une fille vêtue seulement de l’ombre des feuilles, dénonçant « un parti pris de vulgarité inconcevable ». {{Citation|Je dois dire que le côté grotesque de son exposition tient à deux causes : d'abord à une ignorance presque enfantine des premiers éléments du dessin, ensuite à un parti pris de vulgarité inconcevable <ref>''Les Nations rivales dans l'art'', 1868 (France - La jeune École, Peintres et Excentriques, page 343.</ref>}}{{,}}. Le ''Déjeuner sur l’herbe'' ne fait pourtant que s’inspirer d’une œuvre de [[Raphaël (peintre)|Raphaël]] représentant deux [[nymphe]]s<!-- laquelle ? -->, et du ''[[Le Concert champêtre (Titien)|Concert champêtre]]'' du [[Le Titien|Titien]], la seule différence avec ces deux peintures étant les vêtements des deux hommes. Manet, de cette manière, relativise et ridiculise les goûts et les interdits de son époque<ref>[https://books.google.fr/books?id=8DMGAAAAQAAJ&printsec=frontcover&dq=Ernest+Chesneau,+Les+nations+rivales+dans+l%27art&source=bl&ots=dlvYsJa4uU&sig=ow_X-vIxfcbryNYopIQwrXw45Fc&hl=fr&ei=eyOcTZTCC4imhAfogJ28Bg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=1&ved=0CBkQ6AEwAA#v=onepage&q&f=false Les nations rivales dans l'art - Google Livres].</ref>.
 
''Le Déjeuner sur l'herbe'' y fit scandale, provoquant les sarcasmes des uns et les cris d'admiration des autres suscitant partout des polémiques passionnées. Manet était entré dans la pleine lutte.
 
Bientôt Olympia (1865) va accentuer encore le ton de ces controverses. Les caricaturistes dont Manet était la [[Bouc émissaire|tête de turc]] s'en sont donné à cœur joie<ref name="Monneret1987b 205">{{harvsp|Monneret|1987|p=205|id=Monneret1987b}}.</ref>.
 
=== ''Olympia'', ou l’entrée dans la modernité (1863, exposé au Salon officiel de 1865) ===
{{Article détaillé|Olympia (Manet)}}
[[Fichier:Edouard Manet - Olympia - Google Art Project.jpg|vignette|''[[Olympia (Manet)|Olympia]]'', [[1863]] ({{dunité|130.5|190|cm}}), [[Paris]] [[musée d'Orsay]].]]
[[Fichier:Olympia Cham.JPG|vignette|redresse=0.8|[[Cham (dessinateur)|Cham]], caricature d{{'}}''Olympia'' parue dans ''[[Le Charivari]]'' en 1865.]]
Bien que Manet ait finalement décidé de ne pas l’exposer au [[Salon des refusés]] et de ne la dévoiler que deux ans plus tard, c’est en [[1863]] qu'est réalisée la toile d{{'}}''[[Olympia (Manet)|Olympia]]''. L’œuvre, qui allait susciter une controverse encore plus féroce que ''[[Le Déjeuner sur l'herbe]]'', représente une [[prostitution|prostituée]] semblant sortir tout droit d’un [[harem]] à l’[[Proche-Orient|orientale]] et s’apprêtant visiblement à recevoir un client qui s'annonce avec un bouquet<ref name="CMWB 178">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=178|id=CMWB}}.</ref>. Les critiques d'art ont vu dans ce tableau des références à plusieurs peintres : [[Titien|Le Titien]] et sa ''[[Vénus d'Urbin]]'', 1538, [[Florence]], [[musée des Offices]], [[Francisco de Goya|Goya]] et sa ''[[La Maja nue|Maja nue]]'', 1802, [[Madrid]] [[musée du Prado]]<ref name="CMWB 178" />, [[Charles Jalabert|Jalabert]] dans les [[années 1840]] et son ''Odalisque'' 1842, [[Musée des beaux-arts de Carcassonne|musée de Carcassonne]], [[François Léon Benouville|Benouville]] et son ''Odalisque'', 1844, [[Musée des beaux-arts de Pau|musée de Pau]]<ref name="CMWB 180">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=180|id=CMWB}}.</ref>. {{Citation|On a aussi émis l'hypothèse, vraisemblable, qu'une des raisons du scandale provoqué par l'exposition de l' ''Olympia'' de Manet, était l'analogie possible avec ces photographies pornographiques très largement répandues qui montraient des prostituées nues, au regard hardi, étalant leurs charmes pour la clientèle<ref>{{harvsp|Needham|1972|p= 81-86|id=CMWB}}.</ref>.}} A titre d'exemple, [[Françoise Cachin]] et la montrent une photographie ''Nu sur canapé endormi'', studio Quinet, vers 1834, [[Cabinet des estampes]], Paris<ref name="CMWB 179">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=179|id=CMWB}}.</ref>
 
Contrairement au ''Déjeuner sur l’herbe'', ''Olympia'' n’est donc pas tant choquante par son thème que par la manière dont ce thème est traité. Outre sa nudité, le modèle [[Victorine Meurent]] affiche une insolence et une provocation indéniables. [[Paul de Saint-Victor]] écrit dans ''[[La Presse (France)|la Presse]]'' du {{date-|28 mai 1865}} : {{Citation| La foule se presse comme à la Morgue devant l'Olympia faisandée de {{M.}} Manet. L'art descendu si bas ne mérite pas qu'on le blâme<ref name="CMWB 181">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=181|id=CMWB}}.</ref>.}}
''Article détaillé : [[Olympia (Manet)|Olympia]]''
[[Fichier:Edouard Manet - Olympia - Google Art Project.jpg|thumb|''[[Olympia (Manet)|Olympia]]'', [[1863]] ({{dunité|130.5|190|cm}}), [[Paris]] [[musée d'Orsay]].]]
[[Fichier:Olympia Cham.JPG|thumb|upright=0.8|[[Cham (dessinateur)|Cham]], caricature d'''Olympia'' parue dans ''[[Le Charivari]]'' en 1865.]]
Bien que Manet ait finalement décidé de ne pas l’exposer au [[Salon des Refusés]] et de ne la dévoiler que deux ans plus tard, c’est en [[1863]] qu'est réalisée la toile d’''[[Olympia (Manet)|Olympia]]''. L’œuvre, qui allait susciter une controverse encore plus féroce que le ''[[Déjeuner sur l'herbe]]'', représente une [[prostituée]] semblant sortir tout droit d’un [[harem]] à l’[[Proche-Orient|orientale]] et s’apprêtant visiblement à recevoir un client qui s'annonce avec un bouquet<ref name="CMWB 178">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=178|id=CMWB}}.</ref>. Les critiques d'art ont vu dans ce tableau des références à plusieurs peintres : [[Le Titien]] et sa '' [[Vénus d'Urbin]]'', 1538, [[Florence]], [[musée des Offices]], [[Francisco de Goya|Goya]] et sa ''[[La Maja nue|Maja nue]]'', 1802, [[Madrid]] [[musée du Prado]]<ref name="CMWB 178" />, [[Charles Jalabert|Jalabert]] dans les [[années 1840]] et son ''Odalisque'' 1842, [[Musée des beaux-arts de Carcassonne|musée de Carcassonne]], [[François-Léon Benouville|Benouville]] et son ''Odalisque'', 1844, [[Musée des beaux-arts de Pau|musée de Pau]]<ref name="CMWB 180">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=180|id=CMWB}}.</ref>. {{Citation|On a aussi émis l'hypothèse, vraisemblable, qu'une des raisons du scandale provoqué par l'exposition de l' ''Olympia'' de Manet, était l'analogie possible avec ces photographies pornographiques très largement répandues qui montraient des prostituées nues, au regard hardi, étalant leurs charmes pour la clientèle<ref>{{harvsp|Needham|1972|p= 81-86|id=CMWB}}.</ref>.}} A titre d'exemple, [[Françoise Cachin]] et al montrent une photographie ''Nu sur canapé endormi'', studio Quinet, vers 1834, [[Cabinet des estampes]], Paris<ref name="CMWB 179">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=179|id=CMWB}}.</ref>
 
L’atmosphère générale d’[[érotisme]] : {{Citation|Olympia que font plus nue son ruban et autres menus accessoires <ref>Daniel Arasse ''On n'y voit rien. Descriptions, Denoël, 2000'' {{p.|70}}.</ref>}} est renforcée par la présence du chat noir à la queue relevée, aux pieds de la jeune fille. L’animal fut ajouté par Manet, non sans [[humour]], afin de remplacer l’innocent chien figurant dans la ''Vénus d’Urbin'', et peut-être également afin de désigner par [[métaphore]] ce que la jeune fille cache précisément de sa main : {{Citation|A-t-on cependant assez suffisamment mis en évidence que ce que transfère la servante dans l’hommage du bouquet – fastueux morceau de peinture à la facture si tranchée du reste de la toile – est le désir, désir pour le seul objet refusé au regard, le sexe d’Olympia <ref>Martine Bacherich, ''L’intrigue visuelle'' {{p.|199}} dans Nouvelle revue de psychanalyse, Gallimard, Paris, {{numéro|35}}, printemps 1987.</ref>}}. D’autres éléments de la composition ont longtemps perturbé les critiques : c’est le cas du bouquet de [[fleur]]s, [[nature morte]] s’invitant de manière incongrue dans un tableau de nu, mais aussi du bracelet (qui appartenait à la mère du peintre) et de la grossièreté de la [[Perspective (représentation)|perspective]]. C'est ce tableau qui plaira tant à [[Émile Zola]], qui le défendra à travers ses écrits tout au long de sa vie et notamment dans une chronique publiée en 1866 intitulée [[Mon Salon]].
Contrairement au ''Déjeuner sur l’herbe'', ''Olympia'' n’est donc pas tant choquante par son thème que par la manière dont ce thème est traité. Outre sa nudité, le modèle ([[Victorine Meurent]]) affiche une insolence et une provocation indéniables. [[Paul de Saint-Victor]] écrit dans [[La Presse (France)|la Presse]] du 28 mai 1865 : {{Citation| La foule se presse comme à la Morgue devant l'Olympia faisandée de {{M.}} Manet. L'art descendu si bas ne mérite pas qu'on le blâme<ref name="CMWB 181">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=181|id=CMWB}}.</ref>.}}
 
Les critiques et les caricatures pleuvent. Elles témoignent que Manet choquait, surprenait, déclenchait des rires qui étaient signe d'incompréhension et de gêne<ref name="CMWB 181"/>. Parmi elles la caricature de [[Cham (dessinateur)|Cham]] dans ''[[Le Charivari]]'', d'un humour épais, représente une femme nue allongée intitulée ''Manet, la naissance du petit ébéniste'' avec la légende : {{Citation|Manet a pris la chose trop à la lettre, que c'était comme un bouquet de fleurs, les lettres de faire part son au nom de la mère Michèle et de son chat<ref name="CMWB 181"/>}}. Émile Zola témoigne : {{Citation|Et tout le monde a crié : on a trouvé ce corps nu indécent ; cela devait être, puisque c'est là de la chair, une fille que l'artiste a jetée sur la toile dans sa nudité jeune et déjà fanée-<ref>''[[L'Événement (journal français, 1848)|L'Événement illustré]]'', 10 mai 1868 [https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Emile_Zola,_Mes_haines_-_Mon_salon_-_Edouard_Manet,_Ed._Charpentier,_1893.djvu/368 texte original sur wikisource].</ref>.}} Les critiques et les lazzis dont le peintre est la victime l’accablent assez fortement, et le soutien de son ami [[Charles Baudelaire]] l’aide à passer ce cap difficile de sa vie<ref group="note">Baudelaire, lettre à Manet du 11 mai 1865''Des principes esthétiques de la critique d'art du dernier Baudelaire – De Manet au symbolisme''- Wolfgang Drost, dans ''La Critique d'art en France, 1850-1900: actes du colloque de Clermont'' (1999), publié par Jean Paul Bouillon [https://books.google.fr/books?id=5QYu9ZeEpNsC&pg=PA14&lpg=PA14&dq=On+s%27est+bien+moqu%C3%A9+d%27eux+cependant.+Ils+n%27en+sont+pas+morts.%22+Baudelaire&source=bl&ots=BY5dadUmrP&sig=VxwTtZ7KDbbTdZ0akVH8KKslOrA&hl=fr&ei=IzScTeDgEZGXhQfPm43SBg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=3&ved=0CCUQ6AEwAg#v=onepage&q&f=false La Critique d'art en France, 1850... - Google Livres] {{p.|13}}.</ref>.
L’atmosphère générale d’[[érotisme]] : {{ Citation|Olympia que font plus nue son ruban et autres menus accessoires » <ref>Daniel Arasse ''On n'y voit rien. Descriptions, Denoël, 2000'' {{p.|70}}.</ref>,}} est renforcée par la présence du chat noir à la queue relevée, aux pieds de la jeune fille. L’animal fut ajouté par Manet, non sans [[humour]], afin de remplacer l’innocent chien figurant dans la ''Vénus d’Urbin'', et peut-être également afin de désigner par [[métaphore]] ce que la jeune fille cache précisément de sa main : {{Citation|A-t-on cependant assez suffisamment mis en évidence que ce que transfère la servante dans l’hommage du bouquet – fastueux morceau de peinture à la facture si tranchée du reste de la toile – est le désir, désir pour le seul objet refusé au regard, le sexe d’Olympia <ref>Martine Bacherich, ''L’intrigue visuelle'' {{p.|199}} dans Nouvelle revue de psychanalyse, Gallimard, Paris, {{numéro|35}}, printemps 1987.</ref>}}. D’autres éléments de la composition ont longtemps perturbé les critiques : c’est le cas du bouquet de [[fleur]]s, [[nature morte]] s’invitant de manière incongrue dans un tableau de nu, mais aussi du bracelet (qui appartenait à la mère du peintre) et de la grossièreté de la [[Perspective (représentation)|perspective]]. C'est ce tableau qui plaira tant à [[Émile Zola]], qui le défendra à travers ses écrits tout au long de sa vie et notamment dans une chronique publiée en 1866 intitulée [[Mon Salon]].
 
[[1867]] est une année riche en événements pour Manet : le peintre profite de l’[[Exposition internationale|Exposition universelle]] qui se tient à [[Paris]], au printemps, pour organiser sa propre exposition rétrospective et présenter une cinquantaine de ses toiles. S’inspirant de l’exemple de [[Gustave Courbet]], qui avait eu recours à la même méthode pour se détourner du [[Salon de peinture et de sculpture|Salon officiel]], Manet n’hésite pas à puiser fortement dans ses économies pour édifier son pavillon d’exposition, à proximité du [[pont de l'Alma]], et pour organiser une véritable campagne de publicité avec le soutien d’Émile Zola. Le succès, cependant, n'a pas été à la hauteur des espérances de l’artiste : tant les critiques que le public ont boudé cette manifestation culturelle.
Les critiques et les caricatures, pleuvent. Elles témoignent que Manet choquait, surprenait, déclenchait des rires qui étaient le signe d'une incompréhension et d'une gêne<ref name="CMWB 181"/>. Parmi elles la caricature de [[Cham (dessinateur)|Cham]] dans ''[[Le Charivari]]'', d'un humour épais, représente une femme nue allongée intitulée ''Manet, la naissance du petit ébeniste'' avec la légende : {{Citation|Manet a pris la chose trop à la lettre, que c'était comme un bouquet de fleurs, les lettres de faire part son au nom de la mère Michèle et de son chat<ref name="CMWB 181"/>}}. Émile Zola témoigne : {{Citation|Et tout le monde a crié : on a trouvé ce corps nu indécent ; cela devait être, puisque c'est là de la chair, une fille que l'artiste a jetée sur la toile dans sa nudité jeune et déjà fanée-<ref>''[[L'Événement (journal français)|L'Événement illustré]]'', 10 mai 1868 [https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Emile_Zola,_Mes_haines_-_Mon_salon_-_Edouard_Manet,_Ed._Charpentier,_1893.djvu/368 texte original sur wikisource].</ref>.}} Les critiques et les lazzis dont le peintre est la victime l’accablent assez fortement, et le soutien de son ami [[Charles Baudelaire]] l’aide à passer ce cap difficile de sa vie<ref group="note">Baudelaire, lettre à Manet du 11 mai 1865''Des principes esthétiques de la critique d'art du dernier Baudelaire – De Manet au symbolisme''- Wolfgang Drost, dans ''La Critique d'art en France, 1850-1900: actes du colloque de Clermont'' (1999), publié par Jean Paul Bouillon [https://books.google.fr/books?id=5QYu9ZeEpNsC&pg=PA14&lpg=PA14&dq=On+s%27est+bien+moqu%C3%A9+d%27eux+cependant.+Ils+n%27en+sont+pas+morts.%22+Baudelaire&source=bl&ots=BY5dadUmrP&sig=VxwTtZ7KDbbTdZ0akVH8KKslOrA&hl=fr&ei=IzScTeDgEZGXhQfPm43SBg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=3&ved=0CCUQ6AEwAg#v=onepage&q&f=false La Critique d'art en France, 1850... - Google Livres] {{p.|13}}.</ref>.
 
Édouard Manet a cependant atteint la maturité artistique et durant une vingtaine d'années il réalise des œuvres d’une remarquable variété, allant des portraits de son entourage (famille, amis écrivains et artistes) aux marines et aux lieux de divertissement en passant par les sujets historiques. Toutes vont influencer de façon marquée l’[[Impressionnisme|école impressionniste]] et l'histoire de la peinture.
[[1867]] est une année riche en événements pour Manet : le peintre profite de l’[[Exposition universelle]] qui se tient à [[Paris]], au printemps, pour organiser sa propre exposition rétrospective et présenter une cinquantaine de ses toiles. S’inspirant de l’exemple de [[Gustave Courbet]], qui avait eu recours à la même méthode pour se détourner du [[Salon de Paris|Salon officiel]], Manet n’hésite pas à puiser fortement dans ses économies pour édifier son pavillon d’exposition, à proximité du [[pont de l'Alma]], et pour organiser une véritable campagne de publicité avec le soutien d’[[Émile Zola]]. Le succès, cependant, n'a pas été à la hauteur des espérances de l’artiste : tant les critiques que le public ont boudé cette manifestation culturelle.
 
Édouard Manet a cependant atteint la maturité artistique et durant une vingtaine d'années il réalise des œuvres d’une remarquable variété, allant des portraits de son entourage (famille, amis écrivains et artistes) aux marines et aux lieux de divertissement en passant par les sujets historiques. Toutes vont influencer de façon marquée l’[[Impressionniste|école impressionniste]] et l'histoire de la peinture.
 
=== Victorine Meurent et autres portraits féminins ===
 
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Image:Edouard Manet 088.jpg|''[[Portrait de Victorine Meurent]]'', [[1862]] ({{dunité|42.9|43.7|cm}}), [[Boston]], [[Muséemusée des beauxBeaux-arts deArts (Boston)|musée des beaux-arts]].
Fichier:Edouard Manet 072.jpg|''[[La Chanteuse de rue]]'', 1862 - Musée des beaux-arts de Boston.
File:Édouard Manet - Young Lady in 1866 - Google Art Project.jpg|''[[La Femme au perroquet (Manet) Une jeune dame en 1866|Jeune dame en 1866 (la femme au perroquet)]]'', 1866 – [[Metropolitan Museum of Art]], New York.
Image:Edouard Manet - Le Chemin de fer - Google Art Project.jpg|''[[Le Chemin de fer (Manet)|Le Chemin de fer]]'', [[1872]]–[[1873]] ({{dunité|93.3|111.5|cm}}), [[Washington (district de Columbia)|Washington]], [[National Gallery of Art]].
File:Edouard Manet 012.jpg|''[[La Partie de croquet|La partie de croquet]]'', 1873, [[Muséemusée Städel]] {{Dunité|72.5 |72.5}}
Manet - femme en robe à rayures.jpg|''Femme en robe à rayures'', 1877-1880, huile sur toile, [[hôtel de Caumont (Aix-en-Provence)]]
Edouard Manet - La Négresse.jpg|''[[La Négresse (Manet)|La Négresse]]'' (1862), portrait de [[Laure (modèle)|Laure]], modèle que l'on retrouve notamment dans la servante de l'''Olympia''.
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Victorine Louise Meurent, née en 1844<ref name="Monneret1987a 525">{{harvsp|Monneret|1987|p=525|id=Monneret1987a}}.</ref>, avait {{nobr|18 ans}} lorsque Manet la rencontra. Selon Duret, il l'avait croisée par hasard dans la foule, au [[Palais de justice]] et il avait été frappé par {{Citation| son aspect original et sa manière d'être tranchée <ref name="T1 47"> [[Théodore Duret]] cité par {{harvsp|Tabarant|1947|p=47|id=T1}}.</ref>.}} Tabarant situe la rencontre près de l'atelier de gravure [[rue Maître-Albert]] car on retrouve l'adresse de la jeune femme avec son nom mal écrit dans le carnet d'adresse de Manet «  Louise Meuran, rue Maître-Albert, 17  <ref name="T1 47"/>. » Il est très possible que les deux versions soient exactes et que Manet lui-même ait raconté la première à [[Théodore Duret]]<ref name="CMWB 104">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=104|id=CMWB}}.</ref>. Victorine sera son modèle pendant une douzaine d'annéeannées, tout en posant également pour le peintre [[Alfred Stevens (peintre belge)|Alfred Stevens]] qui avait pour elle une affection solide et durable<ref name="Monneret1987a 525"/>. Elle était en tout cas un modèle professionnel et posait déjà dans l'atelier Couture où elle s'était inscrite au début de l'année 19621862. Le premier tableau qu'elle inspire à Manet est ''La Chanteuse de rue'' aussi intitulé ''La Femme aux cerises'' vers 1862<ref name="Monneret1987a 525" />. Amusante et bavarde, elle savait rester silencieuse pendant les séances de pose, sa peau laiteuse de rousse «  accrochait bien la lumière  ». Elle avait le [[franc-parler]] des [[titi parisien |titis parisiens]] {{Citation| des manières fantasques, un certain talent à la guitare et après une liaison amoureuse avec Stevens et une fugue amoureuse aux États-Unis, elle se mit )à peindre elle -même. Son ''Autoportrait'' fut présenté au Salon de 1876<ref>Vollard, Souvenirs d'un marchand de tableau, 1937, p.27 (réédition 2007).</ref>.}}
 
{{article détaillé| Victorine Meurent}}
 
Le ''[[Portrait de Victorine Meurent]]'', tel que Manet le saisit au moment où il vient de la rencontrer, lui donne des traits de femme, et non de la jeune fille qu'elle était. De même la blancheur de sa peau de rousse que Manet exploita ensuite dans les tableaux où elle paraît nue, ne se reflète ni dans le portrait, ni dans la toile ''La Chanteuse de rue''. Un peu davantage dans [[Mlle V. en costume d'espada |{{Mlle|Victorine}} Meurent en costume d'espada]] peint la même année<ref name="CMWB 105">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=105|id=CMWB}}.</ref>.
 
La beauté saisissante de cette peau laiteuse est pour beaucoup dans le traité du nu quque Manet va réaliserréalise dans ''Le Déjeuner sur l'herbe'' et ''Olympia''. Mais, bien que couverte d'un vêtement, le portait en pied de Victorine dans ''La Chanteuse de rue'' fit au moins autant scandale, par sa composition moderniste, que l'autre portrait en pied de Victorine Meurent : ''La Femme au perroquet'' intitulé ensuite ''[[JeuneUne dame en 1866 (la femme au perroquet)|Jeunejeune dame en 1866]]''. Dans ces deux derniers tableaux, les questions techniques et les innovations de Manet avaient pris une telle importance que la critique ne s'intéressa pas du tout au sujet. On attaqua beaucoup ''La Femme au perroquet''<ref name="CMWB 256">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=256(|id=CMWB}}.</ref>. Marius Chaumelin écrivait {{Citation|M. Manet, qui n'aurait pas dû oublier la panique causée, il y a quelques années, par son chat noir du tableau d{{'}}''Ophélie'' (sic), a emprunté le perroquet de son ami Courbet, et l'a placé sur un perchoir à côté d'une jeune femme en peignoir rose. Ces réalistes sont capables de tout ! Le malheur est que ce perroquet n'est pas empaillésempaillé comme les portraits de M. Cabanel, et que le peignoir rose stest d'un ton asseassez riche. Les accessoires empêchent même qu'on ne regarde la figure. Mais on n'y perd rien<ref name="T1 149"> Chaumelin cité par {{harvsp|Tabarant|1947|p=149|id=T1}}.</ref>.}}
 
En 1873, Victorine Meurent pose encore pour ''[[Le Chemin de fer (Manet)|Le Chemin de fer]]'', mais; le lieu où Manet peint ce tableau n'est nullement la [[gare de Paris-Saint-Lazare|gare Saint-Lazare]], mais dans le jardin d'[[Alphonse Hirsch]]<ref name="T2 237">{{harvsp|Tabarant|1930|p=237|id=T2}}.</ref>. OnCette saitinformation précisément où ce tableau a été peint parprovient d'un article de Philippe Burty à l'automne 1872, surconsécutif à ses visites d'atelier. Et contrairementContrairement à Monet, Manet n'était pas attiré par l'image des nouveaux objet de beautéobjets : la fumée, les locomotives, les verrières de la gare. Victorine y porte «  un coutil bleu qui a été à la mode jusqu'à l'automne écrit [[Philippe Burty]]<ref>{{harvsp|Lobstein|2002|p=80}}.</ref>.  » EtCe ceci ne seran'est pas le dernier tableau de Manet avec Victorine. Elle pose encore dans le jardin d'Alfred Stevens pour ''[[La Partie de croquet]]''.
 
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Augustins - Marguerite de Conflans - Édouard Manet D1986.1.jpg|''Marguerite de Conflans'', vers 1875, [[Muséemusée des Augustins de Toulouse]]
Edouard Manet 037.jpg|''[[Nana (Manet)|Nana]]'', [[1877]] ({{dunité|154|115|cm}}), [[Hambourg]], [[Kunsthalle]].
Édouard Manet - Mademoiselle Lucie Delabigne.jpg|''Mademoiselle Lucie Delabigne'', 1879 – [[Metropolitan Museum of Art]], New York
GUGG Portrait of Countess Albazzi.jpg|''Portrait de la comtesse Albazzi'', 1880 ({{dunité|56.5|46.5|cm}}), [[New York]], [[musée Solomon R. Guggenheim]].
Édouard Manet - La Viennoise Irma Brunner.jpg|''[[Portrait d'Irma Brunner]]'', 1881, Paris, [[musée d'Orsay]].
Edouard Manet 045.jpg|''Portrait de Madame Michel-Lévy'', 1882 ({{dunité|74|55|cm}}), [[Washington (district de Columbia)|Washington]], [[National Gallery of Art]].
'Summer' or 'The Amazon', by Edouard Manet.jpg|''L'Amazone'', 1882, [[Muséemusée Thyssen-Bornemisza]], Madrid
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Édouard Manet, s'avère un grand amateur de femmesprésences féminines. ([[Antonin Proust]], qui fréquentait Manet depuis l’enfance, avait l’avantage de connaître intimement son caractère : selon lui, même au plus fort de la maladie du peintre, « la présence d’une femme, n’importe laquelle, le remettait d’aplomb »{{refins|<ref name="Proust"/>}}),. » Manet peignit de nombreux portraits féminins et bien loin de se limiter aux seules [[Suzanne Manet|Suzanne Leenhoff]] et [[Victorine Meurent]], le peintre a immortalisé les traits d’un grand nombre de ses amies et de ses relations.
 
Ainsi, [[Fanny Claus]], amie de Manet et de son épouse Suzanne, future femme du peintre [[Pierre-Ernest Prins]] (Manet fut témoin à leur mariage) est le sujet du ''Portrait de Mademoiselle Claus'' (elle se tient debout à droite) et est représentée assise dans ''[[Le Balcon (Manet)|Le Balcon]]''. On peut citerCitons aussiégalement le ''Portrait de la comtesse Albazzi'', 1880 ou le ''Portrait de Madame Michel-Lévy'', 1882.
 
Il représente aussi des comédiennes comme [[Ellen Andrée]] dans ''[[La Prune (Manet)|La Prune]]'', où l'actrice pose complaisamment dans un décor de [[Bar (établissement)|café]], et semble figée dans une rêverie douce et mélancolique, ou encore [[Henriette Hauser]], la célèbre ''[[Nana (Manet)|Nana]]'' (1877). Dans la droite lignée d’d{{'}}''[[Olympia (Manet)|Olympia]]'', Manet se plaît à représenter sans faux-semblant mais avec plus de légèreté la vie des courtisanes ou « créatures » entretenues, dans cette toile, qui date de trois ans avant la parution du roman homonyme de [[Émile Zola|Zola]]. Le titre pourrait avoir été donné par Manet postérieurement à la réalisation du tableau, lorsqu’il apprit le titre du prochain ouvrage de Zola. Une autre explication voudrait que Manet ait été inspiré par le roman ''[[L'Assommoir]]'', dans lequel une Nana encore toute jeune fille fait sa première apparition, et reste précisément « des heures en chemise devant le morceau de glace accroché au-dessus de la commode »{{refins|<ref>''in'' E. Zola, ''L'Assommoir'', Ch. XI.</ref>}}. Le tableau, comme il se doit, fut refusé au [[Salon de peinture et de sculpture|Salon de Paris]] de [[1877]].
 
== La famille de Manet ==
=== Sa compagne Suzanne Leenhoff ===
[[ImageFichier:Edouard Manet 005.jpg|thumbvignette|150px|''[[La Lecture (Manet)|La Lecture]]'', vers [[1865]] ({{dunité|74|61|cm}}), [[Paris]], [[musée d'Orsay]].]]
[[Suzanne Manet|Suzanne Leenhoff]], née à [[Zaltbommel]] en 1830 était lela professeurprofesseure de piano d'Édouard Manet et de ses frères à partir de 1849. Elle devient la maîtresse d'Édouard, et en 1852, elle met au monde un fils qu'elle fait passer auprès de ses amis pour un jeune frère déclaré sous le nom de Léon Koëlla. L'enfant, baptisé en 1855 a pour parrainmarraine sa mère, Suzanne et pour parrain son père, Édouard qui est l'hôte assidu de la famille Leenhoff [[rue des Batignolles|rue de l'hôtel de ville aux Batignolles]]. Suzanne Leenhoff accompagne souvent Manet, pose pour lui pour un grand nombre de toiles (''La Pêche'', ''[[La Nymphe surprise]]'' et d'autres). En 1863, à la mort de son père, ManetEdouard épouse Suzanne à [[Zaltbommel]]<ref name="Monneret1987a 433">{{harvsp|Monneret|1987|p=433|id=Monneret1987a}}.</ref>. Baudelaire écrivait à [[Étienne Carjat]] en 1863 {{Citation|qu'elle était très belle, très bonne, et grande musicienne}}<ref name="Monneret1987a 433"/>.
[[Fichier:Portrait de Madame Manet sur un canapé bleu.jpg|vignette|''Portrait de Mme Manet sur un canapé bleu'' (1874). Pastel sur papier brun marouflé sur toile. H. 49 ; L. 60 cm]]
 
La silhouette corpulente de Suzanne Manet figure à de nombreuses reprises dans l'œuvre de Manet. En 1860-61, dans une [[sanguine]] : ''Après le bain'' {{Dunité|28|20|cm}}, [[Art Institute of Chicago]]<ref name="T1 41">{{harvsp|Tabarant|1947|p=41|id=T1}}.</ref>, et dans plusieurs gravures de nus<ref name="T1 43">{{harvsp|Tabarant|1947|p=43|id=T1}}.</ref>. et dans d'autre [[nu (genre artistique)|nus]] notamment ''[[La Nymphe surprise]]'' SuzanneElle apparaît encore dans plusieurs portraits notamment ''[[La Lecture (Manet)]]'', où {{Mme|Manet}} est en compagnie de son fils [[Léon KoelinKoëlla-Leenhoff|Léon]]. Ce tableau est identifié après la mort de Manet ''Portrait de Madame Manet et de Monsieur Léon Koella''<ref>{{Harvsp|Rouart|Wildenstein|1975}}, tome |p=I, p. 26}}.</ref>. Suzanne Manet est également le modèle de ''[[Suzanne Manet à son piano|Madame Manet au piano]]'', ''[[Le Départ du vapeur de Folkestone]]'', '' [[La Lecture (Manet)|La lecture]]'', ''Les Hirondelles'' 1873 qui la représente sur la plage de Berck assise à côté de sa belle-mère, ''[[Madame Manet sur un canapé]]'', pastel, 1874, ''[[Madame Édouard Manet dans la serre]]'' [[Galerie nationale d'Oslo|NasjonanlgalleriesNasjonalgalleriet]], [[Oslo]]<ref name="CMWB 437">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=437|id=CMWB}}.</ref>.
 
=== Léon Koëlla-Leenhoff ===
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Image:Édouard Manet - Cavaliers Espagnols (Detail).JPG|''Détail de Léon Leenhoff'', 1859, [[Musée des beauxBeaux-artsArts de Lyon]]
Image:Édouard Manet - L'Enfant à l'épée.jpg| ''[[L'Enfant à l'épée]]'', 1861, Metropolitan Museum of Art New York
Image:Boy Blowing Bubbles Edouard Manet.jpg|''[[Les Bulles de savon (Manet)|Les Bulles de savon]]'', [[1867]] [[musée Calouste-Gulbenkian]] [[Lisbonne]],
Image:EdouardYoung Boy Peeling a Pear (Édouard Manet) - Nationalmuseum - 00718501.jpgtif|''Jeune garçon pelant une poire'', 1868, [[Nationalmuseum]] [[Stockholm]]
Image:Edouard Manet 025.jpg| ''[[Le Déjeuner dans l'atelier]]'', 1868, Bayerische Staatsgemäldesammlungen<ref group="note">Ne pas confondre avec le [[Bayerisches Nationalmuseum]], Bayerische Staatsgemäldesammlungen désigne l'ensemble des Collections de peinture d'état de [[Bavière]].</ref> [[Munich]]
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Déclaré à sa naissance par Suzanne Leenhoff sous le nom Léon-Édouard Koëlla<ref>[http://data.bnf.fr/16231583/leon_leenhoff/http://data.bnf.fr/16231583/leon_leenhoff/ fiche BNF].</ref>, le débat autour de la paternité de [[Léon Koëlla-Leenhoff]] autorise des affirmations vagues et sans preuves. Notamment, celles qui prétendent que l'enfant serait né d'une relation entre Suzanne Leenhoff et le père de Manet. Ce doute est entretenu par certains critiques : {{Citation| Est-il le fils d'Édouard Manet ou son demi-frère? Le débat reste ouvert<ref name="CRMN 240">{{harvsp|Collectif RMN|2011|p=240|id=CRMN }}.</ref>.}} [[Françoise Cachin]] ne s'avance pas. Elle rappelle que l'on ne sait que très peu de choses sur l'intimité de Manet, y compris sur ses relations avec ses amis, et que la correspondance n'apporte rien d'essentiel à cette connaissance de Manet intime <ref name="CMWB 15">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=15|id=CMWB}}.</ref>. Sophie Monneret indique précisément : {{Citation| Léon, (Paris 1852-Bizy 1927). Fils naturel de [[Suzanne Manet|Suzanne Leenhoff]] et très probablement d'Édouard Manet qui épouse celle-ci douze ans après la naissance de l'enfant, Léon Koëlla est déclaré à l'[[état- civil]] comme étant né de la jeune femme et d'un certain Koëlla, dont on ne trouve trace nulle part; baptisé en 1855, l'enfant a pour parrain Édouard et pour marraine Suzanne qui présente cet enfant comme son plus jeune frère. C'est seulement après la mort de Suzanne que Léon la désignera comme sa mère et non plus comme sa sœur<ref name="Monneret1987a 400">{{harvsp|Monneret|1987|p=400|id=Monneret1987a}}.</ref>.}}; Léon a été choyé et gâté à la fois par Édouard, par sa mère Suzanne, et par Madame Manet mère qui habite avec son fils et sa belle fille après leur mariage. Léon sert souvent de modèle au peintre<ref name="Monneret1987a 400"/> et dans une gravure, sans doute exécutée d'après le tableau des Cavaliers.
 
Il est possible de suivre l'évolution progressive de Léon à travers les portraits que Manet a fait de lui, depuis l’enfance jusqu’à l’adolescence. C’est encore un tout jeune enfant qui pose, déguisé en [[Page (serviteur)|page]] [[Espagne|espagnol]], dans ''[[L'Enfant à l'épée]]''<ref name="Monneret1987a 400"/>, mais aussi dans le détail d'un tableau des tout débuts de Manet, ''[[Cavaliers espagnols]]'', ''Détail de Léon Leenhoff'', 1859, [[Muséemusée des beauxBeaux-artsArts de Lyon]]; à l’époque où le peintre accumulait les sujets espagnols. La ressemblance de l'enfant des ''Cavaliers'' avec celui de ''L'Enfant à l'épée'' laisse penser que Léon est alors âgé de sept ou huit ans <ref name="CMWB 47">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=47|id=CMWB}}.</ref>. On le retrouve dans une [[aquarelle]]<ref>{{Harvsp|Rouart|Wildenstein|1975}}, tome |p=II, p. 454}}.</ref>, et dans une gravure tirée du même tableau. Plus tard, dans ''[[Les Bulles de savon (Manet)|Les Bulles de savon]]'', Léon âgé de quinze ans s’amuse à faire des bulles dans un bol de savon. Léon est représenté en adolescent rêveur dans le ''[[Le Déjeuner dans l'atelier|Déjeuner dans l'atelier]]''<ref name="Monneret1987a 400"/>, réalisé à l’appartement familial de [[Boulogne-sur-Mer]], où les Manet passaient l’été. Léon adolescent apparaît encore dans ''Jeune garçon pelant une poire'', 1868, [[Nationalmuseum]] de [[Stockholm]]. Léon et Madame Manet sont les sujets d'un tableau ''Intérieur à Arcachon'' qui emprunte beaucoup au style de Degas. Léon est accoudé face à sa mère qui contemple la mer par la fenêtre ouverte. Cette toile réalisée en 1871 a été réalisée par Manet à la fin du [[siège de Paris (1870-1871)|siège de Paris]], lorsque le peintre partit rejoindre sa famille à [[Oloron-Sainte-Marie]] où il peignit plusieurs vues du port<ref name="CMWB 329">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=329|id=CMWB}}.</ref>. En 1873, Léon, jeune adulte, figure dans ''[[La Partie de croquet]]'' 1873.
En 1873, Léon, jeune adulte, figure dans '' [[La Partie de croquet]]'' 1873.
 
La toile ''[[Le Déjeuner dans l'atelier]]'', 1868, est caractéristique de l'image de Léon Leenhoff adolescent, sept ans après ''[[l'Enfant à l'épée]]''. Adolphe Tabarant le trouve «  énigmatique<ref name="T2 189">{{harvsp|Tabarant|1930|p=189|id=T2}}.</ref>,  » et suggère que Manet aurait fait une esquisse du jeune homme avant de le placer dans le tableau. Mais ce qui est étrange, ce n'est pas le regard rêveur de l'adolescent, que Manet saisit dans d'autres toiles, c'est la composition où les personnages semblent s'ignorer les uns les autres et semblent servir de faire-valoir à Léon. «  Il s'agit d'un œuvre clé dans l'évolution de Manet, la première vraie scène réaliste, inaugurant une série qui mène dix ans plus tard au ''Bar'' ([[Un bar aux Folies Bergère]]), lequel n'est pas sans analogie avec ''Le Déjeuner''<ref name="CMWB 294">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=294|id=CMWB}}.</ref>.  »
 
=== Sa belle-sœur Berthe Morisot ===
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Fichier:Edouard Manet 016.jpg|''[[Le Balcon (Manet)|Le Balcon]]'', 1868-1869 ({{dunité|170|124|cm}}), [[Paris]], [[musée d'Orsay]].
Fichier:Édouard Manet - Berthe Morisot au soulier rose.jpg|''Berthe Morisot au soulier rose'', 1872, Hiroshima Museum of Art.
Fichier:Édouard Manet - Le repos.jpg| ''Le Repos'' (Berthe Morisot), vers 1870-1871, Rhode Island School of Design Museum.
Fichier:Berthe Morisot Manet Lille 2918.jpg|''Berthe Morisot à l'éventail'', 1874, Palais des beaux-arts de Lille.
Fichier:Edouard Manet - Berthe Morisot With a Bouquet of Violets - Google Art Project.jpg|''Berthe Morisot aux bouquet de violettes'', 1872, Paris, Musée d'Orsay
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Edma Morisot, la sœur de Berthe Morisot, connaissait [[Henri Fantin-Latour]] et [[Félix Bracquemond]] depuis 1860 environ. Mais Berthe neMorisot fait la connaissance de Manet qu'plus tardivement, en 1867 lorsque Fantin-Latour les présente au Louvre, où BertheMorisot faisait une copie d'après [[Pierre Paul Rubens|Rubens]]<ref name="CMWB 302">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=302|id=CMWB}}.</ref>. Manet se montre tout d'abord très ironique sur la peinture de BertheMorisot. Dans une lettre adressée à Fantin-Latour, le {{date-|26 août 1868}}, il écrit : {{Citation|Je suis de votre avis, les demoiselles Morisot sont charmantes. Cependant, comme femmes, elles pourraient servir la cause de la peinture en épousant chacune un académicien et en mettant la discorde dans le camp de ce gâteux <ref name="MN1 103">{{harvsp|Moreau-Nélaton|1926|p=240|id=MN1}}.</ref>.}} Ce n'est que parPar la suite que, s'établiront entre Berthe et Édouard des liens d'affection et d'estime mutuelle. En attendant, BertheMorisot regimbe contre les séances de pose pour ''[[Le Balcon (Manet)|Le Balcon]]'', tout comme les autres modèles du tableau : [[Fanny Claus]] et le sculpteur [[Pierre Prins]]<ref name="CMWB 302" />. BertheMorisot trouvait Manet encombrant. Il avait la manie de retoucher lui-même les tableaux de la jeune fille<ref name="Rouart 40">{{harvsp|Denis Rouart|2007|p=40|id=Rouart}}.</ref>.
 
Au début de l'été 1870, environ un an après ''Le Balcon'', {{Citation|Manet se lance dans une série d'éblouissants portraits de Berthe Morisot dont ''Le Repos, portrait de Berthe Morisot''. Il demande à Berthe de poser pour lui alors qu'il est encore en train de faire le portrait de d'Eva Gonzalès<ref>Rouvart-Widentsein, tome1 RW 154.</ref> en robe blanche et; les méthodes de Manet insupportentirritent Berthe<ref name="CMWB 315">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=315|id=CMWB}}.</ref>.}} Elle écrit à sa sœur le {{date-|31 août 1870}} {{Citation|[...] il recommence chaque portrait pour la vingt-cinquième fois : elle pose tous les jours, et le soir, sa tête est lavée au savon noir. Voilà qui est encourageant pour demander aux gens de poser<ref name="Rouart 33">{{harvsp|Rouart|2007|p=33|id=Rouart}}.</ref>.}} Par la suite, Berthe Morisot perd souvent patience au cours des séances de pose avec Manet qu'elle trouve trop pointilleux. D'ailleurs, lorsqu'il vient par la suite, retoucher sesles propres tableaux àde elleMorisot, Bertheelle attend qu'il ait le dos tourné pour remettre sa toile en l'état<ref>{{harvsp|Lobstein|2002|p=62|id=Lobstein}}.</ref>. BertheMorisot porte aussi enune robe blanche lorsqu'elle pose pour ''[[Le Repos, portrait de Berthe Morisot]]'', et ne cesse de s'impatienter. Manet l'insupporte, elleElle écrit à sa sœur {{Citation| Manet me fait la morale et m'offre cette éternelle Mademoiselle Gonzalès comme modèle [...] elle sait mener les choses à bien, tandis que moi, je ne suis capable de rien. En attendant, il recommence son portrait pour la vingt-cinquième fois <ref name="Rouart 34">{{harvsp| Rouart|2007|p=34|id=Rouart}}.</ref>.}} Berthe Morisot, qui est dans une période de doute, est convaincue que celui qui allait être son beau-frère méprisait sa peinture et lui préférait celle d'Eva Gonzalès, et garde un très mauvais souvenir de ces séances de pose pour ce portrait. La jambe gauche repliée sous la robe, elle n'était pas autorisée à bouger pour ne pas défaire l'arrangement du peintre <ref name="CMWB 315"/>.
 
Manet admirait pourtant le talent de Berthe Morisot. Il le lui prouva dix ansannées plus tard en lui offrant, comme cadeau de [[nouvel an]], non pas des chocolats, mais un chevalet, le cadeau le plus encourageant qu'il pouvait lui faire<ref name="Rouart 35">{{harvsp|Rouart|2007|p=35|id=Rouart}}.</ref>.
 
Berthe Morisot devient la belle-sœur de Manet en [[1874]] lorsqu’elle se [[Mariage|marie]] avec son plus jeune frère [[Eugène Manet]]. BertheMorisot s'impose ensuite comme une figure essentielle du [[Impressionnisme|mouvement impressionniste]]. Elle adhère à la [[Société anonyme des artistes peintres, sculpteurs et graveurs]], à laquelle Manet refuse de se joindre, et participe aux [[Première exposition des peintres impressionnistes|Première]] et [[Deuxième exposition des impressionnistes |deuxième]] expositions des impressionnistes<ref name="Monneret1987b 232">{{harvsp|Monneret|1987|p=232|id=Monneret1987b}}.</ref> auxquelles il refuse également de participer.
 
=== Les frères Manet ===
[[FileFichier:Edouard Manet - On the Beach - Google Art Project.jpg|thumbvignette|uprightredresse=0.8| ''[[Sur la plage (Manet)|Sur la plage]]'' Manet, 1873 ]]
Édouard Manet est l'aîné de deux frères : [[Eugène Manet]], né en 1833<ref name="CMWB 504">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=504|id=CMWB}}.</ref>.. Manet le fait apparaître dans ''[[La Musique aux Tuileries]]'', il sert également de modèle à l'homme en jaquette du ''[[Le Déjeuner sur l'herbe|Déjeuner sur l'herbe]]'', et à une [[mine de plomb]] des trois personnages principaux du ''Déjeuner sur l'herbe'' 1862-1863 ([[Oxford]], [[Ashmolean Museum]]) qui n'est pas considérée comme une étude préparatoire, mais un dessin postérieur au ''Déjeuner''<ref name="CMWB 173">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=173|id=CMWB}}.</ref>. Eugène est l'un des deux personnages principaux de la toile ''[[Sur la plage (Manet)|Sur la plage]]'' où le jeune homme est en compagnie de [[Suzanne Manet]], peu avant son mariage avec [[Berthe Morisot]] sur la plage de [[Berck (Pas-de-Calais)|Berck-sur-Mer]]<ref name="CMWB 344">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=344|id=CMWB}}.</ref>. Moreau-Nélaton a également affirmé qu'Eugène aurait posé pour '' [[Le Matador saluant]]''<ref name="MN 76">{{harvsp|Moreau-Nélaton|1926|p=76|id=MN}}.</ref>, ce qui parait très possible au vu de la ressemblance du sujet avec Eugène<ref name="CMWB 241">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=241|id=CMWB}}.</ref>.
 
Gustave Manet né en 1835<ref name="MN 4">{{harvsp|Moreau-Nélaton|1926|p=4|id=MN}}.</ref> était conseiller municipal de Paris<ref>[http://books.openedition.org/psorbonne/1330 Liste des conseillers municipaux sous la {{IIe}} République. En gras le conseillers de Paris : Gustave Manet].</ref>.
 
C'est probablement par son intermédiaire que le peintre a été mis en relation avec [[Georges Clemenceau]] dont il a fait le portrait<ref name="CMWB 443">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=443|id=CMWB}}.</ref>. On sait peu de chose sur Gustave qui n'apparaitapparaît dans aucun tableau de son frère.
 
== Les amis de Manet ==
 
=== Amitiés littéraires ===
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Image:Edouard Manet 049.jpg|''[[Portrait d'Émile Zola]]'', 1868 ({{dunité|146|114|cm}}), [[Paris]], [[musée d'Orsay]].
Image:Portrait of Stéphane Mallarmé (Manet).jpg|''[[Portrait de Stéphane Mallarmé (Manet)|Portrait de Stéphane Mallarmé]]'', 1876 ({{dunité|27|36|cm}}), [[Paris]], [[musée d'Orsay]].
File:NinaCallias.jpg| [[Nina de Callias]] [[musée d'Orsay]].
File:Édouard Manet - Portrait d'Antonin Proust.jpg|''Portrait d'Antonin Proust'' (journaliste et ministre des Arts), 1877 – [[Musée Fabre]], Montpellier.
Image:Édouard Manet - Portrait Henri Rochefort2.jpg|''Portrait d'Henri Rochefort'', 1881 Kunsthalle de Hambourg.
Image:Edouard Manet - Baudelaire.jpg|''Portrait de Baudelaire'', peint et gravé par Manet, 1865 [[Musée national Eugène-Delacroix|Muséemusée Delacroix]] <ref>[http://www.musee-delacroix.fr/spip.php?page=document&id_document=233 Baudelaire Musée Delacroix].</ref>
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Alors même qu’il n’était encore qu’un jeune [[peintureartiste peintre|peintre]], Manet avait déjà conquis l’amitié de [[Charles Baudelaire|Baudelaire]]. Les deux hommes se rencontrent dès [[1859]] dans le salon du commandant Lejosne, ami de la famille Manet<ref name="PZ 430">{{harvsp|Pichois, Ziegler|1987|p=430|id=PZ}}.</ref>. Bien que Baudelaire n’ait jamais écrit publiquement pour soutenir son ami, y compris pendant le scandale du [[Salon des Refusésrefusés]] de [[1863]], il tient le talent du jeune homme en haute estime dès la présentation du ''[[Le Buveur d'absinthe]]''. Comme il l’avait noté en [[1865]], peu avant sa mort, « il y a des défauts, des défaillances, un manque d’aplomb, mais il y a un charme irrésistible. Je sais tout cela, je suis un des premiers qui l’ont compris »{{refins|<ref>Lettre de Baudelaire à Champfleury, 25 mai 1865}}.</ref>.
[[Fichier:MANET - Música en las Tullerías (National Gallery, Londres, 1862).jpg|thumbvignette|uprightredresse=1.2|''[[La Musique aux Tuileries]]'', 1862 [[National Gallery]]]]
 
L’amitié de Baudelaire a été particulièrement bénéfique à Manet après la présentation d’d{{'}}''[[Olympia (Manet)|Olympia]]'' : le peintre, abattu par les critiques féroces qui lui avaient été adressées, avait écrit à Baudelaire alors à [[Bruxelles]] en {{date-|mai 1865}}. Baudelaire avait répondu de manière à lui rendre courage : {{Citation bloc|Il faut donc que je vous parle encore de vous. Il faut que je m'applique à vous démontrer ce que vous valez. C'est vraiment bête ce que vous exigez. On se moque de vous; les plaisanteries vous agacent; on ne sait pas vous rendre justice, etc., etc. Croyez-vous que vous soyez le premier homme dans ce cas? Avez-vous plus de génie que Chateaubriand et que Wagner? On s'est est bien moqué d'eux cependant? Ils n'en sont pas morts. Et pour ne pas vous inspirer trop d'orgueil, je vous dirai que ces hommes sont des modèles, chacun dans son genre, et dans un monde très riche, et que vous, vous n'êtes que le premier dans la décrépitude de votre art. J'espère que vous ne m'en voudrez pas du sans-façon avec lequel je vous traite. Vous connaissez mon amitié pour vous<ref name="PZ 430"/>}} <!--La lettre que Baudelaire envoie en réponse est à la fois ferme et amicale. Le [[poète]] relativise la portée de ces attaques par rapport à celles dont d’autres grands artistes sont victimes. Manet n’est somme toute « que le premier dans la décrépitude de [son] art »{{refins|<ref>Lettre de Baudelaire à Manet, 11 mai 1865.</ref>}}.--> Baudelaire apparaît dans le tableau ''[[La Musique aux Tuileries]]'', il est au second plan, coiffé d'un haut de forme. Manet en a fait un portrait de profil, gravure de 1862<ref>[http://art.rmngp.fr/fr/library/artworks/edouard-manet_portrait-de-charles-baudelaire-au-chapeau_eau-forte_1862 Gravure Baudelaire en haut de forme].</ref>.
 
La mort de Baudelaire, survenue prématurément en [[1867]], a été un coup rude pour Manet etcomme pour sa femme [[Suzanne LeenhoffManet|Suzanne]], qui perdaient à la fois un protecteur et un ami. Le tableau de Manet ''[[L'Enterrement]]'', conservé au [[Metropolitan Museum of Art]] ([[New York]]) peint en 1867, et resté inachevé, a été fort inspiré au peintre par l'enterrement de Baudelaire<ref name="CMWB 260">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=260|id=CMWB}}.</ref>. Manet y assistait. Il y avait alors seulement onze personnes qui suivaient le corbillard, parce que c'était un dimanche et que beaucoup de gens de s'étaient absentés de Paris. Le lendemain, il y eut cent personnes à l'église et autant au cimetière<ref name="T1 505">{{harvsp|Tabarant|1947|p=505|id=T1}}.</ref>.
 
C’est à cette époque qu’Édouard Manet reçoit le soutien d’un jeune auteur de vingt-six ans, [[Émile Zola]]<ref group="note">« La place de {{M.}} Manet est marquée au Louvre, comme celle de Courbet, comme celle de tout artiste d'un tempérament fort et implacable. » Zola, Salon de 1866 pour le journal ''[[L'EvénementÉvénement (1865)|L'Événement]]''.</ref>. Ce dernier, révolté par le refus opposé au ''[[Le Joueur de fifre|Joueur de fifre]]'' pour le [[Salon de Parispeinture et de sculpture|Salon officiel]] de [[1866]], publie la même année un article retentissant dans ''[[L'Événement (1865)|L’Événement]]'', dans lequel il prend la défense du [[Peinturetableau (beaux-arts)|tableau]]. L’année suivante, Zola va jusqu’à consacrer une étude biographique et critique très fouillée à Édouard Manet, afin de permettre la « défense et illustration » de sa [[peinture]], qu’il qualifie de « solide et forte »<ref group="note"> EÉ. Zola, ''Une Nouvelle Manière en peinture : Édouard Manet'', Revue du {{s-|XIX}}, {{1er}} janvier 1867.</ref>.
 
Manet en est très reconnaissant envers son nouvel ami, et; il réalise dès [[1868]] le ''[[Portrait d'Émile Zola]]'', accepté au Salon de la même année. La toile contient plusieurs éléments anecdotiques et discrets révélant l’amitié des deux hommes : outre la reproduction d’''Olympia'' accrochée au mur, et dans laquelle le regard de [[Victorine Meurent]] a d’ailleurs été légèrement modifié par rapport à l’original afin de fixer Zola, on distingue sur le bureau le [[livre (document)|livre]] [[Bleu|bleu-ciel]] que l’écrivain avait rédigé pour défendre Manet. L’entente entre les deux hommes, toutefois, ne durera pas : de plus en plus perplexe face à l’évolution [[Impressionnisme|impressionniste]] que connaissait le style de Manet, bien loin du réalisme qu’il prisait, Zola finit par rompre tout contact.
 
Plus tard dans sa vie, Manet retrouvera chez un homme de lettres l’amitié profonde et spirituelle qu’il avait ressentie pour Baudelaire, en la personne de [[Stéphane Mallarmé]].« Les relations entre Mallarmé et Manet datent au moins de 1873, année de l'arrivée du poète à Paris. Une lettre de John Payne à Mallarmé, datée du {{date-|30 octobre}}, rappelle une visite commune à l'atelier du peintre. La rencontre s'est faite quelques mois plus tôt, soit par l'intermédiaire de Philippe Burty, soit par Nina de Callias dont Manet fit le portrait. Leurs relations furent étroites et suivies au point que Mallarmé a pu écrire à Verlaine dans sa mini biographie en 1947 : {{Citation|J'ai dix ans vu tous les jours mon cher Manet dont l'absence aujourd'hui me parait invraissemblableinvraisemblable <ref name="CMWB 377"> Françoise Cachin dans {{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=377|id=CMWB}}.</ref>.}} Les deux hommes se rencontrent quotidiennement. (...) Manet choisit en 1876 une toile de petit format pour peindre son modèle au naturel dans une attitude décontractée »<ref>[http://www.musee-orsay.fr/fr/collections/oeuvres-commentees/peinture/commentaire_id/stephane-mallarme-319.html?tx_commentaire_pi1%5BpidLi%5D=509&tx_commentaire_pi1%5Bfrom%5D=841&cHash=8367d5a1a3 sur www.musee-orsay.fr].</ref>. Ce dernier, plus jeune de dix ans, ressent une telle admiration pour l’art de Manet qu’il publie à [[Londres]], en [[1876]], un article élogieux à son sujet, en [[anglais]]. Dans ce texte, intitulé ''Les Impressionnistes et Édouard Manet'', Mallarmé prend la défense de son compatriote, et en particulier du tableau ''[[Le Linge (Manet)|Le Linge]]'', une représentation sans prétention d’une jeune femme des [[Quartier des Batignolles|Batignolles]] lavant son linge, œuvre refusée au Salon car mêlant un thème trivial et un style impressionniste. Manet exécute alors un ''[[Portrait de Stéphane Mallarmé (Manet)|Portrait de Stéphane Mallarmé]]''. C'est à l'écrivain [[Georges Bataille]] que revient d'avoir défini la merveilleuse réussite de ce portrait du poète <ref name="CMWB 377"/>. {{Citation| dans l'histoire de l'art et de la littérature, ce tableau est exceptionnel. Il rayonne de l'amitié de deux grands esprits; dans l'espace de cette toile, il n'y a nulle place pour ces nombreux affaissements qui alourdissent l'espèce humaine. La force légère du vol, la subtilité qui dissocie également les phrases et les formes, maquent ici une victoire authentique. La spiritualité la plus aérée, la fusion des possibilités les plus lointaines, les ingénuités et les scrupules composent la plus parfaite image du jeu que l'homme est en définitive, ses lourdeurs une fois surmontées<ref name="Bataille 255">{{harvsp|Bataille|1955|p=5}}.< /ref>.}} [[Paul Valéry]] associait ce qu'il appela « le triomphe de Manet » à la rencontre de la poésie, en la personne de Baudelaire d'abord, puis de Mallarmé. Ce ''triomphe'', semble-t-il s'acheva dans ce tableau, de la manière la plus intime<ref name="Bataille 118">{{harvsp|Bataille|1955|p=118}}.</ref>. »
 
Cette proximité entre l'artiste et l'écrivain amènera Édouard Manet à créer les illustrations qui accompagnent deux textes de Mallarmé : ''[[Le Corbeau (poème)|Le Corbeau]]'', traduction du poème d'[[Edgar Allan Poe]] en 1875, et ''[[L'Après-midi d'un faune]]'' en 1876<ref>Cf. [http://www.pileface.com/sollers/article.php3?id_article=1171 Manet et Mallarmé : "la complète amitié"].</ref>.
 
=== Amitiés artistiques : la « bande de Manet » ===
 
{{article détaillé|Groupe des Batignolles}}
[[Fichier:Henri Fantin-Latour 006.jpg|thumbnailvignette|[[Henri Fantin-Latour]], ''[[Un atelier aux Batignolles]]'', 1870, [[Paris]], [[musée d'Orsay]].]]
Au fur et à mesure que Manet gagne en âge, un nombre grandissant de jeunes artistes se réclament de son esprit en s’opposant à leur tour à l'[[Art académique|académisme]]. Prônant la peinture en plein air et se qualifiant eux-mêmes, tour à tour, d’Intransigeants, de Réalistes ou encore de Naturalistes, la critique va finalement, avec ironie, les surnommer « [[Impressionnisme|Impressionnistes]] ». Parmi ces jeunes talents, certains vont se rapprocher de Manet et former le [[groupe des Batignolles|groupe dit « des Batignolles »]], ainsi nommé en référence au [[quartier des Batignolles]] où se trouvaient l’atelier de Manet et les principaux [[Bar (établissement)|cafés]] que la bande fréquentait. On compte notamment dans ce groupe les [[artiste peintre|peintres]] [[Paul Cézanne]], [[Auguste Renoir]], [[Frédéric Bazille]] ou [[Claude Monet]].
 
Au fur et à mesure que Manet gagne en âge, un nombre grandissant de jeunes artistes se réclament de son esprit en s’opposant à leur tour à l'[[Peinture académique|académisme]]. Prônant la [[peinture]] en plein air et se qualifiant eux-mêmes, tour à tour, d’Intransigeants, de Réalistes ou encore de Naturalistes, la critique va finalement, avec ironie, les surnommer « [[Impressionnisme|Impressionnistes]] ». Parmi ces jeunes talents, certains vont se rapprocher de Manet et former le [[groupe des Batignolles|groupe dit « des Batignolles »]], ainsi nommé en référence au [[quartier des Batignolles]] où se trouvaient l’atelier de Manet et les principaux [[Bar (établissement)|cafés]] que la bande fréquentait. On compte notamment dans ce groupe les [[peinture|peintres]] [[Paul Cézanne]], [[Auguste Renoir]], [[Frédéric Bazille]] ou [[Claude Monet]].
 
De tous ces jeunes disciples, l’ami le plus intime de Manet est incontestablement Claude Monet, futur chef de file de l’impressionnisme. Les familles des deux peintres, deviennent vite très proches et passent de longues journées ensemble dans la verdure d’[[Argenteuil (Val-d'Oise)|Argenteuil]], chez les Monet. Ces visites régulières sont l’occasion pour Édouard Manet de réaliser plusieurs portraits intimistes de son ami, comme celui ironiquement appelé ''[[Claude Monet peignant dans son atelier]]'', et surtout de s’essayer à imiter le style et les thèmes favoris de ce dernier, en particulier l’[[eau]]. L’émulation est visible dans ''[[Argenteuil (Manet)|Argenteuil]]'', où Manet force volontairement son trait pour se rapprocher de l’impressionnisme par nature plus tranché de Monet, avec une [[Seine]] d’un [[bleu]] outrancier.
 
Cette admiration réciproque n’empêche cependant pas les deux hommes de développer, indépendamment l’un de l’autre, leurs propres styles. On peut ainsi utilement comparer deux vues de [[Paris]] réalisées le même jour sur le même sujet en [[1878]], à l’occasion de l’[[Exposition internationale|Exposition universelle]] : tandis que ''[[La Rue Mosnier aux drapeaux]]'' de Manet présente un paysage austère et presque aride, le faste luxuriant de ''[[La Rue Montorgueil (Monet)|La Rue Montorgueil]]'' de Monet révèle un point de vue radicalement différent.
 
Édouard Manet est également très lié au peintre [[Edgar Degas]], bien que ce dernier n’ait pas fait spécifiquement partie du groupe des Batignolles. Les deux hommes sont inséparables aux heures sombres de la [[guerre franco-prussienneallemande de 1870]] lorsque, pris au piège dans le [[Paris]] assiégé en compagnie de son ami, Manet ne pouvait communiquer que par lettres avec sa femme [[Suzanne Manet|Suzanne]] réfugiée en province. Manet et Degas se trouvent d’autres affinités pendant la [[Commune de Paris (1871)|Commune de Paris]] par leur opposition conjointe au parti versaillais. Bien que les deux hommes se soient souvent querellés et affrontés pour obtenir la prééminence dans l’avant-garde artistique, Degas conservera toujours une grande estime pour Manet et contribuera à promouvoir l’œuvre de ce dernier après sa mort.
 
== L'œuvre multiple : peintures historiques, marines, cafés, natures mortes ==
{{article détaillé|Liste des tableaux d'Édouard Manet }}
[[ImageFichier:Edouard Manet 056.jpg|thumbvignette|150px|''[[Le Combat du Kearsarge et de l'Alabama]]'', [[1864]], [[Philadelphia Museum of Art]].]]
=== ''Le Combat du Kearsarge et de l'Alabama'' ===
La peinture historique, en raison de son caractère très [[PeintureArt académique|académique]], reste un genre marginal dans l’œuvre de Manet, quelques événements contemporains importants ont pourtant retenu son intérêt. C'est ainsi que le peintre immortalise en 1865 une bataille navale de la [[guerre de Sécession]] qui s'est déroulée au large de [[Cherbourg-Octeville|Cherbourg]] le {{date-|19 juin 1864}}, entre le navire fédéral ''Kearsarge'' et le bâtiment confédéré ''Alabama'': ''[[Le Combat du Kearsarge et de l'Alabama]]'' ({{dunité|134|127|cm}})<ref name="Cachin Moffett Wilson-Bareau 219">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=219}}.</ref>. En 1872, Barbey d'Aurevilly affirme « Le tableau de Manet est avant tout une magnifique marine » soulignant que « la mer qu'il gonfle alentour est plus terrible que le combat »<ref>Barbey d'Aurevilly, "Salon", ''Le Gaulois'', 3 juillet 1872, (repris dans Sensations d'art, Paris, Finzine 1886). Extraits : {{chap.}}{{LXIII}}, {{p.|334-337}}[http://www2b.ac-lille.fr/weblettres/productions/impres/legaulois.htm Le Gaulois, 3 juillet 1872].</ref>. Le tableau exposé chez Alfred Cadart reçoit les éloges du critique Philippe Burty<ref name="Cachin Moffett Wilson-Bareau 219"/>.
 
Manet réalise la même année plusieurs toiles sur le thème du ''Kearsarge'' et sur le thème des bateaux de pêche qui témoignent des activités maritimes de l'époque : ''L'arrivée à Boulogne du Kearsarge''( 1864)<ref name="Cachin Moffett Wilson-Bareau 221">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=221}}.</ref>, ''Le Steam-boat, marine ou Vue de mer, temps calme'' (1864-1865)<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=224-225}}.</ref>, ''La jetée de Boulogne'' (1869)<ref>{{harvsp|Bataille|1955|p= 92}}.</ref> ou des portraits de membres de son équipage (''Pierrot ivre'', aquarelle qui caricaturerait le pilotin Pontillon, futur époux d'Edma Morisot, sœur de la peintre [[Berthe Morisot]] avec qui Manet se lie d'amitié<ref>[[Adolphe Tabarant]], ''Manet, Histoire Catalographique'', Paris, 1931.</ref>).
 
=== ''L'Exécution de Maximilien'' ===
[[Fichier:Manet, Edouard - The Execution of Emperor Maximilian, 1867.jpg|thumbvignette|150px|''[[L'Exécution de Maximilien]]'', première version 1867, [[musée des Beaux-Arts (Boston)|musée des beaux-arts de Boston]].]]
[[ImageFichier:Edouard Manet 022.jpg|thumbvignette|150px|''[[L'Exécution de Maximilien]]'', [[1868]], version définitive, Kunsthalle de [[Mannheim]].]]
Manet était encore à vif depuis l'insuccès de son exposition à l'Alma lorsque le {{Date|19|juin|1867}}, et alors même que l'Exposition universelle n’est pas terminée, la nouvelle de l’exécution de [[Maximilien Ier (empereur du Mexique)|Maximilien de Habsbourg]], au [[Mexique]], parvient jusqu’à la capitale française. Édouard Manet, depuis toujours fervent [[Républicanisme|républicain]], est scandalisé par la manière dont {{Napoléon III}}, après avoir imposé l'instauration de Maximilien au Mexique, lui a retiré le soutien des troupes françaises<ref name="Cachin Moffett Wilson-Bareau 272">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=272}}.</ref>. Le peintre travaille plus d’une année à une grande toile commémorative et historique, de l'été 1867 à la fin 1868<ref name="Cachin Moffett Wilson-Bareau 273">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=273}}.</ref>.
 
Manet était encore à vif depuis l'insuccès de son exposition à l'Alma lorsque le {{Date|19|juin|1867}}, et alors même que l'Exposition universelle n’est pas terminée, la nouvelle de l’exécution de [[Maximilien Ier du Mexique|Maximilien de Habsbourg]], au [[Mexique]], parvient jusqu’à la capitale française. Édouard Manet, depuis toujours fervent [[Républicanisme|républicain]], est scandalisé par la manière dont {{Napoléon III}}, après avoir imposé l'instauration de Maximilien au Mexique, lui a retiré le soutien des troupes françaises<ref name="Cachin Moffett Wilson-Bareau 272">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=272}}.</ref>. Le peintre travaille plus d’une année à une grande toile commémorative et historique, de l'été 1867 à la fin 1868<ref name="Cachin Moffett Wilson-Bareau 273">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=273}}.</ref>.
 
Il réalise plusieurs versions du même sujet. La première est au [[Muséemusée des beauxBeaux-arts deArts (Boston)|musée de Boston]], des fragments de la deuxième sont rassemblés à la [[National Gallery]] de [[Londres]], l'esquisse définitive est à la [[Ny Carlsberg Glyptotek]] de [[Copenhague]], la composition finale, au musée de [[Mannheim]]<ref name="Cachin Moffett Wilson-Bareau 273"/>. {{Citation bloc|La version de Boston est d'ailleurs la plus proche de [[Francisco de Goya|Goya]], par l'esprit romantique qui l'anime et par les tons chauds, qu'une harmonie froide de gris, de verts et de noirs remplacera dans les versions suivantes. Alors que Goya saisissait le moment où les soldats mettent en joue, Manet, lui, fixe le coup de feu. Cette version serait le ''laboratoire primitif'' de la composition<ref name="Cachin Moffett Wilson-Bareau 275">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=275}}.</ref>.}}
 
Inspirée du ''[[Tres de Mayomayo]]'' de [[Francisco de Goya|Goya]], et cependant traitée d’une manière radicalement différente, la scène de ''[[L'Exécution de Maximilien]]'' satisfait Manet qui l'aurait sans doute proposée au salonSalon si on ne lui avait pas fait savoir à l'avance qu'il serait refusé<ref name="Cachin Moffett Wilson-Bareau 276">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=276}}.</ref>. Mais le tableau, connu dans le milieu artistique, fera des émules notamment avec [[Jean-Léon Gérôme|Gérôme]] et son ''Exécution du maréchal Ney''. {{citation|Avec sa séquence des ''Exécutions'', Manet est un exemple du dernier effort pour recréer la grande peinture d'histoire. Il faut attendre [[Guernica]] de [[Pablo Picasso|Picasso]] (1937), et plus clairement les ''Massacres de Corée'' pour voir relevé le défi de Manet, défi que Manet avait lui-même lancé à Goya et à la grande tradition<ref name="Cachin Moffett Wilson-Bareau 276"/>.}}
 
Exposé aux États-Unis par l'amie du peintre, la cantatrice Émilie Ambre au cours de ses tournées en 1879 et 1880, le tableau n'aura qu'un succès relatif. Le triomphe de l'Impressionnisme refoulera pour un moment l'ambition de peindre les grands évènements du temps<ref name="Cachin Moffett Wilson-Bareau 276"/>.
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=== La Commune de Paris - Manet républicain ===
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File:Manet.Guerre civile.jpg|''Guerre civile'', lithographie (1871-1873).
File:Éduard Manet (1832-1883) Barricade.jpg|''La Barricade'', répression de la Commune de Paris, lithographie (1871-1873).
File:Édouard Manet - Portrait of George Clemeceau.jpg|''[[Portrait de Clemenceau]]'', 1879–1880, [[Paris]], [[musée d'Orsay]].
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Républicain convaincu, Manet s'engage dans la [[Fédération de la Garde nationale|Garde nationale]] au moment de la [[guerre franco-allemande de 1870|guerre de 1870]] en même temps que [[Edgar Degas|Degas]] sous les ordres du peintre [[Ernest Meissonier|Meissonier]] qui est colonel<ref name="Monneret t1|p=483">{{harvsp|Monneret|1987a|p=483}}.</ref>. Après la capitulation, il séjourne à Bordeaux avant de rentrer à Paris où il retrouve son atelier de la rue Guyot{{Note|L'atelier de la rue Guyot a longtemps été considéré comme détruit. Cet atelier se trouvait au 81 rue Guyot, devenu le 8 rue Médéric, où l'immeuble existe toujours. La confusion vient du fait que la numérotation de la rue Guyot a été inversée.|group=note}}. Les derniers soubresauts de la [[Commune de Paris|Commune]] déchirent Paris, et Manet, qu'elle a élu à sa [[Fédération des artistes de Paris|Fédération des artistes]], se désolidarise de ses excès<ref name="Monneret t1|p=483"/>. Toutefois, il regarde avec horreur le caractère sauvage de la répression<ref group="note">[http://www.histoire-image.org/site/etude_comp/etude_comp_detail.php?i=535 La répression de la Commune - L'Histoire par l'image].</ref> et l'exprime dans deux [[lithographie]]s ''La Barricade'' (1871-1873 (musée des beaux-arts de Boston) où les fusilleurs dessinés de dos évoquent l'exécution de Maximilien<ref group="note">''La Barricade'' : actes du colloque organisé les 17, 18 et 19 mai 1995 en Sorbonne par Alain Corbin et Jean Marie Mayeur – contribution de Marie-Claude Genet-Delacroix, pages 120 et suivantes [https://books.google.fr/books?id=1Y3EaSC2_DYC&pg=PA120&lpg=PA120&dq=manet+barricade&source=bl&ots=n5u0pvjWAo&sig=JWNWZ5KU7diAFxTFuOx8Vg9SG84&hl=fr&ei=YBHuTcqKMoSw8QPvrYioBw&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=20&ved=0CKsBEOgBMBM#v=onepage&q=manet%20barricade&f=false La barricade: actes du colloque… - Google Livres].</ref> ou ''Guerre civile'' (1871, un tirage de 1874 est conservé à la [[Bibliothèque nationale de France]]) dans laquelle Manet reprend en l'inversant l'image du ''Torero mort''<ref>Isabelle Cahn, Bibliothèque de l’INHA [http://www.inha.fr/spip.php?article2801&id_document=2583 Guerre civile, 1871].</ref> dans le dessin d'un corps allongé au pied d’une barricade désertée et la charge émotive de l’œuvre est renforcée encore {{Citation|par un cadrage serré, l’artiste concentre l’attention du spectateur sur ce gisant dont la solitude dit l’ineptie de la répression rapide et sauvage<ref>Bertrand Tillier, La répression de la Commune [http://www.histoire-image.org/site/etude_comp/etude_comp_detail.php?i=535 La répression de la Commune - L'Histoire par l'image].</ref>.}}
 
[[Fichier:Carolus-Duran (Charles-Auguste-Émile Durand) - Portrait of Édouard Manet - 2007.68 - Rhode Island School of Design Museum.jpg|vignette|gauche|{{Centrer|''Portrait d'Édouard Manet''<br>[[Carolus-Duran]], 1876<br>[[Rhode Island School of Design Museum]]}}]]
Républicain convaincu, Manet s'engage dans la [[Fédération de la Garde nationale|Garde nationale]] au moment de la [[Guerre franco-prussienne de 1870|guerre de 1870]] en même temps que [[Edgar Degas|Degas]] sous les ordres du peintre [[Jean-Louis-Ernest Meissonier|Meissonier]] qui est colonel<ref name="Monneret t1|p=483">{{harvsp|Monneret|1987a|p=483}}.</ref>. Après la capitulation, il séjourne à Bordeaux avant de retrouver Paris où son atelier de la rue Guyot a été détruit. Les derniers soubresauts de la [[Commune de Paris (1871)|Commune]] déchirent Paris, et Manet, qu'elle a élu à sa [[Fédération des artistes de Paris|Fédération des artistes]], se désolidarise de ses excès<ref name="Monneret t1|p=483"/>. Toutefois, il regarde avec horreur le caractère sauvage de la répression<ref group="note">[http://www.histoire-image.org/site/etude_comp/etude_comp_detail.php?i=535 La répression de la Commune - L'Histoire par l'image].</ref> et l'exprime dans deux [[lithographie]]s ''La Barricade'' (1871-1873 (musée des beaux-arts de Boston) où les fusilleurs dessinés de dos évoquent l'exécution de Maximilien<ref group="note">''La Barricade'' : actes du colloque organisé les 17, 18 et 19 mai 1995 en Sorbonne par Alain Corbin et Jean Marie Mayeur – contribution de Marie-Claude Genet-Delacroix, pages 120 et suivantes [https://books.google.fr/books?id=1Y3EaSC2_DYC&pg=PA120&lpg=PA120&dq=manet+barricade&source=bl&ots=n5u0pvjWAo&sig=JWNWZ5KU7diAFxTFuOx8Vg9SG84&hl=fr&ei=YBHuTcqKMoSw8QPvrYioBw&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=20&ved=0CKsBEOgBMBM#v=onepage&q=manet%20barricade&f=false La barricade: actes du colloque… - Google Livres].</ref> ou ''Guerre civile'' (1871, un tirage de 1874 est conservé à la [[Bibliothèque nationale de France]]) dans laquelle Manet reprend en l'inversant l'image du ''Torero mort''<ref>Isabelle Cahn, Bibliothèque de l’INHA [http://www.inha.fr/spip.php?article2801&id_document=2583 Guerre civile, 1871].</ref> dans le dessin d'un corps allongé au pied d’une barricade désertée et la charge émotive de l’œuvre est renforcée encore {{Citation|par un cadrage serré, l’artiste concentre l’attention du spectateur sur ce gisant dont la solitude dit l’ineptie de la répression rapide et sauvage<ref>Bertrand Tillier, La répression de la Commune [http://www.histoire-image.org/site/etude_comp/etude_comp_detail.php?i=535 La répression de la Commune - L'Histoire par l'image].</ref>.}}
Manet est comme ses contemporains frappé par l'aventure d'[[Henri Rochefort]] qui, déporté en Nouvelle-Calédonie, après la Commune, [[L'Évasion de Rochefort|s'évade]] en 1874 et rejoint l'Australie sur une petite baleinière. Républicain mais prudent, « l'artiste a attendu le triomphe des républicains au Sénat et à la Chambre, en {{date-|janvier 1879}}, ainsi que le vote d'une loi d'amnistie des communards en juillet 1880 autorisant le retour en France de l'évadé pour s'attaquer au sujet »<ref>[http://www.musee-orsay.fr/index.php?id=851&L=0&tx_commentaire_pi1&#91;showUid&#93;=315&no_cache=1 www.musee-orsay.fr Fiche du musée d'Orsay].</ref>.
 
Manet est comme ses contemporains frappé par l'aventure d'[[Henri Rochefort]] qui, déporté en Nouvelle-Calédonie, après la Commune, [[L'Évasion de Rochefort|s'évade]] en 1874 et rejoint l'Australie sur une petite baleinière. Républicain mais prudent, « l'artiste a attendu le triomphe des républicains au Sénat et à la Chambre, en janvier 1879, ainsi que le vote d'une loi d'amnistie des communards en juillet 1880 autorisant le retour en France de l'évadé pour s'attaquer au sujet »<ref>[http://www.musee-orsay.fr/index.php?id=851&L=0&tx_commentaire_pi1&#91;showUid&#93;=315&no_cache=1 www.musee-orsay.fr Fiche du musée d'Orsay].</ref>. Manet, alors malade, a demandé à rencontrer Rochefort pour obtenir des détails sur l'aventure, et le {{Date|4|décembre|1880}}, il écrit à Stéphane Mallarmé : {{Citation|J'ai vu Rochefort hier, l'embarcation qui leur a servi était une [[baleinière]] de couleur gris foncé; six personnes, deux avirons. Amitiés<ref name="Monneret 768">{{harvsp|Monneret|1987a|p=768}}.</ref>.}} C'est à partir des récits de Rochefort qu'il compose deux tableaux intitulés ''L'Évasion de Rochefort'' dont l'un, où les personnages sont plus précis, est conservé au [[musée d'Orsay]] à Paris, l'autre étant au [[Kunsthaus de Zurich]]<ref name="Monneret 768"/>. Dès le mois de janvier suivant, en 1881, Manet exécute un portrait d'Henri Rochefort grandeur nature, actuellement conservé au [[Kunsthalle de Hambourg|musée de Hambourg]]<ref>[http://www.the-athenaeum.org/art/full.php?ID=9938 The Athenaeum - Portrait of M. Henri Rochefort (Édouard Manet - 1881)].</ref>.
 
Un peu auparavant (en 1879-1880) il avait réalisé le [[Portraitportrait de Clemenceau]], alors que Georges Clemenceau était [[Président du Conseil (France)|Présidentprésident du Conseil]], lié à Gustave Manet, frère du peintre, conseiller municipal de La Chapelle (1878-1881), dans le {{18e|arrondissement}} de Paris, fief électoral de Clemenceau <ref name="CMWB 444">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=444}}.</ref>.
 
=== L'univers de la mer ===
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Fichier:Seascape_Calm_Weather.jpg|''Vue de mer, temps calme'', 1864, [[Art Institute of Chicago|Institut d'art de Chicago]].
Image:Edouard Manet 091.jpg|''[[Le Départ du vapeur de Folkestone]]'', [[1869]], [[Philadelphia Museum of Art]].
Image:Edouard Manet 090.jpg|''[[Clair de lune sur le port de Boulogne]]'', [[1869]], [[Paris]], [[musée d'Orsay]].
Image:L'Evasion de Rochefort - Edouard Manet 078(Kunsthaus Zürich).jpg|''[[L'Évasion de Rochefort]]'', [[1881]] ({{dunité|143|114|cm}}), [[Zurich (ville)|Zurich]], [[Kunsthaus de Zurich|Kunsthaus]].
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À partir de [[1868]], les Manet ont pris l’habitude de passer leurs étés à [[Boulogne-sur-Mer]], dans le [[Pas-de-Calais]], où ils ont fait l’acquisition d’un appartement. Outre le ''[[Le Déjeuner dans l'atelier]]'', ces séjours répétés permettent à Édouard Manet de développer un genre qui l’a toujours beaucoup attiré : les marines et l’univers de la mer. Boulogne, important [[Port (marine)|port]] de pêche, constitue alors une source d’inspiration inépuisable pour un peintre aimant les sujets [[Naturalisme (peinture)|naturalistes]].
 
Le saisissant ''[[Clair de lune sur le port de Boulogne]]'', dépeint le retour d’un bateau de pêche à la nuit tombée et l’attente des femmes de marins, sous la lumière de la lune. De cette scène ordinaire, Manet fait un [[clair-obscur]] mystérieux et dramatique, probablement inspiré des paysages nocturnes flamands et hollandais du {{s|XVII}} ou des marines au clair de lune de [[Claude Joseph Vernet|Vernet]]<ref name="CMWB 311" >{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=311|id=CMWB}}.</ref>. Il est possible aussi que Manet ait été inspiré par un petit format de [[Aernout van der Neer|Van der Neer]] qu'il possédait et qu'il proposa à une vente avant de le retirer<ref name="CMWB 311"/>. Une cinquantaine d'œuvres de Van der Neer sur des thèmes analogues ont été vendues à Paris entre 1860 et 1880<ref name="CMWB 312">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=312|id=CMWB}}.</ref>.
 
Les vacances boulonnaises voient la naissance d’autres toiles importantes, en particulier le ''[[Le Départ du vapeur de Folkestone|Départ du vapeur de Folkestone]]'', en [[1869]] : Manet y représente le [[bateau à roues à aubes|bateau à aubeaubes]] assurant la liaison avec le port anglais de [[Folkestone]], et sur lequel le peintre avait d’ailleurs embarqué l’année précédente pour visiter [[Londres]]. La dame habillée de blanc située le plus à gauche de la composition serait [[Suzanne Manet]], accompagnée de son fils [[Léon Koëlla-Leenhoff|Léon]]. La toile, à l'inverse du ''Clair de Lune'', est l'un des exemples les plus saisissants de la manière dont Manet sait jouer avec la lumière et les couleurs. ''[[Le Bateau goudronné]]'', a été peint sur la plage de [[Berck (Pas-de-Calais)|Berck]], et prend pour thème le travail des pêcheurs.
 
La jetée de Boulogne est également le sujet de plusieurs œuvres appartenant pour la plupart à des collectionneurs privés à l'exception d'une d'entre elles conservée au musée Van Gogh d'[[Amsterdam]] et intitulées à peu près toutes ''Jetée de Boulogne''<ref name="CMWB 312"/>.
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=== Cafés et cafés-concerts ===
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Fichier:Edouard Manet 029.jpg|''Au café, cabaret de Reichshoffen'', 1878 ({{dunité|77|83|cm}}), [[Winterthour]], [[muséeMusée Oskar Reinhart « Am Römerholz »]].
File:Edouard_Manet_-_At_the_Café_-_Walters_37893.jpg|''[[Au Café, Café-concert]]'', [[Baltimore]], [[Walters Art Museum]].
File:Edouard Manet - The Plum - National Gallery of Art.jpg|''[[La Prune]]'', 1878 ({{dunité|73.6|50.2|cm}}), [[Washington (district de Columbia)|Washington]], [[National Gallery of Art]].
File:Edouard Manet 006.jpg|''[[Coin de café-concert]]'', 1878-1879 ({{dunité|97.5|77.5|cm}}), [[Londres]], [[National Gallery]].
File:La Serveuse de bocks (1878-1879) - Edouard Manet 033(Musée d'Orsay).jpg|''[[La Serveuse de bocks]]'', 1878-1879 ({{dunité|77.5|65|cm}}), [[Paris]], [[musée d'Orsay]].
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Le rôle des [[café (établissement)|cafés]], brasseries et [[café-concert|cafés concert]] est aussi important dans la vie artistique au {{s|XIX}} qu'il peut l'être dans la vie politique. Peintres écrivains, journalistes, collectionneurs s'y retrouvent souvent<ref name="Monneret t.I 202">{{harvsp|Monneret|1987a|p=202}}.</ref>. Autour de Manet se constitue un « cénacle » qui tient ses assises, à partir de 1866 selon [[Théodore Duret]], le vendredi soir au [[café Guerbois]], situé au 11 Grand-Rue-des-Batignolles devenue de nos jours [[avenue de Clichy]]<ref name="Monneret t.II 314">{{harvsp|Monneret|1987b|p=314}}.</ref>. Deux tables sont réservées à ce groupe qui tient la des discussions tumultueuses d'où sortiront les nouveaux critères de l'art. On retrouve, autour du peintre tous ses camarades de l'atelier [[Thomas Couture|Couture]] et du groupe de 1863 parmi lesquels se trouvent [[Henri Fantin-Latour|Fantin-Latour]], [[James Abbott McNeill Whistler|Whistler]], [[Auguste Renoir|Renoir]]<ref name="Monneret t.II 315">{{harvsp|Monneret|1987b|p=315}}.</ref>.
[[ImageFichier:Edouard Manet 031.jpg|thumbvignette|''[[Chez le père Lathuille]]'', [[1879]] ({{dunité|93|112|cm}}), [[Tournai]], [[Musée des beaux-arts de Tournai|musée des beaux-arts]].]]
[[ImageFichier:Un bar aux Folies Bergère Edouard Manet.jpg | thumb vignette|''[[Un bar aux Folies Bergère]]'', [[1881]]-[[1882]] ({{dunité|96|130|cm}}), [[Londres]], [[Institut Courtauld]].]]
Le peintre, qui a son atelier au 34 [[Boulevard des Batignolles (Paris)|boulevard des Batignolles]] de 1864 à 1866, donne rendez-vous chaque soir dans ce grand café qui portera ensuite le nom de Brasserie Muller<ref name="Monneret t.II 314"/>. Puis, après la [[guerre franco-allemande de 1870|guerre de 1870]], vers 1875, Manet prendra ses quartiers dans le [[Café de la Nouvelle Athènes]], [[place Blanche]]. Ces deux cafés sont de hauts lieux de l'impressionnisme, mais Manet fréquente aussi le lieu de réunion des républicains avancés, futurs membres de la [[Commune de Paris (1871)|Commune de Paris]] comme [[Raoul Rigault]], ou [[Jules Vallès]]<ref name="Monneret t.II 315"/>.
 
Manet a abordé plusieurs fois ce thème des cafés avec par exemple avec ''Le Bon Bock'' en 1873 (Philadelphia Museum of Art, Philadelphie, {{dunité|94|83|cm}}) mais c'est surtout après 1878 que le thème devient notable avec la grande toile intitulée ''Reichshoffen'' qui représentait l'intérieur du nouveau cabaret de la [[rue de Rochechouart |rue Rochechouart]] dans le [[ Montmartre|quartier de Montmartre]] à Paris. Manet a découpé la toile en deux tableaux séparés : ''Au café'' ([[musée Oskar Reinhart « Am Römerholz »]], Winterthur, Suisse) et ''Coin de Café-Concert au cabaret de Reichshoffen'' - National Gallery, Londres, huile sur toile, {{dunité|97.1|77.5|cm}}) dont il existe une version réalisée quelques mois plus tard en 1878-1879 et exposée au [[musée d'Orsay]] : ''La Serveuse de bocks'' (Huile sur toile, {{dunité|77.5|65|cm}})<ref>[http://www.musee-orsay.fr/fr/collections/catalogue-des-oeuvres/notice.html?nnumid=1137 Notice du musée d'Orsay].</ref>. D'autres tableaux comme ''Au café'' ou ''La Prune'' datent de la même période, comme une œuvre moins achevée et moins connue ''Intérieur d'un café'' (vers 1880) qui se trouve au [[Kelvingrove Art Gallery and Museum]], [[Glasgow]], Royaume-Uni<ref>[http://peintres.celebres.free.fr/MANET/index-20.php Intérieur d'un café - Édouard Manet - Tableaux et dessins].</ref>.
Le peintre, qui a son atelier au 34 [[Boulevard des Batignolles (Paris)|boulevard des Batignolles]] de 1864 à 1866, donne rendez-vous chaque soir dans ce grand café qui portera ensuite le nom de Brasserie Muller<ref name="Monneret t.II 314"/>. Puis, après la [[Guerre franco-prussienne de 1870|guerre de 1870]], vers 1875, Manet prendra ses quartiers dans à [[Café de la Nouvelle Athènes|La Nouvelle Athènes]], [[place Blanche]]. Ces deux cafés sont de haut lieu de l'impressionnisme, mais Manet fréquente aussi le lieu de réunion des républicains avancés, futurs membres de la [[Commune de Paris (1871)|Commune de Paris]] comme [[Raoul Rigault]], ou [[Jules Vallès]]<ref name="Monneret t.II 315"/>.
 
Manet a abordé plusieurs fois ce thème des cafés avec par exemple avec ''Le Bon Bock'' en 1873 (Philadelphia Museum of Art, Philadelphie, {{dunité|94|83|cm}}) mais c'est surtout après 1878 que le thème devient notable avec la grande toile intitulée ''Reichshoffen'' qui représentait l'intérieur du nouveau cabaret de la [[rue de Rochechouart |rue Rochechouart]] dans le[[ Montmartre|quartier de Montmartre]] à Paris. Manet a découpé la toile en deux tableaux séparés : ''Au café'' ([[musée Oskar Reinhart « Am Römerholz »]], Winterthur, Suisse) et ''Coin de Café-Concert au cabaret de Reichshoffen'' - National Gallery, Londres, huile sur toile, {{dunité|97.1|77.5|cm}}) dont il existe une version réalisée quelques mois plus tard en 1878-1879 et exposée au [[musée d'Orsay]] : ''La Serveuse de bocks'' (Huile sur toile, {{dunité|77.5|65|cm}})<ref>[http://www.musee-orsay.fr/fr/collections/catalogue-des-oeuvres/notice.html?nnumid=1137 Notice du musée d'Orsay].</ref>. D'autres tableaux comme ''Au café'' ou ''La Prune'' datent de la même période, comme une œuvre moins achevée et moins connue ''Intérieur d'un café'' (vers 1880) qui se trouve au [[Kelvingrove Art Gallery and Museum|Glasgow Museums and Art Galleries]], [[Glasgow]], Royaume-Uni<ref>[http://peintres.celebres.free.fr/MANET/index-20.php Intérieur d'un café - Édouard Manet - Tableaux et dessins].</ref>.
 
C’est cependant une autre atmosphère, celle d'un restaurant avec jardin, situé [[avenue de Clichy]], qui inspire à l'artiste ''[[Chez le père Lathuille]]'' (1879), où l'on voit un jeune homme s’empresser auprès d’une jeune femme et lui [[Flirt|faire la cour]] {{Citation|Il a, au Salon de cette année, un portrait très remarquable de M. Antonin Proust et une scène de plein air, ''[[Chez le père Lathuille]]'', deux figures à une table de cabaret, d'une gaieté et d'une délicatesse de tons charmantes <ref>[http://www.cahiers-naturalistes.com/Salons/18-06-80.html Émile Zola], article sur le Salon de 1880 dans ''Le Voltaire'' du 18-22 juin 1880.</ref>.}}
 
[[Fichier:Carolus-Duran - Portrait Édouard Manet.jpg|vignette|gauche|{{Centrer|''Édouard Manet'', vers 1880<br>par [[Carolus-Duran]]<br>[[Musée d'Orsay]], Paris}}]]
C'est en traitant encore l'univers des cafés et des lieux de plaisir que Manet, déjà profondément rongé par la [[syphilis]] réalise en 1881-1882, une de ses dernières œuvres majeures intitulée ''[[Un bar aux Folies Bergère]]''. La scène, contrairement aux apparences, n’a pas été peinte au bar des [[Folies Bergère]] mais elle a été entièrement recréée en atelier<ref name="CMWB 482" />. La jeune femme servant de modèle, Suzon, est en revanche une véritable employée de ce célèbre café-concert<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=479|id=CMWB}}.</ref>. Les nombreux éléments présents sur le marbre du bar, qu’il s’agisse des bouteilles d’alcool, des fleurs ou des fruits, forment un ensemble pyramidal allant trouver son sommet, dans les fleurs qui ornent le corsage de la serveuse elle-même. Mais l’aspect qui a le plus retenu l’attention des critiques a été le reflet de Suzon dans le [[miroir]]. Ce dernier ne semble pas renvoyer une image exacte de la scène, tant en ce qui concerne la posture de la jeune femme que la présence de l’homme en face d’elle, si rapproché qu’il devrait logiquement tout cacher aux yeux du spectateur. Ce qui selon [[Joris-Karl Huysmans|Huysmans]] « stupéfie les assistants qui se pressent en échangeant des observations désorientées sur le mirage de cette toile<ref name="CMWB 482">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=482|id=CMWB}}.</ref>. « [...] Le sujet est bien moderne et l'idée de {{M.}} Manet de mettre ainsi sa figure de femme, dans son milieu, est ingénieuse [...] C'est vraiment déplorable de voir un homme de la valeur de {{M.}} Manet sacrifier à de tels subterfuges et faire, en somme, des tableaux aussi conventionnels que ceux des autres ! Je le regrette d'autant plus qu'en dépit de ses tons plâtreux, son bar est plein de qualités, que sa femme est bien campée, que sa foule a d'intenses grouillements de vie. Malgré tout, ce bar est certainement le tableau le plus moderne, le plus intéressant que ce salon renferme<ref>J.-K. Huysmans, ''L'Art moderne'', appendice II (Salon de 1882), {{p.|296}}.</ref>. »
C'est en traitant encore l'univers des cafés et des lieux de plaisir que Manet, déjà profondément rongé par la [[syphilis]] réalise en 1881-1882, une de ses dernières œuvres majeures intitulée ''[[Un bar aux Folies Bergère]]''. La scène, contrairement aux apparences, n’a pas été peinte au bar des [[Folies Bergère]] mais elle a été entièrement recréée en atelier<ref name="CMWB 482" />. La jeune femme servant de modèle, Suzon, est en revanche une véritable employée de ce célèbre café-concert<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=479|id=CMWB}}.</ref>. Les nombreux éléments présents sur le marbre du bar, qu’il s’agisse des bouteilles d’alcool, des fleurs ou des fruits, forment un ensemble pyramidal allant trouver son sommet, dans les fleurs qui ornent le corsage de la serveuse elle-même. Mais l’aspect qui a le plus retenu l’attention des critiques a été le reflet de Suzon dans le [[miroir]]. Ce dernier ne semble pas renvoyer une image exacte de la scène, tant en ce qui concerne la posture de la jeune femme que la présence de l’homme en face d’elle, si rapproché qu’il devrait logiquement tout cacher aux yeux du spectateur. Ce qui selon [[Joris-Karl Huysmans|Huysmans]] « stupéfie les assistants qui se pressent en échangeant des observations désorientées sur le mirage de cette toile<ref name="CMWB 482">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=482|id=CMWB}}.</ref>. « [...] Le sujet est bien moderne et l'idée de {{M.}} Manet de mettre ainsi sa figure de femme, dans son milieu, est ingénieuse [...] C'est vraiment déplorable de voir un homme de la valeur de {{M.}} Manet sacrifier à de tels subterfuges et faire, en somme, des tableaux aussi conventionnels que ceux des autres ! Je le regrette d'autant plus qu'en dépit de ses tons plâtreux, son bar est plein de qualités, que sa femme est bien campée, que sa foule a d'intenses grouillements de vie. Malgré tout, ce bar est certainement le tableau le plus moderne, le plus intéressant que ce salon renferme<ref>J.-K. Huysmans, ''L'Art moderne'', appendice II (Salon de 1882), {{p.|296}}.</ref>. »
 
Il n'est pas exclu que l'idée d'une composition devant un miroir ait été inspiré à Manet par un tableau de [[Gustave Caillebotte]] ''Dans un café''<ref>[http://www.musee-orsay.fr/fr/collections/catalogue-des-oeuvres/notice.html?no_cache=1&zoom=1&tx_damzoom_pi1%5Bzoom%5D=0&tx_damzoom_pi1%5BxmlId%5D=069686&tx_damzoom_pi1%5Bback%5D=%2Ffr%2Fcollections%2Fcatalogue-des-oeuvres%2Fnotice.html%3Fnnumid%3D69686 Caillebotte, ''Dans un café'' Musée d'Orsay].</ref>. où un homme debout coupé aux genoux s'appuie contre une table devant un miroir (composition elle-même dérivée du ''Déjeuner dans l'atelier'' de Manet<ref name="CMWB 480">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=480|id=CMWB}}.</ref>.
 
Cette fausse perspective, si riche d'implications poétiques, a surpris dès le début. La caricature faite par [[Louis Morel-Retz|Stop]] dans ''Le Journal amusant'' en témoigne. En légende du dessin, on lit ce commentaire {{Citation|''La Marchande de consolation aux Folies-Bergère'': son dos se reflète dans une glace, mais sans doute, par suite d'une distraction du peintre, un monsieur avec lequel elle cause et dont on voit l'image dans la glace, n'existe pas dans le tableau. Nous croyons devoir réparer cette omission- Salon 1882-Le journal amusant<ref name="CMWB 481">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=481|id=CMWB}}.</ref>.}} Comme beaucoup d'autres scène des tableaux de manetManet, le 'Bar aux Folies-Bergères a été entièrement reconstitué en atelier, comme en témoigne e récit de [[Pierre Georges Jeanniot]] qui est venu rendre visite au peintre à ce moment-là dans son atelier. Manet, déjà très souffrant avait accueilli le jeune homme en lui disant : {{Citation|Il peignait alors le Bar aux ''Folies-Bergères'', et le modèle, une jolie fille, posait derrière une table chargée de bouteilles et de victuailles. Il me reconnureconnut tout de suite, me tendit la main, et dit : c'est ennuyeux, je suis obligé de rester assis. J'ai mal aux pieds. Mettez-vous là<ref>Jeanniot, ''En souvenir de Manet'', La Grande Revue, août 1907, p. 844-860.</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Lobstein|2002|p=116}}.</ref>.}}
 
=== Natures mortes ===
<gallery mode="packed" heights="150">
File:Edouard Manet 069.jpg|''Pivoines blanches'', 1864, [[Paris]], [[musée d'Orsay]].
File:Edouard Manet 062.jpg|''Vase de pivoines sur piédouche'', 1864-1865, [[Paris]], [[musée d'Orsay]].
File:Flowers in a Crystal Vase, Edouard Manet, c1882.jpg|''Fleurs dans un vase de cristal'', vers 1882, [[Washington (district de Columbia)|Washington]], [[National Gallery of Art]].
File:Edouard Manet 064.jpg|''Lilas et roses'', 1883, [[New York]], collection privée.
File:Édouard Manet - Der Fliederstrauß.jpg|''Bouquet de lilas'', 1883, [[Berlin]], [[Alte Nationalgalerie]].
</gallery>
 
<gallery mode="packed" heights="150">
File:Edouard Manet Still-life Salmon Pike and Shrimps.jpg|''Saumon et crevettes'', 1864, [[Pasadena]], [[Norton Simon Museum]].
File:Still Life with Fish 1864 Edouard Manet.jpg|''Nature morte au poisson'', 1864, [[Art Institute of Chicago|Institut d'art de Chicago]].
File:Still Life with Melon and Peaches.JPG|''Melon et pêches'', 1866, [[Washington (district de Columbia)|Washington]], [[National Gallery of Art]].
File:Édouard Manet - Deux poires.jpg|''Deux poires'', 1864, collection privée.
Fichier:Edouard Manet Bunch of Asparagus.jpg|''Botte[[Une botte d'asperges]]'', 1880, [[Cologne]], [[musée Wallraf-Richartz Museum]].
Fichier:Edouard Manet Moss Roses in a Vase.jpg|Moss ''[[Roses inmousseuses adans Vaseun vase]]'', 1882, Oilhuile onsur canvastoile.
</gallery>
Manet aimait aussi les natures mortes : « Un peintre peut tout dire avec des fruits ou des fleurs, ou des nuages seulement », affirmait-il. Une part non négligeable de son œuvre est consacrée à ce genre<ref>« Le peintre y consacrera un cinquième de son œuvre » expo Manet [http://www.fluctuat.net/expos/chroniques/manet.htm Manet, les Natures mortes - Musée d'Orsay].</ref>, avant 1870 surtout puis dans les dernières années de sa vie où la maladie l'immobilise dans son atelier. Certains éléments de ses tableaux constituent de véritables natures mortes comme le panier de fruits dans ''le Déjeuner sur l'herbe'', le bouquet de fleurs dans ''Olympia'' ou le pot de fleurs, la table dressée et différents objets dans le ''Petit déjeuner dans l'atelier''. Il en va de même dans les portraits avec le plateau portant verre et carafe dans le ''Portrait de Théodore Duret'' ou la table et les livres dans le ''portrait d’Émile Zola''. Mais les natures mortes autonomes ne manquent pas dans l’œuvre de Manet : l'artiste a ainsi plusieurs fois peint poissons, huîtres ou autres mets (''Nature morte au cabas et à l’ail'', 1861-1862, [[Louvre- Abou DhabiDabi]], ''[[Anguille et Rouget]]'', 1864 - musée d'Orsay ou ''La Brioche'', 1870 - Metropolitan Museum of Art, New York), rendant ainsi une sorte d'hommage à Chardin. Il a peint plus souvent encore des sujets floraux qui évoquent la peinture hollandaise (roses, pivoines, lilas, violettes) ou encore des fruits et des légumes (poires, melons, pêches, citrons, asperges) ; une anecdote existe à propos de lad{{'}}''[[Une botte d'asperges]]'' : [[Charles Ephrussi]] ayant acheté le tableau plus cher que le prix proposé, Manet lui fit parvenir un petit tableau (aujourd'hui au musée d'Orsay)<ref>[http://www.musee-orsay.fr/fr/collections/catalogue-des-oeuvres/notice.html?no_cache=1&nnumid=1134 Manet - L'Asperge], sur le site musee-orsay.fr, consulté le 31 mai 2014.</ref> représentant une seule [[L'Asperge|asperge]] avec ce mot « Il en manquait une à votre botte »<ref>Éric de Thévenard - Manet, les Natures Mortes [http://www.fluctuat.net/expos/chroniques/manet.htm Manet, les Natures mortes - Musée d'Orsay].</ref>.
 
Au-delà du genre traditionnel, les natures mortes d’Édouard Manet retiennent l'attention en constituant parfois de véritables mises en scène dramatiques, comme le montre le tableau du ''Vase de pivoines sur piédouche'' (1864) : par la composition des fleurs en train de se faner, des pétales tombées à terre et par le cadrage très serré sur le vase, le regard du spectateur est happé et attiré vers un mouvement de haut vers le bas<ref>[http://lintermede.com/exposition-edouard-manet-inventeur-du-moderne-musee-orsay-paris.php Exposition Manet au musée d'Orsay].</ref>.
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== Gravures et dessins ==
{{voir|Liste des gravures et dessins d'Édouard Manet}}
[[Fichier:Champfleury 1868.jpg|thumbvignette|uprightredresse=0.8| Affiche pour l'album ''Les Chats'' de [[Champfleury (écrivain)|Jules Champfleury]], comprenant une lithographie de Manet (1869).]]
{{Citation bloc|L'œuvre gravé de Manet date, presque dans sa totalité, du début de sa carrière entre 1862 et 1868. Bien qu'environ la moitié de cette centaine d'estampes soit demeurée inédite de son vivant, toutes, sans doute, ont été exécutées en vue d'une édition, et la plupart d'après tableaux. Ce sont plutôt des estampes de reproduction au sens où on l'entendait au {{s|XVIII}}, ce ne sont pas encore des estampes originales au sens où l'entendront les impressionnistes. Nous sommes entre deux mondes. ce n'est plus l'[[Ancien Régime]], ce n'est pas encore la République. Le capitalisme français fournit un nouveau public. La peinture de Manet vers 1868 traduit de nouvelles valeurs. 0À cette époque, en revanche, il cesse pour ainsi dire de graver : c'est qu'il existait pour l'estampe d'autres obstacles que les efforts de Manet ébranlèrent, mais ne suffirent pas à lever - [[Michel Melot]]<ref name ="CMWB 35">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=35}}.</ref>.|[[Michel Melot]]}}
 
À partir de 1860-1861, Manet travaille la gravure et réalise en tout près d'une centaine d'[[estampe]]s — soit à ce jour soixante-treize [[eau-forte|eaux-fortes]] et vingt-six [[lithographie]]s et dessins sur bois<ref name="Bailly-Herzberg85">[[Janine Bailly-Herzberg]], ''Dictionnaire de l'estampe en France, 1830-1950'', préface de [[Michel Melot]], Paris, Arts et métiers graphiques/Flammarion, 1985, {{p.|207-208}}, {{ISBN|9782080120137}}.</ref> —, en reprenant pour partie les sujets de certains de ses tableaux, les autres gravures étant totalement originales. Il s'y consacra régulièrement jusqu'en 1869, et y revint épisodiquement par la suite jusqu'en 1882. Des tirages et des retirages furent également réalisés après sa mort<ref>Institut national d’histoire de l’art pour lequel Isabelle Cahn, présente l’œuvre de Manet graveur [{{Lien brisé|url=http://www.inha.fr/spip.php?rubrique369 |titre=Manet Graveur]}} et [{{Lien brisé|url=http://www.inha.fr/spip.php?rubrique370 |titre=Œuvres par ordre chronologique]}}.</ref>.
 
Il fut initiéeinitié à cet art par [[Alphonse Legros]] et publié sous la forme d'albums par [[Alfred Cadart]], lequel, via la [[Société des aquafortistes]], produit deux livraisons à compter de {{date-|septembre 1862}}<ref name="Bailly-Herzberg85"/>.
 
Dresser une chronologie exacte des 99 estampes reste très difficile. La première semble avoir été ''Manet père I'', [[pointe sèche]] et eau forte datée et signée, exécutée à la fin de l'année 1860<ref name="Bailly-Herzberg85"/>. On peut relever ''Le Guitarero'' (1861), ''Le Buveur d’absinthe'' (1861-1862), ''Lola de Valence'' (1862), ''L’Acteur tragique'' (1866), ''Olympia '' (1867, parue chez Dentu dans l'étude qu'[[Émile Zola]] consacra au tableau), ''L’Exécution de Maximilien'' (1868, lithographie), ''Le Torero mort'' (1868), ''La Barricade'' et ''Guerre civile'' (1871, lithographies), '' Berthe Morisot'' (1872) et ''Le Polichinelle'' (sa seule lithographie en couleurs, 1876).
 
Il grava aussi des illustrations pour la librairie comme ''Fleur exotique'', inspirée de [[Francisco de Goya|Goya]], destiné au recueil ''[[Sonnets et eaux-fortes]]'' (A. Lemerre, 1868), ''Le chat et les fleurs'' parue dans ''« Les Chats » de Champfleury'' ([[Jules Rothschild]], 1869, sans oublier ''Le Rendez-vous des chats'', lithographie pour l'affiche de lancement), les deux portraits de Charles Baudelaire parus dans l'étude signée [[Charles Asselineau]] (A. Lemerre, 1869), le frontispice pour ''Les Ballades'' de [[Théodore de Banville]] (été 1874), et surtout, trois ouvrages dont il est le seul illustrateur original, à savoir huit planches pour ''Le Fleuve'' de [[Charles Cros]] (La Librairie de l'eau-forte, 1874), quatre planches et deux vignettes pour ''Le Corbeau'' ([[Richard Lesclide]], 1875) d’[[Edgar Allan Poe]] traduit par [[Stéphane Mallarmé]], et, du même, quatre composition sur bois pour ''[[L'Après-midi d'un faune]]'' (A. Derenne, 1876).
 
[[Fichier:Raven Manet C.jpg|thumbvignette|150px|''Le Corbeau'', {{2e}} planche, 1875.]]
En 1875, Manet illustre ''[[Le Corbeau (poème)| Le Corbeau]]'' de [[d'Edgar Allan Poe]] qui a été traduit par Baudelaire. Il réalise des [[autographie]]s pour l'[[ex-libris]] et quatre illustrations<ref name="CRMN 204">{{harvsp|Collectif RMN|2011|p=204|id=CRMN }}.</ref>.
 
Les [[autographie]]s revêtent une importance particulière pour Manet qui y apporte un grand soin tant par le choix des papiers que par la technique selon [[Étienne Moreau-Nélaton]]<ref group="note"> Moreau-Nélaton a été le premier à établir l'inventaire des gravures de Manet.</ref>. Les autographies sont six dessins au pinceau à l'encre autographique, reportés sur zinc et tirés par Lefman. Les feuilles d'images étaient insérées entre les doubles feuilles du texte<ref name ="CMWB 384">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=384}}.</ref>{{,}}<ref>[http://catalogue.drouot.com/ref/lot-ventes-aux-encheres.jsp?id=940254 ''Le Corbeau'' sur le catalogue de Drouot].</ref>. L'éditeur dut se plier aux goûts raffinés du poète et de l'artiste. [[Stéphane Mallarmé]] rapporte qu'il était effrayé par la soie noire que Manet voulait mettre au dos du carton, et que le peintre exigeait encore {{Citation|Un parchemin, un papier vert ou jaune tendre se rapprochant du ton de la couverture<ref name="Mallarmé 1521"> Mallarmé O.C.I, 1979, {{p.}}1521.</ref>.}} L'illustration de la première strophe est un dessin assez précis qui détaille le poète à sa table. La suivante, retravaillée maintes fois par l'artiste, est plus impressionnante ''minuit lugubre'', avec un paysage sombre et triste. Dans la troisième planche, le corbeau est toujours perché sur le buste de Pallas, à répéter son sinistre '' Jamais plus'', et Manet, en suivant de très près le texte, a inventé une image extraordinaire pour exprimer la confrontation entre le corbeau et le poète. Et plus on avance dans le texte, plus les planches se font noires jusqu'à la dernière image presque illisible avec le jeu des ombres portées et les larges coups de pinceaux<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=385}}.</ref>. Le destin du ''Corbeau'', ouvrage pourtant très raffiné, fut très décevant<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=382}}.</ref>. Selon [[Henri Mondor]] et Jean Aubry, {{Citation|son format trop volumineux, les illustrations d'Édouard Manet, fort discuté encore en 1875, la singularité, pour le gros des lecteurs, du poème de Poe, le nom encore à peu près inconnu de Mallarmé, tout concourut à éloigner les acquéreurs possibles<ref name="Mallarmé 1522"> O.C. I, 1979, {{p.}}1522.</ref>.}} L'année suivante, ''[[L’Après-Midi d’un faune]]'' de Mallarmé, qui devait paraître chez l'éditeur [[Alphonse Derenne]], allait recevoir un meilleur accueil, sans pour autant connaître le succès.
Les [[autographie]]s revêtent une importance particulière pour Manet qui y apporte un grand soin tant par le choix des papiers que par la technique selon [[Étienne Moreau-Nélaton]]<ref group="note"> Moreau-Nélaton a été le premier à établir l'inventaire des gravures de Manet.</ref>. Les autographies sont six dessins au pinceau à l'encre autographique, reportés sur zinc et tirés par Lefman. Les feuilles d'images étaient insérées entre les doubles feuilles du texte<ref name="CMWB 384">{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=384}}.</ref>{{,}}<ref>[http://catalogue.drouot.com/ref/lot-ventes-aux-encheres.jsp?id=940254 ''Le Corbeau'' sur le catalogue de Drouot].</ref>. L'éditeur dut se plier aux goûts raffinés du poète et de l'artiste. [[Stéphane Mallarmé]] rapporte qu'il était effrayé par la soie noire que Manet voulait mettre au dos du carton, et que le peintre exigeait encore {{Citation|Un parchemin, un papier vert ou jaune tendre se rapprochant du ton de la couverture<ref name="Mallarmé 1521"> Mallarmé O.C.I, 1979, {{p.}}1521.</ref>.}} L'illustration de la première strophe est un dessin assez précis qui détaille le poète à sa table. La suivante, retravaillée maintes fois par l'artiste, est plus impressionnante ''minuit lugubre'', avec un paysage sombre et triste. Dans la troisième planche, le corbeau est toujours perché sur le buste de Pallas, à répéter son sinistre'' Jamais plus'', et Manet, en suivant de très près le texte, a inventé une image extraordinaire pour exprimer la confrontation entre le corbeau et le poète. Et plus on avance dans le texte, plus les planches se font noires jusqu'à la dernière image presque illisible avec le jeu des ombres portées et les larges coups de pinceaux<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=385}}.</ref>. Le destin du ''Corbeau'', ouvrage pourtant très raffiné, fut très décevant<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=382}}.</ref>. Selon [[Henri Mondor]] et Jean Aubry, {{Citation|son format trop volumineux, les illustrations d'Édouard Manet, fort discuté encore en 1875, la singularité, pour le gros des lecteurs, du poème de Poe, le nom encore à peu près inconnu de Mallarmé, tout concourut à éloigner les acquéreurs possibles<ref name="Mallarmé 1522"> O.C. I, 1979, {{p.}}1522.</ref>.}} L'année suivante, ''[[L'Après-midi d'un faune]]'' de Mallarmé, qui devait paraître chez l'éditeur [[Alphonse Derenne]], allait recevoir un meilleur accueil, sans pour autant connaître le succès.
 
Selon [[Léon Rosenthal]], quatre planches de Manet auraient disparu et n'existeraient qu'à l'état de photographies : ''Le chanteur des rues'', ''L'hommeshomme au chapeau de paille'', ''La Posada'' et ''Les voyageurs''<ref>L. Rosenthal, ''Manet aquafortiste et lithographe'', Paris, Le Goupy, 1925, {{page|170}}.</ref>.
 
Manet a également utilisé la technique de la [[mine de plomb]] et le [[lavis]] à l'encre de chine pour deux ''Annabel Lee'' (1879-1881). La première ''Jeune femme au bord de la mer'' ({{dunité|46.2|29|cm}}) se trouve à [[Rotterdam]], au [[Musée Boijmans Van Beuningen]], la deuxième à [[Copenhague]] au [[Statens Museum for Kunst]]<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=386 et 387}}.</ref>. Plus tôt, il avait abordé cette technique avec ''À la fenêtre'' ({{dunité|27|18|cm}}, musée du Louvre, Cabinet des dessins) et ''Marine au clair de lune'' ({{dunité|20|18|cm}}, idem).
 
En 1877-1878, Manet produit deux ''fiacres''. L'un à la mine de plomb (Cabinet des dessins du Louvre), l'autre au crayon noir et lavis d'encre bleu. ''L'Homme au béquilles'' ({{dunité|27|20|cm}}) actuellement conservé au Metropolitan de New York, est le personnage que l'on retrouve de dos dans ''La Rue Mosnier aux drapeaux''. Traité au lavis d'encre de chine, cet invalide habitait le [[quartier de l'Europe]]. Le dessin était un projet de couverture pour ''Les Mendiants'', chanson de son ami [[Ernest Cabaner]] sur des paroles de [[Jean Richepin]]<ref>{{harvsp|Cachin|Moffett|Wilson-Bareau|1983|p=402 à 407}}.</ref>.
 
== Dernières années et postérité ==
[[Fichier:Edouard Manet - Girl in the Garden at Bellevue.JPG|thumbvignette|uprightredresse=0.8|''Une Fille dans le jardin à Bellevue'' représentant une maison du [[sentier des Pierres -Blanches]] à [[Meudon]]-Bellevue, [[1880]], [[Zurich]], [[Fondation et Collection Emil G. Bührle]]<ref>[http://wahooart.com/A55A04/w.nsf/OPRA/BRUE-5ZKCAK?OpenDocument&ChangeLangue=FR&Click=&Zoom=Yes Site Internet Wahooart.com].</ref>.]]
[[Fichier:Tombe d'Édouard Manet-grave, cimetière de Passy, Paris 16e 1.jpg|thumbvignette|uprightredresse=0.8|La tombe de Manet, [[Paris]], [[cimetière de Passy]].]]
Édouard Manet, malade, séjourne en 1879 en compagnie de sa femme pendant six semaines dans l'établissement hydrothérapique fondé par le docteur Louis Désiré Fleury à [[Meudon]]-Bellevue. Lorsqu'il y retourne pour une cure de quatre mois en {{date-|mai 1880}}, il séjourne au [[sentier des Pierres-Blanches]] où il peindra plusieurs tableaux. Il obtient même un prix au Salon de 1881 et est décoré de la [[Légion d'honneur]] par son ami [[Antonin Proust]] devenu ministre des Beaux-Arts : l'attribution est décidée malgré des oppositions fin 1881 et la cérémonie a lieu le {{Date-|1er janvier 1882}}<ref group="note">{{Citation|Lorsqu'au nouvel an de 1882, {{M.}} Antonin Proust, ministre des Arts, vint le décorer, l'acte étonna, fut jugé audacieux et souleva, dans le parti de la tradition, le même mécontentement qu'avait suscité l'octroi de la médaille elle-même […] {{M.}} Grévy, le président de la République, prétendit mettre son veto en disant : "Ah! Manet, non."}} - Théodore Duret, ''Histoire d'Édouard Manet'', {{p.|238}} ([https://archive.org/stream/histoirededoua00dureuoft/histoirededoua00dureuoft_djvu.txt en ligne sur www.archive.org]).</ref>.
 
Affaibli depuis plusieurs années, il peint durant les deux dernières années des toiles de petit format qu'il exécute assis (nombreuses petites natures mortes de fruits et de fleurs, comme ''[[Roses mousseuses dans un vase]]''), mais surtout des portraits de ses visiteuses au [[pastel]], technique moins fatigante que la peinture à l'huile<ref >{{Ouvrage|auteur1=[[Françoise Cachin]]|titre=Edouard Manet. « J'ai fait ce que j'ai vu »|éditeur=[[Éditions Gallimard|Gallimard]]|année=2012|passage=112|isbn=}}.</ref>. Il s’éteint finalement le {{Date-|30|avril|1883}} au 39, [[rue de Saint-Pétersbourg]] à l’âge de {{nombre|51|ans}}, des suites d’une [[Ataxie|ataxie locomotrice]] résultant elle-même d'une [[syphilis]] contractée à Rio. La maladie, outre les nombreuses souffrances et la paralysie partielle des membres qu’elle lui avait causées, a ensuite dégénéré en une gangrène qui a imposé de lui amputer le pied gauche onze jours avant sa mort<ref>{{en}}{{pdf}} C. Régnier, [http://www.medicographia.com/html/static/html/issues/84/art_11/article.pdf ''Some French painters and their diseases''] sur ''medicographia.com''.</ref>.
Édouard Manet, malade, séjourne en 1879 en compagnie de sa femme pendant six semaines dans l'établissement hydrothérapique fondé par le docteur Louis Désiré Fleury à [[Meudon]]-Bellevue. Lorsqu'il y retourne pour une cure de quatre mois en mai 1880, il séjourne au [[sentier des Pierres Blanches]] où il peindra plusieurs tableaux. Il obtient même un prix au Salon de 1881 et est décoré de la [[Légion d'honneur]] par son ami [[Antonin Proust]] devenu ministre des Beaux-Arts : l'attribution est décidée malgré des oppositions fin 1881 et la cérémonie a lieu le {{Date-|1er janvier 1882}}<ref group="note">{{Citation|Lorsqu'au nouvel an de 1882, {{M.}} Antonin Proust, ministre des Arts, vint le décorer, l'acte étonna, fut jugé audacieux et souleva, dans le parti de la tradition, le même mécontentement qu'avait suscité l'octroi de la médaille elle-même […] {{M.}} Grévy, le président de la République, prétendit mettre son veto en disant : "Ah! Manet, non."}} - Théodore Duret, ''Histoire d'Édouard Manet'', p. 238 ([https://archive.org/stream/histoirededoua00dureuoft/histoirededoua00dureuoft_djvu.txt en ligne sur www.archive.org]).</ref>.
 
L’enterrement a lieu le {{date-|3|mai|1883}} au [[cimetière de Passy]], en présence notamment d’[[Émile Zola]], d'[[Alfred Stevens (peintre belge)|Alfred Stevens]], de [[Claude Monet]], d'[[Edgar Degas]] et de bien d’autres de ses anciennes connaissances. D’après [[Antonin Proust]], son camarade de toujours, se voyaient dans le convoi funèbre {{Citation|des couronnes, des fleurs, beaucoup de femmes}}. Degas, quant à lui, aurait dit alors de Manet qu’{{Citation|il était plus grand que nous ne pensions}}<ref name="Proust"/>.
Affaibli depuis plusieurs années, il peint les deux dernières années des toiles de petit format qu'il réalise assis (nombreuses petites natures mortes de fruits et de fleurs), mais surtout des portraits de ses visiteuses au [[pastel]], technique moins fatigante que la peinture à l'huile<ref >{{ouvrage|auteur=[[Françoise Cachin]]|titre=Edouard Manet. « J'ai fait ce que j'ai vu »|éditeur=Gallimard|date=2012|passage=112|isbn=|lire en ligne=}}.</ref>. Il s’éteint finalement le {{Date-|30|avril|1883}} au 39, [[Rue de Saint-Petersbourg|rue de Saint-Pétersbourg]] à l’âge de 51 ans, des suites d’une [[Ataxie|ataxie locomotrice]] résultant elle-même d'une [[syphilis]] contractée à Rio. La maladie, outre les nombreuses souffrances et la paralysie partielle des membres qu’elle lui avait causées, a ensuite dégénéré en une gangrène qui a imposé de lui amputer le pied gauche onze jours avant sa mort<ref>{{en}}{{pdf}} C. Régnier, [http://www.medicographia.com/html/static/html/issues/84/art_11/article.pdf ''Some French painters and their diseases''] sur ''medicographia.com''.</ref>.
 
Sa tombe se trouve dans la {{4e}} division du cimetière, une épitaphe gravée par [[Félix Bracquemond]] en 1890 {{Citation étrangère|langue=la|Manet et manebit}} (en latin : {{Citation|Il demeure et demeurera}}, jeu de mots sur le nom du peintre) peut résumer le sentiment général du monde des arts après sa disparition. Il est inhumé avec sa femme Suzanne, avec son frère [[Eugène Manet|Eugène]] ainsi qu'avec sa belle-sœur [[Berthe Morisot|Berthe]]. Son buste ornant sa tombe est l’œuvre du sculpteur et peintre hollandais [[Ferdinand Leenhoff]], frère de la compagne de Manet<ref>[http://www.landrucimetieres.fr/spip/spip.php?article1073 Sépulture de Manet au cimetière de Passy], sur le site ''landrucimetières.fr'', consulté le 11 mai 2014.</ref>{{,}}<ref>[https://www.tombes-sepultures.com/crbst_1641.html Notice], sur ''tombes-sepultures.com''.</ref>.
L’enterrement a eu lieu le {{date-|3|mai|1883}} au [[cimetière de Passy]], en présence notamment d’[[Émile Zola]], d'[[Alfred Stevens (peintre belge)|Alfred Stevens]], de [[Claude Monet]], d'[[Edgar Degas]] et de bien d’autres de ses anciennes connaissances. D’après [[Antonin Proust]], son camarade de toujours, on voyait dans le convoi funèbre {{Citation|des couronnes, des fleurs, beaucoup de femmes}}. Degas, quant à lui, aurait dit alors de Manet qu’{{Citation|il était plus grand que nous ne pensions}}<ref name="Proust"/>.
 
Manet décrié, insulté, ridiculisé est devenu le chef de file reconnu des « avant-gardistes ». Si le peintre a été lié aux acteurs du courant [[impressionnisme|impressionniste]], il est à tort considéré aujourd’hui comme l'un de ses pères<ref group="note">{{Citation|Si la technique de Manet prépare la technique impressionniste, si parfois elle s'en rapproche, d'autre part elle en diffère et même elle s'y oppose.}} {{article|titre=Manet, précurseur de l'Impressionnisme|prénom1= Gabriel|nom1= Séailles|année= 1910|journal=la Revue de Paris}}.</ref>. Il en est un puissant inspirateur autant par sa peinture que par ses thèmes de prédilection. Sa manière de peindre, soucieuse du réel reste en effet foncièrement différente de celle de Claude Monet ou de [[Camille Pissarro]]. Certaines de ses œuvres sont proches de l'impressionnisme, c'est le cas de ''L'Évasion de Rochefort'', ''Portrait de Claude Monet peignant sur son bateau-atelier à Argenteuil'' et ''Une allée dans le jardin de Rueil''. Si Manet s'est tenu à l'écart de l'impressionnisme<ref>[http://www.musee-orsay.fr/fr/evenements/expositions/au-musee-dorsay/presentation-detaillee/page/3/article/manet-inventeur-du-moderne-27127.html ''musee-orsay.fr''].</ref>, il a cependant soutenu ses représentants, en particulier sa belle-sœur Berthe Morisot, lors de la première exposition de la [[Première exposition des peintres impressionnistes ]]<ref>{{Ouvrage |prénom1=Sophie |nom1=Monneret |titre=L'Impressionnisme et son époque |volume=2 |tome=1 |lieu=Paris |éditeur=[[Éditions Robert Laffont|Robert Laffont]] |année=1987 |pages totales=997 |passage=597 |isbn=978-2-221-05412-3}}.</ref>.
Sa tombe se trouve dans la {{4e}} division du cimetière, un ex-libris gravé par [[Félix Bracquemond]] en 1890 {{Citation étrangère|langue=la|Manet et manebit}} (en latin : {{Citation|Il demeure et demeurera}}, jeu de mots sur le nom du peintre) peut résumer le sentiment général du monde des arts après sa disparition. Il est inhumé avec sa femme Suzanne, son frère [[Eugène Manet|Eugène]] et sa belle-sœur [[Berthe Morisot|Berthe]]. Son buste ornant sa tombe est l’œuvre du sculpteur et peintre hollandais [[Ferdinand Leenhoff]], frère de la compagne de Manet<ref>[http://www.landrucimetieres.fr/spip/spip.php?article1073 Sépulture de Manet au cimetière de Passy], sur le site ''landrucimetières.fr'', consulté le 11 mai 2014.</ref>{{,}}<ref>[https://www.tombes-sepultures.com/crbst_1641.html Notice], sur ''tombes-sepultures.com''.</ref>.
 
Le maître laisse plus de 400 toiles et d’innombrables pastels, [[esquisse]]s et [[aquarelle]]s qui constituent un œuvre<!-- ensemble des œuvres : substantif masculin --> pictural majeur à l'influence certaine sur les artistes de son temps comme le [[groupe des Batignolles]] et bien au-delà : Manet est en effet reconnu internationalement comme l’un des plus importants précurseurs de la [[Art moderne|peinture moderne]]<ref>Par exemple, le tableau de [[Pablo Picasso]] reprenant ''[[Le Déjeuner sur l'herbe]]''.</ref> ; ses tableaux majeurs sont visibles dans les plus grands musées du monde. C'est en [[1907]], ironie de l’histoire de la peinture, qu{{'}}''[[Olympia (Manet)|Olympia]]'' « refusée » en 1863, entre, {{nombre|44|ans}} après sa création, au [[musée du Louvre]] (elle est aujourd'hui conservée au [[musée d'Orsay]]).
Manet décrié, insulté, ridiculisé est devenu le chef de file reconnu des « avant-gardistes », et si le peintre a été lié aux acteurs du courant [[impressionnisme|impressionniste]], il est à tort considéré aujourd’hui comme l'un de ses pères<ref group="note">{{Citation|Si la technique de Manet prépare la technique impressionniste, si parfois elle s'en rapproche, d'autre part elle en diffère et même elle s'y oppose.}} {{article|titre=Manet, précurseur de l'Impressionnisme|prénom1= Gabriel|nom1= Séailles|année= 1910|journal=la Revue de Paris}}.</ref>, il n'en est qu'un puissant inspirateur autant par ses morceaux de peinture que par ses thèmes de prédilection. Sa manière de peindre soucieuse du réel reste en effet foncièrement différente de celle de [[Claude Monet]] ou de [[Camille Pissarro]]. Toutefois, certaines de ses œuvres sont proches de l'impressionnisme, c'est le cas de ''L'Évasion de Rochefort'', ''Portrait de Claude Monet peignant sur son bateau-atelier à Argenteuil'' et ''Une allée dans le jardin de Rueil''. Si Manet s'est tenu à l'écart de l'impressionnisme<ref>[http://www.musee-orsay.fr/fr/evenements/expositions/au-musee-dorsay/presentation-detaillee/page/3/article/manet-inventeur-du-moderne-27127.html ''musee-orsay.fr''].</ref>, il a cependant soutenu leurs représentants, en particulier sa belle-sœur [[Berthe Morisot]], lors de la première exposition de la [[Première exposition des peintres impressionnistes ]]<ref>{{Ouvrage |langue =|prénom1 =Sophie|nom1 = Monneret|titre = L'Impressionnisme et son époque|sous-titre = | lien éditeur = éditions Robert Laffont|éditeur = Robert Laffont|lieu = Paris|année = 1987 |tome =1|volume = 2|pages totales = 997| isbn = 978-2-221-05412-3|passage =597}}.</ref>.
 
[[Fichier:Édouard Manet - Pertuiset, le chasseur de lions.jpg|vignette|redresse=0.8|''Pertuiset, le chasseur de lions'' (1881), [[musée d'art de São Paulo]].]]
Le maître laisse plus de 400 toiles et d’innombrables [[pastel]]s, [[esquisse]]s et [[aquarelle]]s qui constituent un œuvre<!-- ensemble des œuvres : substantif masculin --> pictural majeur à l'influence certaine sur les artistes de son temps comme le [[groupe des Batignolles]] et bien au-delà : Manet est en effet reconnu internationalement comme l’un des plus importants précurseurs de la [[Art moderne|peinture moderne]]<ref>Par exemple, le tableau de [[Pablo Picasso]] reprenant ''[[Le Déjeuner sur l'herbe]]''.</ref> et ses tableaux majeurs sont visibles dans les plus grands musées du monde. C'est en [[1907]], ironie de l’histoire de la peinture, qu’''[[Olympia (Manet)|Olympia]]'' « refusée » en 1863, entre, 44 ans après sa création, au [[musée du Louvre]] (il est aujourd'hui conservé au [[musée d'Orsay]]).
Édouard Manet tient une place importante dans le [[roman (littérature)|roman]] d'[[Olivier Rolin]] ''Un chasseur de lions'' (2008), auprès de l'aventurier cocasse et dérisoire Eugène Pertuiset dont il peignit en 1881 le portrait « en Tartarin »<ref>{{Lien web |url=http://www.la-croix.com/livres/article.jsp?docId=2354361&rubId=43500 |titre=Un chasseur de lions de Olivier Rolin - Le Tartarin qui intrigua Manet |site=www.la-croix.com |consulté le=17 juillet 2010.}}.</ref>.
 
En l’an [[2000]], l’une de ses toiles s’est vendue à plus de vingt millions de dollars. En 2014, chez [[Christie's]] à [[New York]], le tableau ''Le Printemps'', propriété d'un collectionneur et de sa famille depuis plus de cent ans, est adjugé pour la somme de 65 millions de dollars (52 millions d'euros)<ref>[https://www.lemonde.fr/culture/breve/2014/11/06/un-record-de-vente-pour-le-printemps-de-manet_4518916_3246.html ''lemonde.fr''], 6 novembre 2014.</ref>{{,}}<ref>[http://www.lexpress.fr/culture/le-printemps-de-manet-vendu-65-millions-de-dollars-a-new-york_1619265.html ''lexpress.fr''].</ref>.
[[Fichier:Édouard Manet - Pertuiset, le chasseur de lions.jpg|thumb|upright=0.8|''Pertuiset, le chasseur de lions'' (1881), [[musée d'art de São Paulo]].]]
Édouard Manet tient une place importante dans le [[roman (littérature)|roman]] d'[[Olivier Rolin]] ''Un chasseur de lions'' (2008), auprès de l'aventurier cocasse et dérisoire Eugène Pertuiset dont il peignit en 1881 le portrait « en Tartarin »<ref>{{Lien web |url=http://www.la-croix.com/livres/article.jsp?docId=2354361&rubId=43500 |titre=Un chasseur de lions de Olivier Rolin - Le Tartarin qui intrigua Manet |site=www.la-croix.com |consulté le=17juillet 2010.}}.</ref>.
 
En 2004, un brocanteur de [[Genève]] aurait découvert un tableau inconnu de Manet caché sous une croûte. Il affirme avoir identifié dans le portrait d'une ravissante jeune femme, [[Méry Laurent]], le modèle et une maîtresse d'Édouard Manet<ref group="note">Récit de la découverte : ''Un Manet si bien caché. Histoire d'une découverte - Mery Laurent muse de l'Impressionnisme par Édouard Manet'' de Jules Petroz - ''Un Manet si bien caché''. Jules Petroz, 2009, éditions Le Manuscrit Paris. [https://www.amazon.fr/manet-bien-cache-Histoire-d%C3%A9couverte/dp/2304025986/ref=sr_1_1?s=books&ie=UTF8&qid=1302084864&sr=1-1 Un manet si bien cache. Histoire d'une découverte - Mery Laurent muse de l'Impressionnisme par Édouard Manet.].</ref>. La toile initiale jugée scandaleuse par son caractère érotique aurait été masquée et oubliée. L'attribution de ce tableau à Édouard Manet n'est cependant pas confirmée<ref>{{Lien web |url=http://fdrouin.free.fr/wordpress/?p=120 |titre=A SYLVIA WILDENSTEIN |date=02/06/2005 |site=fdrouin.free.fr |consulté le=17 juillet 2010.}}.</ref>.
En l’an [[2000]], l’une de ses toiles s’est vendue à plus de vingt millions de dollars. En 2014, chez [[Christie's]] à [[New York]], le tableau ''Le Printemps'', propriété d'un collectionneur et de sa famille depuis plus de cent ans, a été adjugé pour la somme de 65 millions de dollars (52 millions d'euros), mercredi 5 novembre<ref>[https://www.lemonde.fr/culture/breve/2014/11/06/un-record-de-vente-pour-le-printemps-de-manet_4518916_3246.html ''lemonde.fr''], 6 novembre 2014.</ref>{{,}}<ref>[http://www.lexpress.fr/culture/le-printemps-de-manet-vendu-65-millions-de-dollars-a-new-york_1619265.html ''lexpress.fr''].</ref>.
 
En 2004, un brocanteur de [[Genève]] aurait découvert un tableau inconnu de Manet caché sous une croûte. Il affirme avoir identifié dans le portrait d'une ravissante jeune femme, [[Méry Laurent]], le modèle et la maîtresse d'Édouard Manet<ref group="note">Récit de la découverte : ''Un Manet si bien caché. Histoire d'une découverte - Mery Laurent muse de l'Impressionnisme par Édouard Manet'' de Jules Petroz - ''Un Manet si bien caché''. Jules Petroz, 2009, éditions Le Manuscrit Paris. [https://www.amazon.fr/manet-bien-cache-Histoire-d%C3%A9couverte/dp/2304025986/ref=sr_1_1?s=books&ie=UTF8&qid=1302084864&sr=1-1 Un manet si bien cache. Histoire d'une découverte - Mery Laurent muse de l'Impressionnisme par Édouard Manet.].</ref>. La toile initiale jugée scandaleuse par son caractère érotique aurait été masquée et oubliée. L'attribution de ce tableau à Édouard Manet n'est cependant pas confirmée<ref>{{Lien web |url=http://fdrouin.free.fr/wordpress/?p=120 |titre=A SYLVIA WILDENSTEIN |date=02/06/2005 |site=fdrouin.free.fr |consulté le=17juillet 2010.}}.</ref>.
 
Le {{Date-|22 juin 2010}}, un autoportrait d'Édouard Manet a été vendu à [[Londres]] 22,4 millions de livres sterling (27 millions d'euros), un montant record pour une œuvre du peintre français<ref>[http://www.lejdd.fr/Culture/Beaux-Arts/Depeches/Encheres-records-pour-un-Manet-a-Londres-202222/ ''lejdd.fr''].</ref>.
 
En [[2012]], à la suite d'une vente aux enchères, le musée [[Ashmolean Museum]] d'[[Oxford]] a pu acquérir le ''Portrait de Mademoiselle Claus'' peint en [[1868]], grâce à une souscription publique de {{nombre|7.83|millions}} de livres sterling<ref>[http://www.latribunedelart.com/l-ashmolean-museum-d-oxford-lance-une-souscription-pour-l-acquisition-d-un-manet Ashmolean Museum - Oxford], sur le site latribunedelart.com, consulté le 7 mars 2014.</ref>. Le tableau a été interdit d'exportation de [[Grande-Bretagne]], par le ''[[Trésor national (Royaume-Uni)#Le Reviewing Committee on the Export of Works of Art and Objects of Cultural Interest|Reviewing Committee on the Export of Works of Art]]''.
 
[[Fichier:Edouard Manet 041.jpg|vignette|redresse|Édouard Manet, ''Portrait d'Eva Gonzalès'' (1869-1870), [[Londres]], [[National Gallery]].]]
Sa seule élève connue fut [[Eva Gonzalès]] (1849-1883) qui lui fut présentée en 1869 par [[Alfred Stevens (peintre belge)|Alfred Stevens]]. Elle rencontra dans l'atelier de Manet Berthe Morisot, qui fut jalouse de son amitié avec le maître<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Dominique Bona|titre=Berthe Morisot|sous-titre=le secret de la femme en noir|éditeur=[[Éditions Grasset|Grasset]]|année=2000|pages totales=341|passage=Pages 119 à 124|isbn=978-2-246-53711-3}}</ref>. Il fit un tableau d'elle peignant une nature morte en 1870, toile aujourd'hui conservée dans les collections du musée de la [[National Gallery]] à Londres<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Sophie Chaveau|titre=Manet|sous-titre=le secret|lieu=Paris|éditeur=Télémaque|année=2014|pages totales=381|passage=Page 200|isbn=978-2-7533-0238-9}}</ref>.
 
== Notes et références ==
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=== Références ===
{{Références nombreuses|colonnes=3}}
 
== Annexes ==
=== Bibliographie ===
==== Ouvrages ayant servi de source ====
* {{ouvrageOuvrage |langue= fr |auteurauteur1=Collectif RMN |directeur1=Stéphane Guégan |titre= Manet inventeur du moderne | directionsous-titre=[exposition, StéphaneParis, GuéganMusée |éditeur1=Lad'Orsay, Réunion5 desavril-3 muséesjuillet nationaux2011] et du Grand Palais des Champs-Élysées|RMNlieu=Paris |lien éditeur1éditeur=[[Éditions La Gallimard]]/[[Réunion des musées nationaux et du Grand Palais des Champs-Élysées|RMN|éditeur2=ÉditionsRéunion Gallimard|liendes éditeur=Éditions Gallimard|lieu= ParisMusées Nationaux]]|année=2011 |pages totales=297 |isbn=978-2-07-013323-9 |id=CRMN}}. {{plume}}{{commentaire|l'ouvrage comporte des contributions de : Stéphane Guégan, [[Laurence des Cars]], Simone Kelly, Nancy Locke, Helen Burnham, [[Louis-Antoine Prat]], et un entretien avec [[Philippe Sollers]].}}
* {{ouvrageOuvrage|prénomlangue=fr|prénom1= Gérard |nomnom1= Denizeau |lien auteurauteur1= Gérard Denizeau|titre= Découvrir Manet |lieu=Paris|éditeur= Larousse |lieu= Paris|année= 2011 |pages totales= 600 |isbn= 978-2-03-586121-4}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage | auteur1=[[Henri Loyrette]] | auteur2=Gary Tinterow | titre= Impressionnisme :| sous-titre=Les origines, 1859-1869 |éditeur1 lieu=Paris/New York | éditeur=[[Réunion des musées nationaux et du Grand Palais des Champs-Élysées|Réunion des Musées Nationaux]]|éditeur2=/[[Metropolitan Museum of Art]]= |lieu1= Paris|lieu2année=New York1994-1995 |année1=1994| année2=1995|pages totales=476 | isbn= 978-27118282032-7118-2820-3 | id=LT}}.{{plume}}{{commentaire|Ouvrage publié en France (1994) à la suite de la rétrospective aux Galeries nationales du Grand Palais, Paris du 19 avril au 8 août, et aux États-Unis (1995 du 19 septembre 94 au 8 janvier 1995 au Metroplitan Museum of Art. Gary Tinterow est directeur du département {{s|XIX|e}} du [[Metropolitan Museum of Art]].}}
* {{ouvrageOuvrage|langue=fr|prénom1= Dominique |nom1= Lobstein|titre= Manet|lieu=Paris|éditeur= Jean-Paul Gisserot |année= 2002|pages totales= 124|isbn= 2877476944 2-87747-694-4|lire en ligne= https://books.google.com/books?id=Q2919KUUVRgC&printsec=frontcover&dq=Dominique+Lobstein&hl=fr&ei=UtnfTfuWOsSg-waHlLHEDQ&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=2&ved=0CDIQ6AEwAQ#v=onepage&q&f=false|id=Lobstein}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage |prénom1langue=fr |prénom1=Françoise |nom1= Cachin |lien auteur1= Françoise Cachin |prénom2= Charles S. |nom2=Moffett Moffett|prénom3= Juliet |nom3= Wilson-Bareau |titre= Manet |sous-titre=1832-1883 |éditeurlieu=Paris |éditeur=Réunion des Musées Nationaux|lieu= Paris |année= 1983 |pages totales= 544 |isbn= 2711802302 |consulté le=2-7118-0230-2 |id=CMWB}} {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage|prénomprénom1= Adolphe |nomnom1= Tabarant |lien auteurauteur1= Adolphe Tabarant|titre= Manet et ses œuvres|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Gallimard |lieuGallimard]]|année= Paris1947|année première édition= 1897|année=1947|pages totales= 600| id=T1}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage|prénomprénom1= Adolphe |nomnom1= Tabarant |lien auteurauteur1= Adolphe Tabarant|titre= Les Manet de la collection [[Henry Osborne Havemeyer|Havemeyer]] |sous-titre=La Renaissance de l'art français |numéro d'éditionlieu= XIIIParis|éditeur=|lieu= Paris XIII|année= 1930|consulté le=|id=T2}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage|prénomprénom1= Théodore |nomnom1= Duret |lien auteurauteur1= Théodore Duret |titre= Histoire de Manet et de son œuvre|lieu=Paris|éditeur= Charpentier et Fasquelle |lieu= Paris |année= 1902 et 1906}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage |langue=en |prénom1=Beatrice |nom1= Farwell |titre= Manet's espada |éditeurvolume=2 Metropolitan Museum Journal|lieu= New York |annéeéditeur=Metropolitan 1969Museum Journal |volumeannée=1969 2}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage|langue=fr|prénom1=Mario |nom1= Bois |titre= Manet, tauromachies et autres thèmes espagnols|lieu=Paris|éditeur= Plume |lieu= Paris |année= 1994 |pages totales= 167|isbn=2-908034-72-7}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage|prénom1= Théophile |nom1= Thoré-Burger |lien auteur1= Théophile Thoré-Burger |prénom2= William|nom2= Bürger|titre= Salons de William Bürger, 1861-1868, avec une préface par Théophile Thoré|éditeurvolume= Jules Renouard 2|tome=II|lieu= Paris|annéeéditeur=Jules 1870 Renouard|volumeannée= 2 |tome= II1870}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage |idlangue=Monneret1987afr |prénom1= Sophie |nom1= Monneret |titre= L'Impressionnisme et son époque |volume=2 |tome=1 |lieu=Paris |éditeur=[[Robert Laffont]]|lieu= Paris |année= 1987|volume=2 |tome= 1|pages totales= 997 |isbn= 2-22105412221-05412-1 |id=Monneret1987a}}. {{plume}}
* {{fr}} {{ouvrageOuvrage |idlangue=Monneret1987bfr |prénom1= Sophie |nom1= Monneret |titre= L'Impressionnisme et son époque |volume=2 |tome=II |lieu=Paris |éditeur=[[Robert Laffont]]|lieu= Paris |année= 1987|volume=2 |tome= II|pages totales= 1185 |isbn= 2-22105413221-05413-X |id=Monneret1987b}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage|prénom1= Michel |nom1=Laclotte|lien Laclotteauteur1=Michel Laclotte|prénom2= Jean-Pierre|nom2= Cuzin |lien auteur= Michel Laclotte |titre= Dictionnaire de la peinture|éditeurlieu=Larousse Paris|lien éditeur=[[Éditions Larousse|lieu= Paris Larousse]]|année= 1987|pages totales= 991|isbn= 978-2-03-511307-8 }}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage |prénomprénom1= Georges |nomnom1=Bataille |lien auteurauteur1= Georges Bataille |titre= Manet |sous-titre= |numéro d'éditionlieu=Genève |éditeur= [[Albert Skira|lien]] éditeur= Albert Skira |lieu= Genève|année= 1955 |pages totales=135 }}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage |prénomprénom1= Étienne |nomnom1= Moreau-Nélaton |lien auteurauteur1= Étienne Moreau-Nélaton |titre= Manet raconté par lui-même |éditeurvolume=2 Henri Laurens|tome=I |lieu= Paris |annéeéditeur=Henri 1926|volume= 2Laurens |tomeannée=I1926 |consulté le= MN1}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage |prénomprénom1= Étienne |nomnom1= Moreau-Nélaton |lien auteurauteur1= Étienne Moreau-Nélaton |titre= Manet raconté par lui-même |éditeurvolume=2 Henri|tome=II Laurens|lieu= Paris|année= 1926|volumeéditeur=Henri 2Laurens |tomeannée=1926 II|consulté le= MN2}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage |auteur1=[[Claude Pichois]] |auteur2= [[Jean Ziegler]] |titre=Baudelaire |éditeurlieu=Paris Éditions Julliard|lien éditeur=[[Éditions Julliard]] |lieuannée=Paris|jour=11987 |mois=mai |annéejour= 19871 |pages totales=704|passage= |isbn=978-22600045302-260-00453-0 |id=PZ }}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage |langue=en |prénom1= John |nom1=Richardson |titre= Édouard Manet : paintings and drawings |sous-titre= Introduction|éditeur= Phaidon Press|lieu= Londres et New York |éditeur=Phaidon Press |année= 1958 }}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage |langue=en |prénom1= Gerald |nom1=Needham |lien auteur= |titre=Woman as sex object, Studies in erotic art 1730-1970 |sous-titre= Manet's Olympia and Pornographic Photography |éditeurlieu=New York |éditeur=Thomas Hess, Linda Nochlin|lieu=New York |année=1972 1972|pages totales=258 |passage=80-89 |isbn= |id=Needham}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage |auteurauteur1=[[Antonin Proust]] |titre=Édouard Manet : souvenirs|éditeursous-titre=souvenirs La Revue blanche|lienlieu=Paris |éditeur= [[La Revue blanche]] |lieu= Paris|année= 1891-1903 |isbn= |id=Proust}}. {{plume}} {{commentaire|La Revue Blanche est numérisée sur Gallica [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb344304470/date les numéros de la Revue Blanche], réédité en 1996 par L'Échoppe, 102 p., {{ISBN|978-2905657398}}.}}
* {{ouvrageOuvrage|prénom1= Antonin |nom1=Proust |lien auteurauteur1= Antonin Proust|titre= Manet souvenirs publiés par A. Barthélemy|lieu=Paris|éditeur= librairie Raynouard|lieu= Paris |année= 1947 |pages totales= 600 |id=Proust47}} réédition {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage |langue=en en|auteurauteur1=Denis Rouart| |titre= Berthe Morisot, the correspondence with her family and friends |lieu=Rhode Island |éditeur= Moyer Bell LTD|lieu= [[Rhodes Island]]|jourannée=212007 |mois=avril |annéejour=200721 |pages totales=46 |isbn=9780918825629978-0-918825-62-9 |id=Rouart}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage |langue=en |prénom1= Louisine |nom1= Havemeyer |lien auteurauteur1=Henry Osborne Havemeyer |titre= Sixteen to sixty |sous-titre= Memoirs of a collector |éditeurlieu=New York |éditeur=Susan Alyson Stein |lieu= New York |année= 1961 et 1993 |isbn=978-1-883145-00-72 |isbn2=1-883145-00-7}}. {{plume}}
* {{ouvrageOuvrage |langueauteur1= |auteur= [[André Malraux]] |titre=[[Les Voix du silence]]|sous-titre= |numéro d'éditionlieu=Paris |éditeur=[[Éditions Gallimard]] |collection=La Galerie de la Pléiade, [[La Nouvelle Revue Françaisefrançaise|NRF]]|lieu= Paris |jour= |mois= |année= 1951 |volume= |tome= |pages totales=647 |passage=|isbn= |lire en ligne= |consulté le= |id=Malraux}}. {{plume}} {{commentaire| Histoire de l'art très personnelle d'André Malraux, qui cite abondamment Édouard Manet[http://data.bnf.fr/12156491/andre_malraux_les_voix_du_silence/ notice bibliographique BNF], [http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb40035604b présentation catalogue bnf] ouvrage réédité en 1952, 1953, 1965.}}
* {{ouvrageOuvrage|prénom1=Daniel|nom1=Wildenstein|prénom2=Denis|nom2=Rouart|titre=Manet|sous-titre=Catalogue raisonné (deux tomes)|année=1975|éditeur=Bibliothèque des arts|année=1975|isbn=}}.
 
==== Autres ouvrages ====
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* Martine Bacherich, ''Édouard Manet, le regard incarné'', Éditions Olbia, 1998 {{ISBN|271910440X}} ;
* Serge Bismuth, ''Manet et Mallarmé'', L'Harmattan, 2002 {{ISBN|2747527247}} ;
* Isabelle Cahn, ''Manet : Natures mortes'', Gallimard, coll. « [[Liste des volumes de « Découvertes Gallimard » (3e partie)|Découvertes Gallimard Hors série]] », 2000 {{ISBN|2070535355}} ;
* Françoise Cachin, ''Manet : « J'ai fait ce que j'ai vu »'', Gallimard, coll. « [[Découvertes Gallimard]] / Arts » ([[Liste des volumes de « Découvertes Gallimard » (1re partie)|{{n°|203}}]]), 1994 {{ISBN|2070532666}} ;
* [[Éric Darragon]], ''Manet'', Fayard, 1989 {{ISBN|2-213-02345-X}} ;
Ligne 537 ⟶ 533 :
* Emmanuel Laurent, ''Mademoiselle V. Journal d'une insouciante'', La Différence, 2003, {{ISBN|978-2-7291-1435-0}}. Roman suivi d'une biographie critique de Victorine Meurent, le modèle favori d'Edouard Manet.
* John Leighton, ''Édouard Manet : Impressions de la mer'', Marot, 2005 {{ISBN|2930117303}} ;
* {{Ouvrage|auteur1=Jean-Jacques Lévêque,|lien ''Manet'',auteur=Jean-Jacques Lévêque|titre=Manet|éditeur=éditions Siloé, Paris, |année=1983|pages {{ISBNtotales=156|2850540285isbn=978-2-850-54028-8}}
* Georges L. Mauner, Henri Loyrette, commissaires d'expositions organisées par la Réunion des Musées nationaux et {{lang|en|texte=l'American Federation of Arts de New-York}}, d'abord à Paris, Musée d'Orsay du {{date-|9 octobre 2000}} au {{date-|7 janvier 2001}}, puis à Baltimore, The Walters Art Gallery, du {{date-|30 janvier}} au {{date-|22 avril 2001}}, ''Manet, les natures mortes'', éditions de la Martinière, Paris, 2000, 192 pages. {{ISBN|273242692X}}
* Gilles Néret, ''Édouard Manet - Le premier des modernes'', Taschen, 2003 {{ISBN|3822819484}} ;
* Ronald Pickvance, ''Manet : {{date-|5 juin}} au {{date-|11 novembre 1996}}'', [[Fondation Pierre Gianadda]], 1997 {{ISBN|2884430385}} ;
* Pascal Durand, ''Crises. Mallarmé via Manet. De « The Impressionists and Edouard Manet » à «Crise de vers »'', Leuven, Peeters/Vrin, coll. « Accent », 1998.
* {{Ouvrage|auteurlangue=fr|auteur1=Dictionnaire [[Bénézit]]|titre=Dictionnaire critique et documentaire des peintres,sculpteurs, dessinateurs et graveurs de tous les temps et de tous les pays|volume=9|éditeur=éditions Gründ|langueannée=français1999|mois=janvier|année=1999|pages totales=13440|isbn=2700030192|volume=9|passage=137-140|isbn=2-7000-3019-2}}
* [[Claude Jeancolas]], ''Le Groupe des Batignolles, Manet, Renoir, Degas... 1865-1874,'', éditions FVW, Paris, 2014
* Robert Floetemeyer: Baudelaire und Manet - Grenzen der "modernité". In: {{lang|de|texte=Von Duccio bis Beckmann. Festschrift für Christian Lenz, Frankfurt 1998 (Verlag Blick in die Welt), S 53 - 63}}, {{ISBN|3-88284-008-0}}
* {{Ouvrage|prénom1=Pierre|nom1=Bourdieu|lien auteur1=Pierre Bourdieu|titre=Sur Manet|sous-titre=Une révolution symbolique|éditeur=Seuil/Raisons d'agir|collection=Cours et travaux|année=2013|pages totales=778|annéeisbn=2013}} {{Commentaire biblio|ouvrage édité par [[Pascale Casanova]], [[Patrick Champagne]], Christophe Charle, Franck Poupeau et Marie-Christine Rivière}} {{Commentaire| correspondance}}
* Édouard Manet, ''Voyage à Rio : lettres de jeunesse, 1848-1849''. – [[Paris]] : Éditions du Sandre, [[2005]]. – 53 p., {{unité|22|cm}}. – {{ISBN|2-914958-18-8}}.
* [[Marc Pautrel]], ''Le Peuple de Manet'', Gallimard, 2021.
* [[Alain Le Ninèze]], ''La femme moderne selon Manet'', Ateliers Henry Dougier, Paris, 2021.
 
=== Articles connexes ===
* [[École de Berck]]
* [[(11984) Manet]]
 
=== Liens externes ===
{{Autres projets|commons=Category:Édouard Manet}}
* {{Lien web|url=http://bibliotheque-numerique.inha.fr/collection/?&refine[Categories][]=Estampes&refine[Categories][]=Estampes$$$Fonds%20d%27estampes%20d%27artistes$$$Estampes%20d%27%C3%89douard%20Manet%20(1832-1883)|titre=Estampes d'Édouard Manet|site=[[Institut national d'histoire de l'art|INHA]]|consulté le=11 janvier 2018}}.
* {{Autorité}}
* {{Bases art}}
* {{Lien web|url=http://bibliotheque-numerique.inha.fr/collection/?&refine[Categories][]=Estampes&refine[Categories][]=Estampes$$$Fonds%20d%27estampes%20d%27artistes$$$Estampes%20d%27%C3%89douard%20Manet%20(1832-1883)|titre=Estampes d'Édouard Manet|site=[[INHA]]|consulté le=11 janvier 2018}}.
* [http://www.culture.gouv.fr/documentation/mnr/pres.htm Site Rose-Valland Musées Nationaux Récupération (MNR)]
 
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