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{{Titre en italique|it|Bucchero}}
[[FileImage:Oinochoe in bucchero etruria meridionale, fine VII, inizio VI secolo ac..jpg|thumbvignette|''[[Œnochoé]]'' en ''bucchero'''bucchero.''''']]
 
Le '''''bucchero'''''<ref>[https://www.treccani.it/vocabolario/bucchero/ Bùcchero, vocabolario Treccani]</ref> est un type [[céramique]] noire et brillante, en ''[[terracotta (matériau)|terracotta]]'' souvent fine et très légère, en [[monochrome (peinture)|monochromie]] noire (''bucchero nero''), qui fut produite dans le centre de l'Italie par les [[Étrusques]]. La caractéristique la plus évidente de ce type de céramique est la couleur complètement noire qui a été obtenue grâce à une cuisson particulière. Le ''bucchero'' a été utilisé en [[Étrurie]] à partir du deuxième quart du {{-ssp-|VII}} |à la première moitié du {{-s-|V}} ; un matériau similaire était populaire depuis longtemps aussi en [[Éolide|éolien]].
 
== Étymologie ==
Ce mot [[italien]] est dérivé du latin ''poculum'', récipient à boire, peut-être à travers l'espagnol ''búcaro'', ou le portugais ''púcaro''<ref>Nicola Zingarelli, ''Vocabolario della Lingua Italiana'', 2011. </ref> ; le mot espagnol ''búcaro'' correspond également à une sorte d'argile odorante autrefois mâchée par les femmes, à partir de laquelle ces récipients étaient fabriqués<ref>María Moliner, ''Diccionario del uso del Español'', 2007.</ref>. Le terme ''Bucchero'' pourrait dériver du mot portugais ''búcaro'', signifiant « argile odorante », car ce type de poterie était réputé pour émettre une odeur particulière.
 
Aux {{SpS2-|XVIII|et|XIX|s}}, en [[Europe]], un grand intérêt se manifeste pour un type particulier de poterie [[Civilisation précolombienne|précolombienne]] de couleur noire. Ces céramiques sont expédiées en grand nombre d'[[Amérique du Sud]] vers l'Europe, où elles sont commercialisées et imitées. Dans le même temps, en Italie, les « ''etruscheria'' », ([[Artéfact (archéologie)|artefacts]] de [[style étrusque]]) sont très demandés et de grandes fouilles sont organisées en [[Toscane]] et en [[Ombrie]] à la recherche d’antiquités étrusques. En raison des similitudes avec les populaires céramiques sud-américaines, la poterie noire qui est trouvée dans les tombes étrusques est appelée « ''bucchero'' ». Cette forme à l'italienne s'est imposée dans la terminologie archéologique et aujourd'hui encore, le terme « ''bucchero'' » est encore courant dans la littérature scientifique.
 
== Histoire ==
[[FileImage:MMA etruscan pottery 12.jpg|thumbvignette|''Oinochoe'' du Metropolitan Museum of Art (inv. 91.1.454).]]
La céramique de ''Buccherobucchero'' semble avoir été la suite naturelle de l{{'}}''[[Impastoimpasto (poterie)|''impasto]]'' (poterie)]] associée à la [[culture de Villanova]] antérieure, à partir de laquelle la civilisation étrusque elle-même avait évolué. Elle est beaucoup plus raffinée que l{{'}}''impestoimpasto'' : l'argile est dépurée, les incisions minuscules et le travail se fait au tour uniquement ; la couloir noire, homogène, est dans doute le résultat d'une cuisson parfaite, dans un endroit riche d'oxyde de fer<ref name=":0">Commune di Roma, ''Les musées capitolins, guide'', pp{{p. |103-104}}.</ref>.
 
Le stade précédent le ''bucchero'' étrusque est la céramique d'empâtement noir-brillant, documenté à partir de l'[[âge du bronze]], à partir de laquelle le ''bucchero'' se développe grâce à un processus d'amélioration de la technique de purification et d'oxydation. Au {{-s-|VII}}, il existe encore des exemples de réduction partielle, avec des terres cuites brunes et plus claires. Les meilleurs spécimens pour ce type de cuisson vont du gris foncé au noir (obtenu peut-être en ajoutant du [[charbon de bois]] à de l'argile).
 
La première apparition d'un type de céramique qui peut clairement être classé comme ''bucchero'' s'est produite vers 675 avant notre ère dans la communauté côtière de [[Chisra]] (l'actuelle [[Cerveteri]]), dans le sud de l'Étrurie ; le stade le plus ancien, du deuxième quart du {{-s-|VII}}, est le meilleur et peut-être le produit d'un seul magasin. Les parois atteignent la finesse du proto-corinthien et la surface est d'un noir profond avec un haut degré de brillance. Après 650 av. J.-C., la nouveauté Cerveterine est adoptée par de nouveaux ateliers dans le reste de l'Étrurie à [[Véies]], [[Tarquinia]], dans la partie sud du monde étrusque, et [[Vulci]], jusqu'au Latium et la [[Campanie]] ; les ateliers du centre-nord de l'Etrurie se distinguent avant tout par la production de ce qu'on appelle le ''bucchero lourd'' (du deuxième quart du {{-sp-|VI|au début du|V}}.), caractérisé par des parois épaisses et une décoration plastique en relief et tout en rondeur. Dans le même temps, la qualité des vases diminue, acquérant des parois plus épaisses, des couleurs plus claires et opaques, des décorations simplifiées ; Caere maintient la suprématie dans la production de bucchero, mais pas la qualité technique et artistique de la première période.
 
Initialement d'une épaisseur très mince, ces objets commencèrent à s'alourdir au cours des décennies ; la surface, luisante, est décorée soit par des gravures, soit avec des motifs en relief et des ajours plastiques. Les formes reprennent la plupart des modèles de la céramique d'''impasto'', comme, par exemple le ''[[kantharos]]'', le calice ou le puisoir, tandis qu'un groupe moindre reprend ceux de la céramique importée de Grèce, comme les coupes, telles que ''[[skyphos]]'' ou kotyle, et les flacons à huile (''[[olpé]]'') ; dans certains cas, on peut également supposer une dérivation d'objets fait d'un matériau précieux, tel que l'[[ivoire]] ou le [[bronze]], par exemple<ref name=":0">Commune di Roma, ''Les musées capitolins, guide'', pp. 103-104.</ref>. Le décor des premiers ''buccheri'' est incisé, tandis que celui des ''buccheri'' postérieurs est estampé.
 
On distingue plusieurs phases dans la production des ''buccheri :''
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Dans les mobiliers funéraires, la quantité de ''bucchero'' est à peine supérieure à celle de la céramique grecque, mais inférieure à la céramique d'''impasto'', ce qui indique que ces objets étaient considérés comme de la vaisselle ayant de la valeur ; des études récentes ont mis en évidence que ces objets n'étaient pas déposés un par un dans les sépultures, mais plutôt sous forme « de service », soit pour manger, soit pour la toilette<ref name=":0" />.
 
Le ''bucchero'' étrusque des agglomérations de l'[[Étrurie méridionale]] centrale s'est exporté massivement vers les marchés de toute la Méditerranée, notamment sous certaines formes (''oinochoai'', ''kantharoi'', calices), avec une phase intense entre le {{-sp-|VII|et le|VI}} : dans les localités occidentales, les exemplaires exportés atteignent souvent des milliers, associés pour la plupart à des amphores qui contenaient du vin<ref name=":0" />.
 
== Technique de réalisation ==
Considéré comme la poterie « nationale » de l'[[Étrurie]] antique, le ''bucchero'' se distingue par son tissu noir ainsi que par sa surface noire brillante obtenue grâce à la méthode unique de « réduction » dans laquelle il est cuit. Elle se distingue des autres types de [[céramique]] (''[[impasto (poterie)|impasto]]'') par un mode de cuisson particulier lui donnant cette couleur différente des poteries classiques plutôt brunes, dans le but d'imiter le métal noirci. Son [[argile]] était noircie dans la masse par [[fumigation]] au cours d'une cuisson par [[réaction d'oxydo-réduction]]<ref>Définition du dictionnaire Reverso</ref>. Après que la vaisselle non cuite est disposée dans la [[touraille]] et que le feu commence, les trous d'aération sont fermés, réduisant ainsi l'apport d'[[oxygène]] requis dans une cuisson au four normale. Dans l'atmosphère enfumée du four, les flammes privées d'oxygène tirent des molécules d'oxygène de l'[[oxyde de fer]] de la poterie. Ce processus fait changer la couleur de la surface de l'argile de son rouge naturel au noir, les objets prenant la couleur noire (transformation de l'[[oxyde de fer(III)]] d'argile en [[oxyde de fer(II)]]) qui les distingue de tout autre type de terre cuite. Ainsi, contrairement à la céramique [[Campanie|campanienne]] à [[glaçure]] noire des colons [[grecs]] du [[Mezzogiorno]], la [[Éclat|surface noire lustrée]], brillante et noire de nombreux pots de ''bucchero'' est obtenue par un brunissage diligent (polissage) ou, occasionnellement, par l'application d'une fine [[Barbotine (argile)|barbotine]] ([[émulsion]] d'argile).
 
La fabrication de ces céramiques est restée longtemps un mystère. En effet, pour expliquer la coloration noire de ces céramiques, on a longtemps supposé une cuisson dans un milieu fortement réducteur avec un grand excès de carbone. Il est facile de faire des céramiques de ce type sans monter à plus de {{unité|500 °C}}. En revanche, ces céramiques ne tiennent pas l'eau. On ne devrait donc pas avoir pu les retrouver après {{nb|2500 ans}} enfouies sous terre.
 
Le professeur [[Joseph Davidovits]] a montré qu'il existe une technique pour expliquer la fabrication du ''bucchero''. Il est fabriqué à basse température (< {{unité|500 °C}}), tout en étant aussi résistant à l'eau qu'une céramique classique, sans nécessiter un processus de cuisson à {{unité|900 |°C}} sous atmosphère réductrice<ref>{{de}} K. Burkhardt, ''Petrographische und Geochemische Untersuchungen an ceramics'', Rome, Université “ La Sapienza ”, F. Burragato, O. Grubessi & L. Lazzarini, éditeurs, {{p.|133-142}}, 1994.</ref>. Il s'agit du procédé L.T.G.S. (''Low Temperature Geoplymeric Setting of ceramics''), un procédé de [[géopolymère]] faisant intervenir entre 0,5 % et 3 % d'[[alcali]] dans la masse de pâte céramique. Cet alcali peut être obtenu en faisant réagir de la chaux avec certains sels ([[natron]]). Or il se trouve que dans le pourtour de la [[Méditerranée]] les argiles contiennent naturellement ce genre de sels<ref>[http://www.geopolymer.org/fichiers_pdf/etruscan_ceramic.pdf « FABRICATION DE CÉRAMIQUE ETRUSQUE (BUCCHERO NERO) VII-VIII S. AV. J.-C. », Frédéric Davidovits, Alessandro Naso, Joseph Davidovits ]</ref>.
 
Les décorations gravées que leur corps porte sont à thématique géométrique ; elles peuvent être surmontées de figurines [[zoomorphe]]s ou [[anthropomorphe]]s à tendance [[moyen-orient|orientalisante]].
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== Style ==
[[FileImage:Bucchero chalice Louvre C627.jpg|thumbvignette|Calice ''bucchero'' à pattes hautes à décor en relief, début {{-s-|VI}} (musée du Louvre).]]
 
Bien que les formes des pots de Villanova aient fourni les bases des potiers étrusques, ils ont ajouté de nouveaux types et formes largement inspirés par l'intensification du commerce avec les cultures les plus avancées de l'extrémité orientale de la Méditerranée, en particulier les régions de [[Chypre (pays)|Chypre]], de [[Syrie]] et de [[Phénicie]], ainsi que l'[[Égypte]]. La plupart des nouvelles formes exotiques imitaient les objets en fer blanc importés de ces cultures. Les potiers d'Étrurie étaient en mesure d'offrir à leurs clients une céramique produite localement et moins chère, équivalente aux produits métalliques désirables mais coûteux en provenance de l'Est. Certains des magasins de poterie étrusques ont même réalisé des imitations d'articles en métal au point de recouvrir la surface des vases bucchero de fines feuilles d'[[argent]] dans le but de reproduire visuellement les importations luxueuses.
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Pendant la période orientalisante et jusqu'à la période archaïque, la production de ''bucchero sottile'' se poursuit, mais progressivement perd son caractère unique à mesure que l'Étrurie s'hellénise de plus en plus. Alors que Rome commence à grignoter les territoires de l'[[Étrurie méridionale]], les centres de production de ''bucchero'' se déplacent vers le nord, vers les villes de Chiusi et [[Vulci]]. À cet endroit, pendant l'[[antiquité classique]], les potiers marquent la tradition du ''bucchero'' en introduisant une nouvelle variété de céramique connue sous le nom de ''bucchero pesante'', ou bucchero lourd. Dans cette phase finale de l'histoire de la poterie ''bucchero'', les parois de la vaisselle s'épaississent et les proportions s'affaissent. La décoration du ''bucchero pesante'' consiste généralement en des figures moulées appliquées sur la surface encore humide du pot. Au début du {{-s-|V}}, le ''bucchero'' n'est plus exporté et, chez eux, les consommateurs préfèrent les poteries colorées des artisans grecs avec leurs panneaux narratifs et figuratifs. Les potiers étrusques se consacrent désormais à la production d'imitations provinciales de vases grecs à figures rouges.
 
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File:Museo archeologico di Firenze, Oinochoe con testa di toro, Chiusi prima metà del VI sec. a.c. 1.JPG|''Bucchero'' à tête de taureau <br> [[Musée archéologique national (Florence)]].
File:MMA etruscan cup 3.jpg|Coupe étrusque en ''bucchero'' <br>[[Metropolitan Museum of Art]].
File:Testa di canopo da chiusi, VI secolo a.c..JPG|Tête de [[canope de Chiusi|canope]] reconstituée <br> [[Musée archéologique national de Chiusi]].
File:Museo guarnacci, bucchero.JPG|Vitrine de ''buccheri'' du [[musée Guarnacci]] de [[Volterra]].
File:Bucchero kantharos Terme.jpg|[[Canthare (vase)|Canthare]] en ''bucchero''<br>[[Rome]].
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<references />
 
==Bibliographie Voir aussi ==
{{Autres projets|commons=Category:Bucchero}}
=== Bibliographie ===
* Jean Gran-Aymerich, Christian Lahanier, Jeanne Gauthier, Alain Duval, Jean-Michel Malfoy, Catherine Boyer. « Sur deux groupes de bucchero examinés au Louvre ». In ''Mélanges de l'École française de Rome''. Antiquité {{t.|97}}, {{N°}}2, 1985, {{p.}} 611-638 - [http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-5102_1985_num_97_2_1472 texte et nombreuses références bibliographiques] (lien consulté le {{date-|20 septembre 2009}}).
*{{en}} Erik A. Rasmussen, ''Bucchero pottery from southern etruria'', {{nb p.|248}}, Hardback.
Ligne 77 ⟶ 80 :
* M. Martelli, ''Bucchero'', 1994, ''Enciclopedia dell'arte antica classica e orientale (Secondo supplemento)'', editore Istituto della enciclopedia italiana, Roma.
* Robert Manuel Cook, ''Greek Painted Pottery'', London ; New York, Routledge, 1997, {{p.|144-147}} {{ISBN|0-415-13860-4}}.
* [[Mauro Cristofani]], ''Dizionario illustrato della civiltà etrusca'', Firenze, Giunti, 1999, {{p.|45-48}} {{ISBN|88-09-21728-4}}.
* Jean Gran-Aymerich, Les Vases de Bucchero. Le Monde Étrusque entre Orient et Occident; Roma, L'Erma di Bretschneider, 2017 {{ISBN|978-88-913-0817-7}}.
* http://www.geopolymer.org/fr/bibliotheque/articles-archeologiques/h-fabrication-de-ceramique-etrusque-brun-noire-analogue-ltgs
 
=== Articles connexes ===
 
* [[Art étrusque]]
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* [[Palais des Conservateurs]]
 
=== Liens externes ===
* [http://www.geopolymer.org/fr/bibliotheque/articles-archeologiques/h-fabrication-de-ceramique-etrusque-brun-noire-analogue-ltgs Notice de geopolymer.org]
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{{Liens}}
 
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