« Communisme » : différence entre les versions

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{{Trop long|date=mai 2024}}{{Voir homonymes|Communisme (homonymie)}}
 
[[Fichier:Kmarx.gif|vignette|[[Karl Marx]], théoricien du communisme.]]
{{Confusion|Collectivisme}}
 
[[Fichier:Karl Marx Portrait.jpg|vignette|[[Karl Marx]], théoricien du communisme.]]
 
[[Fichier:Lenin 1920.jpg|vignette|[[Vladimir Ilitch Lénine]], fondateur de l'[[URSS]].]]
 
[[Fichier:Mao, Bulganin, Stalin, Ulbricht Tsedenbal.jpeg|vignette|droite|[[Mao Zedong]] et [[Joseph Staline]], deux des principaux dirigeants d'États communistes du {{s-|XX}}.]]
 
[[Fichier:CheHighChe Guevara - Guerrillero Heroico by Alberto Korda.jpg|vignette|[[Che Guevara]], révolutionnaire [[Marxisme|marxiste]] argentin, une figure de la [[révolution cubaine]].]]
[[Fichier:Fidel venceremos Santiago 4175v.jpg|vignette|[[Fidel Castro]] représenté sur un panneau de propagande à [[Cuba]].]]
[[Fichier:PRC flags in Rome.JPG|vignette|Manifestation du [[Parti de la refondation communiste]] [[italie]]n en 2007.]]
Le '''communisme''' (du [[latin]] ''{{lang|la|communis}}'' – commun, universel) est initialement un ensemble de [[doctrine]]s politiques, issues du [[socialisme]] et, pour la plupart, du [[marxisme]], s'opposant au [[capitalisme]] et visant à l'instauration d'une société sans [[Classe sociale|classes sociales]], sans [[salariat]]<ref>Karl Marx dans ''Salaire, prix et profit'', dit ceci : {{Citation|Les trade-unions agissent utilement en tant que centres de résistance aux empiétements du capital. Elles manquent en partie leur but dès qu'elles font un emploi peu judicieux de leur puissance. Elles manquent entièrement leur but dès qu'elles se bornent à une guerre d'escarmouches contre les effets du régime existant, au lieu de travailler en même temps à sa transformation et de se servir de leur force organisée comme d'un levier pour l'émancipation définitive de la classe travailleuse, c'est-à-dire pour '''l'abolition définitive du salariat'''.}}
 
[[Fichier:PRC flags in Rome.JPG|vignette|Manifestation du [[Parti de la refondation communiste]] [[italie]]n en 2007.]]
Source : https://www.marxists.org/francais/marx/works/1865/06/km18650626o.htm</ref> et une mise en place d'une totale [[Socialisation des biens|socialisation économique et démocratique des moyens de production]]<ref>Citation de Friedrich Engels dans son ouvrage ''Socialisme utopique et socialisme scientifique'' : {{Citation|Avec la prise de possession des moyens de production par la société, la production marchande est éliminée, et par suite, la domination du produit sur le producteur. L'anarchie à l'intérieur de la production sociale est remplacée par l'organisation planifiée consciente. La lutte pour l'existence individuelle cesse. Par-là, pour la première fois, l'homme se sépare, dans un certain sens, définitivement du règne animal, passe de conditions animales d'existence à des conditions réellement humaines. Le cercle des conditions de vie entourant l'homme, qui jusqu'ici dominait l'homme, passe maintenant sous la domination et le contrôle des hommes, qui, pour la première fois, deviennent des maîtres réels et conscients de la nature, parce que et en tant que maîtres de leur propre socialisation.}}
 
Le '''communisme''' (du [[latin]] ''{{lang|la|communis}}'' – commun, universel) est initialement un ensemble de [[doctrine]]s politiques, issues du [[socialisme]] et, pour la plupart, du [[marxisme]], s'opposant au [[capitalisme]] et visant à l'instauration d'une société sans [[Classe sociale|classes sociales]], sans [[salariat]], et la mise en place d'une totale [[Socialisation des biens|socialisation économique et démocratique des moyens de production]].
Source : https://www.marxists.org/francais/marx/80-utopi/utopie.pdf</ref>.
 
Dans son sens d'origine, le communisme est une forme d'[[organisation sociale]] sans [[Classe sociale|classe]], sans [[État]] et sans [[monnaie]], où les [[bien matériel|biens matériels]] seraient partagés. Au {{s-|XIX}}, le mot « communisme » entre dans le vocabulaire du [[socialisme]]. Il se rattache en particulier à l'œuvre de [[Karl Marx]] et [[Friedrich Engels]] {{incise|qui le reprennent à leur compte en 1848 dans le ''[[Manifeste du parti communiste]]''}} et, plus largement, à l'école de pensée [[marxisme|marxiste]], qui prône la fin du [[capitalisme]] via la [[Collectivisme économique|collectivisation]] des [[ moyens de production]]. En 1917, les [[bolcheviks]], dirigés par [[Vladimir Ilitch Lénine]], prennent le pouvoir en Russie lors de la [[révolution d'Octobre]]. Cet évènement change radicalement le sens du mot communisme : il désigne désormais un [[mouvement politique]] international, né d'une scission du socialisme, et qui se reconnaît dans le courant [[Révolution communiste|révolutionnaire]] incarné par les bolcheviks ainsi que dans l'[[Marxisme-léninisme|interprétation du marxisme par Lénine]]. Le communisme se présente désormais comme la véritable expression politique du [[mouvement ouvrier]], au détriment de la [[social-démocratie]] dont il est issu. Selon cette acception, le communisme constitue l'un des phénomènes les plus importants du {{s-|XX}}<ref name="LSCp9to19">{{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=9-19}}</ref>, qui a pu être qualifié de {{citation|siècle du communisme}} tant cette [[idéologie]] y a tenu un rôle moteur<ref name="DictionnaireUtopies">Denis Berger et Loïc Rignol, article ''Communismes'', in [[Michèle Riot-Sarcey]], [[Thomas Bouchet]] et Antoine Picon (dir.), ''Dictionnaire des utopies'', Larousse, 2002, p. 53-58.</ref>.
Plus spécialement, ce terme est associé au [[mouvement communiste international]] né après la [[Première Guerre mondiale]], fruit d'une scission de la [[Internationale ouvrière|{{IIe}} Internationale]] provoquée par les [[bolcheviks]]. Il renvoie également, dans le contexte de la [[guerre froide]], à une alliance géopolitique ([[Bloc de l'Est|Bloc communiste]]) dominée par l'[[Union des républiques socialistes soviétiques|Union soviétique]], ainsi qu'à [[État communiste|une forme de régime politique]], [[dictature|dictatorial]] ou [[totalitarisme|totalitaire]], caractérisé par la position exclusive du [[Partis communistes dans le monde|Parti communiste]], la surveillance et la pression constante des [[Police politique|polices politiques]] sur toutes les structures institutionnelles, sociales et économiques ainsi que sur les simples citoyens<ref>Martyn Latsis définit, dans le journal ''La Terreur rouge'' du {{date-|1|11|1918}}, les tâches de cette [[Tchéka|police politique]] : « La Commission extraordinaire n'est ni une commission d'enquête, ni un tribunal. C'est un organe de combat dont l'action se situe sur le front intérieur de la guerre civile. Il ne juge pas l’ennemi : il le frappe. Nous ne faisons pas la guerre contre des personnes en particulier. Nous exterminons la bourgeoisie comme classe. Ne cherchez pas, dans l'enquête, des documents et des preuves sur ce que l'accusé a fait, en acte et en paroles, contre le pouvoir soviétique. La première question que vous devez lui poser, c'est à quelle classe il appartient, quelle est son origine, son éducation, son instruction et sa profession. Ce sont ces questions qui doivent décider de son sort. Voilà la signification et l'essence de la [[Terreur rouge (Russie)|Terreur rouge]] ». Cité par Viktor Tchernov dans ''Tche-Ka'', ed. E. Pierremont, {{p.|20}} et par [[Sergueï Melgounov]], ''La Terreur rouge en Russie, 1918-1924'', éditions des Syrtes, 2004, {{ISBN|2-84545-100-8}}.</ref> ainsi que par une [[Économie (activité humaine)|économie]] [[planification|planifiée]] instituée par la [[Collectivisation en Union soviétique|collectivisation]].
 
Lénine et ses partisans créent en 1919 l'[[Internationale communiste]] (dite ''Troisième Internationale'', ou ''Komintern'') afin de regrouper à l'échelle internationale les partisans de la [[République socialiste fédérative soviétique de Russie|Russie soviétique]]. L'[[Union des républiques socialistes soviétiques]] (URSS), fondée en 1922 pour fédérer les territoires de l'ex-Empire russe, dirige via le Komintern les activités des [[Liste des partis communistes|partis communistes du monde entier]] : elle domine ainsi la mouvance communiste, malgré l'existence de courants dissidents, et de critiques la qualifiant de [[capitalisme d'État]]. Après le reflux de la [[Révolutions de 1917 à 1923|vague révolutionnaire internationale de 1917-1923]] et la mort de Lénine en 1924, [[Joseph Staline]] s'impose comme le dirigeant de l'URSS face à [[Léon Trotski]], et oppose à l'[[internationalisme]] de la [[révolution permanente]] sa doctrine du {{Citation|[[socialisme dans un seul pays]]}}.
Dans son sens d'origine, le communisme est une forme d'[[organisation sociale]] sans [[Classe sociale|classes]], sans [[État]] et sans [[monnaie]], où les [[bien matériel|biens matériels]] seraient partagés. Au {{s-|XIX}}, le mot « communisme » entre dans le vocabulaire du [[socialisme]]. Il se rattache en particulier à l'œuvre de [[Karl Marx]] et [[Friedrich Engels]] {{incise|qui le reprennent à leur compte en [[1848]] dans le ''[[Manifeste du parti communiste]]''}} et, plus largement, à l'école de pensée [[marxisme|marxiste]], qui prône la fin du [[capitalisme]] via la [[Collectivisme économique|collectivisation]] des [[ moyens de production]]. En [[1917]], les [[bolcheviks]], dirigés par [[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]], prennent le pouvoir en Russie lors de la [[révolution d'Octobre]]. Cet évènement change radicalement le sens du mot communisme : il désigne désormais un mouvement politique international, né d'une scission du socialisme, et qui se reconnaît dans le courant révolutionnaire incarné par les bolcheviks comme dans l'interprétation du marxisme par Lénine. Le communisme se présente désormais comme la véritable expression politique du [[mouvement ouvrier]], au détriment de la [[social-démocratie]] dont il est issu. Selon cette acception, le communisme constitue l'un des phénomènes les plus importants du {{s-|XX}}<ref name="LSCp9to19">{{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=9-19}}</ref>, qui a pu être qualifié de {{citation|siècle du communisme}} tant cette idéologie y a tenu un rôle moteur<ref name="DictionnaireUtopies">Denis Berger et Loïc Rignol, article ''Communismes'', in [[Michèle Riot-Sarcey]], Thomas Bouchet et Antoine Picon (dir.), ''Dictionnaire des utopies'', Larousse, 2002, pages 53-58.</ref>.
 
En 1941, durant la [[Seconde Guerre mondiale]], l'URSS est [[Opération Barbarossa|attaquée]] par l'[[Troisième Reich|Allemagne nazie]], avec laquelle elle avait conclu un [[Pacte germano-soviétique|pacte]] deux ans plus tôt. Les troupes soviétiques jouent alors un rôle déterminant dans la défaite du [[nazisme]], notamment lors de la [[bataille de Stalingrad]]. Après-guerre, l'URSS accède au rang de [[superpuissance]] : elle occupe militairement l'essentiel de l'[[Europe de l'Est]], dont les pays deviennent des [[État communiste|États communistes]], formant le [[bloc de l'Est]]. La [[Chine]] bascule également dans le camp communiste en 1949. Le [[rideau de fer]] qui sépare l'Europe et la progression spectaculaire du communisme amènent le monde à se diviser en {{citation|blocs}} rivaux : la [[guerre froide]] oppose ainsi durant plusieurs décennies les pays communistes au « [[monde libre]] », au sein duquel les [[États-Unis]] constituent la superpuissance rivale de l'URSS. La Chine de [[Mao Zedong]] occupe quant à elle une place à part après la [[rupture sino-soviétique]]. À l'apogée de l'influence du communisme dans le monde, un tiers de l'humanité vit dans des [[État communiste|pays communistes]]<ref name="ducoulombier2011">{{harvsp|Ducoulombier|2011|p=11}}</ref>.
Lénine et ses partisans créent en [[1919]] l'[[Internationale communiste]] (dite ''Troisième Internationale'', ou ''Komintern'') afin de regrouper à l'échelle internationale les partisans de la [[République socialiste fédérative soviétique de Russie|Russie soviétique]]. L'[[Union des républiques socialistes soviétiques]] (URSS), fondée en 1922 pour fédérer les territoires de l'ex-Empire russe, dirige via le Komintern les activités des partis communistes du monde entier : elle domine ainsi la mouvance communiste, malgré l'existence de courants dissidents. Après la mort de Lénine, [[Joseph Staline]] s'impose comme le maître absolu de l'URSS.
 
Dans les [[années 1980]], l'URSS tente de remédier à ses difficultés économiques et politiques en lançant un mouvement de réformes, la [[perestroïka]] : mais ce processus de libéralisation aboutit à l'[[Chute des régimes communistes en Europe|effondrement général]] des régimes communistes européens entre 1989 et 1991. Par la suite, bien qu'en net déclin<ref name="Furet572">{{harvsp|Furet|1995|p=572}}</ref>, le communisme ne disparaît pas : si des partis anciennement communistes ont adopté d'autres identités, d'autres ont conservé leur nom et sont associés au pouvoir dans certains pays. À [[Cuba]], au [[Viêt Nam]], au [[Laos]] et en [[Corée du Nord]], des pays se réclamant du communisme existent encore, sans se conformer à un mode de gouvernement unique. La Chine, pays le plus peuplé de la planète, est toujours dirigée formellement par un [[Parti communiste chinois|Parti communiste]] ; convertie à l'[[économie de marché]], elle est aujourd'hui l'une des principales puissances mondiales.
En [[1941]], durant la [[Seconde Guerre mondiale]], l'URSS est [[Opération Barbarossa|attaquée]] par l'[[Troisième Reich|Allemagne nazie]], avec laquelle elle avait conclu un [[Pacte germano-soviétique|pacte]] deux ans plus tôt. Les troupes soviétiques jouent alors un rôle déterminant dans la défaite du nazisme. Après-guerre, l'URSS accède au rang de [[superpuissance]] : elle occupe militairement l'essentiel de l'[[Europe de l'Est]], dont les pays deviennent des [[État communiste|États communistes]], formant le [[bloc de l'Est]]. La [[Chine]] bascule également dans le camp communiste en [[1949]]. Le [[Rideau de fer]] qui sépare l'Europe et la progression spectaculaire du communisme amènent le monde à se diviser en {{citation|blocs}} rivaux : la [[guerre froide]] oppose ainsi durant plusieurs décennies les pays communistes au « [[monde libre]] », au sein duquel les [[États-Unis]] constituent la superpuissance rivale de l'URSS. La [[Chine]] de [[Mao Zedong|Mao]] occupe quant à elle une place à part après la [[rupture sino-soviétique]]. À l'apogée de l'influence du communisme dans le monde, un quart de l'humanité vit dans des [[État communiste|pays communistes]]<ref name="ducoulombier2011">{{harvsp|Ducoulombier|2011|p=11}}</ref>.
 
En tant que dictatures à [[parti unique]], les régimes se réclamant du communisme se sont tous rendus coupables de violations des [[droits de l'homme]] ; certains, comme l'URSS sous [[Joseph Staline]] et la Chine sous Mao Zedong, ont commis des crimes de masse, le nombre de leurs victimes s'élevant à plusieurs millions de morts. Le bilan historique du communisme, qui englobe un ensemble de réalités très différentes les unes des autres, demeure cependant, du fait même de sa complexité, contrasté et polémique. Le communisme a fait l'objet de diverses approches historiographiques concurrentes, longtemps handicapées par la difficulté d'accès aux documents et par les contextes politiques nationaux et internationaux. La fin de la guerre froide et l'ouverture des archives du bloc de l'Est ont depuis bouleversé le champ des études sur le communisme, sans mettre fin à toutes les controverses autour du sujet.
Dans les [[années 1980]], l'URSS tente de remédier à ses difficultés économiques et politiques en lançant un mouvement de réformes, la [[perestroïka]] : mais ce processus aboutit à l'[[Chute des régimes communistes en Europe|effondrement général]] des régimes communistes européens entre [[1989]] et [[1991]]. Par la suite, bien qu'en net déclin<ref name="Furet572">{{harvsp|Furet|1995|p=572}}</ref>, le communisme ne disparaît pas : si des partis anciennement communistes ont adopté d'autres identités, d'autres ont conservé leur nom et sont associés au pouvoir dans certains pays. À [[Cuba]], au [[Viêt Nam]], au [[Laos]] et en [[Corée du Nord]], des pays communistes existent encore, sans se conformer à un mode de gouvernement unique. La république populaire de [[Chine]], pays le plus peuplé de la planète, est toujours dirigée par un Parti communiste ; convertie à l'[[économie de marché]], elle est aujourd'hui l'une des principales puissances mondiales.
 
== Définitions et concepts associés ==
En tant que dictatures à [[parti unique]], les régimes se réclamant du communisme se sont tous rendus coupables de violations des [[droits de l'homme]] ; certains, comme l'URSS sous [[Joseph Staline|Staline]] et la Chine sous [[Mao Zedong|Mao]], ont commis des crimes de masse, le nombre de leurs victimes s'élevant à plusieurs millions de morts. Le bilan historique du communisme, qui englobe un ensemble de réalités très différentes les unes des autres, demeure cependant, du fait même de sa complexité, contrasté et polémique. Le communisme a fait l'objet de diverses approches historiographiques concurrentes, longtemps handicapées par la difficulté d'accès aux documents et par les contextes politiques nationaux et internationaux. La fin de la guerre froide et l'ouverture des archives du bloc de l'Est ont depuis bouleversé le champ des études sur le communisme, sans mettre fin à toutes les controverses autour du sujet.
Le vocable de communisme est [[polysémie|polysémique]] et, par son histoire, associé à un vaste ensemble de notions. Le mot désigne à l'origine une forme théorique de société égalitaire, ainsi que les courants d'idées qui se réclament de ce concept. Ensuite, par extension, il désigne un grand nombre de réalités concrètes, qui englobent un ensemble de pratiques politiques, de formations partageant les mêmes références idéologiques, d'organisations sociales et économiques, de [[régime politique|régimes politiques]] et de phénomènes culturels. Ainsi, selon les contextes, le mot « communisme » peut désigner une [[idéologie]], un engagement au sein d'un [[parti politique]], un mouvement [[révolution (politique et sociale)|révolutionnaire]], un régime politique, ou une [[organisation sociale]]<ref name="LSCp9to19"/>.
 
Le ''[[Le Petit Larousse|Larousse]]'' donne les définitions suivantes du mot communisme : « Théorie visant à mettre en commun les biens matériels. Formation économique et sociale caractérisée par la mise en commun des moyens de production et d'échange, par la répartition des biens produits suivant les besoins de chacun, par la suppression des classes sociales et l'extinction de l'État qui devient l'administration des choses. Politique, doctrine des partis communistes ; forme d'organisation des pays où ces partis sont au pouvoir. Ensemble des partis communistes, des communistes »<ref>[http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/communisme/17572 Communisme], définition sur Larousse.fr</ref>. Le ''Grand Dictionnaire Encyclopédique de la langue française'', publié aux éditions de la Connaissance, indique quant à lui : « Organisation d'un groupe social dans lequel les biens sont possédés en commun (vieilli) : le communisme d'un monastère. Doctrine d'inspiration religieuse ou utopiste prônant l'abolition de la propriété individuelle : le communisme de [[Thomas More]]. Pratique politique, définie par [[Karl Marx]] et [[Friedrich Engels]], fondée sur une analyse de la société capitaliste et caractérisée notamment par la [[Socialisation des biens|socialisation]] des [[moyens de production]], l'État étant dirigé par le parti prolétarien et appelé à disparaitre au profit d'une [[société sans classes]]. Régime politique, économique et social mis en œuvre dans les États se réclamant du marxisme : le communisme chinois »<ref name=GDElf>Définition ''communisme'', ''Grand Dictionnaire Encyclopédique de la langue française'', éditions de la Connaissance, 1996</ref>.
== Définitions, concepts associés et synonymes ==
Le vocable de communisme est [[polysémie|polysémique]] et, de par son histoire, associé à un vaste ensemble de notions. Le mot désigne à l'origine une forme théorique de société égalitaire, ainsi que les courants d'idées qui se réclament de ce concept. Ensuite, par extension, il désigne un grand nombre de réalités concrètes, qui englobent un ensemble de pratiques politiques, de formations partageant les mêmes références idéologiques, d'organisations sociales et économiques, de [[régime politique|régimes politiques]] et de phénomènes culturels. Ainsi, selon les contextes, le mot « communisme » peut désigner une [[idéologie]], un engagement au sein d'un [[parti politique]], un mouvement [[révolution (politique et sociale)|révolutionnaire]], un [[régime politique]], ou une [[organisation sociale]]<ref name="LSCp9to19"/>.
 
Le communisme des {{s2-|XIX|XX}} a souvent été rattaché par l'historiographie à des idées plus anciennes, remontant jusqu'à l'[[Antiquité]]. Ces dernières n'ont cependant pas de filiation politique directe avec le communisme récent, et ne constituent pas une famille de pensée cohérente avant l'[[époque contemporaine]]<ref name="DictionnaireUtopies"/>. Depuis le début du {{s-|XX|e}}, le mot est, pour l'essentiel, rattaché à une scission du [[socialisme]] et plus particulièrement à sa version [[léninisme|léniniste]]. L'historien français Romain Ducoulombier souligne à ce titre l'importance de la rupture survenue après 1917 quant à la définition du communisme au sens contemporain du terme : pour lui, la {{citation|filiation pluriséculaire}} du communisme, qui le fait remonter aux écrits d'auteurs comme Thomas More, est {{citation|complètement imaginaire}} ; le {{citation|communisme de Lénine}}, qui correspond à la définition actuelle du mot, ne s'inscrit pas dans la lignée d'auteurs anciens, mais dans le prolongement des controverses politiques et théoriques du socialisme à la fin du {{s-|XIX|e}}. L'adoption du nom de {{citation|communistes}} par Lénine et ses partisans avait pour but de souligner leur volonté de se démarquer des réformistes, dans le contexte d'une scission de la famille socialiste et d'une révolution alors en cours en Russie<ref>{{harvsp|Ducoulombier|2011|p=20-22}}</ref>.
Le ''[[Le Petit Larousse|Larousse]]'' donne les définitions suivantes du mot communisme : « Théorie visant à mettre en commun les biens matériels. Formation économique et sociale caractérisée par la mise en commun des moyens de production et d'échange, par la répartition des biens produits suivant les besoins de chacun, par la suppression des classes sociales et l'extinction de l'État qui devient l'administration des choses. Politique, doctrine des partis communistes ; forme d'organisation des pays où ces partis sont au pouvoir. Ensemble des partis communistes, des communistes »<ref>[http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/communisme/17572 Communisme], définition sur Larousse.fr</ref>. Le ''Grand Dictionnaire Encyclopédique de la langue française'', publié aux éditions de la Connaissance, indique quant à lui : « Organisation d'un groupe social dans lequel les biens sont possédés en commun (vieilli) : le communisme d'un monastère. Doctrine d'inspiration religieuse ou utopiste prônant l'abolition de la propriété individuelle : le communisme de [[Thomas More]]. Pratique politique, définie par [[Karl Marx|Marx]] et [[Friedrich Engels|Engels]], fondée sur une analyse de la société capitaliste et caractérisée notamment par la [[Socialisation des biens|socialisation]] des [[moyens de production]], l'État étant dirigé par le parti prolétarien et appelé à disparaitre au profit d'une [[société sans classes]]. Régime politique, économique et social mis en œuvre dans les États se réclamant du marxisme : le communisme chinois »<ref name=GDElf>Définition ''communisme'', ''Grand Dictionnaire Encyclopédique de la langue française'', éditions de la Connaissance, 1996</ref>.
 
Le communisme des {{s2-|XIX|XX}} a souvent été rattaché par l'historiographie à des idées plus anciennes, remontant jusqu'à l'[[Antiquité]]. Ces dernières n'ont cependant pas de filiation politique directe avec le communisme récent, et ne constituent pas une famille de pensée cohérente avant l'[[époque contemporaine]]<ref name="DictionnaireUtopies"/>. Depuis le début du {{s-|XX|e}}, le mot est, pour l'essentiel, rattaché à une scission du [[socialisme]] et plus particulièrement à sa version [[léninisme|léniniste]]. L'historien Romain Ducoulombier souligne à ce titre l'importance de la rupture survenue après 1917 quant à la définition du communisme au sens contemporain du terme : pour lui, la {{citation|filiation pluriséculaire}} du communisme, qui le fait remonter aux écrits d'auteurs comme [[Thomas More]], est {{citation|complètement imaginaire}} ; le {{citation|communisme de Lénine}}, qui correspond à la définition actuelle du mot, ne s'inscrit pas dans la lignée d'auteurs anciens, mais dans le prolongement des controverses politiques et théoriques du socialisme à la fin du {{s-|XIX|e}}. L'adoption du nom de {{citation|communistes}} par Lénine et ses partisans avait pour but de souligner leur volonté de se démarquer des réformistes, dans le contexte d'une scission de la famille socialiste et d'une révolution alors en cours en Russie<ref>{{harvsp|Ducoulombier|2011|p=20-22}}</ref>.
 
=== Définition première et évolution du sens ===
==== Sens d'origine ====
[[Fichier:Utopia coloured.png|vignette|À ''[[Utopia]]'', la [[cité idéale]] imaginée au {{XVIe siècle}} par [[Thomas More]] dans son œuvre fondatrice, le libre consentement des citoyens (et pas seulement des prolétaires) relève du courant de pensée [[utopie|utopiste]], différent du communisme moderne qui, pour sa part, admet la [[coercition]] comme moyen de faire évoluer les sociétés.]]
Dans son sens d'origine et d'un point de vue [[Philosophie|philosophique]], le mot désigne une forme d'organisation sociale marquée par la mise en commun des biens. Il peut désigner au sens large {{citation|toute organisation économique et sociale dont la base est la propriété commune par opposition à la propriété individuelle}} ; pris dans ce sens, le concept présente certains points communs avec la [[cité idéale]] telle que la définissait [[Platon]] dans ''[[La République]]''<ref>[[André Lalande (philosophe)|André Lalande]], ''Vocabulaire technique et critique de la philosophie'', Presses universitaires de France, édition de 2010, pagesp. 152-153</ref>{{,}}<ref>Platon, [[La République]], 457b-458b, {{p.|212}}</ref>. Il y écrit notamment : « Aucun d'eux ne possédera rien en propre, hors les objets de première nécessité »<ref>{{Ouvrage|langue=Grec ancien|auteur1=Platon|titre=La République|passage=Livre III, 416 d|lire en ligne=http://mercure.fltr.ucl.ac.be/Hodoi/concordances/platon_republique_03/lecture/31.htm|consulté le=15 avril 2022}}</ref>. Cette notion est reprise par les stoïciens, dont notamment [[Sénèque]] lorsqu'il posa les bases de l'[[évergétisme]] romain : « {{citation|Le bien commun est le fait du sage}}<ref>{{Ouvrage|langue=latin/françaisla+fr|auteur1=Sénèque|titre=Lettres à Lucilius, t. II, Livre I|passage=Lettre 85|lieu=Paris|éditeur=Les Belles Lettres|date=1945|pages totales=170|bnf=31351826|lire en ligne=}}</ref>. » ou « {{citation|L'homme est un animal social né pour le bien commun}}<ref>{{Ouvrage|langue=latin/françaisla+fr|auteur1=Sénèque|titre=De la Clémence, I, III, 2|passage=|lieu=|éditeur=|date=|pages totales=|isbn=|lire en ligne=http://remacle.org/bloodwolf/philosophes/seneque/clemence.htm}}</ref>. »
 
Cette définition d'une société communiste s'est notamment développée dans la pensée [[Utopie|utopiste]] dont [[Thomas More]] est, au {{XVIe siècle}}, le précurseur, à; cecice près que Thomas Moredernier n'envisage pas de moyens [[Coercition|coercitifs]] pour y parvenir.
 
Au {{s|XVIII}}, la philosophie des [[Lumières (philosophie)|Lumières]] met en évidence l'idée d'un bien commun, à la suite du ''[[Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes]]'', [[Jean-Jacques Rousseau]] situe l'origine des inégalités dans la propriété. Il déclare que l'idée de biensbien commun est à l'origine d'une société bien constituée. « {{citation|Le premier qui, ayant enclos un terrain, s'avisa de dire : ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile. Que de crimes, de guerres, de meurtres, que de misères et d'horreurs n'eût point épargné au genre humain celui qui, arrachant les pieux ou comblant le fossé, eût crié à ses semblables : gardez-vous d'écouter cet imposteur ; vous êtes perdus, si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la Terre n'est à personne}}<ref>{{Ouvrage|langue=françaisfr|auteur1=Jean-Jacques Rousseau|titre=Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes|passage=|lieu=|éditeur=|date=1755|pages totales=|isbn=|lire en ligne=https://fr.wikisource.org/wiki/Discours_sur_l%E2%80%99origine_et_les_fondements_de_l%E2%80%99in%C3%A9galit%C3%A9_parmi_les_hommes}}</ref>. »
 
C'est dans ''[[Du contrat social]]'', que [[Jean-Jacques Rousseau|Rousseau]] évoque plus clairement sa pensée à ce sujet : « {{citation|la propriété n’est que l’effet de la force ou le droit du premier occupant »}}<ref name=":0">{{Ouvrage|langue=françaisfr|auteur1=Jean-Jacques Rousseau|titre=Du contrat social|passage=|lieu=|éditeur=|date=|pages totales=|isbn=|lire en ligne=https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k202715b.texteImage}}</ref>, et ajoute que « {{citation|le plus fort n'est jamais assez fort pour être toujours le maître, s'il ne transforme sa force en droit, et l'obéissance en devoir. De là le droit du plus fort ; droit pris ironiquement en apparence, et réellement établi en principe »}}<ref name=":0" />. Il comprend que l'origine de la propriété n'est qu'à rechercher dans la force. Dans le même ouvrage, il déclare les raisons de l'iniquité des lois, « {{citation|les lois sont toujours utiles à ceux qui possèdent et nuisibles à ceux qui n'ont rien »}}<ref name=":0" />. Sa pensée annonce l'avènement de la pensée communiste au {{XIXe siècle}}, et même dans un certain sens à l'[[anarchisme]], lorsqu'il dit : « {{citation|quoi qu’il en soit, à l’instant qu’un Peuple se donne des Représentants, il n’est plus libre ; il n’est plus »}}<ref name=":0" />. Sa théorie du contrat social relève d'une société sans État, dont les individus assemblés en Peuple seraient capables de se donner des droits (ayant un substrat commun) et de les respecter. « {{citation|L'impulsion du seul appétit est esclavage, et l'obéissance à la loi qu'on s'est prescrite est liberté »}}<ref name=":0" />.
 
Le passage à une telle société est conçu soit comme une application des principes égalitaires du [[christianisme]] {{Incise|idée présente notamment chez des auteurs comme [[Étienne Cabet]]}} soit comme un retour au [[communisme primitif]] dont certains postulent qu'il aurait été l'état originel des sociétés humaines<ref name="DictionnaireUtopies" />{{,}}<ref name="100mots">Gérard Duménil, [[Michael Löwy]], [[Emmanuel Renault]], ''Les 100 mots du marxisme'', Presses universitaires de France, 2009, pages {{p.|32-34}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Piettre|1966|p=30}}</ref>{{,}}<ref name="Paroles">{{Ouvrage|prénom1=Gérald|nom1=Berthoud|auteur2=Giovanni Busino|titre=Paroles reçues|sous-titre=du bon usage des sciences sociales|éditeur=Droz|collection=Travaux de sciences sociales|lieu=Genève Suisse|numéro dans collection=189|année=2000|pages totales=432|isbn=978-2-600-00453-4|lire en ligne=https://books.google.com/books?id=e0-nzXugUIAC&printsec=frontcover}}</ref>. En [[1869]], le philosophe [[Ludwig Büchner]] décrit le communisme comme {{Citation|''un état social où, sans péril pour le but même de la société ou pour l'individualité de chacun, le travail dégagé de toute contrainte et purement volontaire, aurait uniquement pour but le bien de la communauté''}}<ref>''L'Homme selon la science, son passé, son avenir'' (1869), Ludwig Büchner (trad. Letourneau), éd. Reinwald, 1885, {{p.|224}}</ref>.
 
==== Évolutions ====
[[File:RIAN archive 24345 Children guards of honor.jpg|vignette|gauche|Garde d'honneur de jeunes [[Pionniers soviétiques|pionniers]] devant un monument à la mémoire de [[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]], en [[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]].]]
Durant la première moitié du {{XIXe siècle}}, on retrouve des idées communistes dans divers courants de pensée se réclamant de [[Gracchus Babeuf]]. L'aspiration au communisme est présente aussi bien chez des révolutionnaires radicaux comme [[Auguste Blanqui]] que chez des chrétiens comme Cabet et [[Wilhelm Weitling]]. Le mot communisme devient un élément des vocabulaires du [[socialisme]] - dont il désigne au sens plus large des formes radicales - et de l'[[anarchisme]]. [[Karl Marx]] et [[Friedrich Engels]] le reprennent à leur compte dans leur ''[[Manifeste du parti communiste]]'' ([[1848]]) ; il est par la suite associé plus nettement au [[marxisme]], qui devient progressivement l'idéologie dominante du courant socialiste et [[social-démocratie|social-démocrate]] européen. Pour Marx et ses continuateurs, le communisme est la forme que prendra la société future, à l'issue d'un processus historique sous-tendu par la [[lutte des classes]] et qui débouchera sur le renversement du capitalisme. Le terme communisme ne désigne pas, alors, un courant politique distinct du [[socialisme]] et de la [[social-démocratie]]. En [[1890]], dans la préface à une réédition du ''Manifeste'', Engels explique que Marx et lui ont choisi en 1848 de se revendiquer comme communistes car le mot désignait alors, au sein du [[mouvement ouvrier]], ceux qui exigeaient {{citation|que la société fût réorganisée de fond en comble}}<ref name="100mots"/>{{,}}<ref name="Paroles"/>. À la fin du {{s-|XIX|e}}, la notion de communisme est essentiellement rattachée à celle de [[collectivisme économique]], qui désigne plus précisément les doctrines prônant la mise en commun des [[moyens de production]]<ref>[[Jules Guesde]] juge ainsi que les [[marxisme|marxistes]] se posent en {{Citation|double qualité de communistes — comme but — et de collectivistes — comme moyen —}} ; {{cf}} [[s:Une formule prétendue communiste|« Une formule prétendue communiste »]], ''L'Égalité'', 1882. Il écrit également que {{Citation|''le collectivisme ne se distingue pas du [[Socialisme scientifique|communisme scientifique]], tel qu'il est sorti de la critique maîtresse de Karl Marx. Si cette appellation a prévalu en France, c’est que, pour les besoins de notre propagande, il y avait lieu de nous distinguer des divers systèmes communistes qui, forgés de toutes pièces par des hommes de plus ou moins bonne volonté ou de génie, versaient tous dans l’utopie''}} ; cf [http://www.marxists.org/francais/guesde/works/1894/03/guesde_18940307.htm ''Le collectivisme''], 7 mars 1894. Ainsi, peu après la [[Commune de Paris (1871)|Commune de Paris]] en [[1871]], certains marxistes se sont désignés comme « collectivistes » et la majorité des anarchistes comme « communistes », du fait que le premier courant visait la création d'un État dirigé par les travailleurs et la collectivisation comme outil de transition, au contraire du second qui voulait utiliser directement des moyens libres et autonomes pour atteindre le but recherché. Le [[france|Français]] [[Paul Lafargue]] estime quant à lui que le terme de {{citation|''Collectivisme est un mauvais synonyme belge pour communisme. Le communisme a un passé historique et a eu pour représentants au début du siècle [[Robert Owen|Owen]] et [[Charles Fourier|Fourier]]. En 1847, Marx et Engels ont publié le ''[[Manifeste du parti communiste|Manifeste communiste]]'', document incomparable au {{XIXes-|XIX}} siècle… Enfin, le mot ne fait en rien l'affaire si nous propageons les idées du communisme''.}} ; cf ''In'' Jacques Macé, ''Paul et Laura Lafargue — Du droit à la paresse au droit de choisir sa mort'', {{abréviation discrète|éd.|éditions}} l'Harmattan, 220 p., 2001, {{p.|74}}.</ref> et plus particulièrement l'[[Propriété privée|abolition de la propriété privée]].
 
À la suite de la [[révolution d'Octobre]], le mot ''communisme'' est rattaché, de manière prépondérante, à la tendance [[léninisme|léniniste]] du marxisme. [[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]] s'approprie dans ses écrits le terme {{citation|communisme}} pour distinguer son parti et ses idées des autres familles politiques de [[gauche (politique)|gauche]]<ref>{{harvsp|Service|2007|p=64}}</ref>. Dans ''[[L'État et la Révolution]]'', rédigé avant la révolution d'Octobre, il souligne que {{citation|dans la mesure où les moyens de production deviennent propriété ''commune'', le mot {{citation|communisme}} peut s'appliquer également [dans la phase socialiste de l'{{citation|État prolétarien}}] à condition de ne pas oublier que ce n'est pas le communisme intégral}}<ref>{{harvsp|Lénine|1917|p=112}}</ref>.
 
Après leur prise de pouvoir et la naissance de la [[République socialiste fédérative soviétique de Russie|Russie soviétique]], les [[bolcheviks]] se rebaptisent [[Parti communiste de l'Union soviétique|Parti communiste]], afin de souligner leur caractère [[Révolution (politique et sociale)|révolutionnaire]] et de se différencier désormais des [[social-démocratie|sociaux-démocrates]] : Lénine souligne en 1919 que l'utilisation du mot {{citation|communisme}} est {{citation|incomparablement plus forte}} du point de vue du [[mouvement ouvrier]], et qu'il permet de se distinguer de la [[Internationale ouvrière|{{IIe}} internationale]] agonisante. Pour lui, cependant, l'utilisation du terme communiste ne doit pas signifier que le {{citation|régime communiste}}, au sens de phase supérieure du socialisme, est réalisé<ref>Vladimir Ilitch Lénine, in ''Anarchisme et modernité'' (recueil de textes), Éditions sociales, 1958, 10/18, pagesp. 389-390</ref>.
 
À la suite des bouleversements que constituent la révolution en Russie et la création de l'[[Internationale communiste]], le mot {{citation|communisme}} désigne, de manière prépondérante, les partisans des bolcheviks et de l'[[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]]<ref name="100mots"/> : pris dans ce sens, le communisme est une scission du socialisme, qui reprend l'[[internationalisme]] de principe de sa mouvance d'origine et vise à propager la révolution à l'échelle mondiale. Les communistes ambitionnent de supplanter les socialistes comme porte-drapeaux du [[mouvement ouvrier]] ; ils reprennent par ailleurs à leur compte l'usage d'un certain nombre de symboles historiques et signes distinctifs du socialisme, comme l'usage du [[drapeau rouge]] et de la couleur [[rouge]] en général, ou le chant ''[[L'Internationale]]''. Le mot désigne non plus uniquement la [[société sans classes]] et sans État censée représenter le dernier stade de l'évolution socialiste, mais l'ensemble des pratiques politiques et gouvernementales mises en œuvre par des [[régime politique|régimes politiques]] se réclamant du [[marxisme-léninisme]], et dans lesquels le Parti communiste local exerce le monopole du pouvoir. Il désigne également de manière plus large, l'ensemble des actions et des théories des partisans de cette idéologie. Les communistes continuent par ailleurs de se réclamer du [[socialisme]], ce qui a occasionné de nombreuses confusions entre les mouvances socialistes et communistes et a permis à leurs adversaires de réaliser des amalgames entre elles<ref>{{harvsp|Service|2007|p=107-108}}</ref>.
 
Sur le plan [[Économie (activité humaine)|économique]], le marxisme prône la destruction du [[capitalisme]] et s'oppose par conséquent au [[libéralisme économique|libéralisme]] et à l'[[économie de marché]] : la propriété collective des moyens de production se traduit historiquement, dans les régimes communistes, par une économie [[Étatisme|étatisée]], [[Dirigisme|dirigiste]] et [[Planification économique|planifiée]], où le secteur privé, pour autant qu'il soit autorisé, ne doit théoriquement jouer qu'un rôle limité. Les pays ayant connu une révolution communiste ont non seulement étatisé l'économie, mais également, du fait du caractère souvent peu développé de leurs économies, mis en œuvre des politiques d'[[industrialisation]] destinées à renforcer la productivité et à moderniser leurs sociétés<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=209-212}}</ref>.
 
Les [[anarchisme|anarchistes]], au sein desquels le [[anarcho-communisme|communisme libertaire (ou anarcho-communisme)]] demeure un courant important, continuent quant à eux de se réclamer de leurs propres conceptions du communisme<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=87-88}}</ref>, qu'ils présentent volontiers comme le seul communisme authentique, en opposition totale avec les conceptions léninistes<ref>[[Daniel Guérin]], ''Pour le communisme libertaire'', Spartacus, 2003, pagep. 168</ref>.
 
=== Le concept de société communiste ===
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==== Visions chrétienne et anarchiste ====
[[Fichier:KropotkinAtelier Nadar - Pierre Kropotkine.jpg|vignette|[[Pierre Kropotkine]], théoricien [[anarcho-communisme|anarcho-communiste]].]]
Avant puis en parallèle à son utilisation par la théorie marxiste, la notion de société communiste a connu diverses définitions, principalement durant la première moitié du {{s-|XIX|e}}. Du point de vue du [[communisme chrétien]], notamment chez des [[intellectuel]]s comme [[Étienne Cabet]] ou [[Wilhelm Weitling]], il s'agit d'un retour à l'idéal égalitaire du [[christianisme]], via le partage des [[Bien matériel|biens matériels]] et l'[[égalité sociale]] absolue<ref name="droz">{{harvsp|Droz|1972|p=390-395}}</ref>.
 
Aux yeux de Cabet, la société communiste sera instaurée sans violence et par le [[prosélytisme]], aboutissant à un monde où chacun recevra une rémunération selon ses besoins, ce qui permettra de détruire tous les vices de la civilisation, tandis que le progrès de l'industrie permettra l'abondance : il s'agirait là de revenir aux conceptions de [[Jésus-Christ]], {{citation|pionnier d'une organisation sociale appelée royaume de Dieu}} qui préfigurait le communisme<ref>[http://www.universalis.fr/encyclopedie/etienne-cabet/ CABET ÉTIENNE (1788-1856)], [[Encyclopædia Universalis]]</ref>. Pour définir les principes de sa [[cité idéale]] d'[[Icarie]], Cabet utilise la formule {{citation|[[De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins|De chacun suivant ses forces, à chacun suivant ses besoins]]}}, qui connait alors, sous différentes variantes, une importante fortune dans les pensées socialiste et anarchiste<ref>Étienne Cabet, ''Réalisation de la communauté d’Icarie'', 1847, pagep. 36</ref>.
 
Diverses communautés [[Religion|religieuses]] fondées sur le partage des biens matériels, comme celle des [[Shakers]] en Amérique du Nord, ont par ailleurs été assimilées, dès le {{s-|XIX|e}}, à l'idée communiste : [[Friedrich Engels|Engels]], faisant abstraction de leur dimension religieuse, voyait en elles la preuve que la communauté des biens pouvait être réalisée de manière concrète<ref>[[Friedrich Engels]], [http://www.marxists.org/francais/engels/works/1845/00/fe18450000.htm Description de colonies communistes surgies ces derniers temps et encore existantes] (1845), texte sur [[Archive internet des marxistes|marxists.org]]</ref>.
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Dans une optique [[anarchisme|anarchiste]], [[Pierre Kropotkine]] voit pour sa part la société [[anarcho-communisme|communiste libertaire]] comme un système fondé sur l'[[Entraide (économie politique)|entraide]], où les communautés humaines fonctionneraient à la manière de groupes d'égaux ignorant toute notion de [[frontière]]. Les [[loi]]s deviendraient inutiles car la protection de la propriété perdrait son sens ; la répartition des biens serait, après [[expropriation]] des richesses et mise en commun des moyens de production, assurée par un usage rationnel de la [[prise au tas]] (ou {{citation|prise sur le tas}}) dans un contexte d'abondance, et du [[rationnement]] pour les biens plus rares<ref>{{Ouvrage|prénom1=Olivier|nom1=Meuwly|titre=Anarchisme et modernité : essai politico-historique sur les pensées anarchistes et leurs répercussions sur la vie sociale et politique actuelle|éditeur=l'Âge d'homme|lieu=Lausanne Paris|année=1998|pages totales=223|passage=85-87, 207|isbn=978-2-8251-1091-1|oclc=468157615}}</ref>.
 
Les anarchistes se distinguent de la vision marxiste d'une société communiste en rejetant l'idée d'une dictature qui serait exercée après la révolution par un pouvoir temporaire : à leurs yeux, un tel système ne pourrait en effet déboucher que sur la tyrannie. Privilégiant la destruction de l'[[État]], ils sont au contraire partisans d'un passage direct, ou du moins aussi rapide que possible, à une société {{citation|communiste libertaire}} ; celle-ci se réaliserait par le biais de ce que [[Mikhaïl Bakounine|Bakounine]] appelait l'{{citation|organisation spontanée du travail et de la propriété collective des associations productrices librement organisées et fédéralisées dans les communes}}<ref name="DupuyEncrevé">Christian Dupuy et André Encrevé, ''Saint-Junien, un bastion anarchiste en Haute-Vienne (1893-1923)'', Presses Universitaires de Limoges et du Limousin, 2003, pagep. 195</ref>. La formule ''De chacun selon ses facultés, à chacun selon ses besoins'' se retrouve également <math>-</math> notamment sous la plume de Kropotkine <math>-</math> parmi les principes anarchistes<ref>Présentation de l'éditeur, in Pierre Kropotkine, ''L'État, son rôle historique : Et autres textes'', Le Flibustier, 2009, page {{p.|12}}</ref>.
 
==== Visions marxistes ====
[[Fichier:MarxEngels 3a.jpg|vignette|Statues de [[Karl Marx]] et [[Friedrich Engels]] à [[Berlin]].]]
[[Karl Marx|Marx]] ne définit pas clairement la manière dont sera organisée la {{citation|société communiste}} après la révolution qu'il envisage, les travailleurs devant organiser la nouvelle société par eux-mêmes pour eux-mêmes<ref>{{Lien web |titre=Marx : ilStatuts de l'A.I.T. |url=https://www.marxists.org/francais/marx/works/1864/00/18640000.htm |site=www.marxists.org |consulté le=2024-01-13}}</ref>. Il indique néanmoins que l'être humain, libéré de l'[[Aliénation (Marx)|aliénation]], pourra pleinement réaliser son potentiel individuel et que la propriété privée capitaliste sera remplacée par la [[Coopération (économie sociale)|coopération]] entre des travailleurs libres, qui disposeront en commun des moyens de production et des ressources de la nature<ref name="Kolak">[[Leszek Kołakowski]], ''Main currents of marxism'', W.W. Norton & Company, édition intégrale de 2005, pages {{p.|254-256}}</ref>. Dans ses notes pour ''[[La Sainte Famille (Marx, Engels)|La Sainte Famille]]'', il définit le communisme, {{citation|abolition positive de la propriété privée considérée comme une séparation de l'homme de lui-même}}, comme {{citation|l'appropriation réelle de l'essence humaine par l'homme et pour l'homme, donc comme retour de l'homme à lui-même en tant qu'homme social, c'est-à-dire l'homme humain, retour complet, conscient et avec maintien de toute la richesse du développement antérieur. Ce communisme étant un [[Naturalisme (philosophie)|naturalisme]] achevé coïncide avec l'[[humanisme]] ; il est la véritable fin de la querelle avec la nature et entre l'homme et l'homme, entre l'objectif et l'affirmation de soi, entre la liberté et la nécessité, entre l'individu et l'espèce. Il résout le mystère de l'histoire et il sait qu'il le résout}}. L'homme communiste est donc, dans l'optique de la théorie marxiste, un {{citation|homme total}}, libéré de l'[[Aliénation (Marx)|aliénation]] : la société communiste est vue comme l'apparition de la vraie liberté, qui ne peut véritablement exister que dès lors que l'[[État]] disparaît, via un processus de [[Dépérissement de l’État|dépérissement]] envisagé comme naturel<ref>{{Ouvrage|prénom1=Dmitri Georges|nom1=Lavroff|lien auteur1=Dmitri Georges Lavroff|titre=Les grandes étapes de la pensée politique|éditeur=Dalloz|collection=Précis Dalloz|lieu=Paris|année=1993|pages totales=499|passage=446-447|isbn=978-2-247-01471-2|oclc=77249321}}</ref>. Dans le ''[[Manifeste du parti communiste]]'', Marx et Engels définissent le communisme comme « {{citation|une association où le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous »}}<ref>{{Ouvrage|auteur1=[[Karl Marx]]|nom2=Friedrich Engels|titre=Manifeste du parti Communiste|éditeur=EditionsÉditions Mille et une Nuits|lieu=Paris|année=1994|passage=43|isbn=978-2-910233-53-2}}</ref>. Dans ''[[Critique du programme de Gotha]]'' ([[1875]]), Marx en parle comme d'{{citation|une société coopérative fondée sur la possession commune des [[moyens de production]]}}<ref name="100mots"/> : il reprend dans ce même ouvrage, pour définir la société communiste, l'adage utilisé par divers auteurs comme [[Étienne Cabet|Cabet]] ou le théoricien socialiste [[Louis Blanc]], [[de chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins|{{citation|de chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins}}]]<ref name="Piettre7991"/>. Certains{{qui}} défendent que le marxisme n'est pas une doctrine communiste, mais une doctrine comme une autre<ref name="guesde">Claude Willard, ''Jules Guesde, l'apôtre et la loi'', les Éditions ouvrières, {{coll.}} La part des hommes, 1991 {{ISBN|978-2-7082-2889-4}}, {{p.|70}}.</ref>.
 
En 1876, défendant l'idée communiste face aux critiques d'auteurs comme l'[[anarchisme individualiste|anarcho-individualiste]] [[Max Stirner]], [[Jules Guesde]] écrit : {{Citation|Pas de spoliation, mais au contraire, maintien de la propriété réellement personnelle existante, ou création pour les sans-propriété d'aujourd'hui, de la copropriété de demain. Nous sommes aujourd'hui le seul parti plus que défenseurs, créateur de la propriété pour tous.}}<ref name="guesde"/>.
 
Dans son acception par la théorie [[marxisme|marxiste]], que [[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]] reprend à son compte, le communisme est considéré comme le dernier stade - dit {{citation|[[Phase supérieure de la société communiste|phase supérieure]]}} - d'un processus historique sous-tendu par la [[lutte des classes]], et qui se terminera par l'abolition du [[capitalisme]] et des [[classe sociale|classes sociales]]. Une première phase, nécessairement [[révolution (politique et sociale)|révolutionnaire]] et probablement violente, aboutira à la mise en place d'une [[dictature du prolétariat]] — expression forgée par [[Auguste Blanqui]] — que [[Karl Marx]] conçoit comme une phase transitoire de dictature révolutionnaire destinée à mettre à bas le pouvoir de la [[bourgeoisie]] fondé sur le capitalisme. Sur le plan économique, la dictature du prolétariat se traduira par la suppression de la [[propriété privée]] des [[moyens de production]]. Cette première phase, dite également {{citation|phase inférieure}}, d'instauration du [[socialisme]] — dit également [[socialisme d'État]] — et du [[collectivisme économique]], correspondra à un processus de [[socialisation des biens]]<ref name="Piettre7991">{{harvsp|Piettre|1966|p=79-91}}</ref>. Dans leurs écrits, Marx et Engels utilisent alternativement les mots {{citation|communisme}} et {{citation|socialisme}} pour désigner la société qui verra le jour après la révolution<ref name="100mots"/>.
 
Bien que cela soit inéluctable<ref name=":1">{{Article|langue=fr|auteur1=Philippe Adair|titre=La baisse tendancielle du taux de profit chez Marx (pertinence et limites d'un pronostic)|périodique=Cahiers d'économie politique|numéro=10-11|titre numéro=L'hétérodoxie dans la pensée économique. Marx - Keynes - Schumpeter|pages=305-322|date=17 mai 2018|lire en ligne=https://www.persee.fr/docAsPDF/cep_0154-8344_1985_num_10_1_1015.pdf|accès url=libre|format=pdf}}.</ref>{{,}}<ref name=":2">{{Lien web |langue=fr-FR |prénom=Encyclopædia |nom=Universalis |titre=ÉCONOMIE (Histoire de la pensée économique) - Marxisme : Les crises du capitalisme |url=https://www.universalis.fr/encyclopedie/economie-histoire-de-la-pensee-economique-marxisme/5-les-crises-du-capitalisme/ |site=Encyclopædia Universalis |consulté le=2024-01-13}}</ref>, Marx lui-même n'indique pas précisément quelles sont les conditions de développement social et économique nécessaires pour le passage au [[socialisme]] : ce point entraîne de nombreux débats parmi ses continuateurs. Concernant l'usage de la [[Violence politique|violence]], sa pensée connaît des évolutions : s'il souligne dans un premier temps la nécessité d'une révolution violente pour abattre le capitalisme, il en arrive ensuite à considérer que, dans les pays suffisamment développés, il sera possible de passer au socialisme par des moyens pacifiques, en gagnant les esprits par la propagande<ref name="Kolak"/>{{,}}<ref name="Piettre7991"/>.
 
Marx emploie, dans un seul texte, l'expression d'{{citation|[[État ouvrier]]}} pour qualifier le gouvernement qui s'opposerait à l'{{citation|État bourgeois}}, mais ne définit pas le type de [[régime politique]] par lequel se traduirait la [[dictature du prolétariat]]<ref>{{Ouvrage|prénom1=Maurice|nom1=Barbier|titre=La pensée politique de Karl Marx|éditeur=L'Harmattan|lieu=Paris|année=1992|pages totales=447|passage=168|isbn=978-2-7384-1527-1|oclc=398018625|id=398018625}}</ref>. Lénine, s'appuyant sur les textes d'Engels, considère que l'[[État]] sera alors devenu un {{citation|État prolétarien}} (expression utilisée alternativement à {{citation|État ouvrier}})<ref name="Lénine1821">{{harvsp|Lénine|1917|p=18-21}}</ref>. Le prolétariat s'empare en effet du pouvoir d'État et transforme dans un premier temps les moyens de production en propriété d'État : il s'agit là d'un processus de {{citation|suppression}}, par la révolution prolétarienne, de l'État bourgeois qui sera alors remplacé par l'État prolétarien<ref name="Lénine1821"/>. Durant cette phase, où l'État continue d'exister et dirige l'économie<ref name="Piettre7991"/>, Lénine juge que l'exercice de la [[dictature du prolétariat]], qu'il définit comme {{citation|l'organisation de l'avant-garde des opprimés en classe dominante pour mater les oppresseurs}}, nécessitera une [[répression politique]], qui sera exercée {{citation|contre une minorité d'exploiteurs par une majorité d'exploités}}<ref>{{harvsp|Lénine|1917|p=101-103}}</ref>. La dictature, dans l'optique léniniste, est censée être {{citation|temporaire}} et nécessaire pour briser la résistance des ennemis de la révolution<ref>{{harvsp|Boukharine|1919|p=76-77}}</ref>. [[Nikolaï Boukharine|Boukharine]], écrivant en 1919 dans le contexte de la [[guerre civile russe]], juge indispensable l'usage de la violence pour mener à bien la révolution, considérant qu'{{citation|une révolution sans guerre civile est aussi chimérique qu'une révolution {{citation|pacifique}}. […] [Marx et les autres théoriciens socialistes] comprenaient que le prolétariat ne peut convaincre la bourgeoisie et doit imposer sa volonté par la guerre civile menée, à l'aide des baïonnettes, de fusils et de canons, jusqu'à la victoire}}<ref>{{harvsp|Boukharine|1919|p=122}}</ref>. Le [[progrès technique]], dont le capitalisme fait un instrument d'exploitation par le biais du [[mécanisation|machinisme]], doit être utilisé dans la phase du socialisme comme un outil d'émancipation de la classe ouvrière, libéré des aspects avilissants du travail : ce phénomène est notamment illustré par la boutade de Lénine : {{citation|le communisme, c'est les [[Soviet]]s plus l'électricité}}<ref>{{harvsp|Piettre|1966|p=83-84}}</ref>.
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[[File:Manifest der kommunistischen Partei (Marx) p 001.jpg|vignette|Le ''[[Manifeste du parti communiste]]'', publié par [[Karl Marx]] et [[Friedrich Engels]] en [[1848]].]]
[[File:Das Kapital.JPG|vignette|gauche|Une édition des trois volumes du ''[[Le Capital|Capital]]''.]]
Par-delà sa signification première, le communisme est principalement rattaché à l'école de pensée [[marxisme|marxiste]] issue des travaux de [[Karl Marx]] et [[Friedrich Engels]]. Il englobe donc, par extension, un ensemble de courants, de notions et de réalités politiques associés au marxisme et s'en réclamant. Marx postule l'[[Aliénation (Marx)|aliénation]] de l'[[ouvrier]] du fait que ce dernier ne possède pas les [[moyens de production]] ; l'aliénation concerne par ailleurs l'ensemble des acteurs économiques, du fait de leur soumission au [[Économie de marché|marché]]. Parallèlement à l'idée d'aliénation économique intervient la notion de [[classe sociale]], et notamment celle de [[prolétariat]]. Dans l'optique de Marx, le prolétariat, en tant que classe subissant une forme extrême d'aliénation et d'exploitation, aura pour mission et vocation de créer une nouvelle société, viacar uneil formen'a pas d'intérêt au maintien de renversementla société [[dialectique]]capitaliste. Pour le marxisme, la [[lutte des classes]] est le moteur de l'[[Histoire|Histoire de l'humanité]], dès lors que les classes sociales sont nées de la division du [[Travail (économie)|travail]] après l'abandon de l'état originel du [[communisme primitif]] : les contradictions internes du système capitaliste doivent conduire à son auto-destruction, et par conséquent à une [[Révolution (politique et sociale)|révolution]] conduite par le prolétariat, qui aboutira à la propriété collective des moyens de production<ref>{{harvsp|Aron|1997|p=146-148}}</ref>.
 
Marx, et après lui les auteurs marxistes, visent à démontrer que la réalisation d'une nouvelle société via la révolution prolétarienne et le renversement du [[capitalisme]] est non seulement du domaine du possible, mais relève d'une nécessité historique. Dans ''[[Le Capital]]'', son principal traité d'économie politique, Marx s'attache, en utilisant une méthode à visées [[science|scientifique]]s et en s'appuyant notamment sur des concepts comme la [[Plus-value (marxisme)|plus-value]] et la [[Théorie de la valeur (marxisme)|théorie de la valeur-travail]], à prouver l'injustice du système capitaliste. Les deuxième et troisième volumes du ''Capital'', achevés par Engels après la mort de Marx, visent à démontrer l'instabilité essentielle du capitalisme et sa tendance à l'auto-destruction, du fait de la [[baisse tendancielle du taux de profit]]<ref name=":1" />{{,}}<ref name=":2" />. Outre ces analyses économiques, la pensée marxiste s'appuie sur une conception [[matérialisme|matérialiste]] de l'Histoire (dite ''[[matérialisme historique]]''). Marx et Engels considèrent que l'Histoire résulte du fait que l'homme a commencé à transformer la [[nature]] par le biais du [[Travail (économie)|travail]], ce qui a entraîné la division de l'humanité en [[classe sociale|classes sociales]] : la [[lutte des classes]] qui en résulte, et qui constitue le moteur de l'Histoire, est l'occasion d'une série de crises où les forces productives, à mesure qu'elles se développent, entrent en mesurecontradiction avec les structures sociales. Les crises fondamentales de la société capitaliste, en débouchant sur la [[Révolution (politique et sociale)|révolution]] puis sur une période de [[dictature du prolétariat]], permettront à l'arrivée d'aboutir à une [[société sans classes]], qui équivaudra au [[communisme primitif]] des origines, mais à un niveau très supérieur<ref>{{harvsp|Aron|1997|p=151-155}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Labica|Bensussan|1985|p=728}}</ref>.
 
Le matérialisme historique, qui prend en compte l'ensemble des facteurs [[Sociologie|sociaux]] et [[Économie (activité humaine)|économiques]] pour analyser l'histoire des sociétés humaines, tend à être vu par les continuateurs de Marx et Engels comme un pur [[économisme]] : ces interprétations, qu'Engels lui-même jugeait excessives, font de l'économie le principal moteur de l'Histoire<ref>{{harvsp|Labica|Bensussan|1985|p=729}}</ref>. La méthode d'analyse marxiste, qui s'attache à dégager des lois de transformation sociale selon une logique de [[science exacte]], est baptisée au {{XIXe siècle}} {{citation|[[socialisme scientifique]]}}, afin de la distinguer du {{citation|[[socialisme utopique]]}} des premiers temps<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=515}}</ref>. Par la suite, [[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]] considère lui aussi le marxisme comme une pensée d'essence scientifique, jugeant que le matérialisme ne peut qu'être confirmé par les sciences<ref>{{harvsp|Colas|1987|p=32-33}}</ref>. École de pensée essentiellement [[athéisme|athée]], le marxisme s'oppose en principe à la [[religion]], considérée comme un facteur d'[[Aliénation (Marx)|aliénation]] et d'oppression, et qualifiée par Marx d'{{citation|opium du peuple}}<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=481-483}}</ref>.
 
Le marxisme est par ailleursparfois également décrit comme une [[philosophie]] qui se veutserait à la fois [[matérialisme|matérialiste]] et [[dialectique]] : la théorie qui formule à la fois les lois de la pensée et celles de la réalité, appelée [[matérialisme dialectique]], est une méthode d'analyse du réel reposant sur l'existence de contradictions, et sur le fait que ces contradictions se résolvent à un niveau supérieur. La triade [[thèse-antithèse-synthèse]], dérivée de la pensée de [[Georg Wilhelm Friedrich Hegel|Hegel]], est utilisée pour parvenir à une [[Plan dialectique|vision dialectique]] de l'Histoire, où le passage du capitalisme au socialisme surviendra selon un processus logique, le socialisme étant la négation du capitalisme ou plutôt une manière de surmonter les contradictions internes de celui-ci. La notion selon laquelle le socialisme remplacera nécessairement le capitalisme introduit une équivoque au sein du marxisme, entre d'une part les tenants d'un schéma historique simple selon lequel le capitalisme s'autodétruira naturellement pour laisser la place au socialisme, et d'autre part ceux qui jugent que cette révolution doit être provoquée. Cette dernière vision {{Incise|à tendance {{citation|[[millénarisme|millénariste]]}}}} du marxisme, se traduit dès la fin du {{XIXe siècle}} par une controverse entre les socialistes qui, dans l'attente de la révolution, sont devenus en pratique des réformistes, et ceux qui demeurent partisans d'un renversement actif du capitalisme. C'est cette dernière tendance qui va, après [[1917]], donner naissance à ce qui constitue le communisme au sens moderne du mot<ref>{{harvsp|Aron|1997|p=166-170}}</ref>.
 
===== Communisme et léninisme =====
====== Léninisme ======
{{article connexe|Léninisme|Centralisme démocratique}}
[[Fichier:Hammer and sickle.svg|vignette|gauche|redresse|[[Faucille et marteau|La faucille et le marteau]], l'un des symboles les plus familiers du communisme, représente l'union entre les travailleurs agricoles et industriels par la jonction entre le [[marteau (outil)|marteau]] du [[prolétariat]] [[ouvrier]] et la [[faucille]] des [[paysan]]s.]]
 
La tendance du socialisme qui prendra par la suite le nom de communisme se distingue par son mode de fonctionnement interne et par la méthode de prise du pouvoir qu'elle met au point dans le contexte particulier de la [[Empire russe|Russie impériale]]. Pour contrer l'appareil répressif tsariste, [[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]], chef des [[bolcheviks]], préconise la formation d'un parti strictement hiérarchisé, formé de {{citation|révolutionnaires professionnels}}. Lénine se heurte en effet, en Russie, à un double problème : outre le caractère absolutiste du régime en place, le pays est dépourvu d'un [[capitalisme]] comme d'une [[bourgeoisie]] suffisamment développés, ce qui rend très éloignée la perspective de la révolution socialiste (censée survenir, selon le schéma marxiste, après une révolution bourgeoise qui aura été suivie du développement puis de l'auto-destruction du capitalisme). Lénine en conclut qu'il revient aux révolutionnaires de se substituer à la bourgeoisie pour tenir un rôle d'accélérateur de l'Histoire, provoquant ainsi la révolution au lieu d'attendre son déclenchement naturel. Il théorise pour le [[parti politique|parti]] un rôle central, considérant que c'est à lui non seulement de susciter la [[lutte des classes]] là où elle ne s'est pas encore développée du fait d'un contexte local, mais aussi d'assumer un rôle d'{{citation|avant-garde}} du [[mouvement ouvrier]] à qui il devra apporter le savoir et la conscience révolutionnaire<ref name="Colas1331">{{harvsp|Colas|1987|p=13-31}}</ref>{{,}}<ref>James D. Young, ''{{Lang|en|texte=Socialism Since 1889: A Biographical History}}'', Barnes & Noble, 1988, {{p.|101}}</ref>.
[[Fichier:Hammer and sickle.svg|vignette|gauche|[[Faucille et marteau|La faucille et le marteau]], l'un des symboles les plus familiers du communisme, représente l'union entre les travailleurs agricoles et industriels par la jonction entre le [[marteau (outil)|marteau]] du [[prolétariat]] [[ouvrier]] et la [[faucille]] des [[paysan]]s.]]
La tendance du socialisme qui prendra par la suite le nom de communisme se distingue par son mode de fonctionnement interne et par la méthode de prise du pouvoir qu'elle met au point dans le contexte particulier de la [[Empire russe|Russie impériale]]. Pour contrer l'appareil répressif tsariste, [[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]], chef des [[bolcheviks]], préconise la formation d'un parti strictement hiérarchisé, formé de {{citation|révolutionnaires professionnels}}. Lénine se heurte en effet, en Russie, à un double problème : outre le caractère absolutiste du régime en place, le pays est dépourvu d'un [[capitalisme]] comme d'une [[bourgeoisie]] suffisamment développés, ce qui rend très éloignée la perspective de la révolution socialiste (censée survenir, selon le schéma marxiste, après une révolution bourgeoise qui aura été suivie du développement puis de l'auto-destruction du capitalisme). Lénine en conclut qu'il revient aux révolutionnaires de se substituer à la bourgeoisie pour tenir un rôle d'accélérateur de l'Histoire, provoquant ainsi la révolution au lieu d'attendre son déclenchement naturel. Il théorise pour le [[parti politique|parti]] un rôle central, considérant que c'est à lui non seulement de susciter la [[lutte des classes]] là où elle ne s'est pas encore développée du fait d'un contexte local, mais aussi d'assumer un rôle d'{{citation|avant-garde}} du [[mouvement ouvrier]] à qui il devra apporter le savoir et la conscience révolutionnaire<ref name="Colas1331">{{harvsp|Colas|1987|p=13-31}}</ref>{{,}}<ref>James D. Young, ''{{Lang|en|texte=Socialism Since 1889: A Biographical History}}'', Barnes & Noble, 1988, page 101</ref>.
 
Lénine - dont la pensée sera, après sa mort, synthétisée au sein d'un corpus appelé [[léninisme]] - prône le fonctionnement du parti selon la logique du [[centralisme démocratique]], c'est-à-dire d'un strict respect, par la base, des décisions qui auront été prises par les organes de direction<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=107-108}}</ref>{{,}}<ref name="Colas1331"/>. Il théorise également, bien avant sa prise du pouvoir, l'usage de la {{citation|terreur de masse}} pour combattre les contre-révolutionnaires<ref>{{harvsp|Colas|1987|p=39-42}}</ref>.
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Après la mort de Lénine, le [[léninisme]] est codifié par [[Joseph Staline|Staline]] sous la forme d'une doctrine imposée à l'ensemble de l'[[Internationale communiste]], et dont les analyses, initialement conçues en fonction du contexte russe, sont censées s'appliquer de manière obligatoire à l'ensemble des pays<ref>{{harvsp|Labica|Bensussan|1985|p=650}}</ref>.
 
Le fondement économique du léninisme est le développement plus rapide de la production des moyens de production<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=ACADEMIE DES SCIENCES DE L'U.R.S.S. INSTITUT D'ECONOMIE|titre=MANUEL D'ECONOMIE POLITIQUE|éditeur=EditionÉdition électronique réalisée par Vincent Gouysse à partir de l’ouvrage publié en mars 1956 aux EditionsÉditions Sociales, Paris. Texte conforme à la {{2e}} édition de 1955.|lieu=Paris|année=1956|pages totales=442|passage=Une condition essentielle de la reproduction socialiste est l'établissement d'un juste rapport entre les sections I et II de la production sociale, le rôle déterminant dans toute l'économie appartenant à la section I, qui fournit les moyens de production. Sans développement prioritaire de la production des moyens de production, la reproduction élargie est impossible. Pour élargir la production (« accumuler » au sens absolu du mot), il est nécessaire de produire d'abord des moyens de production; il faut donc, pour cela, élargir la section de la production sociale qui fournit les moyens de production. (V. LENINE : Pour caractériser le romantisme économique, p. 31, Editions en langues étrangères, Moscou, 1954.) Lénine indiquait que le développement prioritaire de la production des moyens de production par rapport à celle des biens de consommation, lors de la reproduction élargie, est une loi économique. La loi du développement prioritaire de la production des moyens de production acquiert en régime socialiste une importance plus grande encore qu'en régime capitaliste. Le développement plus rapide de la section I que de la section II est la condition nécessaire de l'essor ininterrompu de la production socialiste sur la base d'une technique supérieure(p.380-381)|lire en ligne=http://www.communisme-bolchevisme.net/download/Manuel_d_economie_politique_Moscou_1955.pdf}}</ref> par rapport à la production des articles de consommation.Ce mode de production est différent du communisme de Karl Marx qui suppose, contrairement au léninisme, le développement plus rapide des articles de consommation par rapport à la production des moyens de production<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Karl Marx|titre=Le Capital. Critique de l’économie politique. Livre deuxième|éditeur=Une édition électronique réalisée à partir du livre de Karl Marx (1867).V. Giard et E. Brière, livraires-éditeurs|lieu=Paris|année=1900|pages totales=592|passage="Pour assurer la marche normale des entreprises, l'accumulation doit être plus rapide dans la [section] 2 que dans [section] 1; sans cela la partie [section] 1(v + pl) qui est échanger contre [section ]2(c) augmenterait plus vite que [section] 2(c)."(le Capital livre 2, p.571-572) NDLR: Section 2 : production d'articles de consommation Section 1: production de moyens de production v: salaires pl: plus-values c: capital constant|lire en ligne=http://classiques.uqac.ca/classiques/Marx_karl/capital/capital_livre_2/capital_livre_2_fichiers.html}}</ref>.
 
====== Marxisme-léninisme et stalinisme ======
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Le concept de [[stalinisme]] a par ailleurs été forgé pour qualifier aussi bien l'idéologie marxiste-léniniste codifiée par Staline que la pratique politique de ce dernier et, par extension, les régimes [[dictature|dictatoriaux]] se réclamant du communisme, analysés sous l'angle de la notion de [[totalitarisme]]. Utilisé le plus souvent dans un sens critique et péjoratif, ce terme n'a été que rarement revendiqué par les acteurs du communisme étatique ou par les partisans de celui-ci, bien que certains aient pu occasionnellement se présenter comme {{citation|staliniens}} ou {{citation|stalinistes}}<ref>[[Brigitte Studer]], ''Totalitarisme et stalinisme'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=36}}</ref>.
 
Après la [[déstalinisation]], le marxisme-léninisme est demeuré l'idéologie officielle de l'URSS et des régimes qui lui étaient affiliés, sans que ne soit opérée de révision théorique majeure. Les courants marxistes-léninistes qui refusaient, à l'image du [[maoïsme]], de condamner les conceptions et la pratique staliniennes, se sont présentés comme {{citation|[[Anti-révisionnisme|anti-révisionnistes]]}}<ref>Steve S. K. Chin, ''{{Lang|en|texte=The thought of Mao Tse-Tung: form and content}}'', université de Hong Kong, Centre of Asian Studies, 1979, pagesp. 89-91</ref>{{,}}<ref>James Salibur O'Donnell, ''{{Lang|en|texte=A coming of age: Albania under Enver Hoxha}}'', {{Lang|en|texte=East European Monographs}}, 1999, pagep. 31</ref>.
 
====== Trotskisme ======
{{article connexe|Trotskisme}}
[[File:Pocrci.JPG|vignette|gauche|Congrès [[trotskisme|trotskiste]] en [[Argentine]], en 2006.]]
Le [[trotskisme]] (ou trotskysme) – du nom de [[Léon Trotski]] – est une tendance se réclamant du léninisme, mais opposée au stalinisme. Avant 1917, Trotski élabore la théorie de la [[révolution permanente]] qui implique, dans le contexte russe, la poursuite continue de la lutte révolutionnaire après la révolution bourgeoise, afin de transformer celle-ci en révolution socialiste et de parvenir à la [[dictature du prolétariat]] ; à l'échelle internationale, elle se traduit par la [[révolution permanente]], soit l'extension mondiale de la révolution. Après 1924, l'idéologie trotskiste se distingue surtout par son opposition à la vision stalinienne du communisme en contestant le règne de la [[bureaucratie]] (nom donné par Trotski à la [[nomenklatura]]) et en prônant la démocratie et la liberté de débat au sein du Parti communiste. Déjà divisé du vivant de Trotski, le trotskisme éclate en multiples tendances ([[pablisme]], [[Courant lambertiste|lambertisme]], [[Union communiste internationaliste|Union communiste]], [[Quatrième internationale posadiste|posadisme]], [[Ligue Internationale des Travailleurs - Quatrième Internationale|morenisme]]...) après la Seconde Guerre mondiale<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=581-582}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Labica|Bensussan|1985|p=1181-1184}}</ref>.
 
====== Maoïsme ======
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{{article connexe|Titisme|Juche|Communisme de conseils|Gauche communiste}}
 
D'autres courants communistes d'importance inégale existent, certains étant essentiellement à usage d'une région du monde, voire d'un pays. On a appelé [[titisme]] – du nom de [[Josip Broz Tito|Tito]], qui utilisait pour sa part le terme {{citation|yougoslavisme}} – la pratique politique en vigueur en [[République fédérative socialiste de Yougoslavie|Yougoslavie]] après la [[rupture Tito-Staline|rupture de ce pays avec l'URSS]]. Tito prônait l'unité de son pays selon un principe d'équilibre entre les nationalités, et l'économie yougoslave fonctionnait officiellement selon les principes de l'[[autogestion]] des entreprises par les travailleurs. Dans les faits, l'autogestion yougoslave est demeurée superficielle et subordonnée au contrôle par l'État et le Parti<ref name="Priestland318">{{harvsp|Priestland|2009|p=318-321}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Labica|Bensussan|1985|p=1151-1154}}</ref>. L'[[opéraïsme]] est une tendance née en [[Italie]] dans les [[années 1960]], qui prône les [[Grève sauvage|grèves sauvages]], l'[[Illégalisme (anarchisme)|illégalisme]] ainsi que le refus radical de l'organisation capitaliste du [[Travail (économie)|travail]], et qui a influencé une partie de l'[[Extrême gauche en Italie|extrême gauche italienne]] pendant les [[Années de plomb (Italie)|années de plomb]]<ref>Guigou J. Wajnsztejn, ''L'individu et la communauté humaine : Anthologie de textes de Temps critiques'', l'Harmattan, 1998, {{p.|71-72}}</ref>{{,}}<ref name="satta">Vladimiro Satta, ''I nemici della Repubblica'', Rizzoli, 2016, pagesp. 27-30</ref>. On a parfois appelé {{citation|[[hoxhaïsme]]}} le marxisme-léninisme {{citation|anti-révisionniste}} et stalinien, professé en [[République populaire socialiste d'Albanie|Albanie]] par [[Enver Hoxha]]<ref>Andrew C. Janos, ''East Central Europe in the Modern World The Politics of the Borderlands from Pre- to Postcommunism'', Stanford University Press, 2000, pages {{p.|283-284}}</ref>. L'idéologie maoïste radicale du [[Sentier lumineux]], au [[Pérou]], est appelée {{citation|[[Pensée Gonzalo]]}} du nom du fondateur de l'organisation, [[Abimael Guzmán]] alias {{citation|Président Gonzalo}}. Le [[Juche]] est l'idéologie en vigueur en [[Corée du Nord]] : élaborée par [[Kim Il-sung|Kim Il-Sung]] avec l'aide de divers cadres de son régime, cette doctrine s'est d'abord revendiquée du marxisme-léninisme, avant de se présenter comme une doctrine originale ayant transcendé le marxisme lui-même. Le Juche se traduit surtout par un discours nationaliste prônant un socialisme [[Autosuffisance|autosuffisant]], et par des pratiques [[autarcie|autarciques]]<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=332}}</ref>.
 
[[Fichier:Red star.svg|vignette|gauche|Un autre des symboles utilisés par le communisme, l'[[étoile rouge (symbole)|étoile rouge]], représente les cinq continents et la révolution prolétarienne.]]
 
Le mot ''gramscisme'' désigne la pensée d'[[Antonio Gramsci]], auteur d'une œuvre théorique marxiste hétérodoxe et découverte après la mort de son auteur. Publiée de manière souvent tronquée en fonction des intérêts du [[Parti communiste italien]], la pensée de Gramsci a fait l'objet d'interprétations divergentes. Gramsci prend ses distances par rapport à l'[[économisme]] marxiste, en jugeant que l'Histoire n'est pas déterminée par la structure économique mais par l'interprétation que l'on donne de cette structure et des lois qui la régissent, et en adoptant une démarche qui relève de l'[[historicisme]]. Le rattachement du gramscisme au [[léninisme]] fait l'objet de débats, et semble surtout obéi à une interprétation opportuniste de la part des dirigeants communistes italiens. Gramsci se distingue également en insistant sur le rôle de la [[culture]] et des [[intellectuel]]s, et sur le fait que les révolutionnaires doivent viser l'[[hégémonie culturelle]]. Cette conception implique d'agir non seulement sur les terrains politique et économique, mais également sur ceux de la culture et des arts, car ceux-ci touchent la [[conscience collective]]<ref>{{harvsp|Colas|1987|p=113-114}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=208-209}}</ref>.
Le mot ''gramscisme'' désigne la pensée d'[[Antonio Gramsci]], auteur d'une œuvre théorique marxiste hétérodoxe et découverte après la mort de son auteur. Publiée de manière souvent tronquée en fonction des intérêts du [[Parti communiste italien]], la pensée de Gramsci a fait l'objet d'interprétations divergentes. Gramsci prend ses distances par rapport à l'[[économisme]] marxiste, en jugeant que l'Histoire n'est pas déterminée par la structure économique mais par l'interprétation que l'on donne de cette structure et des lois qui la régissent, et en adoptant une démarche qui relève de l'[[historicisme]]. Le rattachement du gramscisme au [[léninisme]] fait l'objet de débats, et semble surtout obéir à une interprétation opportuniste de la part des dirigeants communistes italiens. Gramsci se distingue également en insistant sur le rôle de la [[culture]] et des [[intellectuel]]s, et sur le fait que les révolutionnaires doivent viser l'[[hégémonie culturelle]]. Cette conception implique d'agir non seulement sur les terrains politique et économique, mais également sur ceux de la culture et des arts, car ceux-ci touchent la [[conscience collective]]<ref>{{harvsp|Colas|1987|p=113-114}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=208-209}}</ref>.
 
On appelle ''castrisme'' - du nom de [[Fidel Castro]] - un ensemble de thèses portant sur la spécificité de la [[révolution cubaine]], mais aussi le régime marxiste-léniniste cubain lui-même et, par extension, les courants qui s'en réclament. Le castrisme ne constitue pas une idéologie distincte à proprement parler, mais un discours analysant le monde sous l'angle de l'[[anti-impérialisme]] et du [[tiers-mondisme]], et assimilant la lutte contre le capitalisme - incarné en l'occurrence par l'[[impérialisme américain]] - à celle contre une forme de [[néocolonialisme]]<ref>{{harvsp|Labica|Bensussan|1985|p=157-159}}</ref>.
 
On a par ailleurs baptisé du nom de [[Gauche communiste]] un ensemble de courants de pensée {{citation|[[Gauchisme|gauchistes]]}} (d'[[extrême gauche]] ou d'[[ultragauche|ultra gauche]]), apparus dès l'[[entre-deux-guerres]], et dont certains s'opposent au [[léninisme]]. Le [[luxemburgisme]] - nom donné au courant qui se réclame de [[Rosa Luxemburg]] - s'oppose aux conceptions de Lénine sur le rôle dirigeant du parti et juge que le prolétariat doit prendre lui-même son destin en main, en utilisant notamment la grève de masse spontanée ; cette école de pensée trouve son prolongement dans le [[communisme de conseils]] (ou {{citation|conseillisme}}) qui prône un gouvernement par les [[conseil ouvrier|conseils ouvriers]]<ref>Jacques Wajnsztejn, ''Après la révolution du capital'', l'Harmattan, 2007, pages {{p.|81-89}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Labica|Bensussan|1985|p=681-683}}</ref>. Le terme d'{{citation|[[ultragauche|ultra gauche]]}} est parfois employé comme synonyme de l'extrême gauche elle-même, mais peut désigner, de manière plus précise, cet ensemble de courants communistes anti-léninistes<ref name="Bourseiller2009143">[[Christophe Bourseiller]], ''À gauche, toute ! : Trotskistes, néo-staliniens, libertaires, « ultra-gauche », situationnistes, altermondialistes…'', CNRS éditions, 2009, pagesp. 143-144</ref>. Le [[bordiguisme]] - du nom d'[[Amadeo Bordiga]] - est pour sa part une tendance {{citation|gauchiste}} du léninisme, qui se réclame des conceptions de Lénine mais voit dans l'URSS un {{citation|État capitaliste}}<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=282}}</ref>.
 
On a appelé [[eurocommunisme]] un courant porté dans les [[années 1970]] par plusieurs partis communistes, pour la plupart européens, et qui consistait - sans pour autant rompre avec l'URSS - à remettre en cause l'orthodoxie idéologique, en renonçant à diverses notions comme la [[dictature du prolétariat]] ou le [[marxisme-léninisme]], et en prônant une évolution démocratique vers le socialisme<ref name="Brown464">{{harvsp|Brown|2009|p=464-468}}</ref>.
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Le mot communisme désignait, étymologiquement, une société sans [[État]]. Du fait de l'évolution de son usage, il désigne également, par extension, une forme de [[régime politique]] dominé par le parti communiste local, et caractérisé par un État fort. Ni [[Karl Marx|Marx]] ni [[Friedrich Engels|Engels]] ne décrivent avec précision à quoi ressemblera l'{{citation|[[État ouvrier]]}} durant la période de la [[dictature du prolétariat]]<ref>{{Harvsp|Maurice Barbier|1992|p=263-264|id=398018625}}.</ref> : dans la pratique, la prise du pouvoir par les communistes a débouché sur la mise en place de régimes où le PC local – qu'il soit [[parti unique]] de manière officielle ou de facto – détient le monopole du pouvoir, excluant toute alternance et toute forme de véritable [[pluralisme]] politique<ref name="Aron181185">{{harvsp|Aron|1997|p=181-185}}</ref>, dans des pays se présentant comme {{citation|démocratiques}}, {{citation|populaires}} et {{citation|socialistes}}. L'historien [[Jean-François Soulet]] dégage un ensemble de traits communs permettant de distinguer l'URSS et les régimes communistes fondés après elle : tout d'abord, la toute-puissance du parti communiste local, dont la direction – sur le modèle du [[Politburo du Parti communiste de l'Union soviétique|Politburo du PCUS]] en URSS ou du [[Bureau politique du Parti communiste chinois|Politburo du PCC]] en Chine – est le principal organe de décision ; dans la majorité des cas, le véritable dirigeant de l'État est le chef du Parti (qui peut, sans que cela soit systématique, cumuler son poste avec celui de [[chef du gouvernement]] ou de [[chef de l'État]]). Ensuite, le poids d'autres groupes de pression influents comme l'armée et la police ; l'existence d'une classe dirigeante privilégiée – la [[nomenklatura]] – liée à l'appareil du régime et du Parti (les cadres du Parti étant également surnommés [[apparatchik]]s) ; enfin, une économie [[Étatisme|étatisée]]<ref>{{harvsp|Soulet|1996|p=56-81}}</ref>.
 
L'historien [[Archie Brown]] définit un ensemble de critères permettant d'identifier un [[État communiste|système politique communiste]] : pour lui, le terme de {{citation|communisme}} est le plus adapté pour désigner ce type de régime. L'usage du terme {{citation|[[Socialisme|socialiste]]}}, que les régimes communistes utilisaient pour se désigner eux-mêmes, est en effet inadéquat en ce que le concept de socialisme recouvre un ensemble politique bien plus vaste : {{citation|étant donné que les partis communistes au pouvoir qualifiaient leurs systèmes politiques de {{citation|socialistes}}, il est raisonnable de se demander en quoi il est justifié de les appeler « communistes ». De nombreux politiciens ex-communistes ont contesté l'usage de ce terme car, nous rappellent-ils, le « communisme » était censé être le dernier stade du socialisme, qu'ils n'ont jamais prétendu avoir atteint. Cependant, les membres de ces partis au pouvoir se définissaient ''eux-mêmes'' comme des communistes et les chercheurs occidentaux, en rangeant les systèmes dans la catégorie « communiste », n'envisageaient pas une seconde qu'ils parlaient de ce que Marx et Lénine décrivaient par le terme « communisme » — cette société auto-gouvernée, sans État, et coopérative, qui n'a jamais existé nulle part}}<ref name="Brown101"/>.
 
[[Fichier:Fotothek df pk 0000178 006.jpg|vignette|gauche|Défilé de l'[[Armée rouge]] en 1946.]]
 
Pour Brown, la première caractéristique d'un système communiste est le monopole du pouvoir exercé par le Parti communiste local, selon une logique de [[parti unique]] de fait ou de droit. Cette méthode de gouvernement est assimilée après 1945 à la [[dictature du prolétariat]] : ce concept se traduit dans les faits par le règne du Parti, celui-ci étant présenté comme l'expression exclusive de la volonté et des intérêts du [[prolétariat]]. Durant la période post-stalinienne, le terme le plus couramment utilisé sur le plan officiel était celui de {{citation|rôle dirigeant}} du Parti. Un système de gouvernement communiste se distingue également par la pratique du [[centralisme démocratique]] et, sur le plan économique, par une [[économie planifiée]], pouvant éventuellement coexister dans certains cas avec une forme d'[[économie de marché]] dans certains secteurs d'activité<ref name="Brown101"/>. La forme de contrôle de l'économie par l'État est parfois qualifiée de [[capitalisme d'État]]<ref>{{Ouvrage|prénom1=Tony|nom1=Cliff|traducteur=Jacques Fournier|postface=Chris Harman|titre=Le capitalisme d'État en URSS|sous-titre=de Staline à Gorbatchev|titre original=State capitalism in Russia|éditeur=Études et documentation internationales|lieu=Paris|année=1990|pages totales=303|isbn=978-2-85139-095-0|lire en ligne=https://books.google.com/books?id=AL-JXobXz5YC&printsec=frontcover}}</ref>, terme utilisé dès 1918 par Lénine lui-même (mais notamment employé, par la suite, par les adversaires {{citation|[[gauchisme|gauchistes]]}} et [[communisme de conseils|conseillistes]] du communisme soviétique<ref name="Winock 64-65"/>) : le développement du marché sous contrôle de l'État est à l'origine conçu, dans une société largement non industrialisée comme celle de la Russie, comme une étape vers la construction du socialisme<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=550, 770}}</ref>.
Pour Brown, la première caractéristique d'un système communiste est le monopole du pouvoir exercé par le Parti communiste local, selon une logique de [[parti unique]] de fait ou de droit. Cette méthode de gouvernement est assimilée après 1945 à la [[dictature du prolétariat]] : ce concept se traduit dans les faits par le règne du Parti, celui-ci étant présenté comme l'expression exclusive de la volonté et des intérêts du [[prolétariat]]. Durant la période post-stalinienne, le terme le plus couramment utilisé sur le plan officiel était celui de {{citation|rôle dirigeant}} du Parti. Un système de gouvernement communiste se distingue également par la pratique du [[centralisme démocratique]] et, sur le plan économique, par une [[économie planifiée]], pouvant éventuellement coexister dans certains cas avec une forme d'[[économie de marché]] dans certains secteurs d'activité<ref name="Brown101"/>. La forme de contrôle de l'économie par l'État est parfois qualifiée de [[capitalisme d'État]]<ref>{{Ouvrage|prénom1=Tony|nom1=Cliff|traducteur=Jacques Fournier|postface=Chris Harman|titre=Le capitalisme d'État en URSS|sous-titre=de Staline à Gorbatchev|titre original=State capitalism in Russia|éditeur=Études et documentation internationales|lieu=Paris|année=1990|pages totales=303|isbn=978-2-85139-095-0|lire en ligne=https://books.google.com/books?id=AL-JXobXz5YC&printsec=frontcover}}</ref>, terme utilisé dès 1918 par Lénine lui-même (mais notamment employé, par la suite, par les adversaires {{citation|[[gauchisme|gauchistes]]}} et [[communisme de conseils|conseillistes]] du communisme soviétique<ref name="Winock 64-65"/>) : le développement du marché sous contrôle de l'État est à l'origine conçu, dans une société largement non industrialisée comme celle de la Russie, comme une étape vers la construction du socialisme<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=550, 770}}</ref>.
 
[[File:Bundesarchiv Bild 183-N1007-0041, Berlin, 25. Jahrestag DDR-Gründung, Wachaufzug.jpg|vignette|Troupes de la [[Nationale Volksarmee]], l'armée de la [[République démocratique allemande|RDA]], en 1974.]]
 
Enfin, Archie Brown cite comme dernier critère l'existence d'une forme d'organisation internationale communiste et l'appartenance du régime politique concerné à celle-ci<ref name="Brown101"/>.
 
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== Histoire ==
{{Section trop longue|date=mai 2024}}{{article détaillé|Histoire du communisme}}
 
=== Origines ===
==== Ancêtres du socialisme et du communisme ====
[[Fichier:MEDAILLON.OF.SAINT.THOMAS.MORE.jpg|vignette|gauche|Médaillon à l'effigie de [[Thomas More]], auteur de [[L'Utopie|L'''Utopie'']].]]
[[Fichier:François-Noël (Gracchus) Babeuf.jpgpng|vignette|[[Gracchus Babeuf]], révolutionnaire français.]]
Le concept de communisme désigne tout d'abord l'idée de mise en commun des [[bien matériel|biens matériels]], puis par extension une [[organisation sociale]] où la [[propriété privée]] serait absente. On trouve des ancêtres lointains et indirects du communisme et du [[socialisme]] dans la pensée [[Antiquité|antique]], notamment chez [[Platon]] qui imagine dans ''[[La République]]'' une [[cité idéale]], divisée en trois classes, et dont les dirigeants mettraient leurs biens en commun. Il ne s'agit nullement d'une société égalitaire, seule l'élite de la cité étant concernée. [[Sparte]] qui, selon [[Plutarque]] aurait mis en place un régime de communauté de biens au sein de sa classe dirigeante, est un autre exemple de cette forme de {{citation|communisme}} antique<ref>{{harvsp|Droz|1972|p=55-71}}</ref>. Le concept de partage des biens est également présent dans la pensée [[christianisme|chrétienne]]<ref>{{harvsp|Service|2007|p=14-15}}</ref>, et tout particulièrement, sous la [[Renaissance]], dans des [[hérésie]]s issues notamment de l'[[anabaptisme]]. Au {{s|XVI|e}}, durant la [[guerre des Paysans allemands]], l'idéologue [[Millénarisme|millénariste]] [[Thomas Münzer]] prône la constitution de {{citation|communautés de saints}}, où tout serait partagé<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=13-14}}</ref>. Par la suite, des anabaptistes, inspirés par les idées de Münzer, animent à [[Münster]] en [[1534]]-[[1536]] un régime [[théocratie|théocratique]] fondé sur la communauté des biens<ref>{{harvsp|Droz|1972|p=85-87}}</ref>.
 
Durant les siècles suivants, l'idée d'une société [[égalitarisme|égalitariste]] basée sur le partage des biens constitue un élément essentiel du courant de pensée [[utopie|utopiste]]. Le philosophe et théologien [[Thomas More]] signe en [[1516]] le livre ''[[Utopia|L'Utopie]]'' qui constitue le modèle de la littérature utopiste : il y décrit un pays idéal où règne l'harmonie et la vertu. En [[1602]], le moine [[Tommaso Campanella]] publie ''[[La Cité du Soleil]]'', autre ouvrage fondateur du courant. More comme Campanella s'inspirent nettement de ''[[La République]]'' de [[Platon]]<ref>{{harvsp|Droz|1972|p=89}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Winock|1992|p=13}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=14-15}}</ref>. L'imaginaire utopique continue de nourrir la critique sociale radicale, avec comme point commun le fait de considérer la propriété privée comme une source d'injustice : on retrouve cette idée chez des auteurs des [[Lumières (philosophie)|Lumières]] comme [[Jean Meslier|le curé Meslier]], [[Étienne-Gabriel Morelly|Morelly]], [[Léger Marie Deschamps|Dom Deschamps]] ou [[William Godwin|Godwin]]<ref>{{harvsp|Winock|1992|p=15-18}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Droz|1972|p=262-265}}</ref>.
 
En [[France]], sous le [[Directoire]], [[Gracchus Babeuf]] mène en [[1796]] la [[conjuration des Égaux]] <ref>{{harvsp|Brown|2009|p=16}}</ref>. Très proche, sur le plan des idées, du communisme au sens contemporain du terme, Babeuf préconise une société égalitaire, fondée sur l'abolition de la propriété particulière. Il prône par ailleurs la prise du pouvoir via un coup de force organisé par un état-major secret incarnant l'avant-garde révolutionnaire. Pour l'historien [[Michel Winock]], la méthode de Babeuf annonce celles de [[Auguste Blanqui|Blanqui]] et de [[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]] ; plus largement, Winock voit dans la [[Révolution française]] la prémisse de divers éléments du socialisme et du communisme, sur les plans des idées et de la pratique<ref>{{harvsp|Winock|1992|p=146-155}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=16, 22-25}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Droz|1972|p=248-249}}</ref>. [[Philippe Buonarroti]], camarade de Babeuf, s'emploie par la suite à diffuser les idées {{citation|babouvistes}}<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=18-19}}</ref>. [[Nicolas Edme Restif de La Bretonne|Restif de la Bretonne]], à la même époque, contribue à donner son sens contemporain au mot ''communisme'', qu'il rattache à la pensée de Babeuf<ref>Jacques Grandjonc, « Quelques dates à propos des termes communiste et communisme », ''Mots'', no 7, octobre 1983, {{p.|143-148}}</ref>.
 
==== Le communisme au sein du mouvement socialiste ====
{{article détaillé|Socialisme}}
{{article connexe|Socialisme utopique|Social-démocratie|Blanquisme|Anarcho-communisme|Histoire de l'anarchisme}}
[[Fichier:Red flag waving transparent rev.png|vignette|redresse|Le [[drapeau rouge]], utilisé comme symbole du [[mouvement ouvrier]] à partir du {{XIXe siècle}}.]]
[[Fichier:Cabet 1840.jpg|vignette|gauche|210px|[[Étienne Cabet]].]]
Durant les premières décennies du {{XIXe siècle}}, l'idée communiste se rattache au courant [[socialisme|socialiste]], qui se développe alors dans le contexte de la [[révolution industrielle]] et des bouleversements sociaux et économiques qui l'accompagnent. Le socialisme naît sous la forme d'une école de pensée [[anticapitalisme|anticapitaliste]], qui vise à résoudre la [[question sociale]] en améliorant le sort de la [[classe ouvrière]] : il devient une expression politique du [[mouvement ouvrier]]. L'idée d'une société fondée sur le partage des biens matériels est très présente dans le courant pré-[[marxisme|marxiste]] du {{citation|[[socialisme utopique]]}} : le Britannique [[Robert Owen]], inspirateur du courant dit {{citation|[[owenisme|oweniste]]}}, prône l'auto-suffisance des ouvriers au sein de communautés [[coopérative]]s et tente de mettre ses idées en pratique dans des expériences comme celle de [[New Harmony (Indiana)|New Harmony]] aux [[États-Unis]]<ref>{{harvsp|Droz|1972|p=287-286}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=17-18}}</ref>.
 
[[Fichier:Marx and Engels.jpg|vignette|[[Karl Marx]] et [[Friedrich Engels]].]]
 
Au sein du mouvement socialiste, le terme ''communistes'' tend à désigner, dans les [[années 1840]], un ensemble de tendances radicales, principalement celles qui insistent sur notion de [[lutte des classes]] et qui ne comptent pas sur la bonne volonté des classes dominantes pour changer la société. [[Gracchus Babeuf|Babeuf]] demeure une {{citation|figure mythique}} et une référence commune pour les tout premiers {{citation|communistes}}, bien que certains se démarquent de son œuvre et de son action<ref name="DictionnaireUtopies"/>. [[Auguste Blanqui]], notamment, envisage une [[Révolution (politique et sociale)|révolution]] violente, qui se traduirait par une [[dictature du prolétariat]] avant le passage à une société communiste<ref name="droz" />{{,}}<ref>{{harvsp|Winock|1992|p=42-44}}</ref>{{,}}<ref name="DictionnaireUtopies"/>.
 
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En Allemagne, le socialisme se diffuse d'abord dans les milieux intellectuels, sous l'influence des Français. En [[1836]], à Paris, des socialistes allemands en exil fondent, à l'initiative de [[Wilhelm Weitling]], la [[Ligue des justes]], qui prône un communisme empreint de mysticisme chrétien, comparable à celui des [[anabaptisme|anabaptistes]]. Cette idéologie de type religieux, apparentée à l'{{citation|icarisme}} de Cabet, est empreinte de principes [[Non-violence|non-violents]]<ref>{{harvsp|Droz|1972|p=419-427}}</ref>. En juin [[1847]], la Ligue des justes prend le nom de [[Ligue des communistes]] sous l'impulsion de [[Karl Marx]] et de [[Friedrich Engels]]. D'abord liée à la [[Société des saisons]] [[Blanquisme|blanquiste]], elle se veut [[internationalisme|internationaliste]] et adopte comme devise le mot d'ordre {{citation|[[Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !]]}}. En février [[1848]], Marx et Engels publient la {{citation|profession de foi}} du mouvement, intitulée ''[[Manifeste du parti communiste]]''. Les auteurs posent les bases d'une conception à visée scientifique du socialisme ; ils affirment en outre une orientation nettement révolutionnaire et rejettent tant le {{citation|[[socialisme utopique]]}} que les conceptions chrétiennes du communisme. L'idée communiste, telle que la conçoivent Marx et Engels, est désormais associée à l'[[athéisme]]<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=482}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Droz|1972|p=446-452}}</ref>.
 
[[Fichier:MarxKapital.jpg|vignette|gauche|220px|''[[Le Capital]]'', principal ouvrage d'[[économie politique]] de [[Karl Marx]].]]
 
Les idées socialistes apparaissent au premier plan de la politique européenne lors du [[Printemps des peuples]]. L'échec des insurrections de 1848 ne donne qu'un coup d'arrêt provisoire à la diffusion du socialisme, qui continue de se développer en Europe parallèlement au [[syndicalisme]]. En [[1864]], plusieurs organisations socialistes se réunissent au sein de l'[[Association internationale des travailleurs]] (ou ''Première Internationale''), dont Marx rédige les statuts provisoires. L'Internationale se défait avec le temps, du fait notamment des divisions entre les partisans de Marx et ceux de l'[[Anarchisme|anarchiste]] [[Mikhaïl Bakounine]], mais les idées socialistes continuent de progresser<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=41}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Winock|1992|p=107-108}}</ref>. L'épisode de la [[Commune de Paris (1871)|Commune de Paris]] de [[1871]] contribue à entretenir une mythologie révolutionnaire dans l'imaginaire socialiste et, plus tard, communiste<ref>{{harvsp|Winock|1992|p=216-221}}</ref>.
 
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À la fin du {{s-|XIX|e}}, dans la majorité des pays européens, le socialisme évolue sensiblement vers le [[réformisme]]. Le conflit entre réformistes et [[Révolution (politique et sociale)|révolutionnaires]] se déclare notamment en Allemagne. [[Eduard Bernstein]], l'un des principaux idéologues du [[Parti social-démocrate d'Allemagne]] (SPD), ayant constaté que les prédictions de Marx sur l'effondrement du capitalisme ne se réalisaient pas, préconise en effet un dépassement du marxisme. Il juge que les socialistes doivent cesser de se voir comme le parti du [[prolétariat]] et devenir un vaste parti démocratique, qui représenterait également les [[classes moyennes]], et que la social-démocratie doit renoncer à la révolution pour aspirer simplement à une plus grande [[justice sociale]]. La {{citation|[[Reformismusstreit|querelle réformiste]]}} (''Reformismusstreit'') tourne au désavantage des thèses de Bernstein, qui sont condamnées en [[1899]] lors du congrès du SPD. Mais malgré cette défaite apparente des thèses {{citation|[[Révisionnisme (marxisme)|révisionnistes]]}}, le socialisme européen n'en continue pas moins de se recentrer, avec comme conséquence un décalage croissant entre un discours toujours officiellement révolutionnaire et une pratique de plus en plus réformiste<ref name="winock" />. Il conserve néanmoins une aile d'[[extrême gauche]], qui compte en Allemagne [[Rosa Luxemburg]] et [[Karl Liebknecht]] parmi ses représentants. Rosa Luxemburg se distingue notamment en prônant une révolution prise en main par le [[prolétariat]] lui-même, partis et syndicats devant se contenter d'{{citation|éclairer}} les ouvriers sans prétendre les diriger<ref>{{harvsp|Droz|1974|p=54-55}}</ref>.
 
[[Fichier:VladimirUlyanovLenin2.JPG|vignette|160px|[[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]], vers 1900.]]
 
L'[[Empire russe]], qui est toujours, à la fin du {{s-|XIX|e}}, une [[Absolutisme|monarchie absolue]], connaît contexte particulier. Les militants socialistes y sont réprimés, et le courant révolutionnaire est particulièrement fort. Le [[Parti ouvrier social-démocrate de Russie]] (POSDR), formé en [[1898]] lors d'un congrès clandestin qui ne réunit que neuf participants, est contraint de s'organiser dans l'illégalité et l'exil. De nombreux révolutionnaires russes sont dispersés à travers l'Europe et, jusqu'en [[1905]], le mouvement socialiste russe demeure illégal<ref>{{harvsp|Service|2007|p=30, 48}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=139-149}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Droz|1974|p=404}}</ref>. C'est dans ce contexte qu'en [[1902]], [[Vladimir Ilitch Lénine|Vladimir Oulianov]], dit {{citation|Lénine}}, publie le traité politique ''[[Que faire ? (Lénine)|Que faire ?]]'', dans lequel il prône notamment l'organisation de la [[Révolution (politique et sociale)|révolution]] par un parti clandestin, hiérarchisé et discipliné, qui constituerait l'avant-garde du [[prolétariat]]<ref>{{harvsp|Service|2000|p=137-142}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=149-151}}</ref>. [[Léon Trotski|Léon Bronstein]], dit {{citation|Trotski}}, rejoint à la même époque les milieux socialistes exilés<ref>{{harvsp|Service|2009|p=68-72}}</ref>. Le mouvement socialiste russe connaît, dans les premières années du {{s-|XX|e}}, de profondes divisions et conflits incessants : dès le second congrès du POSDR, en [[1903]], les partisans de [[Julius Martov|Martov]] s'opposent à ceux de Lénine. Les premiers reçoivent le nom de [[mencheviks]] ({{citation|minoritaires}}), et les seconds de [[bolcheviks]] ({{citation|majoritaires}})<ref>{{harvsp|Service|2009|p=152-157}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=1151-153}}</ref>.
 
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==== Révolution en Russie ====
{{Article connexe|Révolution russe|Révolution d'Octobre}}
Durant le conflit mondial, l'[[Empire russe]] souffre durement des combats sur le [[Front de l'Est (Première Guerre mondiale)|Front de l'Est]]. L'économie du pays s'effondre, portant le coup de grâce au régime tsariste, déjà politiquement discrédité. En [[1917]], au début du mois de mars (fin février selon le [[calendrier julien]]) éclate la [[révolution de Février]], premier acte de la [[révolution russe]]. Des députés de la [[Douma d'État de l'Empire russe|Douma]] créent un comité destiné à servir de gouvernement provisoire ; dans le même temps est formé le [[Soviet de Petrograd|Soviet des députés ouvriers et des délégués des soldats de Petrograd]], sur le modèle des conseils de la révolution de 1905. Le tsar [[Nicolas II de Russie|Nicolas II]] abdique. Si certains [[mencheviks]] et [[Parti socialiste révolutionnaire (Russie)|socialistes révolutionnaires]] ont participé à cette révolution spontanée, les bolcheviks n'y ont jusqu'ici tenu aucun rôle<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=48-49}}</ref>. Alors que la Russie est toujours en guerre, le [[Gouvernement provisoire (Russie)|gouvernement provisoire]], dirigé par [[Gueorgui Lvov]] puis par [[Aleksandr Kerenski]], préfère attendre la convocation d'une assemblée constituante pour mener les réformes comme la redistribution des terres. En outre, le [[Soviet de Petrograd]] lui dispute la réalité du pouvoir<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=326-327}}</ref>{{,}}<ref name="Brown p49-50">{{harvsp|Brown|2009|p=49-50}}</ref>.
 
[[Fichier:USSR stamp 1957 CPA 2067.jpg|vignette|Timbre soviétique commémorant la [[révolution d'Octobre]].]]
 
Avec l'aide du [[Oberste Heeresleitung|commandement allemand]] qui souhaite contribuer à déstabiliser la Russie en y faisant entrer des fauteurs de trouble potentiels, Lénine et d'autres révolutionnaires exilés retournent sur le sol russe. En chemin, Lénine rédige un document connu ensuite sous le nom de ''[[Thèses d'avril]]'', qu'il présente dès son arrivée à la réunion des [[bolcheviks]]<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=385-386}}</ref>{{,}}<ref name="Brown p49-50"/> : il y préconise le remplacement du gouvernement provisoire par un cabinet socialiste, ainsi que la redistribution des terres aux paysans, l'arrêt de la guerre, l'auto-détermination des peuples et la transformation des [[Soviet]]s de travailleurs en organes de gouvernement<ref>{{harvsp|Service|2007|p=59-60}}</ref> ; il prône également {{citation|la création d'une Internationale révolutionnaire (...) contre les social-chauvins et contre le « centre »}}, et le contrôle des [[Soviet]]s par le Parti. Les bolcheviks, qui entretiennent l'agitation<ref>{{harvsp|Carrère d'Encausse|1998|p=265-266, 274}}</ref>, prennent le contrôle des détachements armés des Soviets, bientôt baptisés [[Garde rouge (Russie)|gardes rouges]]<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=370}}</ref>. Mais l'insurrection des [[Journées de juillet 1917|journées de juillet]] est un échec total<ref name="Figes p421-433">{{harvsp|Figes|1998|p=421-433}}</ref> ; Lénine doit se réfugier en [[Grand-duché de Finlande|Finlande]]. En son absence, les bolcheviks continuent de profiter du chaos politique et gagnent des élus aux Soviets, aux comités d'usine et dans les syndicats. En août, la contre-offensive sur le front de l'Est, décidée par [[Aleksandr Kerenski|Kerenski]], est un désastre qui discrédite le gouvernement provisoire<ref>{{harvsp|Service|2007|p=60-61}}</ref>. En septembre, [[Léon Trotski|Trotski]], désormais allié aux bolcheviks, est élu président du Soviet de Petrograd<ref>{{harvsp|Service|2009|p=178-179}}</ref>.
Avec l'aide du [[Oberste Heeresleitung|commandement allemand]] qui souhaite contribuer à déstabiliser la Russie en y faisant entrer des fauteurs de trouble potentiels, Lénine et d'autres révolutionnaires exilés retournent sur le sol russe. En chemin, Lénine rédige un document connu ensuite sous le nom de ''[[Thèses d'avril]]'', qu'il présente dès son arrivée à la réunion des [[bolcheviks]]<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=385-386}}</ref>{{,}}<ref name="Brown p49-50"/> : il y préconise le remplacement du gouvernement provisoire par un cabinet socialiste, ainsi que la redistribution des terres aux paysans, l'arrêt de la guerre, l'auto-détermination des peuples et la transformation des [[Soviet]]s de travailleurs en organes de gouvernement<ref>{{harvsp|Service|2007|p=59-60}}</ref> ; il prône également {{citation|la création d'une Internationale révolutionnaire (…) contre les social-chauvins et contre le « centre »}}, et le contrôle des [[Soviet]]s par le Parti. Les bolcheviks, qui entretiennent l'agitation<ref>{{harvsp|Carrère d'Encausse|1998|p=265-266, 274}}</ref>, prennent le contrôle des détachements armés des Soviets, bientôt baptisés [[Garde rouge (Russie)|gardes rouges]]<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=370}}</ref>. Mais l'insurrection des [[Journées de juillet 1917|journées de juillet]] est un échec total<ref name="Figes p421-433">{{harvsp|Figes|1998|p=421-433}}</ref> ; Lénine doit se réfugier en [[Grand-duché de Finlande|Finlande]]. En son absence, les bolcheviks continuent de profiter du chaos politique et gagnent des élus aux Soviets, aux comités d'usine et dans les syndicats. En août, la contre-offensive sur le front de l'Est, décidée par [[Aleksandr Kerenski|Kerenski]], est un désastre qui discrédite le gouvernement provisoire<ref>{{harvsp|Service|2007|p=60-61}}</ref>. En septembre, [[Léon Trotski|Trotski]], désormais allié aux bolcheviks, est élu président du Soviet de Petrograd<ref>{{harvsp|Service|2009|p=178-179}}</ref>.
[[Fichier:Lenin and manifistation by Isaak Brodsky (1919, GIM).jpg|vignette|gauche|Portrait de [[Vladimir Ilitch Lénine]] par [[Isaak Brodsky]].]]
 
[[Fichier:Lenin and manifistation by Isaak Brodsky (1919, GIM).jpg|vignette|gauche|Portrait de [[Vladimir Ilitch Lénine]] par [[Isaak Brodsky]].]]
 
Durant son séjour en Finlande, Lénine rédige ''[[L'État et la Révolution]]'', ouvrage dans lequel il théorise le passage du stade d'un État bourgeois à celui d'un {{citation|État prolétarien}}, qui, après une phase de [[dictature du prolétariat]] provisoire, s'éteindra ensuite de lui-même pour aboutir à la phase du communisme ; il n'y aborde que furtivement la question de l'usage de la violence, considérant qu'il ne faudra réprimer qu'une {{citation|minorité d'exploiteurs}}<ref>{{harvsp|Service|2000|p=292-298}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Droz|1974|p=440-441}}</ref>. Il envisage par ailleurs le remplacement du nom {{citation|bolcheviks}} par celui de ''Parti communiste''<ref>{{harvsp|Lénine|1917|p=91-93}}</ref>.
 
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==== Survie du pouvoir soviétique ====
{{article connexe|Guerre civile russe|Terreur rouge (Russie)|Communisme de guerre|Nouvelle politique économique|Union des républiques socialistes soviétiques}}
Le régime des bolcheviks est encore très instable : la Russie reste en guerre contre les [[Empires centraux]], et le nouveau gouvernement est incapable de se défendre malgré la transformation de la [[Garde rouge (Russie)|Garde rouge]] en [[Armée rouge]]. Pour éviter l'effondrement, Lénine décide en mars de signer une paix séparée avec les Empires centraux : le [[traité de Brest-Litovsk (Empires centraux-Russie)|traité de Brest-Litovsk]] sauve le nouveau régime, au prix de la perte de la [[République populaire biélorusse|Biélorussie]], de l'[[République populaire ukrainienne|Ukraine]] et des [[pays baltes]]. En interne, Lénine doit composer avec l'opposition de personnalités comme [[Léon Trotski|Trotski]], [[Nikolaï Boukharine]] et [[Karl Radek]], qui souhaitaient une {{citation|guerre révolutionnaire}} que le nouveau régime n'a pas les moyens de mener. À la même période, lors du septième congrès des bolcheviks, le Parti est rebaptisé ''[[Parti communiste de l'Union soviétique|Parti communiste de Russie (bolchevik)]]'', afin de souligner son aspect révolutionnaire et de se distinguer des autres socialistes<ref>{{harvsp|Service|2000|p=355}}</ref>. Après la paix coûteuse avec les Empires centraux, les bolcheviks doivent encore se battre sur plusieurs fronts : les [[Parti socialiste-révolutionnaire de gauche|socialistes-révolutionnaires de gauche]], jusque-là alliés des bolcheviks,conflits entrentsociaux enéclatent rébellionsous ; les [[Armées blanches]], [[Intervention alliée pendant la guerre civile russe|soutenues]] par les [[Alliésl'impulsion de laplusieurs Première Guerre mondiale|Alliés]]groupes, font quantamenant à elles peser une grave menace sur le nouveau pouvoir ; les territoires de l'ex-Empire russe sombrent dans unela [[guerre civile russe|guerre civile d'une extrême violence]]. Pour survivre, le gouvernement bolchevik improvise une organisation militaire, et un mode de fonctionnement économique appelé {{citation|[[communisme de guerre]]}}. [[Léon Trotski|Trotski]] professionnalise et réorganise l'Armée rouge au prix d'une discipline impitoyable, et fait encadrer les troupes par des [[Commissaire politique|Commissaires politiques]] garants de la ligne idéologique. Les partis d'opposition sont interdits, et un vaste programme de [[nationalisation]]s permet d'[[étatisme|étatiser]] et de mobiliser l'économie. Des réquisitions agricoles sont pratiquées pour assurer le ravitaillement, provoquant des insurrections dans la paysannerie : Lénine, qui les attribue aux seuls paysans riches ({{citation|[[koulak]]s}}), ordonne de les réprimer avec la plus grande violence<ref>{{harvsp|Service|2007|p=70-73}}</ref>{{,}}<ref name="werth">{{harvsp|Werth|2004|p=142-163}}</ref>.
 
Les institutions autonomes nées de la révolution (Soviets, comités d'usine, syndicats) sont subordonnées au Parti : le régime s'emploie ensuite à dominer l'ensemble de la [[société civile]], via une [[bureaucratie]] grandissante dont les membres reçoivent le nom d'[[apparatchik]]s. Le monde du [[Travail (économie)|travail]] est mis sous contrôle : les ouvriers, censés être au pouvoir par l'entremise du Parti, se voient refuser le droit de [[grève]]. Le régime s'appuie également sur une police politique, la [[Tchéka]], dirigée par [[Félix Dzerjinski]] : la [[peine de mort]], abolie quelques mois plus tôt, est rétablie. La [[Assassinat de la famille impériale russe|famille du tsar est massacrée]], et les opposants réprimés. La répression à grande échelle ne débute vraiment qu'après que Lénine réchappe, le {{date|30 août 1918}}, à une tentative d'assassinat par la [[Parti socialiste révolutionnaire (Russie)|SR]] [[Fanny Kaplan]]<ref name="werth" />. Le [[5 septembre]], le Conseil des commissaires du peuple décrète une politique de [[Terreur rouge (Russie)|Terreur rouge]] visant les contre-révolutionnaires et les {{citation|[[Ennemi de classe|ennemis de classe]]}}<ref>[[Nicolas Werth]], [http://www.massviolence.org/IMG/pdf/Crimes-et-violences-de-masse-des-guerres-civiles-russes-1918-1921.pdf Crimes et violences de masse des guerres civiles russes], Online Encyclopedia of Mass Violence / Sciences-Po Paris, 2008</ref> : la [[Tchéka]] et l'[[Armée rouge]] mènent une campagne de répression d'une violence et d'un arbitraire extrêmes, qui se déroule en parallèle aux [[terreur blanche (Russie)|massacres]] commis par les [[Armées blanches|Blancs]]<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=535-536, 630-632, 641-649}}</ref>. À partir de [[1921]], le clergé russe est victime de massacres<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=745-749}}</ref>. Un [[Système concentrationnaire soviétique avant 1930|système de camps]] est mis en place pour y détenir prisonniers, déserteurs, {{citation|otages issus de la haute bourgeoisie}}, fonctionnaires de l'ancien régime, etc., arrêtés à titre préventif et enfermés sans jugement<ref>[[Nicolas Werth]], ''Un État contre son peuple : violences, répression, terreurs en Union soviétique'', in {{harvsp|Le Livre noir du communisme|1997|p=85}}</ref>. La forte présence de [[Juifs]] parmi les chefs bolcheviks donne par ailleurs naissance à la thèse [[antisémitisme|antisémite]] du {{citation|[[judéo-bolchevisme]]}}, qui assimile les communistes aux Juifs. De nombreux [[pogrom]]s sont commis pendant la guerre civile, notamment lors de la [[Terreur blanche (Russie)|terreur blanche]]<ref name="figes">{{harvsp|Figes|1998|p=640, 677-679}}</ref>.
 
[[Fichier:CampañaDeVeranoContraKolchak1919.svg|vignette|gauche|Contre-offensive de l'[[Armée rouge]] contre l'[[Armées blanches|Armée blanche]] de [[Alexandre Koltchak|Koltchak]], à l'hiver 1919.]]
 
En [[1919]]-[[1920]], les bolcheviks parviennent à triompher du gros des armées blanches, auxquelles les Alliés, tout juste sortis de la guerre mondiale, n'ont apporté qu'une aide limitée. Ils doivent cependant toujours affronter les divers gouvernements indépendantistes - notamment en [[République populaire ukrainienne|Ukraine]] - les [[armée révolutionnaire insurrectionnelle ukrainienne|anarchistes]] de [[Nestor Makhno]], mais aussi, jusqu'en [[1923]], les {{citation|[[armées vertes]]}} des paysans révoltés<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=163-169}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=751-769}}</ref>. Les bolcheviks reprennent le contrôle d'une majorité des anciens territoires impériaux, où sont proclamées des [[République socialiste soviétique|Républiques socialistes soviétiques]]. Les [[pays baltes]], la [[Finlande]] et la Pologne orientale leur échappent cependant : la défaite contre les Polonais lors de [[Guerre soviéto-polonaise|la guerre de 1919-1921]] marque notamment un reflux pour la Russie soviétique, qui avait un temps espéré y étendre la révolution. Né dans des circonstances très précaires, le premier [[État communiste]] de l'Histoire survit ''in fine'' au chaos politique et à la guerre civile<ref name="figes" />.
 
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En mars [[1921]], le gouvernement bolchevik doit affronter la [[révolte de Kronstadt]]. Sur ordre de [[Léon Trotski|Trotski]], l'insurrection est écrasée ; la répression fait plusieurs milliers de victimes et de condamnations à mort ou à la déportation<ref name="Werth p170-181"/>. Cet épisode achève de sonner le glas de l'anarchisme en Russie où les libertaires, initialement ralliés au régime bolchevik, ont été réprimés dès 1918<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=87}}</ref>. Les bolcheviks se consacrent ensuite à la chasse aux opposants socialistes-révolutionnaires et mencheviks, et à la lutte contre les grèves et le {{citation|laisser-aller}} ouvrier, au combat contre les insurrections paysannes, et à la répression contre l'église<ref>Nicolas Werth, ''Un État contre son peuple : violences, répression, terreurs en Union soviétique'', in {{harvsp|Le Livre noir du communisme|1997|p=130}}</ref>.
 
C'est dans ce contexte que le {{Xe}} congrès du [[Parti communiste de l'Union soviétique|Parti communiste]] entreprend de réorganiser le fonctionnement du régime et de l'économie du pays. Les factions au sein du Parti sont interdites, tandis qu'une résolution, adoptée sous l'impulsion de Lénine, élève le rôle dirigeant du [[parti unique]] au rang de composante du [[marxisme]]. Les révoltes, dont celle de Kronstadt, ayant montré l'urgence de procéder à des réformes et d'améliorer les conditions de vie de la population, Lénine parvient à faire adopter par le Parti son projet de [[Nouvelle politique économique]] (NEP), qui met fin au communisme de guerre. Le commerce extérieur est libéralisé et la création de petites entreprises privées autorisée. Lénine entend ainsi assurer une transition vers le socialisme<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=770}}</ref>{{,}}<ref name="Werth p170-181"/>. Le {{XIe}} congrès, en 1922, poursuit la réorganisation du Parti : [[Joseph Staline]] devient Secrétaire général, fonction apparemment technique mais qui lui permet de contrôler les nominations de cadres et de constituer un réseau. Le {{date|30 décembre 1922}}, l'[[Union des républiques socialistes soviétiques]] (URSS) naît d'un traité qui réunit au sein d'une [[État fédéral|fédération]] la [[Républiquerépublique socialiste fédérative soviétique de Russie]] et les autres [[République socialiste soviétique|Républiques socialistes soviétiques]] issues de l'ex-Empire russe<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=182-184}}</ref>.
 
Le nouvel État normalise progressivement ses relations internationales : dès [[1922]], le [[Traité de Rapallo (1922)|traité de Rapallo]] établit des relations diplomatiques et commerciales avec l'[[République de Weimar|Allemagne de Weimar]]. L'ensemble des pays occidentaux noue ensuite des contacts avec l'URSS. À partir de [[1924]], Staline s'oppose à la ligne de Trotski ; ce dernier prône une {{citation|[[révolution permanente]]}}, soit l'exportation à court terme du modèle soviétique par le biais d'une révolution internationale, condition indispensable à ses yeux pour bâtir le {{citation|socialisme}}. Staline impose au contraire la politique du {{citation|[[socialisme dans un seul pays]]}}, qui vise à consolider en priorité le {{citation|socialisme}} dans la seule URSS afin de se donner les moyens de réaliser plus tard la révolution mondiale<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=84-85}}</ref>.
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[[Fichier:Communist-International-1920.jpg|vignette|gauche|Publication de l'[[Internationale communiste]].]]
[[Fichier:FFM Rosa-Luxemburg-Gedenktafel.jpg|vignette|Plaque commémorative à l'effigie de [[Rosa Luxemburg]].]]
Dans l'ensemble de l'Europe, les partis socialistes et sociaux-démocrates sont divisés entre partisans et adversaires de la [[révolution d'Octobre]]. En [[Finlande]], toutetout juste indépendante, une [[guerre civile finlandaise|guerre civile]] oppose, de janvier à mai [[1918]], les {{citation|[[Gardes rouges (Finlande)|Rouges]]}} - la faction radicale du [[Parti social-démocrate de Finlande]] - soutenus par les bolcheviks et les {{citation|[[Garde blanche (Finlande)|Blancs]]}} soutenus par l'[[Empire allemand]] : les révolutionnaires sont vaincus et, réfugiés en Russie, y constituent le [[Parti communiste de Finlande (1918)|Parti communiste de Finlande]]. En Allemagne, la chute de l'Empire est accompagnée par une vive opposition entre les [[Parti social-démocrate d'Allemagne|sociaux-démocrates]] réformistes et les révolutionnaires [[Ligue spartakiste|spartakistes]]. Le chef du gouvernement provisoire [[Friedrich Ebert]] s'en tient à une ligne légaliste, tandis que les dirigeants spartakistes [[Karl Liebknecht]] et [[Rosa Luxemburg]] s'opposent à la [[démocratie parlementaire]] et prônent une {{citation|[[République des Conseils]]}}, soit un régime dirigé par les [[conseil ouvrier|conseils ouvriers]]. Le [[{{date|1er janvier]] [[1919]]}}, les spartakistes fondent le [[Parti communiste d'Allemagne]] (KPD). Le lendemain, une manifestation ouvrière provoque des affrontements à [[Berlin]] : Liebknecht, emporté par le mouvement, appelle à renverser le gouvernement. Le [[Révolte spartakiste de Berlin|soulèvement berlinois de janvier 1919]] est vite écrasé par le gouvernement social-démocrate appuyé par les [[Corps franc]]s. La répression est sanglante ; Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg sont eux-mêmes assassinés par des militaires<ref>{{harvsp|Service|2007|p=86}}</ref>.
 
[[Fichier:Bela-kun-republica-soviética--outlawsdiary00tormuoft.jpg|vignette|Proclamation de la [[République des conseils de Hongrie]].]]
 
D'autres mouvements favorables à la révolution russe apparaissent en Europe, qu'ils prennent d'emblée ou non le nom de {{citation|communistes}}. Le [[Parti socialiste italien]], dont les {{citation|[[Maximalisme|maximalistes]]}} ont pris le contrôle, passe dans les rangs révolutionnaires. L'[[Royaume d'Italie (1861-1946)|Italie]] entre dans la période d'agitation politique et de grèves sauvages appelée le ''[[biennio rosso]]'' (« deux années rouges ») <ref name="LFI,p147/149">{{Ouvrage|prénom1=Pierre|nom1=Milza|auteur2=Serge Berstein|titre=Le fascisme italien|sous-titre=1919-1945|éditeur=Éditions du Seuil|collection=Points Histoire|lieu=Paris|année=1980|pages totales=434|passage=147-149|isbn=978-2-02-005513-0}}</ref>.
D'autres mouvements favorables à la révolution russe apparaissent en Europe, qu'ils prennent d'emblée ou non le nom de {{citation|communistes}}. Le [[Parti socialiste italien]], dont les {{citation|[[Maximalisme|maximalistes]]}} ont pris le contrôle, passe dans les rangs révolutionnaires. L'[[Royaume d'Italie (1861-1946)|Italie]] entre dans la période d'agitation politique et de grèves sauvages appelée le ''[[biennio rosso]]'' (« deux années rouges »)<ref name="LFI,p147/149">{{Ouvrage|prénom1=Pierre|nom1=Milza|auteur2=Serge Berstein|titre=Le fascisme italien|sous-titre=1919-1945|éditeur=Éditions du Seuil|collection=Points Histoire|lieu=Paris|année=1980|pages totales=434|passage=147-149|isbn=978-2-02-005513-0}}</ref>.
 
Le {{date|2 mars 1919}} se tient à [[Moscou]] le congrès fondateur de l'[[Internationale communiste]] (ou ''Komintern'', ou {{citation|Troisième Internationale}}), qui ambitionne de supplanter la {{citation|[[Internationale ouvrière|Deuxième internationale]]}} discréditée par les soutiens des socialistes à la guerre. D'emblée contrôlée par les Russes, elle a pour tâche de coordonner et d'impulser des mouvements révolutionnaires dont on pense alors qu'ils vont s'étendre et soutenir la Russie soviétique<ref>[[Serge Wolikow]], ''Aux origines de la galaxie communiste : l'Internationale'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=294-296}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Service|2007|p=108-110}}</ref>. Plusieurs partis communistes apparaissent alors en Europe, comme en [[Royaume de Bulgarie|Bulgarie]]<ref>{{harvsp|Droz|1977|p=294-297}}</ref> ou en [[Deuxième république de Pologne|Pologne]]<ref>{{harvsp|Droz|1977|p=327-328}}</ref>. Dès le {{date|22|mars|1919}}, le [[Parti socialiste italien]] rejoint l'Internationale communiste<ref>{{harvsp|Droz|1977|p=178}}</ref>.
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Le [[Parti des communistes de Hongrie]] est fondé en Russie par des prisonniers de guerre Hongrois convertis au communisme. Son chef [[Béla Kun]], une fois revenu dans son pays tout juste indépendant, profite du chaos politique qui y règne : le {{date|21 mars 1919}}, les communistes, alliés aux [[Parti social-démocrate de Hongrie|sociaux-démocrates]], prennent le pouvoir et proclament la [[République des conseils de Hongrie]]. Le régime se rend vite impopulaire par ses nationalisations autoritaires et ses campagnes de répression baptisées, comme en Russie, {{citation|[[Terreur rouge (Hongrie)|terreur rouge]]}}. Les communistes hongrois tentent en outre de récupérer les territoires perdus par le pays à la fin de la guerre : ils entrent en conflit avec la [[Royaume de Roumanie|Roumanie]], ce qui provoque leur chute au bout de trois mois. Béla Kun fuit à l'étranger et les communistes hongrois sont [[Terreur blanche (Hongrie)|brutalement réprimés]]<ref>{{harvsp|Service|2007|p=87-90}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Droz|1977|p=242}}</ref>. En Allemagne, une [[République des conseils de Bavière]] est proclamée le [[7 avril]], mais écrasée par les Corps francs dès les premiers jours de mai<ref>{{harvsp|Service|2007|p=90-92}}</ref>. En juin de la même année, le [[Parti communiste d'Autriche]] échoue dans sa tentative d'insurrection à [[Vienne (Autriche)|Vienne]]<ref>{{Ouvrage|langue=en|prénom1=Donald F.|nom1=Busky|titre=Communism in history and theory|éditeur=Praeger|lieu=Westport, Conn|année=2002|pages totales=173|passage=66|isbn=978-0-313-01256-3|oclc=52923931}}</ref>.
 
La forte présence de [[Juifs]], non seulement en Russie au sein de la direction des [[bolcheviks]] et de l'appareil de la [[Tchéka]], mais aussi dans les gouvernements hongrois et bavarois, contribue à alimenter la thèse [[antisémitisme|antisémite]] du [[judéo-bolchevisme]] : l'idée voulant que le communisme soit issu d'un [[complot juif]] est largement diffusée, en Europe comme sur le continent américain, durant tout l'[[entre-deux-guerres]]<ref>André Gerrits, ''{{Lang|en|texte=The myth of Jewish communism: a historical interpretation}}'', Peter Lang Pub Inc, 2009, pagep. 20</ref>{{,}}<ref>William Brustein, ''{{Lang|en|texte=Roots of hate: anti-semitism in Europe before the Holocaust}}'', Cambridge {{Lang|en|texte=University Press}}, 2003, pagesp. 293-294</ref>.
 
[[Fichier:Flag of the People's Republic of Mongolia (1924-1940).svg|vignette|gauche|Premier drapeau de la [[République populaire mongole]].]]
[[Fichier:Flag of the Mongolian People's Republic (1924–1940).svg|vignette|gauche|Premier drapeau de la [[République populaire mongole]].]]
 
En [[Royaume d'Italie (1861-1946)|Italie]], le [[Parti socialiste italien|PSI]] arrive en tête aux élections, mais refuse de participer au gouvernement : l'un de ses principaux animateurs, [[Amadeo Bordiga]], prône l'abstention et la préparation de l'insurrection. Au début des [[années 1920]], Lénine critique vivement les stratégies {{citation|[[Gauchisme|gauchistes]]}} au sein du mouvement communiste, qu'il juge stériles et inaptes à accéder au pouvoir : il expose ses vues sur la {{citation|[[Gauche communiste]]}} — représentée notamment par Bordiga en Italie, ou par [[Anton Pannekoek]] aux Pays-Bas — dans le livre ''[[La Maladie infantile du communisme (le « gauchisme »)]]'', publié en mai 1920<ref name="LFI,p147/149"/>.
 
Au-delà des désaccords stratégiques, les communistes s'interrogent sur la meilleure manière pour exporter la révolution. Quand la [[Deuxième république de Pologne|Pologne]] tente d'annexer l'ouest du territoire ukrainien, Lénine y voit l'occasion de passer à la {{citation|guerre révolutionnaire}} préconisée dès 1918 par les {{citation|communistes de gauche}}. L'[[Armée rouge]] parvient en effet à repousser les troupes polonaises : le second congrès de l'[[Internationale communiste]] a lieu le {{date|9 juillet 1920}} durant l'offensive soviétique en direction de [[Varsovie]], alors que les conditions d'une révolution mondiale semblent être réunies<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=169-170}}</ref>. Ce congrès définit également [[Conditions d'admission à la IIIe Internationale|21 conditions d'admission]] pour les partis souhaitant rejoindre le Komintern, stipulant notamment que les PC doivent être organisés et hiérarchisés selon les principes du [[centralisme démocratique]] et viser la révolution en combinant les actions légales et illégales, avec l'aide de structures clandestines cohabitant avec le parti officiel<ref>Serge Wolikow, ''Aux origines de la galaxie communiste : l'Internationale'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=297-298}}</ref>. Plusieurs Asiatiques participent à ce second congrès :sous Léninel'impulsion considèrede en effet que la révolution soviétique doit trouver des alliés hors d'Europe,Lénine afin de miner les arrières des puissances [[Colonialisme|coloniales]] qui lui sont hostiles<ref>{{harvsp|Carrère d'Encausse|1998|p=473-475}}</ref>. Le mois suivant se tient à [[Bakou]] le {{citation|Congrès des peuples de l'Orient}}, qui établit des liens avec des mouvements nationalistes asiatiques<ref>Serge Wolikow, ''Internationalistes et internationalismes communistes'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=515}}</ref>.
 
Les espoirs d'extension de la révolution en Europe sont cependant éphémères : dès le mois d'août 1920, la [[Bataille de Varsovie (1920)|contre-attaque des troupes polonaises]] arrête l'Armée rouge devant Varsovie. La Russie soviétique doit ensuite reconnaître sa défaite<ref>{{harvsp|Service|2000|p=406-412}}</ref>. Quelques mois plus tôt, en Allemagne, le [[soulèvement de la Ruhr]], lancé en réaction à une [[putsch de Kapp|tentative de putsch nationaliste]], est mis en échec par l'armée. En mars [[1921]], une [[Action de mars|nouvelle tentative d'insurrection allemande]] débouche sur un échec complet<ref name="Droz220222">{{harvsp|Droz|1977|p=220-222}}</ref>.
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==== Échecs et divisions du mouvement communiste ====
 
[[Fichier:Location of the First Congress of the Chinese Communist Party Xintiandi Shanghai July 1921.jpg|vignette|Musée du premier congrès du [[Parti communiste chinois]], à [[Shanghai]].]]
Au cours des années [[années 1920|1920]] et [[années 1930|1930]], des partis communistes continuent d'apparaître sur tous les continents, en Europe, en Asie, sur le continent américain et jusqu'en Océanie. En [[France]], lors du [[Congrès de Tours (SFIO)|congrès de Tours]] de [[1920]], la [[Section française de l'Internationale ouvrière|SFIO]] connaît une scission entre les partisans de la Russie soviétique et les modérés conduits par [[Léon Blum]]. La ''Section française de l'Internationale communiste'', regroupant les premiers qui sont alors majoritaires, prend ensuite le nom de [[Parti communiste français]]<ref>{{harvsp|Courtois|Lazar|1993|p=57-67}}</ref>. Dès l'année suivante, cependant, les socialistes reprennent l'ascendant sur les communistes, dont les effectifs s'effondrent alors que la vague révolutionnaire s'essouffle en Europe<ref>{{harvsp|Winock|1992|p=84}}</ref>. En [[Royaume d'Italie (1861-1946)|Italie]], les partisans d'[[Antonio Gramsci]] et [[Amadeo Bordiga]] quittent en [[1921]] le [[Parti socialiste italien]] et fondent le [[Parti communiste d'Italie]]. La gauche italienne se divise au pire moment, alors que le [[fascisme]] est en pleine ascension<ref>{{harvsp|Droz|1977|p=263-266, 303-304, 310-314}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=78}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=242, 268}}</ref>. Les dimensions des PC sont très inégales selon les pays : certains ont de nombreux militants, d'autres ne sont que des groupuscules<ref>{{harvsp|Ducoulombier|2011|p=53}}</ref>. La direction de l'[[Internationale communiste]] est assurée jusqu'en [[1934]] par des Soviétiques ([[Grigori Zinoviev]], [[Nikolaï Boukharine]], [[Viatcheslav Molotov]] puis [[Dmitri Manouïlski]]) mais les cadres communistes exilés de leur propre pays occupent une place importante dans sa hiérarchie, à l'image de l'Italien [[Palmiro Togliatti]], du Finlandais [[Otto Wille Kuusinen]], des Hongrois [[Mátyás Rákosi]] et [[Béla Kun]] ou du Bulgare [[Georgi Mikhailov Dimitrov|Georgi Dimitrov]]<ref>Serge Wolikow, ''Internationalistes et internationalismes communistes'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=526-528}}</ref>.
 
Aux [[Indes orientales néerlandaises]], le [[Parti communiste indonésien]], [[indépendantisme|indépendantiste]], attire de nombreux militants. C'est cependant en Chine que le communisme connaît son développement le plus lourd de conséquences pour l'avenir de l'[[Asie]]. Alors que la [[République de Chine (1912-1949)|Républiquerépublique de Chine]] est en plein chaos depuis [[1916]], des groupes marxistes apparaissent dans la mouvance du [[nationalisme chinois]]<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=9-15}}</ref>. La Russie soviétique et le [[Kuomintang]], parti de [[Sun Yat-sen]], nouent une alliance : le Komintern s'emploie dès lors à favoriser la naissance en Chine d'un parti communiste qui épaulerait les nationalistes. Différents groupes, issus notamment du [[mouvement du 4-Mai]] et encadrés par le Komintern, s'unissent pour former en juillet [[1921]] le [[Parti communiste chinois]] (PCC), qui s'allie au Kuomintang au sein d'un [[Premier front uni chinois|Front uni]]<ref name="Brown p98-99">{{harvsp|Brown|2009|p=98-99}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=305}}</ref>. En [[Asie du Sud-Est]], un agent du Komintern, le Vietnamien [[Hô Chi Minh|Nguyên Ai Quôc]] (futur ''Hô Chi Minh''), est chargé d'encadrer les organisations locales. Il fonde en [[1930]] le [[Parti communiste indochinois]], qui vise l'indépendance des pays de l'[[Indochine française]]<ref>[[Pierre Brocheux]], ''Libération nationale et communisme en Asie du Sud-Est'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=405-406}}</ref>.
 
À l'échelle internationale, la mouvance communiste est parcourue de divisions. La tendance dite de la [[Gauche communiste]] s'oppose à l'autoritarisme des conceptions [[léninisme|léninistes]] : des militants et intellectuels se réclament en effet du [[luxemburgisme]] {{Incise|c'est-à-dire des idées de [[Rosa Luxemburg]]}} et prônent la prise en main du prolétariat par lui-même, via notamment des [[conseil ouvrier|conseils ouvriers]], plutôt que par des [[Parti politique|partis politiques]]. Les principales figures du [[communisme de conseils]], comme les Néerlandais [[Anton Pannekoek]] et [[Herman Gorter]], sont rapidement exclues du Komintern et le courant conseilliste est marginalisé dès 1921<ref name="Courtois p252">{{harvsp|Courtois|2007|p=252}}</ref>{{,}}<ref name="Winock 64-65">{{harvsp|Winock|1992|p=64-65}}</ref>. [[Paul Levi]] tente de préserver l'héritage politique de Rosa Luxemburg au sein du [[Parti communiste d'Allemagne|KPD]], mais ily est finalement exclu pour avoir critiqué le rôle des envoyés du Komintern lors des [[Action de mars|évènements de mars 1921]]<ref name="Droz220222"/>.
 
Au cours des [[années 1920]], l'Internationale communiste envoie des émissaires chargés de surveiller la conformité idéologique des partis et d'homogénéiser leur fonctionnement sur le modèle bolchevik. En [[1924]] commence la phase dite de {{citation|bolchevisation}} des partis communistes, afin de les réorganiser après l'échec des révolutions européennes<ref>Serge Wolikow, ''Aux origines de la galaxie communiste : l'Internationale'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=298-304}}</ref>. Des [[Organisations communistes de masse|organisations de masse]] (l'[[Internationale syndicale rouge]], l'[[Internationale paysanne rouge]], la [[Ligue contre l'impérialisme et l'oppression coloniale]]...) animées par des cadres spécialistes de l'[[agitprop]] comme l'allemand [[Willi Münzenberg]], sont fondées pour concurrencer celles de la social-démocratie. Le syndicalisme communiste progresse surtout en France, grâce au contrôle de la [[Confédération générale du travail unitaire|CGTU]]<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=416-417}}</ref>{{,}}<ref>Michel Dreyfus, ''Syndicalistes communistes'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=691-702}}</ref>.
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{{Article connexe|Procès de Moscou|Grandes Purges|Déportation des peuples en URSS}}
 
Au milieu des années [[1930]], Staline affermit encore son contrôle sur le Parti ; le culte de la personnalité dont il s'entoure est de plus en plus marqué. Lors du {{XVIIe}} congrès du PC, en [[1934]], il est qualifié de {{citation|chef des classes ouvrières du monde entier}}, d'{{citation|incomparable génie de notre époque}} et de {{citation|plus grand homme de tous les temps et de tous les peuples}}<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=257-258}}</ref>. Le [[1er décembre|{{1er}} décembre]] de la même année, l'[[Assassinat de Sergueï Kirov|assassinat]] de [[Sergueï Kirov]], chef du Parti à Leningrad, donne à Staline l'occasion de lancer une vaste campagne de terreur, pour purger l'appareil du PC et la société soviétique en vue d'éliminer définitivement toute forme d'opposition réelle ou potentielle. Staline vise à débarrasser la société soviétique de ses éléments présumés hostiles, mais aussi à finir d'épurer le Parti et le régime au profit de ses fidèles. Zinoviev et Kamenev sont arrêtés pour {{citation|complicité idéologique}} avec les assassins de Kirov<ref name="Werth p260-266">{{harvsp|Werth|2004|p=260-266}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Service|2007|p=148-149}}</ref>. Le [[NKVD]], police politique qui a pris la succession du [[Guépéou]], lance ensuite une vaste campagne d'arrestations de cadres du Parti, censés être des {{citation|trotskistes}} ou des {{citation|zinoviévistes}}. Des dizaines de milliers de personnes {{citation|peu sûres}} ou présumées {{citation|antisoviétiques}} sont déportées, notamment sur des critères ethniques<ref>Nicolas Werth, ''Un État contre son peuple : violences, répression, terreurs en Union soviétique'', in {{harvsp|Le Livre noir du communisme|1997|p=203-205}}</ref>. En [[1935]]-[[1936]], Staline achève de renforcer sa position en nommant à des postes clés des fidèles comme [[Anastase Mikoyan]], [[Andreï Jdanov]], [[Nikita Khrouchtchev]] ou [[Nikolaï Iejov]]. Il s'emploie à réécrire à sa gloire l'histoire du bolchevisme. La propagande s'exerce tant dans le monde du travail, avec la campagne en faveur du {{citation|[[stakhanovisme]]}}<ref name="Werth p260-266"/>, que dans les arts, avec le {{citation|[[Réalisme socialiste soviétique|réalisme socialiste]]}}<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=173-174}}</ref>, ou dans les sciences, avec le soutien au pseudo-biologiste [[Trofim Denissovitch Lyssenko|Trofim Lyssenko]] qui fait régner la terreur dans les milieux scientifiques<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=221}}</ref>.
 
La période [[1936]]-[[1938]] marque l'apogée de la terreur stalinienne. En août 1936 s'ouvre une parodie de procès - le premier des {{citation|[[procès de Moscou]]}} - qui permet de liquider seize vétérans bolcheviks, parmi lesquels [[Lev Kamenev]], [[Grigori Zinoviev]] et [[Mikhaïl Tomski]]. Mis en accusation par le procureur [[Andreï Vychinski]], les accusés sont contraints à des {{citation|aveux}} humiliants<ref>{{harvsp|Service|2007|p=149}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Souvarine|1985|p=514-516}}</ref>, reconnaissant avoir comploté contre Staline en liaison avec Trotski et participé à l'assassinat de Kirov ; ils sont tous condamnés à mort. En septembre [[1936]], [[Nikolaï Iejov]] est nommé à la tête du [[NKVD]] avec pour mission d'achever de démasquer le {{citation|bloc trotskiste-zinoviéviste}}. En janvier, un second procès de Moscou aboutit à la condamnation de 17 accusés, parmi lesquels [[Gueorgui Piatakov]] et [[Karl Radek]], pour participation à un {{citation|centre trotskiste antisoviétique}} en liaison avec l'[[Troisième Reich|Allemagne nazie]] et l'[[Empireempire du Japon]]. Entre février [[1937]] et mars [[1938]], la purge du Parti atteint son apogée : des dizaines, voire des centaines de milliers de responsables sont destitués ou arrêtés. Ils sont remplacés par une nouvelle génération de cadres (celle de [[Léonid Brejnev]], [[Alexis Kossyguine]] ou [[Andreï Gromyko]]). L'état-major de l'[[Armée rouge]] est décimé<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=266-269}}</ref>.
 
Le NKVD, sous la direction de Iejov, se livre à une campagne sans précédent de terreur, d'arrestations et de déportations visant les {{citation|ennemis}} et les éléments {{citation|socialement dangereux}} au sein de la population. Les militaires, les scientifiques, l'intelligentsia, le clergé, les {{citation|koulaks}} ou supposés tels, ainsi que diverses minorités ethniques, sont ciblés à une grande échelle. Les {{citation|[[Grandes Purges]]}} de Staline, également appelées {{citation|Grande Terreur}}, se soldent par des centaines de milliers d'exécutions<ref name="Werth p268-276">{{harvsp|Werth|2004|p=268-276}}</ref>, passées ensuite sous silence durant des décennies<ref>[[Nicolas Werth]], ''Un État contre son peuple : violences, répression, terreurs en Union soviétique'', in {{harvsp|Le Livre noir du communisme|1997|p=206-225}}</ref>.
 
Lors du troisième procès de Moscou, 21 personnalités, parmi lesquelles [[Nikolaï Boukharine]] et [[Alexeï Rykov]] (mais également [[Guenrikh Iagoda]] qui dirigeait le NKVD au moment du premier procès), sont condamnées pour un ensemble de complots. Un grand nombre de communistes étrangers présents en URSS - Allemands, Finlandais, Hongrois, Polonais... - et de cadres du Komintern, sont arrêtés et exécutés, à l'image de [[Béla Kun]]<ref name="Werth p268-276"/>{{,}}<ref>{{harvsp|Service|2004|p=347-356}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=80-88, 168-169}}</ref>. La situation devenant chaotique, Staline met fin aux purges de l'appareil à la fin de [[1938]]. Iejov, blâmé pour les {{citation|excès}} de la terreur, est remplacé par [[Lavrenti Beria]] à la tête du NKVD, avant d'être lui-même arrêté, jugé et exécuté<ref name="Werth p268-276"/>{{,}}<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=179-180}}</ref>.

L'historien [[Robert Conquest]], en cumulant les exécutions et les personnes mortes en prison ou en déportation, évalue le bilan humain de la période stalinienne des [[années 1930]] à environ 20 millions de victimes<ref>[[Robert Conquest]], ''The Great Terror : a reassessment'', Pimlico, 2008, pagesp. 484-489</ref>.
 
=== Le communisme international, de la stalinisation à l'approche de la guerre ===
==== De la ligne {{citation|classe contre classe}} aux fronts populaires ====
{{Article connexe|Front populaire (France)|Front populaire (Espagne)|Histoire du Parti communiste français}}
Le contrôle sur l'[[Internationale communiste]] est également renforcé, et les partis communistes nationaux soumis à une stricte surveillance de la part des envoyés de Moscou<ref>{{harvsp|Service|2004|p=281-282}}</ref> : l'appareil du Komintern est repris en main par des fidèles de Staline comme [[Dmitri Manouïlski]] et [[Viatcheslav Molotov]]<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=298}}</ref>. La {{citation|bolchevisation}} des PC nationaux, entamée dès [[1924]], s'accompagne de l'épuration de l'appareil dirigeant de nombreux PC<ref>Claude Pennetier, Bernard Pudal, ''Du parti bolchevik au parti stalinien'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=505-506}}</ref>. Les personnalités jugées trop indépendantes ou ne suivant pas d'assez près la ligne dominante sont évincées : c'est le cas de [[Boris Souvarine]], exclu du Komintern pour avoir pris la défense de [[Léon Trotski|Trotski]]<ref>{{harvsp|Furet|1995|p=139-143}}</ref>, ainsi que d'[[Amadeo Bordiga]], exclu du parti italien en exil pour {{citation|gauchisme}}<ref name="Courtois p252" />. Le [[Parti communiste français]], alors isolé face à la [[Section française de l'Internationale ouvrière|SFIO]]<ref>{{harvsp|Winock|1992|p=86}}</ref>, est réorganisé au profit d'un nouveau secrétariat, composé de [[Maurice Thorez]], [[Jacques Duclos]] et [[Benoît Frachon]]<ref>{{harvsp|Courtois|Lazar|1993|p=95-106}}</ref>. La ligne du Komintern, donc de l'URSS et plus précisément de Staline, prime désormais largement sur les intérêts des partis nationaux<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=83-86}}</ref>.
 
[[Fichier:Race Hatred on Trial cover.jpg|vignette|gauche|Couverture d'une brochure [[antiracisme|antiraciste]] éditée en [[1931]] par le [[Parti communiste USA]].]]
 
Des communistes opposés à Staline créent de nouvelles organisations dissidentes, qui tentent de rivaliser avec les partis du Komintern. En [[1929]], des exclus du [[Parti communiste d'Allemagne]] forment le [[Parti communiste d'Allemagne - opposition]] ; en Espagne, différents groupes opposés au [[Parti communiste d'Espagne]] fusionnent en [[1935]] au sein du [[Parti ouvrier d'unification marxiste]] (POUM). Mais malgré les tentatives de constituer une internationale rivale du Komintern, les dissidences demeurent très minoritaires et le communisme reste dominé par le parti soviétique<ref>{{harvsp|Furet|1995|p=140}}</ref>.
 
Dans les pays occidentaux, la dimension électorale des PC est très inégale au tournant de la [[années 1930|décennie 1930]]. Le [[Parti communiste d'Allemagne]] est alors le plus puissant d'Europe de l'Ouest<ref name="Le Siècle des communismes p306-310">Serge Wolikow, ''Aux origines de la galaxie communiste : l'Internationale'', {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=306-310}}</ref> ; le [[Parti communiste français]]<ref>{{harvsp|Courtois|Lazar|1993|p=97-109}}</ref> et le [[Parti communiste tchécoslovaque]] disposent d'une réelle assise électorale. D'autres, comme le [[Parti communiste de Grande-Bretagne]], le [[Parti communiste USA]] ou le [[Parti communiste du Canada]], demeurent très minoritaires<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=92-98}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Service|2007|p=119-129, 194-201}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Droz|1977|p=540}}</ref>. Les PC fonctionnent souvent comme des {{citation|contre-sociétés}}, à la profonde ferveur militante<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=123-128}}</ref>.
 
[[Fichier:Dimitrov Statue, Memento Park 2 (Valentin Sztracsev, 1983).JPG|vignette|Statue de [[Georgi Mikhailov Dimitrov|Georgi Dimitrov]], secrétaire général du [[Internationale communiste|Komintern]] à partir de 1934 (sculpture exposée à [[Memento Park]], [[Budapest]]).]]
 
À compter de [[1929]], l'Internationale communiste, se conformant aux instructions de l'URSS, prévoit l'effondrement rapide du capitalisme, ce que la [[Grande Dépression]] paraît dans un premier temps confirmer. Les PC sont tenus d'adopter une ligne {{citation|classe contre classe}}, qui consiste à s'opposer radicalement aux partis de gauche modérés. Les socialistes sont désormais accusés de {{citation|social-fascisme}} ou qualifiés de {{citation|[[social-traître|sociaux-traîtres]]}}, tandis que les communistes considèrent comme secondaires les périls posés par le [[fascisme]] et, en Allemagne, par le [[nazisme]]<ref name="Le Siècle des communismes p306-310"/>{{,}}<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=185-186}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Furet|1995|p=235-237}}</ref>. Le résultat de cet aveuglement est catastrophique : après l'arrivée au pouvoir d'[[Adolf Hitler]] en Allemagne, le [[Parti communiste d'Allemagne|KPD]] est interdit, et des milliers de communistes déportés ou tués, dans le pays qui aurait théoriquement du être le fer de lance de la révolution européenne<ref name="Le Siècle des communismes p306-310"/>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=85-88}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Courtois|Lazar|1993|p=110}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=93-94}}</ref>.
 
En [[1934]], des cadres du Komintern comme [[Georgi Mikhailov Dimitrov|Dimitrov]] et [[Palmiro Togliatti|Togliatti]] réussissent à convaincre Staline d'adopter une nouvelle ligne. L'URSS envisage désormais une alliance avec la France et le Royaume-Uni contre l'[[Troisième Reich|Allemagne nazie]], et le Komintern préconise la formation de {{citation|fronts populaires}} contre le danger {{citation|fasciste}}. Dimitrov, principal avocat de cette stratégie, devient le chef de l'IC<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=191-192}}</ref>. L'Allemagne nazie conclut quant à elle avec l'[[Empireempire du Japon]] un traité d'alliance [[anticommunisme|anticommuniste]], le [[Pactepacte anti-Komintern]] — auquel adhèrent ensuite l'[[Royaume d'Italie (1861-1946)|Italie]], la [[Royaume de Hongrie (1920-1946)|Hongrie]], puis l'[[Espagne franquiste]]. L'[[antifascisme]] - le {{citation|fascisme}}, pris au sens large, étant présenté comme une forme tardive du [[capitalisme]] - devient un élément clé de la [[propagande communiste]] : on le retrouve plus tard, après [[1945]], dans le discours officiel des pays du [[bloc de l'Est]]<ref>{{harvsp|Furet|1995|p=249-281}}</ref>.
 
Les partis communistes {{Incise|désormais alliés aux sociaux-démocrates, aux libéraux et même à certains milieux religieux}} gagnent, grâce à la cause antifasciste, de nombreux sympathisants<ref name="Brown p88">{{harvsp|Brown|2009|p=88}}</ref>. En outre, la méconnaissance des réalités soviétiques permet alors à l'[[économie planifiée]] soviétique d'apparaître à beaucoup comme une alternative souhaitable aux incertitudes de l'[[économie de marché]] dont le monde a souffert à la suite du [[krach de 1929]]<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=118-119}}</ref>. Le communisme séduit tout particulièrement les milieux artistiques et intellectuels occidentaux<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=164}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=165}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Service|2007|p=203-206}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Furet|1995|p=185-188}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=122-123}}</ref>.
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Le [[Parti communiste d'Espagne]] (PCE) forme lui aussi un [[Front populaire (Espagne)|Front populaire]] avec le [[Parti socialiste ouvrier espagnol]] (PSOE) et divers partis de gauche comme le [[Parti ouvrier d'unification marxiste]] (POUM, PC anti-stalinien)<ref>{{harvsp|Beevor|2006|p=84-86}}</ref>. En février [[1936]], le Front populaire espagnol remporte les [[Élections générales espagnoles de 1936|élections générales]] mais doit, quelques mois plus tard, affronter un [[Soulèvement nationaliste des 17 et 18 juillet 1936 en Espagne|soulèvement militaire]] qui marque le début de la [[guerre d'Espagne]]<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=193-194}}</ref>.
 
En [[Amérique latine]], la nouvelle politique du Komintern porte aussi ses fruits : au [[Chili]], le [[Front populaire (Chili)|Front populaire]] formé par le [[Parti communiste du Chili]], le [[Parti socialiste du Chili]] et le [[Parti radical (Chili)|Parti radical]], accède au pouvoir en [[1938]]. L'entente entre socialistes et communistes chiliens ne résiste cependant pas au déclenchement de la [[Seconde Guerre mondiale]] et à la polémique sur la politique suivie par l'URSS<ref>{{harvsp|Droz|1978|p=219-220}}</ref>. Toujours en [[Amérique latine]], le parti communiste de [[Cuba]] s'allie avec l'homme fort du pays, [[Fulgencio Batista]]<ref>{{harvsp|Thomas|2001|p=438-445, 458-459}}</ref>. La stratégie des fronts populaires est également appliquée en [[Asie]] : le [[Parti communiste d'Inde]], qui militait jusque-là pour une révolution immédiate contre les Britanniques, modère son discours et s'allie avec les nationalistes du [[Parti du Congrès|Congrès]] dans la lutte pour l'indépendance. Cette nouvelle ligne permet aux communistes indiens de gagner en influence, notamment dans les [[Syndicat professionnel|syndicats]]<ref name="DictionnaireInde">Catherine Clémentin-Ojha, Christophe Jaffrelot, Denis Matringe, Jacques Pouchepadass, ''Dictionnaire de l'Inde'', Larousse, 2009, pagesp. 180-182</ref>.
 
==== Conflits armés de l'entre-deux-guerres ====
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[[Fichier:Voa chinese Long March first starting point 11may10.jpg|vignette|gauche|Monument à la [[Longue Marche]] devant le [[mausolée de Mao Zedong]].]]
En [[République de Chine (1912-1949)|Chine]], la situation est particulière, le pays étant depuis [[1927]] le théâtre d'une [[Guerre civile chinoise|guerre civile entre communistes et nationalistes]]. Le {{date|7 novembre 1931}}, le [[Parti communiste chinois]], fédérant l'ensemble discontinu de territoires qu'il contrôle, proclame la [[République soviétique chinoise]], avec [[Mao Zedong]] comme président. Dès [[1930]], le chef nationaliste [[Tchang Kaï-chek]] lance de nouvelles campagnes contre les {{citation|bandits communistes}} et tente, d'abord sans succès, d'anéantir leurs bases<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=17}}</ref>.
Le [[Internationale communiste|Komintern]], trouvant Mao trop indépendant, entreprend de favoriser à ses dépens le groupe des {{citation|[[28 bolcheviks]]}} formés à Moscou<ref>{{harvsp|Fairbank|1989|p=323}}</ref>, mais à la fin [[1934]], les troupes nationalistes parviennent à prendre la principale base communiste, dans le [[Jiangxi]] : Mao Zedong et plusieurs dizaines de milliers de communistes doivent entamer la [[Longue Marche]], qui les mène un an plus tard dans la base du [[Shaanxi]]. Mao établit alors son nouveau quartier général à [[Yan'an]] et bénéficie d'un leadership renforcé sur le Parti communiste, grâce notamment au prestige personnel retiré de la Longue Marche<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=249-256}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=100}}</ref>. Parallèlement, l'[[Empire du Japon]] poursuit ses [[Expansionnisme du Japon Shōwa|visées expansionnistes]] en Chine. En [[1936]], le camp nationaliste et le Komintern font respectivement pression sur Tchang Kaï-chek et Mao Zedong pour qu'ils unissent leurs forces contre les Japonais : l'[[accord de Xi'an]] aboutit à la formation d'un [[Deuxième front uni chinois|deuxième front uni]] entre le [[Kuomintang]] et le PC chinois, ce qui constitue l'application en Chine de la stratégie des fronts populaires<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=255-256}}</ref>.
 
Le [[Internationale communiste|Komintern]], trouvant Mao trop indépendant, entreprend de favoriser à ses dépens le groupe des {{citation|[[28 bolcheviks]]}} formés à Moscou<ref>{{harvsp|Fairbank|1989|p=323}}</ref>, mais à la fin [[1934]], les troupes nationalistes parviennent à prendre la principale base communiste, dans le [[Jiangxi]] : Mao Zedong et plusieurs dizaines de milliers de communistes doivent entamer la [[Longue Marche]], qui les mène un an plus tard dans la base du [[Shaanxi]]. Mao établit alors son nouveau quartier général à [[Yan'an]] et bénéficie d'un leadership renforcé sur le Parti communiste, grâce notamment au prestige personnel retiré de la Longue Marche<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=249-256}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=100}}</ref>. Parallèlement, l'[[empire du Japon]] poursuit ses [[Expansionnisme du Japon Shōwa|visées expansionnistes]] en Chine. En [[1936]], le camp nationaliste et le Komintern font respectivement pression sur Tchang Kaï-chek et Mao Zedong pour qu'ils unissent leurs forces contre les Japonais : l'[[accord de Xi'an]] aboutit à la formation d'un [[Deuxième front uni chinois|deuxième front uni]] entre le [[Kuomintang]] et le PC chinois, ce qui constitue l'application en Chine de la stratégie des fronts populaires<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=255-256}}</ref>.
Bénéficiant de cette trêve, Mao met au point une version {{citation|sinisée}} du [[marxisme]], qu'il mêle à la philosophie chinoise et adapte aux réalités locales. Il en résulte une doctrine connue en Occident sous le nom de [[maoïsme]] et en Chine sous celui de {{citation|pensée Mao Zedong}}<ref name="Fairbank p347-356">{{harvsp|Fairbank|1989|p=347-356}}</ref> : pour conquérir le pouvoir, Mao mise sur la mobilisation permanente de la population et les tactiques de [[guérilla]]<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=257-258}}</ref>{{,}}<ref name="Fairbank p347-356"/>. En [[1937]], l'[[Empire du Japon]] envahit la [[République de Chine (1912-1949)|République de Chine]], déclenchant la [[Guerre sino-japonaise (1937-1945)|seconde guerre sino-japonaise]]. Les troupes communistes participent aux combats contre les Japonais aux côtés des nationalistes, mais privilégient la consolidation de leurs propres forces afin de pouvoir vaincre plus tard leurs alliés du moment<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=146-147}}</ref>. La résistance anti-japonaise permet aux communistes d'affermir leur influence dans les campagnes où vit la majorité de la population chinoise<ref>{{harvsp|Fairbank|1989|p=349-350}}</ref>. Commencée avant le déclenchement de la [[Seconde Guerre mondiale]], la guerre sino-japonaise devient ensuite un théâtre d'opérations de ce nouveau conflit. Entre-temps, Mao consolide son autorité sur le PCC, aux dépens notamment de [[Wang Ming]] que le Komintern avait envoyé à Yan'an pour superviser le parti chinois. Le PCC est soumis à partir de [[1942]] à une purge interne, baptisée {{citation|[[Campagne de rectification de Yan’an|campagne de rectification]]}}, qui permet à Mao d'achever d'en prendre le contrôle. En [[1943]], Mao devient Président du Parti communiste chinois ; il s'affirme ensuite comme le chef absolu du Parti, dont sa pensée devient la doctrine officielle<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=378-380}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=256-258}}</ref>.
 
Bénéficiant de cette trêve, Mao met au point une version {{citation|sinisée}} du [[marxisme]], qu'il mêle à la philosophie chinoise et adapte aux réalités locales. Il en résulte une doctrine connue en Occident sous le nom de [[maoïsme]] et en Chine sous celui de {{citation|pensée Mao Zedong}}<ref name="Fairbank p347-356">{{harvsp|Fairbank|1989|p=347-356}}</ref> : pour conquérir le pouvoir, Mao mise sur la mobilisation permanente de la population et les tactiques de [[guérilla]]<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=257-258}}</ref>{{,}}<ref name="Fairbank p347-356"/>. En [[1937]], l'[[empire du Japon]] envahit la [[République de Chine (1912-1949)|république de Chine]], déclenchant la [[Guerre sino-japonaise (1937-1945)|seconde guerre sino-japonaise]]. Les troupes communistes participent aux combats contre les Japonais aux côtés des nationalistes, mais privilégient la consolidation de leurs propres forces afin de pouvoir vaincre plus tard leurs alliés du moment<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=146-147}}</ref>. La résistance anti-japonaise permet aux communistes d'affermir leur influence dans les campagnes où vit la majorité de la population chinoise<ref>{{harvsp|Fairbank|1989|p=349-350}}</ref>. Commencée avant le déclenchement de la [[Seconde Guerre mondiale]], la guerre sino-japonaise devient ensuite un théâtre d'opérations de ce nouveau conflit. Entre-temps, Mao consolide son autorité sur le PCC, aux dépens notamment de [[Wang Ming]] que le Komintern avait envoyé à Yan'an pour superviser le parti chinois. Le PCC est soumis à partir de [[1942]] à une purge interne, baptisée {{citation|[[Campagne de rectification de Yan’an|campagne de rectification]]}}, qui permet à Mao d'achever d'en prendre le contrôle. En [[1943]], Mao devient Président du Parti communiste chinois ; il s'affirme ensuite comme le chef absolu du Parti, dont sa pensée devient la doctrine officielle<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=378-380}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=256-258}}</ref>.
 
===== En Espagne =====
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En Espagne, la [[Guerre d'Espagne|guerre civile]] voit l'alliance [[antifascisme|antifasciste]] préconisée par le Komintern affronter de manière directe les {{citation|fascistes}} et assimilés. Durant les premiers mois du conflit, plusieurs régions espagnoles connaissent une {{citation|[[Révolution sociale espagnole de 1936|révolution sociale]]}} : les milices {{citation|prolétariennes}}, anarchistes, socialistes, communistes et {{citation|[[Parti ouvrier d'unification marxiste|poumistes]]}} prennent le contrôle de nombreuses localités, notamment en [[Catalogne]] et en [[Aragon (communauté autonome)|Aragon]]. Des terres agricoles sont [[Expropriation|expropriées]] et l'économie {{citation|[[Socialisation des biens|socialisée]]}} de manière spontanée, plus ou moins contre le gré des directions des organisations ouvrières<ref>{{harvsp|Hermet|1989|p=119-126, 146}}</ref>.
 
Parallèlement à cette période d'euphorie révolutionnaire, les zones [[Seconde République espagnole|républicaines]] sont le théâtre d'une {{citation|[[Terreur rouge (Espagne)|terreur rouge]]}}, commise à la fois par les communistes et les anarchistes contre les catégories sociales suspectées de {{citation|fascisme}} (clergé, monarchistes, personnes {{citation|de droite}}...). Le gouvernement républicain est dépassé et la terreur rouge - qui se déroule en parallèle à la [[Terreur blanche (Espagne)|terreur nationaliste]] exercée par les troupes de [[Francisco Franco|Franco]] - choque l'opinion internationale, poussant la France et le Royaume-Uni à choisir la [[Non-intervention (guerre d'Espagne)|non-intervention]]<ref>{{harvsp|Beevor|2006|p=157-168}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Hermet|1989|p=118-136}}</ref>. Les [[Nationalistes espagnols|nationalistes]] sont de leur côté soutenus par [[Adolf Hitler|Hitler]] et [[Benito Mussolini|Mussolini]] ; l'[[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]], officiellement neutre, envoie en renfort des républicains des {{citation|volontaires}} (pilotes de guerre, mais aussi agents du [[NKVD]] et du [[Direction générale des renseignements de l'État-major des forces armées russes et soviétiques|GRU]]). Des groupes de combattants venus de divers pays, les [[Brigades internationales]], sont recrutés et encadrés par des agents du Komintern<ref>{{harvsp|Beevor|2006|p=290-291}}</ref>{{,}}<ref name="Le Siècle des communismes p655-673">Rémi Skoutelsky, ''Brigadistes internationaux et résistants'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=655-673}}</ref>. Le gouvernement espagnol, entretemps, rétablit l'ordre et revient sur le décret de collectivisation des terres confisquées, avec l'appui des communistes qui en profitent pour régler leurs comptes avec leurs adversaires d'extrême-gauche. La guerre d'Espagne connaît alors au sein du camp républicain une {{citation|guerre civile dans la guerre civile}}, lors des purges sanglantes lancées par les communistes contre les anarchistes et le [[Parti ouvrier d'unification marxiste|POUM]]. Le conflit s'achève en [[1939]] par la victoire des [[Espagne franquiste|franquistes]]. Les communistes espagnols sont réduits à la clandestinité ou à l'exil<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=89-90}}</ref>{{,}}<ref name="Le Siècle des communismes p655-673"/>{{,}}<ref>{{harvsp|Hermet|1989|p=142-151}}</ref>.
 
==== La dissidence trotskiste ====
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[[Fichier:Allied leaders at the 1943 Tehran Conference.jpg|vignette|gauche|[[Joseph Staline]], [[Franklin Delano Roosevelt]] et [[Winston Churchill]] à la [[conférence de Téhéran]].]]
 
Dès l'été 1940, les relations germano-soviétiques se dégradent. L'URSS joue l'apaisement en proposant d'adhérer au [[pacte tripartite]] ; en avril [[1941]], elle se prémunit contre une invasion sur son flanc asiatique en signant un [[Pacte nippo-soviétique|pacte de neutralité avec le Japon]]. Staline, s'il pense la guerre avec le Reich inévitable à terme, refuse cependant de croire à l'imminence de l'attaque allemande et se montre sourd aux avertissements. Le {{date|22 juin 1941}}, l'Allemagne déclenche l'[[opération Barbarossa]], invasion à grande échelle du territoire de l'URSS, prenant les Soviétiques de court<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=326-329}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=136-138}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Service|2004|p=399-419}}</ref>.
 
[[Fichier:Front est 1941.png|vignette|Carte de l'[[opération Barbarossa]], qui marque le début de la {{citation|[[Grande Guerre patriotique]]}}.]]
 
L'[[Armée rouge]] subit des pertes terribles durant les premiers mois du conflit. Mais l'URSS, moins isolée que ne l'escomptait Hitler, bénéficie rapidement du soutien matériel et financier du [[Royaume-Uni]], ainsi que de celui des [[États-Unis]] dans le cadre du programme [[Lend-Lease]]. La résistance des troupes soviétiques parvient à ralentir l'avance des Allemands et de leurs alliés européens de l'[[Axe Rome-Berlin-Tokyo|Axe]]. Les Soviétiques sont en outre aidés par les méthodes nazies : accueillis de manière relativement favorable en Ukraine ou en Biélorussie, voire parfois comme des libérateurs dans les pays baltes, les occupants se livrent bientôt à des [[Crimes de guerre nazis en Union soviétique|exactions atroces]] qui retournent les populations contre eux. Le conflit est d'une rare violence : l'Armée rouge perd environ neuf millions d'hommes au cours de la guerre, qui entraîne également la mort de quinze à dix-huit millions de civils soviétiques<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=334-339, 346-351}}</ref>{{,}}<ref name="Brown p136-142">{{harvsp|Brown|2009|p=136-142}}</ref>.
 
Pour galvaniser la population soviétique, Staline fait appel dans sa propagande non plus uniquement à l'idéologie communiste, mais aussi à la fibre [[Patriotisme|patriotique]] et [[nationalisme|nationaliste]] : il s'emploie à susciter un consensus social dans la {{citation|[[Grande Guerre patriotique]]}}, et multiplie les mesures de libéralisation. L'URSS contribue plus que tout autre pays à la défaite allemande en Europe<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=351-356}}</ref>{{,}}<ref name="Brown p136-142"/>. Désormais fêté pour sa résistance par la propagande [[Alliés de la Seconde Guerre mondiale|alliée]], Staline entreprend de rassurer Britanniques et Américains en dissociant l'URSS de la révolution mondiale : en mai [[1943]], l'[[Internationale communiste]] est dissoute, ce qui permet de supprimer en apparence la subordination des PC envers l'URSS. Dans les faits, les fonctions du Komintern sont transférées au Département international du [[Comité central du Parti communiste de l'Union soviétique|Comité central]] du [[Parti communiste de l'Union soviétique]], dirigé par [[Georgi Mikhailov Dimitrov|Dimitrov]], ancien chef de l'Internationale<ref>{{harvsp|Service|2007|p=219-223}}</ref>.
 
À partir de l'invasion de l'URSS en juin [[1941]], les communistes européens entrent en [[Résistance dans l'Europe occupée par les nazis|résistance]] dans tous les pays occupés. Ils prennent, dans certains pays, une part essentielle au combat anti-nazi : la libération nationale est présentée comme liée au sort de l'URSS, dans le cadre d'une lutte [[antifascisme|antifasciste]] mondiale. Dans les pays occupés par l'Allemagne, les communistes sont réprimés et déportés<ref>{{harvsp|Droz|1977|p=493-495}}</ref>. En France, où plusieurs cadres du PCF avaient envisagé, au début de l'occupation allemande, de faire légaliser le parti, les communistes entament la lutte contre les occupants après Barbarossa. La politique des Allemands et de [[Régime de Vichy|Vichy]] provoque à partir de [[1942]] un afflux de volontaires dans les rangs des [[Francs-tireurs et partisans]] (FTP). Les communistes, devenus un pilier de la [[résistance intérieure française]], se rapprochent de la [[France libre]] : à la mi-1943, le [[Front national (Résistance)|Front national]], l'organisation créée pour chapeauter les actions du PCF, participe au [[Conseil national de la Résistance]] et au commandement des [[Forces françaises de l'intérieur]]<ref name="CourtoisLazar170">{{harvsp|Courtois|Lazar|1993|p=170-202}}</ref>. La [[Résistance en Italie pendant la Seconde Guerre mondiale|résistance italienne]] se développe après la chute de [[Benito Mussolini|Mussolini]] et l'invasion allemande : les communistes tiennent un rôle de premier plan dans la lutte contre les Allemands et la [[République sociale italienne]]. [[Palmiro Togliatti]], revenu d'exil, prêche la modération et convainc les partisans que la révolution ne sera pas à l'ordre du jour après-guerre<ref name="Colarizi277">{{harvsp|Colarizi|2000|p=277-293}}</ref>.
 
[[Fichier:Marshal Tito during the Second World War in Yugoslavia, May 1944.jpg|vignette|Des membres de la direction des [[Partisans (Yougoslavie)|Partisans yougoslaves]] en 1944 ; [[Josip Broz Tito|Tito]] se trouve à droite.]]
 
Dans les [[Balkans]] occupés, les factions communistes et non communistes de la résistance en arrivent à s'affronter<ref name="Brown p143"/>. Le [[Parti communiste de Grèce]] forme le [[Front de libération nationale (Grèce)|Front de libération nationale]] (EAM) dont l'[[Armée populaire de libération nationale grecque]] (ELAS) est la branche armée : l'EAM-ELAS, de loin le mouvement le plus puissant de la [[Résistance en Grèce pendant la Seconde Guerre mondiale|résistance grecque]], s'attaque aussi bien aux résistants anticommunistes qu'aux occupants<ref name="Mazower">Mark Mazower, ''{{Lang|en|texte=Inside Hitler's Greece}}'', {{Lang|en|texte=Yale University Press}}, 2001, pages 97-98, 103-106, 329-330, 355-377</ref>. Josip Broz alias [[Josip Broz Tito|Tito]], chef du [[Ligue des communistes de Yougoslavie|Parti communiste de Yougoslavie]] clandestin, met sur pied les [[Partisans (Yougoslavie)|Partisans]] et entame le conflit contre les occupants, dans l'espoir de l'arrivée de l'Armée rouge. Les communistes yougoslaves se trouvent bientôt en conflit avec les [[Tchetniks]], résistants nationalistes serbes. La [[Front yougoslave de la Seconde Guerre mondiale|guerre de résistance en Yougoslavie]] se double bientôt d'une véritable guerre civile : divers chefs tchetniks s'allient aux Italiens, puis aux Allemands, en privilégiant le combat contre les communistes. Fin 1943, [[Winston Churchill|Churchill]] décide de soutenir les Partisans, considérés comme plus fiables dans la lutte contre les nazis, au détriment des Tchetniks. L'organe de direction des Partisans, le [[Conseil antifasciste de libération nationale de Yougoslavie]] (AVNOJ), se proclame alors gouvernement légitime du pays<ref name="Brown p143"/>{{,}}<ref>{{HitlersNewDisorder}}, pages 55-57 et 191-192.</ref>{{,}}<ref>Walter R. Roberts, ''{{Lang|en|texte=Tito, Mihailović, and the allies, 1941–1945}}'', {{Lang|en|texte=Duke University Press}}, 1987, pages 312–313</ref>. Dans l'[[Royaume d'Albanie (1939-1944)|Albanie annexée par l'Italie]], [[Enver Hoxha]] organise une force de résistance et crée, en novembre [[1941]], le [[Parti du travail d'Albanie|Parti communiste d'Albanie]]<ref>{{harvsp|Droz|1977|p=317-318}}</ref>.
Dans les [[Balkans]] occupés, les factions communistes et non communistes de la résistance en arrivent à s'affronter<ref name="Brown p143"/>. Le [[Parti communiste de Grèce]] forme le [[Front de libération nationale (Grèce)|Front de libération nationale]] (EAM) dont l'[[Armée populaire de libération nationale grecque]] (ELAS) est la branche armée : l'EAM-ELAS, de loin le mouvement le plus puissant de la [[Résistance en Grèce pendant la Seconde Guerre mondiale|résistance grecque]], s'attaque aussi bien aux résistants anticommunistes qu'aux occupants<ref name="Mazower">Mark Mazower, ''{{Lang|en|texte=Inside Hitler's Greece}}'', {{Lang|en|texte=Yale University Press}}, 2001, p. 97-98, 103-106, 329-330, 355-377</ref>. Josip Broz alias [[Josip Broz Tito|Tito]], chef du [[Ligue des communistes de Yougoslavie|Parti communiste de Yougoslavie]] clandestin, met sur pied les [[Partisans (Yougoslavie)|Partisans]] et entame le conflit contre les occupants, dans l'espoir de l'arrivée de l'Armée rouge. Les communistes yougoslaves se trouvent bientôt en conflit avec les [[Tchetniks]], résistants nationalistes serbes. La [[Front yougoslave de la Seconde Guerre mondiale|guerre de résistance en Yougoslavie]] se double bientôt d'une véritable guerre civile : divers chefs tchetniks s'allient aux Italiens, puis aux Allemands, en privilégiant le combat contre les communistes. Fin 1943, [[Winston Churchill|Churchill]] décide de soutenir les Partisans, considérés comme plus fiables dans la lutte contre les nazis, au détriment des Tchetniks. L'organe de direction des Partisans, le [[Conseil antifasciste de libération nationale de Yougoslavie]] (AVNOJ), se proclame alors gouvernement légitime du pays<ref name="Brown p143"/>{{,}}<ref>{{HitlersNewDisorder}}, p. 55-57 et 191-192.</ref>{{,}}<ref>Walter R. Roberts, ''{{Lang|en|texte=Tito, Mihailović, and the allies, 1941–1945}}'', {{Lang|en|texte=Duke University Press}}, 1987, p. 312–313</ref>. Dans l'[[Royaume d'Albanie (1939-1944)|Albanie annexée par l'Italie]], [[Enver Hoxha]] organise une force de résistance et crée, en novembre [[1941]], le [[Parti du travail d'Albanie|Parti communiste d'Albanie]]<ref>{{harvsp|Droz|1977|p=317-318}}</ref>.
 
En [[Asie]] également, que ce soit en Chine, en Malaisie ou aux Philippines, des communistes participent au combat contre les Japonais. Le poids décisif de l'URSS dans le conflit mondial, ainsi que la contribution des communistes aux mouvements de résistance nationaux, permettent au régime soviétique et aux PC de bénéficier, dans le monde entier, d'une vague de sympathie. Des partis dont l'image avait souffert du pacte germano-soviétique peuvent ainsi revenir sur le devant de la scène, et bénéficier d'un afflux de militants<ref name="Brown p143">{{harvsp|Brown|2009|p=143}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Service|2007|p=217-223}}</ref>.
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En octobre [[1944]], alors qu'une partie de l'Est de l'Europe est déjà occupée par l'URSS, Churchill propose à Staline un plan de partage des zones d'influence : la Roumanie serait à 90 % sous influence soviétique et 10 % sous influence britannique, la Grèce à 90 % sous influence britannique, la Bulgarie à 75 % réservée aux Soviétiques, la Hongrie et la Yougoslavie étant partagées à 50/50 %<ref name="Werth p358-360"/>. La [[conférence de Yalta]], en février [[1945]], règle à l'avantage des Soviétiques plusieurs points fondamentaux de la situation européenne, dont le tracé des frontières polonaises. L'URSS s'engage également à déclarer la guerre au [[Empire du Japon|Japon]] en échange de l'annexion du sud de [[Sakhaline]] et des [[îles Kouriles]]. En avril et mai, les Soviétiques [[Bataille de Berlin|entrent dans Berlin]], puis [[Offensive de Prague|dans Prague]]. À la fin de la guerre en Europe, l'Est de l'Allemagne et l'essentiel de l'Europe orientale sont occupés par l'Armée rouge<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=360-362}}</ref>. Dans le reste de l'Europe, malgré un contexte fort différent qui ne permet pas aux PC locaux d'espérer prendre le pouvoir, l'influence des communistes est également renforcée. Au sortir de la guerre, de nombreux partis communistes français participent à des gouvernements de coalition<ref name="CourtoisLazar170"/>{{,}}<ref name="Colarizi277"/>.
 
Après la fin de la guerre en Europe, et entre les deux [[bombardements atomiques d'Hiroshima et Nagasaki|bombardements atomiques américains]], l'URSS [[Invasion soviétique de la Mandchourie|envahit la Mandchourie, les îles Kouriles, la Mongolie-Intérieure, Sakhaline et la Corée]], accélérant la [[reddition du Japon]] et la fin du conflit mondial. Les communistes chinois ne bénéficient pas d'une aide très active de la part des Soviétiques, mais gagnent de précieuses bases d'opération en [[Mandchourie]] et s'emparent des armes des Japonais<ref>{{harvsp|Fairbank|1989|p=367-368, 377}}</ref>. Le Nord de la [[Corée]] est occupé par les Soviétiques, tandis que les Américains occupent le Sud<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=267}}</ref>. En [[Indochine française]] où l'[[Armée impériale japonaise]] stationnait à sa guise, Nguyễn Ái Quốc alias [[Hô Chi Minh]], chef du [[Parti communiste vietnamien|Parti communiste indochinois]] revenu au pays après trente ans d'exil et de missions pour le compte du Komintern, a créé en mai [[1941]] le [[Việt Minh]], qui se veut un large {{citation|front national}} indépendantiste et bénéficie durant la guerre de l'aide des Américains. Les Japonais [[Coup de force japonais de 1945 en Indochine|anéantissent l'administration française en Indochine]] en mars [[1945]] ; en août, le Việt Minh profite du vide politique qui suit leur reddition, et prend le pouvoir dans le Nord du territoire vietnamien. Le [[2 septembre]], Hô Chi Minh proclame l'indépendance de la {{citation|[[Républiquerépublique démocratique du Viêt Nam]]}}<ref>{{harvsp|Dalloz|1987|p=66-73}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Cesari|1995|p=30-31}}</ref>.
 
=== Le communisme durant la guerre froide ===
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==== Extension du communisme en Europe et en Asie ====
===== Division de l'Europe par le Rideau de fer =====
[[Fichier:EiserneVorhangIron Curtain map.pngsvg|vignette|Division de l'Europe au temps du [[Rideau de fer]].]]
En [[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]], le caractère autoritaire du régime est réaffirmé de manière souvent brutale, décevant les espoirs de réformes nourris pendant la guerre par une partie de la population. Plus de 40 % des prisonniers de guerre soviétiques rapatriés sont renvoyés à l'armée, voire au [[goulag]]. Dans les territoires conquis en [[1939]]-[[1940]] puis réintégrés à l'URSS à la fin de la guerre - soit l'[[Ukraine occidentale]], les [[pays baltes]] et la [[République socialiste soviétique moldave|Moldavie]] - les résistances à l'annexion et à la collectivisation doivent être écrasées. Des centaines de milliers de récalcitrants, de collaborateurs réels ou supposés et plus généralement d'éléments de {{citation|classes hostiles}} sont déportés. Le système concentrationnaire atteint son apogée<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=374-378, 383-387}}</ref>. Le régime stalinien entreprend en outre à partir de [[1946]] de reprendre le contrôle de la vie intellectuelle, qui s'était quelque peu relâché durant la guerre, :notamment [[Andreïavec Jdanov]] est chargél'aide de [[jdanovismeAndreï artistique|remettre au pas la culture et les artsJdanov]]. Dansdans le domaine deculturel laet [[biologie]], l'influence du pseudo-scientifiquede [[Trofim Denissovitch Lyssenko|Lyssenko]] estdans plusle forte quedomaine jamaisbiologique<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=378-383}}</ref>.
 
Entre [[1945]] et [[1949]], des [[État communiste|régimes communistes]] sont mis en place dans l'ensemble des pays d'[[Europe de l'Est]] et d'[[Europe centrale]] : ces nouveaux {{citation|pays frères}} de l'URSS constituent l'ensemble connu sous le nom de [[bloc de l'Est]]. Dans tous les pays de l'Est, les seuls partis politiques autorisés sont désormais soit le PC local en tant que [[parti unique]] officiel, soit la coalition formée par le PC et les partis qui lui sont subordonnés. Les régimes ainsi constitués se présentent comme des {{citation|[[démocratie populaire|démocraties populaires]]}}, terme emprunté par [[Joseph Staline|Staline]] à la propagande des [[Partisans (Yougoslavie)|Partisans yougoslaves]] pendant la guerre et imposé ensuite aux dirigeants communistes est-européens. Dans les [[démocratie libérale|démocraties libérales]] d'[[Europe de l'Ouest|Europe occidentale]], la plupart des partis communistes sont marginalisés dès le début de la guerre froide : certains d'entre eux conservent cependant un électorat important, notamment en [[Italie]] et en [[France]]<ref>Serge Wolikow, Antony Todorov, ''Le Communisme comme système'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=332-333}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Service|2007|p=249-250}}</ref>. Le seul pays d'Europe de l'Ouest à avoir - de [[1945]] à [[1957]] - un gouvernement à majorité communiste est le [[micro-État]] de [[Saint-Marin]], enclavé en Italie et très influencé par la vie politique italienne<ref name="sanmarino">[http://www.treccani.it/enciclopedia/san-marino_res-17d1505a-87eb-11dc-8e9d-0016357eee51_%28Enciclopedia-Italiana%29/ San Marino], [[Encyclopédie Treccani]] en ligne</ref>.
 
====== Formation du Bloc de l'Est ======
{{Article connexe|Bloc de l'Est|Coup de Prague|Blocus de Berlin|Rupture Tito-Staline|Procès de Prague}}
Dans l'ensemble des pays d'[[Europe de l'Est]], occupés pour la plupart par l'Armée rouge, des régimes aux structures calquées sur celles de l'URSS apparaissent. Aidés par des conseillers soviétiques, les communistes locaux s'arrogent - immédiatement ou progressivement - le monopole du pouvoir et mettent en place des [[État policier|États policiers]] ; l'Europe de l'Est est placée sous l'étroite influence du gouvernement de Moscou, dont les nouveaux régimes apparaissent comme des dépendances directes<ref>{{harvsp|Service|2004|p=510-512}}</ref>. Dans plusieurs pays, des maquis de résistance anticommuniste mènent la lutte durant plusieurs années, notamment en [[République populaire de Pologne|Pologne]]<ref>[[Andrzej Paczkowski]] et [[Karel Bartošek]], in ''[[Le Livre noir du communisme]]'', Robert Laffont, 1997, {{p.|414-416}}</ref>, en [[République populaire de Bulgarie|Bulgarie]]<ref>D. Charlanov, L. Ognianov et P. Tzvetkov, ''La Bulgarie sous le joug communiste'', in {{harvsp|Courtois|2002|p=346-357}}</ref> et en [[République socialiste de Roumanie|Roumanie]]<ref>Romulus Rusan (dir.), ''Le système répressif communiste en Roumanie, '' in {{harvsp|Courtois|2002|p=415-420}}</ref>, mais aussi dans certains territoires reannexés par l'URSS comme les [[pays baltes]], la [[République socialiste soviétique de Biélorussie|Biélorussie]] et l'[[République socialiste soviétique d'Ukraine|Ukraine]]<ref>{{harvsp|Service|2004|p=484}}</ref>.
 
En Yougoslavie, dès la victoire des [[Partisans (Yougoslavie)|Partisans]] en [[1945]], le [[Parti communiste de Yougoslavie]] dirigé par [[Josip Broz Tito|Tito]] détient le monopole du pouvoir et mène des purges sanglantes contre les opposants et les collaborateurs. Des élections législatives sont organisées dans des conditions si irrégulières que l'opposition boycotte le scrutin, laissant les communistes seuls en lice. La [[Royaume de Yougoslavie|monarchie]] est officiellement abolie en novembre, laissant place à la [[République fédérative socialiste de Yougoslavie|Républiquerépublique fédérative populaire de Yougoslavie]], avec le PCY comme [[parti unique]]. Le pays devient un [[État fédéral]], avec six républiques théoriquement placées sur un pied d'égalité : les [[Nationalités de l'ex-Yougoslavie|nationalités]] yougoslaves voient leurs spécificités reconnues. Dans l'Albanie voisine, le [[Parti communiste d'Albanie]] dirigé par [[Enver Hoxha]], sous couvert d'un {{citation|Front démocratique}}, détient tous les pouvoirs dès l'automne 1944 et remporte officiellement 93 % des suffrages aux élections. La [[République populaire socialiste d'Albanie|Républiquerépublique populaire d'Albanie]] est proclamée en janvier [[1946]]<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=151-153}}</ref>{{,}}<ref name="Service252">{{harvsp|Service|2007|p=252}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Fejtö|1952|p=48-75}}</ref>.
 
[[Fichier:Bundesarchiv Bild 183-S91405, Berlin, "Haus des Zentralkommitees der SED".jpg|vignette|gauche|Portrait du {{citation|[[Petit père des peuples]]}} [[Joseph Staline]], affiché à l'occasion du {{70e|anniversaire}} de ce dernier, sur la façade du siège du [[Parti socialiste unifié d'Allemagne|SED]] à [[Berlin-Est]].]]
 
En [[République populaire de Pologne|Pologne]], la coalition dirigée par le [[Parti ouvrier polonais]] obtient officiellement plus de 80 % des voix lors d'élections truquées. Les opposants sont réduits au silence ou à l'exil. Le [[Parti socialiste polonais]] est absorbé par le Parti ouvrier, qui devient le [[Parti ouvrier unifié polonais]]<ref>{{harvsp|Fejtö|1952|p=44-47, 206-207}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=165-169}}</ref>.
 
En [[Royaume de Roumanie|Roumanie]], sous la pression des occupants soviétiques, le [[Parti communiste roumain|PC roumain]] entre au gouvernement. Les communistes épurent l'administration et, en novembre 1946, sont déclarés vainqueurs d'élections législatives qu'ils ont en réalité perdues. Ils s'emparent ensuite du pouvoir, en s'appuyant notamment sur leur [[police politique]], la [[Securitate]]. En décembre [[1947]], le roi [[Michel Ier de Roumanie|Michel {{Ier}}]] est contraint à l'abdication : la [[République populaire roumaine]] est proclamée<ref>{{harvsp|Fejtö|1952|p=94-95, 102-103, 289-290}}</ref>{{,}}<ref>Romulus Rusan, ''Le système répressif communiste en Roumanie'', in {{harvsp|Courtois|2002|p=375-398}}</ref>.
 
[[Fichier:Bundesarchiv Bild 183-09018-0009, Schnelltriebwagen Berlin-Prag, Louis Fürnberg spricht.jpg|vignette|Portraits de [[Joseph Staline]] et du président [[République socialiste tchécoslovaque|tchécoslovaque]] [[Klement Gottwald]].]]
 
En [[Royaume de Bulgarie|Bulgarie]], [[Georgi Mikhailov Dimitrov|Georgi Dimitrov]], revenu au pays, reprend la tête du [[Parti communiste bulgare]]. Des purges, menées dès septembre 1944 lors de l'invasion du pays par l'Armée rouge, permettent de neutraliser l'opposition. Au sein de la coalition du [[Front patriotique (Bulgarie)|Front patriotique]], les communistes marginalisent leurs alliés agrariens et sociaux-démocrates. La monarchie est abolie en septembre [[1946]] ; Dimitrov devient chef du gouvernement de la [[République populaire de Bulgarie]], tandis que les communistes déclenchent une campagne de terreur contre leurs adversaires. Le dernier député d'opposition est arrêté en juin 1948<ref>{{harvsp|Fejtö|1952|p=102-103}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=172-173}}</ref>{{,}}<ref>Diniou Charlanov, Lioubomir Ognianov, Plamen Tzvetkov, ''La Bulgarie sous le joug communiste'', in {{harvsp|Courtois|2002|p=311-334}}</ref>.
En [[Royaume de Bulgarie|Bulgarie]], [[Georgi Mikhailov Dimitrov|Georgi Dimitrov]], revenu au pays, reprend la tête du [[Parti communiste bulgare]]. Des purges, menées dès septembre 1944 lors de l'invasion du pays par l'Armée rouge, permettent de neutraliser l'opposition. Au sein de la coalition du [[Front patriotique (Bulgarie)|Front patriotique]], les communistes marginalisent leurs alliés agrariens et sociaux-démocrates. La monarchie est abolie en septembre [[1946]] ; Dimitrov devient chef du gouvernement de la [[république populaire de Bulgarie]], tandis que les communistes déclenchent une campagne de terreur contre leurs adversaires. Le dernier député d'opposition est arrêté en juin 1948<ref>{{harvsp|Fejtö|1952|p=102-103}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=172-173}}</ref>{{,}}<ref>Diniou Charlanov, Lioubomir Ognianov, Plamen Tzvetkov, ''La Bulgarie sous le joug communiste'', in {{harvsp|Courtois|2002|p=311-334}}</ref>.
 
En [[Troisième République tchécoslovaque|Tchécoslovaquie]] — pays qui n'est alors pas occupé par l'Armée rouge — le [[Parti communiste tchécoslovaque]] arrive au pouvoir par ses propres moyens. En 1945, le PCT, dirigé par [[Klement Gottwald]], [[Antonín Zápotocký]] et [[Rudolf Slánský]], participe au gouvernement de coalition mis en place par le président [[Edvard Beneš]]. Bénéficiant d'un vrai soutien dans la population grâce à leur opposition aux [[accords de Munich]] et à leur participation à la résistance<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=213}}</ref>, les communistes consolident leur influence, en profitant notamment de la maladie de Beneš. En février [[1948]], lors du [[coup de Prague]], ils prennent le contrôle du pays : un nouveau gouvernement est formé, composé pour moitié de ministres PCT. Beneš est remplacé par Gottwald. Les partis et l'administration sont épurés et une nouvelle constitution est adoptée, achevant d'instaurer le [[République socialiste tchécoslovaque|régime communiste en Tchécoslovaquie]]<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=157-160}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Fejtö|1952|p=208-221}}</ref>.
 
[[Fichier:Bundesarchiv Bild 183-V04317-002, Berlin, 2. Parteitag der SED, Walter Ulbricht.jpg|vignette|gauche|[[Walter Ulbricht]], secrétaire général du [[Parti socialiste unifié d'Allemagne]] et dirigeant de la [[République démocratique allemande]].]]
 
En [[République de Hongrie (1946-1949)|Hongrie]], le [[Parti communiste hongrois]], dirigé par [[Mátyás Rákosi]] — membre en 1919 du gouvernement de la [[République des conseils de Hongrie|République des conseils]] — [[Ernő Gerő]] et [[Imre Nagy]] détient des ministères clés dans le gouvernement de coalition : mais, dépourvu de réel soutien populaire, il est battu lors des élections de novembre 1945. Rákosi emploie alors une stratégie progressive, la {{citation|[[tactique du salami]]}}, pour s'emparer des leviers du pouvoir et forcer les autres partis à se scinder ou à fusionner avec le Parti communiste. [[László Rajk (homme politique)|László Rajk]], ministre communiste de l'intérieur, met sur pied une police secrète, l'[[Államvédelmi Hatóság|AVH]], et liquide l'opposition par la terreur. Une nouvelle constitution est adoptée en 1949 et la Hongrie prend le nom de [[République populaire de Hongrie]] ; le Parti des travailleurs - nouveau nom du PC - devient parti unique<ref>[[Miklós Molnár|Miklós Molnar]], ''Histoire de la Hongrie'', Hatier, 1996, pages 384-386</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Fejtö|1952|p=105, 263-272}}</ref>.
En [[République de Hongrie (1946-1949)|Hongrie]], le [[Parti communiste hongrois]], dirigé par [[Mátyás Rákosi]] — membre en 1919 du gouvernement de la [[République des conseils de Hongrie|République des conseils]] — [[Ernő Gerő]] et [[Imre Nagy]] détient des ministères clés dans le gouvernement de coalition : mais, dépourvu de réel soutien populaire, il est battu lors des élections de novembre 1945. Rákosi emploie alors une stratégie progressive, la {{citation|[[tactique du salami]]}}, pour s'emparer des leviers du pouvoir et forcer les autres partis à se scinder ou à fusionner avec le Parti communiste. [[László Rajk (homme politique)|László Rajk]], ministre communiste de l'intérieur, met sur pied une police secrète, l'[[Államvédelmi Hatóság|AVH]], et liquide l'opposition par la terreur. Une nouvelle constitution est adoptée en 1949 et la Hongrie prend le nom de [[république populaire de Hongrie]] ; le Parti des travailleurs - nouveau nom du PC - devient parti unique<ref>[[Miklós Molnár|Miklós Molnar]], ''Histoire de la Hongrie'', Hatier, 1996, p. 384-386</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Fejtö|1952|p=105, 263-272}}</ref>.
 
Dans la [[zone d'occupation soviétique en Allemagne]], le [[Parti communiste d'Allemagne]] est, dès juin 1945, le premier parti à se reconstituer après la défaite du régime nazi : ses cadres prennent le contrôle des administrations avec le soutien des Soviétiques. En avril [[1946]], les parties des appareils du KPD et du [[Parti social-démocrate d'Allemagne]] présentes dans la zone soviétique fusionnent au sein du [[Parti socialiste unifié d'Allemagne]] (SED). En juin [[1948]], réagissant à la création par les Alliés occidentaux d'une nouvelle monnaie dans leur [[Trizone]], [[Joseph Staline|Staline]] ordonne le [[blocus de Berlin|blocus]] de [[Berlin-Ouest]]. Durant près d'un an, l'aviation occidentale ravitaille l'ouest de la ville via un [[pont aérien]] ; Staline finit par renoncer au blocus. Le 7 octobre 1949, le camp communiste réagit à la proclamation de la [[Allemagne de l'Ouest|République fédérale d'Allemagne]] (RFA, dite ''Allemagne de l'Ouest'') quelques mois plus tôt, en proclamant la [[République démocratique allemande]] (RDA, dite ''Allemagne de l'Est''). L'Allemagne est désormais divisée en deux entités opposées : en RDA, les seuls partis autorisés sont le SED et ceux qui lui sont subordonnés au sein du [[Front national de la République démocratique allemande|Front national]]<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=173-176}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Service|2007|p=243}}</ref>.
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[[Fichier:PCI logo.jpg|vignette|Emblème du [[Parti communiste italien]].]]
En [[Europe de l'Ouest]] et en [[Europe du Nord]], les PC déclinent rapidement au début de la guerre froide : ils ne demeurent des forces de premier plan que dans trois des principaux pays européens, la [[France]], l'[[Italie]] et la [[Finlande]]<ref name="Priestland292">{{harvsp|Priestland|2009|p=292-294}}</ref>.
 
Le [[Parti communiste français]] réalise une percée historique lors des [[Élections législatives françaises de 1945|élections de 1945]] et atteint son apogée avec [[Élections législatives françaises de novembre 1946|celles de novembre 1946]], avec 28,3 % des suffrages. Le PCF devient le premier parti de France en nombre de voix : il s'implante très fortement en milieux ouvrier et rural, mais aussi dans le monde intellectuel où les communistes gagnent de nombreux {{citation|compagnons de route}} prestigieux<ref>{{harvsp|Aron|1970|p=117-159}}</ref>. Le PCF participe au gouvernement de coalition mais la situation intérieure française se tend, notamment du fait du contexte international et en particulier de la [[guerre d'Indochine]] : en octobre [[1947]], les communistes sont exclus du [[Gouvernement Paul Ramadier (2)|gouvernement Ramadier]]. Tout en restant très implanté sur le plan électoral, le PCF se trouve désormais dans l'opposition pour plusieurs décennies. Les communistes français usent par ailleurs de l'argument [[pacifisme|pacifiste]] en lançant en [[1950]] le [[Mouvement de la paix]] : l'{{citation|[[appel de Stockholm]]}}, pétition lancée par le [[Conseil mondial de la paix]] pour réclamer l'interdiction de l'arme atomique, leur permet de s'approprier en partie, en France et ailleurs, la thématique pacifiste<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=372-373}}</ref>. Le culte de la personnalité de [[Maurice Thorez]] atteint son apogée à la fin des [[années 1940]], tandis que le PCF connaît plusieurs purges de son appareil. En [[1952]], alors que Thorez, malade, est soigné à Moscou, son entourage évince de la direction du PCF ses rivaux [[André Marty]] et [[Charles Tillon]]<ref>{{harvsp|Courtois|Lazar|1993|p=213-287}}</ref>{{,}}<ref name="Priestland292"/>.
Le [[Parti communiste français]] réalise une percée historique lors des [[Élections législatives françaises de 1945|élections de 1945]] et atteint son apogée avec [[Élections législatives françaises de novembre 1946|celles de novembre 1946]], avec 28,3 % des suffrages. Le PCF devient le premier parti de France en nombre de voix : il s'implante très fortement en milieux ouvrier et rural, mais aussi dans le monde intellectuel où les communistes gagnent de nombreux {{citation|[[Compagnon de route|compagnons de route]]}} prestigieux<ref>{{harvsp|Aron|1970|p=117-159}}</ref>. Le PCF participe au gouvernement de coalition mais la situation intérieure française se tend, notamment du fait du contexte international et en particulier de la [[guerre d'Indochine]] : en octobre [[1947]], les communistes sont exclus du [[Gouvernement Paul Ramadier (2)|gouvernement Ramadier]]. Tout en restant très implanté sur le plan électoral, le PCF se trouve désormais dans l'opposition pour plusieurs décennies. Les communistes français usent par ailleurs de l'argument [[pacifisme|pacifiste]] en lançant en [[1950]] le [[Mouvement de la paix]] : l'{{citation|[[appel de Stockholm]]}}, pétition lancée par le [[Conseil mondial de la paix]] pour réclamer l'interdiction de l'arme atomique, leur permet de s'approprier en partie, en France et ailleurs, la thématique pacifiste<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=372-373}}</ref>. Le culte de la personnalité de [[Maurice Thorez]] atteint son apogée à la fin des [[années 1940]], tandis que le PCF connaît plusieurs purges de son appareil. En [[1952]], alors que Thorez, malade, est soigné à Moscou, son entourage évince de la direction du PCF ses rivaux [[André Marty]] et [[Charles Tillon]]<ref>{{harvsp|Courtois|Lazar|1993|p=213-287}}</ref>{{,}}<ref name="Priestland292"/>.
 
Le [[Parti communiste italien]], dirigé par [[Palmiro Togliatti]], tire un grand prestige de sa participation à la résistance contre l'occupant allemand et les fascistes. En 1946, le nombre de ses adhérents dépasse deux millions, en comptant les Jeunesses communistes. Le PCI participe jusqu'en mai [[1947]] au gouvernement de coalition d'après-guerre, mais en est ensuite évincé sous la pression des États-Unis<ref>{{harvsp|Colarizi|2000|p=319-325}}</ref>. Le [[Front démocratique populaire (Italie)|Front démocratique populaire]], coalition du PCI et du [[Parti socialiste italien|PSI]], remporte plus de 30 % des voix lors des élections de 1948, mais est nettement battu par la [[Démocratie chrétienne (Italie)|Démocratie chrétienne]]. Rejeté dans l'opposition sur le plan national, le PCI conserve néanmoins une position dominante au sein de la gauche italienne et reste implanté dans tout le pays<ref>[[Serge Wolikow]], Antony Todorov, ''L'Expansion européenne d'après-guerre'', [[Michel Dreyfus]], [[Bruno Groppo]], ''Les Partis communistes français et italiens'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=328-329, 423-438}}</ref>.
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===== Progrès du communisme en Extrême-Orient =====
====== La naissance de la Chine communiste ======
{{Article connexe|Histoire de la Républiquerépublique populaire de Chine}}
[[Fichier:Mao Zedong making speech.jpg|vignette|gauche|Portrait de [[Mao Zedong]], fondateur de la [[Républiquerépublique populaire de Chine]].]]
Hors d'Europe, le communisme connaît notamment une progression spectaculaire en [[Extrême-Orient]], ce qui donne par la suite naissance à l'expression {{citation|[[rideau de bambou]]}}, équivalent asiatique du [[rideau de fer]]. Au sortir de la guerre mondiale, la tension entre les nationalistes du [[Kuomintang]] et le [[Parti communiste chinois]] est à nouveau à son maximum : les [[États-Unis]] tentent en vain une médiation. Le régime de [[Tchang Kaï-chek]] gère l'économie du pays - ruinée par le conflit - de manière désastreuse, ce qui profite aux communistes. Dès [[1946]], la [[guerre civile chinoise]] reprend. En promettant une réforme agraire, les communistes obtiennent l'appui crucial des campagnes. En janvier [[1949]], l'[[Armée populaire de libération]] des communistes encercle Pékin : le gouvernement nationaliste se réfugie sur l'[[île de Taïwan]] - où il maintient un État appelé [[République de Chine (Taïwan)|République de Chine]] - et conserve le siège de la Chine à l'[[Organisation des Nations unies|ONU]]<ref>{{harvsp|Fairbank|1989|p=368-380}}</ref>. Le [[1er octobre|{{1er}} octobre]] [[1949]], [[Mao Zedong]] proclame la [[Républiquerépublique populaire de Chine]], dont il est le président et [[Zhou Enlai]] le premier ministre<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=20-21}}</ref>.
 
Les Soviétiques sont circonspects face à ce nouvel allié ; ce n'est que le {{date|14 février 1950}} que le [[pacte sino-soviétique]] est signé<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=400}}</ref>. Mao, qui apprécie peu l'attitude de Staline à l'égard de son pays, a néanmoins besoin de l'appui des Soviétiques pour rebâtir la Chine. Par ailleurs, dès octobre 1950, le [[Tibet (1912-1951)|Tibet]], qui échappait au contrôle chinois depuis [[1912]], est [[Intervention militaire chinoise au Tibet (1950-1951)|envahi par l'armée de Mao]] : en mai [[1951]], le [[Tenzin Gyatso|{{14e}} dalaï-lama]] doit signer l'[[accord en 17 points sur la libération pacifique du Tibet]] qui reconnaît la souveraineté chinoise. La Chine populaire s'emploie à purger les cadres et partisans du Kuomintang, puis met en œuvre une réforme agraire qui détruit les élites villageoises : des millions d'{{citation|[[Ennemi du peuple|ennemis du peuple]]}} sont envoyés dans des camps. Après avoir, par des campagnes répressives, réussi à restaurer l'ordre et à rendre à l'économie un cours normal, le régime de Mao s'emploie à {{citation|soviétiser}} la Chine en renforçant le pouvoir du Parti, en collectivisant l'agriculture et en développant l'industrialisation<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=33-52}}</ref>.
 
La naissance de la Républiquerépublique populaire de Chine a de profondes répercussions : en faisant basculer le pays le plus peuplé du monde dans le camp communiste, elle bouleverse les équilibres géopolitiques et influe sur d'autres conflits en cours en Asie, que ce soit en Indochine française ou en Corée<ref>{{harvsp|Soulet|1996|p=101-102}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=294-296}}</ref>.
 
====== La Guerreguerre de Corée ======
{{Article connexe|Guerre de Corée}}
[[Fichier:Central Korea during Communist Spring Offensive 1951.jpg|vignette|Offensive des communistes durant la [[guerre de Corée]], au printemps 1951.]]
Dans le nord de la [[Corée]] libérée des Japonais, les occupants soviétiques soutiennent en février [[1946]] la formation d'un gouvernement provisoire dirigé par le jeune chef communiste [[Kim Il-sung]] - tout juste revenu de son exil en URSS - qui crée le [[Parti du travail de Corée]]<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=267-269}}</ref>. En [[1948]], Kim Il-sung proclame la [[Corée du Nord|Républiquerépublique populaire démocratique de Corée]] (''Corée du Nord'') qui dispute aussitôt la souveraineté à la [[Corée du Sud|Républiquerépublique de Corée]] (''Corée du Sud''). Kim parvient à convaincre Staline de l'opportunité d'une attaque contre le Sud, afin de réunifier toute la Corée sous sa bannière<ref name="Brown189">{{harvsp|Brown|2009|p=189-192}}</ref> : en juin [[1950]], l'attaque du Nord contre le Sud déclenche la [[guerre de Corée]]. L'[[Organisation des Nations unies|ONU]] autorise alors l'intervention d'une force militaire - principalement américaine - pour défendre le Sud<ref name="Werth399"/>. L'avancée des troupes nord-coréennes est arrêtée net par les Américains, qui les repoussent vers le Nord. Staline convainc alors Mao d'intervenir en Corée : trois millions de soldats chinois viennent soutenir Kim Il-sung. L'URSS n'intervient pas officiellement, mais équipe les troupes chinoises et nord-coréennes<ref name="Brown189"/>.
 
La Chine paie un lourd tribut au conflit — plus de {{nombre|800000|soldats}} tués, dont le fils de Mao — mais elle modernise son armée tandis que le Parti communiste chinois renforce son unité dans la lutte contre l'{{citation|ennemi numéro un du peuple chinois}}. La Chine y gagne également le maintien d'un régime ami à sa frontière. Après une contre-attaque américaine en [[1951]], le front se stabilise. L'[[armistice de Panmunjeom]], en juillet [[1953]], met un terme au conflit, scellant la division de la Coréen, séparée par une [[zone coréenne démilitarisée]]<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=57-62}}</ref>. Ce conflit marque un tournant dans la guerre froide, le président américain [[Harry S. Truman]] ayant refusé de recourir à l'arme nucléaire, dont l'emploi lui semblait trop risqué et qui aurait pu conduire à une [[Troisième Guerre mondiale]]. Elle renforce également la cohésion du monde occidental et de l'[[atlantisme]]<ref>{{harvsp|Service|2007|p=244}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Soutou|2010|p=317-346}}</ref>.
 
====== La Guerreguerre d'Indochine ======
{{Article connexe|Guerre d'Indochine}}
[[Fichier:Dien Bien Phu002.jpg|vignette|Image de la [[bataille de Diên Biên Phu]].]]
[[Fichier:The Soviet Union 1990 CPA 6182 stamp (Birth Cent of Ho Chi Minh (Vietnamese leader)).jpg|vignette|gauche|Timbre soviétique à l'effigie de [[Hô Chi Minh]].]]
En [[Indochine française]], le [[Corps expéditionnaire français en Extrême-Orient]] débarque en octobre [[1945]] et reprend progressivement possession de la colonie, que le [[Việt Minh]] continue de contrôler au Nord. En novembre, le [[Parti communiste indochinois]] proclame, afin de rassurer les partenaires du Việt Minh, son autodissolution : dans les faits, les chefs communistes restent aux commandes. En mars [[1946]], les [[accords Hô-Sainteny]], conclus par [[Hô Chi Minh]] avec le commissaire du [[Gouvernement provisoire de la République française|GPRF]] [[Jean Sainteny]], prévoient la reconnaissance par la France d'un État vietnamien au sein de l'[[Union française]]. Le général [[Philippe Leclerc de Hauteclocque|Leclerc]], chef du Corps expéditionnaire, peut alors rentrer dans [[Hanoï]]<ref>{{harvsp|Dalloz|1987|p=85-97}}</ref>. Mais la [[conférence de Fontainebleau (1946)|conférence de Fontainebleau]], censée définir le statut du Viêt Nam, tourne court durant l'été. En novembre, les Français bombardent [[Hải Phòng]] ; le [[19 décembre]], le Việt Minh tente un coup de force sur tout le territoire vietnamien. L'insurrection est contenue et Hô prend le maquis, déclenchant la [[guerre d'Indochine]]<ref>{{harvsp|Dalloz|1987|p=101-114, 130-131}}</ref>. Ce soulèvement communiste s'identifie totalement à une lutte [[nationalisme|nationaliste]] et [[indépendantisme|indépendantiste]] : Hô Chi Minh peut dès lors apparaître, dans le contexte de la [[décolonisation]], comme un symbole du [[tiers-monde]] émergent<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=296}}</ref>. À l'origine, le conflit est essentiellement vietnamien : les indépendantistes laotiens ([[Pathet Lao]]) et cambodgiens ([[Khmers issarak]]) sont très dépendants du Việt Minh<ref>{{harvsp|Dalloz|1987|p=115-130}}</ref>. Avec la naissance de la [[Républiquerépublique populaire de Chine]], Hô gagne une importante base arrière en territoire chinois<ref>{{harvsp|Dalloz|1987|p=157-158}}</ref>, ainsi qu'une aide logistique et des stocks d'armes ; les Français reçoivent de leur côté l'aide des États-Unis. En février [[1951]], l'ancien PC indochinois renaît officiellement sous le nom de [[Parti des travailleurs du Viêt Nam]] : les insurgés vietnamiens affichent désormais ouvertement leurs couleurs communistes ; la création des {{citation|partis frères}} laotien et cambodgien est décidée<ref>{{harvsp|Dalloz|1987|p=165-171, 178-200}}</ref>.
 
Dès [[1953]], face à une situation insoluble, la France envisage une {{citation|sortie honorable}} d'Indochine<ref>{{harvsp|Dalloz|1987|p=213-214}}</ref>. Des négociations sont prévues à [[Genève]] ; le chef militaire du Việt Minh, [[Võ Nguyên Giáp]], décide alors de prendre coûte que coûte la base de [[Ðiện Biên Phủ]] pour être en position de force lors des pourparlers. La [[bataille de Diên Biên Phu]], qui dure près de deux mois, s'achève par la victoire de l'[[Armée populaire vietnamienne]], mettant la France en situation de faiblesse alors que s'ouvre la conférence. [[Pierre Mendès France]] signe les [[accords de Genève]], qui permettent à la France de sortir du conflit et mettent fin à l'[[Indochine française]]. Le Viêt Nam est coupé en deux : le Nord revient à la [[Républiquerépublique démocratique du Viêt Nam]], dont [[Hô Chi Minh]] est le président et [[Phạm Văn Đồng]] le premier ministre, et le Sud à l'[[État du Viêt Nam]], remplacé l'année suivante par la [[Républiquerépublique du Viêt Nam]]. La séparation du pays est censée être provisoire en attendant des élections mais, au Sud, le gouvernement anticommuniste de [[Ngô Đình Diệm]] refuse d'organiser le scrutin prévu par les accords. Le [[Royaume du Laos]] doit négocier avec le [[Pathet lao]], tandis que [[Norodom Sihanouk]], roi du [[Royaume du Cambodge (1953-1970)|Cambodge]], réussit à éviter toute concession aux [[Khmers issarak]]. Les [[États-Unis]] augmentent leur présence en [[Asie du Sud-Est]] pour y contenir l'avancée du communisme ; ils remplacent rapidement les derniers conseillers français au Sud Viêt Nam<ref>{{harvsp|Dalloz|1987|p=228-272}}</ref>.
 
====== Dans le reste de l'Extrême-Orient ======
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La politique étrangère de l'URSS est marquée, après la mort de Staline, par une première phase de [[Détente (guerre froide)|détente]] Est-Ouest : en juillet [[1953]], les Soviétiques favorisent la fin de la [[guerre de Corée]]<ref>{{harvsp|Soutou|2010|p=394, 420-428}}</ref>. Les relations internationales demeurent néanmoins rythmées par l'opposition entre les deux superpuissances. Les États-Unis demeurent attachés à leur doctrine d'endiguement. En [[Amérique latine]] - où plusieurs PC gagnent en influence, notamment en [[Bolivie]], en [[Argentine]] ou au [[Brésil]] -, ils incitent les gouvernements locaux à réprimer les communistes<ref name="Droz203">{{harvsp|Droz|1978|p=203-211}}</ref>{{,}}<ref>Michael Löwy, ''Figures du communisme latino-américain'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=680-682}}</ref>. Au [[Guatemala]], le [[Parti guatémaltèque du travail]] s'allie - d'ailleurs contre l'avis des Soviétiques, qui jugent la démarche imprudente - au président [[Jacobo Arbenz Guzmán|Arbenz]] : la [[Central Intelligence Agency|CIA]] soutient alors un coup d'État qui [[Opération PBSUCCESS|renverse Arbenz en 1954]]<ref name="Soulet215">{{harvsp|Soulet|1996|p=215}}</ref>. À partir de 1955, l'URSS revient à une politique plus dynamique en Europe : le {{date|15 mai 1955}} naît le [[Pacte de Varsovie]], une alliance militaire entre l'Union soviétique et les pays du [[bloc de l'Est]], destinée à faire pendant à l'[[Organisation du traité de l'Atlantique nord|OTAN]]<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=428}}</ref>.
 
L'URSS impose des réformes aux régimes est-européens, dont les dirigeants sont contraints à cesser de cumuler les postes de chefs du gouvernement et du Parti. En [[Républiquerépublique populaire de Hongrie]], [[Mátyás Rákosi]] se voit imposer en 1953 [[Imre Nagy]], communiste plus modéré, comme chef du gouvernement. Nagy entreprend un mouvement de réformes, mais Rákosi parvient à obtenir son remplacement en 1955<ref>{{harvsp|Fejtö|1972|p=21-26}}</ref>. En [[Républiquerépublique populaire de Bulgarie]], [[Valko Tchervenkov]], qui a succédé à Dimitrov mort en 1949, cède la tête du [[Parti communiste bulgare]] à [[Todor Jivkov]], qui l'évince ensuite tout à fait<ref>{{harvsp|Fejtö|1972|p=32}}</ref>. En mai [[1955]], [[Nikita Khrouchtchev]] se rend à [[Belgrade]] et l'URSS se réconcilie avec la [[République fédérative socialiste de Yougoslavie|Yougoslavie]]. [[Josip Broz Tito|Tito]], réhabilité dans le camp communiste, conserve cependant son indépendance<ref>{{harvsp|Fejtö|1972|p=40-48}}</ref> ; il maintient de bonnes relations avec les États occidentaux qui soutiennent financièrement son pays et adopte sur le plan international une position [[Neutralité (relations internationales)|neutraliste]]. En [[1955]], la Yougoslavie participe à la [[conférence de Bandung]], qui donne par la suite naissance au [[Mouvement des non-alignés]] dont elle est l'un des membres fondateurs. L'État yougoslave [[décentralisation|décentralise]] ses institutions de manière croissante ; le régime de Tito devient au fil des ans le plus ouvert et le plus prospère des pays communistes européens<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=203}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=320-321}}</ref>{{,}}<ref name="Service255">{{harvsp|Service|2007|p=255-257}}</ref>.
 
En février [[1956]], lors du [[XXe congrès du Parti communiste de l'Union soviétique]], Khrouchtchev lit un {{citation|rapport secret}} révélant une partie des crimes de [[Joseph Staline|Staline]]. Seule une petite partie des exactions staliniennes est rendue publique et aucune des grandes orientations prises depuis 1917 n'est remise en cause : le rapport Khrouchtchev, dont l'existence est rapidement connue à l'étranger, cause cependant un choc considérable. Les PC occidentaux perdent de très nombreux adhérents et sympathisants<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=430-434}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=240-246}}</ref>. Khrouchtchev rompt également avec la [[doctrine Jdanov]] et prône la [[coexistence pacifique]] entre systèmes politiques différents<ref>{{harvsp|Soutou|2010|p=455-456}}</ref>. Le [[Kominform]] est supprimé, en vue de ne plus faire apparaître de lien de subordination entre les partis communistes et le régime soviétique<ref>{{harvsp|Furet|1995|p=528}}</ref>.
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{{article connexe|Soulèvement de Poznań en 1956|Insurrection de Budapest}}
[[Fichier:Hole in flag - Budapest 1956.jpg|vignette|Le drapeau hongrois, dont le symbole communiste a été retiré, lors de l'[[insurrection de Budapest]].]]
Les répercussions de la [[déstalinisation]] lancée par Khrouchtchev se font sentir dans l'ensemble du [[bloc de l'Est]], mais ont des conséquences particulièrement importantes en [[Républiquerépublique populaire de Pologne]] et en [[Républiquerépublique populaire de Hongrie]]. Après avoir entendu l'allocution de Khrouchtchev au congrès du PCUS, le dirigeant polonais [[Bolesław Bierut]] tombe malade, apparemment victime d'un [[infarctus]], et meurt à Moscou<ref name="Brown276">{{harvsp|Brown|2009|p=276-292}}</ref>. Le nouveau dirigeant polonais [[Edward Ochab]], qui lui succède, entame une relative libéralisation<ref>{{harvsp|Fejtö|1972|p=76-77}}</ref>. Plusieurs dizaines de milliers de prisonniers politiques sont libérés, parmi lesquels [[Władysław Gomułka]] et ses alliés. En juin, une manifestation ouvrière à [[Poznań]] dégénère en [[soulèvement de Poznań en 1956|véritable soulèvement]], vite réprimé par l'armée polonaise ; l'agitation populaire s'accroît néanmoins et des cadres de l'appareil du [[Parti ouvrier unifié polonais]] réclament bientôt le retour au pouvoir de Gomułka. Au cours des [[Octobre polonais de 1956|bouleversements d'octobre]], Gomułka revient à la tête du Parti, avec l'appui des Soviétiques qui souhaitent éviter une situation comparable à la crise hongroise. Gomułka, attaché aux intérêts nationaux de son pays, bénéficie alors d'un réel soutien populaire. Mais, bien qu'annonçant un programme de réformes, il garantit aux Soviétiques qu'il ne touchera pas à leurs intérêts en Pologne : la démocratisation polonaise demeure limitée<ref name="Fejto104131">{{harvsp|Fejtö|1972|p=104-131}}</ref>{{,}}<ref name="Brown276"/>.
 
En [[République populaire de Hongrie|Hongrie]], la situation évolue au même moment de manière bien plus dramatique : en juillet [[1956]], [[Mátyás Rákosi]] doit, sous la pression des Soviétiques, céder à [[Ernő Gerő]] la tête du [[Parti des travailleurs hongrois]]. [[László Rajk (homme politique)|László Rajk]] est réhabilité au mois d'octobre, sept ans après son exécution. Le [[22 octobre]], une manifestation étudiante débouche sur la publication d'un manifeste révolutionnaire qui réclame le départ des staliniens et le retour au pouvoir du réformateur [[Imre Nagy]]. Le lendemain, la statue de Staline au centre de [[Budapest]] est abattue ; l'agitation vire bientôt à l'[[insurrection de Budapest|insurrection ouverte]]. Imre Nagy, redevenu chef du gouvernement, est d'abord réticent face au mouvement, mais évolue bientôt vers un soutien aux contestataires. Fin octobre, il forme un gouvernement de coalition avec des non communistes ; le [[31 octobre]], il annonce le départ de la Hongrie du [[Pacte de Varsovie]] et proclame la neutralité du pays. Les Soviétiques décident alors de reprendre le contrôle et font intervenir l'[[Armée rouge]], qui écrase le soulèvement. [[János Kádár]], qui avait soutenu Nagy, accepte de former un nouveau gouvernement favorable à l'URSS. Nagy est jugé à huis clos, puis pendu<ref name="Fejto104131"/>{{,}}<ref name="Brown276"/>.
 
===== Poursuite de la déstalinisation et rupture avec la Chine =====
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[[Fichier:Mao Tsé-toung, portrait en buste, assis, faisant face à Nikita Khrouchtchev, pendant la visite du chef russe 1958 à Pékin.jpg|vignette|gauche|alt=Photographie de deux hommes souriant assis à une table|[[Mao Zedong]] et [[Nikita Khrouchtchev]] en 1958.]]
Les événements de Hongrie ont un effet désastreux sur l'image de l'URSS, qui se trouve encore dégradée dans le monde entier, quelques mois après la révélation des crimes de Staline. Dans le monde entier, les partis communistes perdent à nouveau de nombreux militants et sympathisants ; certains, comme le [[Parti communiste français|PCF]] et le [[Parti communiste italien|PCI]] conservent cependant un poids électoral important. Le PCF, initialement décontenancé, se convertit à la [[déstalinisation]] ; le PCI affirme progressivement une liberté de ton et une autonomie accrues<ref name="Brown276"/>{{,}}<ref name="Courtois441">{{harvsp|Courtois|2007|p=441-447}}</ref>.
 
[[Fichier:Mansudae Grand Monument (5063141561).jpg|vignette|Statue du {{citation|Grand leader}} [[Kim Il-sung]] à [[Pyongyang]], [[Corée du Nord]].]]
 
La déstalinisation a également des conséquences en [[République populaire de Chine]] : le [[Parti communiste chinois]] adopte en [[1956]] un mode de fonctionnement plus collégial ; la [[Maoïsme|pensée Mao Zedong]] disparaît temporairement des statuts officiels. [[Deng Xiaoping]] devient secrétaire général du Parti, dont Mao demeure le président<ref name="Brown313">{{harvsp|Brown|2009|p=313-331}}</ref>. Le contrôle policier de la population demeure cependant rigide. Le [[laogai]], un système de camps comparable au [[goulag]] soviétique, est créé : selon des estimations très approximatives, plusieurs dizaines de millions de prisonniers y auraient transité au fil des décennies<ref>[[Jean-Louis Margolin]], ''Chine : une longue marche dans la nuit'', in {{harvsp|Le Livre noir du communisme|1997|p=544-560}}</ref>. La collectivisation agricole est accélérée, mais la logique productiviste conduit à un échec économique ; le malaise social et politique s'accroît en Chine<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=122-134}}</ref>. Mao prend acte des difficultés et décrète, en février 1957, une {{citation|campagne de rectification}} - dite {{citation|[[campagne des cent fleurs]]}} - en encourageant la critique sur l'action du Parti. Cette initiative aboutit cependant, dans les milieux intellectuels et étudiants, à un nombre si important de critiques que Mao finit, dès l'été, par faire réprimer les contestataires au cours de purges {{citation|[[campagne anti-droitiste|anti-droitistes]]}}. Après l'échec de cette {{citation|libéralisation contrôlée}}, Mao fait de l'{{citation|[[anti-révisionnisme]]}} l'une de ses priorités idéologiques<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=139-151}}</ref>{{,}}<ref name="Brown313"/>.
La déstalinisation a également des conséquences en [[république populaire de Chine]] : le [[Parti communiste chinois]] adopte en [[1956]] un mode de fonctionnement plus collégial ; la [[Maoïsme|pensée Mao Zedong]] disparaît temporairement des statuts officiels. [[Deng Xiaoping]] devient secrétaire général du Parti, dont Mao demeure le président<ref name="Brown313">{{harvsp|Brown|2009|p=313-331}}</ref>. Le contrôle policier de la population demeure cependant rigide. Le [[laogai]], un système de camps comparable au [[goulag]] soviétique, est créé : selon des estimations très approximatives, plusieurs dizaines de millions de prisonniers y auraient transité au fil des décennies<ref>[[Jean-Louis Margolin]], ''Chine : une longue marche dans la nuit'', in {{harvsp|Le Livre noir du communisme|1997|p=544-560}}</ref>. La collectivisation agricole est accélérée, mais la logique productiviste conduit à un échec économique ; le malaise social et politique s'accroît en Chine<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=122-134}}</ref>. Mao prend acte des difficultés et décrète, en février 1957, une {{citation|campagne de rectification}} - dite {{citation|[[campagne des cent fleurs]]}} - en encourageant la critique sur l'action du Parti. Cette initiative aboutit cependant, dans les milieux intellectuels et étudiants, à un nombre si important de critiques que Mao finit, dès l'été, par faire réprimer les contestataires au cours de purges {{citation|[[campagne anti-droitiste|anti-droitistes]]}}. Après l'échec de cette {{citation|libéralisation contrôlée}}, Mao fait de l'{{citation|[[anti-révisionnisme]]}} l'une de ses priorités idéologiques<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=139-151}}</ref>{{,}}<ref name="Brown313"/>.
 
En [[Corée du Nord]], [[Kim Il-sung]], lui aussi en désaccord avec la [[déstalinisation]], entreprend de développer l'identité propre de son régime. Il élabore une idéologie à usage national, le [[Juche]]. La Corée du Nord, gouvernée selon une logique militariste, pratique un [[Culte de la personnalité en Corée du Nord|culte de la personnalité exacerbé]] autour du {{citation|Grand leader}} Kim Il-sung<ref name="Priestland302">{{harvsp|Priestland|2009|p=302-303}}</ref>.
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Après la dissolution du Kominform, le [[mouvement communiste international]] est incarné pour l'essentiel par les relations bilatérales des partis : entre 1957 et 1969, cinq [[conférences mondiales des Partis communistes]] sont organisées. Elles mettent cependant en évidence des divisions grandissantes<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=393-395}}</ref>. La déstalinisation contribue en effet à provoquer une crise entre l'URSS et la Chine. [[Mao Zedong]], qui désapprouve la condamnation de Staline par Khrouchtchev et veut se dégager de la tutelle soviétique, est hostile à un rapprochement avec les [[États-Unis]] comme à toute forme de [[coexistence pacifique]] : en novembre [[1957]], lors de la conférence des PC à Moscou, il choque son auditoire en déclarant qu'une guerre nucléaire pourrait se justifier, les victimes étant un prix à payer pour la victoire du socialisme. En [[1958]], l'URSS montre des signes d'irritation quand la politique chinoise provoque la [[deuxième crise du détroit de Taïwan]]. Les rapports sino-soviétiques se tendent et, en avril [[1960]], la presse chinoise condamne avec virulence le {{citation|[[Révisionnisme (marxisme)|révisionnisme]]}} soviétique. En juin de la même année, le congrès des partis communistes à [[Bucarest]] est le lieu de violentes disputes entre Soviétiques et Chinois ; les coopérants soviétiques de l'industrie chinoise sont rappelés. Les rapports entre les deux pays sont dès lors franchement mauvais, bien que la [[rupture sino-soviétique]] ne devienne réellement publique qu'en [[1963]]<ref>{{harvsp|Soutou|2010|p=511-515}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=318-324}}</ref>.
 
À la faveur de la rupture sino-soviétique, la [[République populaire socialiste d'Albanie|Républiquerépublique populaire d'Albanie]] s'éloigne elle aussi de l'URSS : le dirigeant albanais [[Enver Hoxha]], qui refuse la déstalinisation au nom de l'{{citation|[[anti-révisionnisme]]}}, s'en prend violemment aux Soviétiques lors du congrès de Bucarest de 1960. En [[1961]], après que l'URSS a suspendu son aide économique, l'Albanie choisit de s'aligner sur la Chine et se tient désormais à l'écart du [[bloc de l'Est]]. Différents PC à travers le monde connaissent des scissions ou comportent des fractions maoïstes : le [[Parti communiste du Brésil]], scission du [[Parti communiste brésilien]] pro-soviétique, s'aligne ainsi sur la Chine ; le [[Parti communiste d'Inde (marxiste)]] naît en 1964 en tant que dissidence pro-chinoise du [[Parti communiste d'Inde]]. L'ambition de la Chine de constituer un pôle communiste concurrent à celui de l'URSS n'a finalement guère de succès, et rien n'est fait pour créer une véritable {{citation|internationale}} maoïste. La Corée du Nord et le Nord Viêt Nam se rapprochent de la Chine, sans rompre pour autant avec l'URSS<ref name="Lew372">Roland Lew, ''Le Communisme chinois'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=372-379}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Fejtö|1972|p=167-172}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Soulet|1996|p=154-155}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Bourseiller|2008|p=58-59}}</ref>. Dans les années 1960, la Chine reste isolée : le seul État réellement aligné sur elle est l'Albanie, pays éloigné et de dimensions modestes. Un conflit avec l'Inde à propos de territoires frontaliers entraîne une [[guerre sino-indienne|brève guerre]] entre les deux pays, privant la Chine de son principal allié en Asie<ref name="Lew372" />. [[Zhou Enlai]] entretient des contacts diplomatiques en Asie et en Afrique, et la Chine se pose en champion des peuples opprimés du [[tiers-monde]] ; elle ne parvient cependant pas à susciter autour d'elle un {{citation|front uni}} cohérent<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=243-253}}</ref>.
 
===== Le désastre du Grand Bond en avant en Chine =====
{{article connexe|Grand Bond en avant|Grande famine en Chine}}
Après sa {{citation|victoire}} de 1957 sur les {{citation|droitistes}} et la reprise en main des villes frondeuses, Mao souhaite promouvoir la {{citation|voie chinoise au socialisme}}, en visant l'[[autosuffisance]] du pays et en développant un modèle spécifiquement chinois, différent du modèle soviétique jugé trop rigide. Sur son injonction, la Chine tente de rattraper à marche forcée son retard économique en mobilisant la population dans le cadre d'un effort [[productivisme|productiviste]] et d'une [[collectivisation]] accrue. Des objectifs de production totalement irréalistes sont fixés, tandis que 740000 coopératives agricoles fusionnent en 24000 [[Commune populaire|communes populaires]], pour regrouper l'ensemble des paysans chinois. Toutes les activités sont collectivisées dans le cadre du {{citation|[[Grand Bond en avant]]}}, dont Mao attend qu'il fasse {{citation|jaillir les énergies populaires}}. Cette campagne, en grande partie improvisée et dépourvue de moyens techniques adéquats, désorganise totalement l'[[agriculture]] chinoise, affamant les campagnes. Mao, face aux critiques, opère en avril 1959 une retraite stratégique et renonce au poste de président de la République, qu'il laisse à [[Liu Shaoqi]], pour se concentrer sur celui de président du Parti. Il refuse cependant d'écouter les appels à arrêter le Grand bond en avant, qu'il décide au contraire de relancer, transformant une politique dangereuse en véritable désastre économique et humain. Mao provoque ainsi [[Grande famine en Chine|l'une des pires famines de l'histoire chinoise]], causant des millions de morts (les estimations vont de 14 à 43 millions de victimes). À l'automne 1960, le gouvernement chinois est contraint, dans l'urgence, de mettre fin à l'expérience<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=156-181}}</ref>{{,}}<ref name="Brown313"/>{{,}}<ref>Roland Lew, ''Le Communisme chinois'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=369-372}}</ref>{{,}}<ref>Jean-Louis Margolin, ''Chine : une longue marche dans la nuit'', in {{harvsp|Le Livre noir du communisme|1997|p=530-541}}</ref>.
 
En parallèle, la Chine doit également gérer, en [[1959]], le [[Soulèvement tibétain de 1959|soulèvement au Tibet]] : la répression de l'insurrection fait entre 2000 et {{nombre|20000|morts}}, tandis que le [[Tenzin Gyatso|dalaï-lama]] se réfugie en [[Inde]]. En 1965, l'administration du Tibet est réorganisée, donnant naissance à la [[région autonome du Tibet]]<ref>{{harvsp|Soulet|1996|p=102}}</ref>.
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[[Image:Checkpoint Charlie 1961-10-27.jpg|vignette|Chars [[Union des républiques socialistes soviétiques|soviétiques]] et [[États-Unis|américains]] se faisant face sur [[Checkpoint Charlie]], à la limite entre [[Berlin-Est]] et [[Berlin-Ouest]].]]
[[Fichier:Potsdamer Platz, 1961-11-22.jpg|vignette|gauche|Fortifications sur la [[Potsdamer Platz]], au moment de la construction du [[mur de Berlin]] en [[1961]].]]
En Europe, les pays du [[bloc de l'Est]] connaissent des évolutions contrastées. En [[Républiquerépublique populaire de Hongrie]], [[János Kádár]] se livre, dans les années qui suivent l'écrasement de l'[[insurrection de Budapest]], à une politique de libéralisation modérée. Grâce à des réformes économiques, la Hongrie communiste connaît une période de relative prospérité, qualifiée de {{citation|[[socialisme du goulash]]}}<ref>{{harvsp|Fejtö|1972|p=104-131, 167}}</ref>{{,}}<ref name="Brown276"/>.
 
En [[République démocratique allemande]], le régime se consolide, mais demeure handicapé par l'enclave de [[Berlin-Ouest]] : cette vitrine du monde occidental permet aux Est-allemands de constater l'écart avec leurs propres conditions de vie, mais aussi de partir s'installer en [[Allemagne de l'Ouest]]. LaLe nombre important de départs vers l'Ouest aggrave les tensions diplomatiques à Berlin, qui atteignent un point culminant durant la [[Crise de Berlin (1958-1963)|crise de 1961]]. Finalement, dans la nuit du {{date|12 août 1961}}, la construction d'un mur séparant Berlin-Ouest de [[Berlin-Est]] est lancée : le [[mur de Berlin]] constitue désormais le symbole le plus visible du [[rideau de fer]] en Europe. La crise diplomatique est exacerbée par la construction du mur, mais elle s'apaise à la fin de 1961 : s'il met fin à l'exode des Est-allemands, le mur constitue un désastre en termes d'image pour la RDA et l'ensemble du camp communiste<ref>{{harvsp|Soutou|2010|p=517-557}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Service|2007|p=356-357}}</ref>.
 
[[Fichier:Prague - sculpture-communism.jpg|vignette|Le ''Mémorial des victimes du communisme'' à [[Prague]].]]
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===== La Guerre du Viêt Nam et les autres conflits en Asie du Sud-Est =====
{{article connexe|Guerre du Viêt Nam|Guerre civile laotienne|Guerre civile cambodgienne (1967-1975)|Massacres de 1965 en Indonésie}}
L'[[Asie du Sud-Est]] reste dans les [[années 1960]] un foyer de tensions et de conflits meurtriers. Après la [[guerre d'Indochine]], le Viêt Nam a été divisé entre deux États autoritaires, la [[République démocratique du Viêt Nam]] (Nord Viêt Nam) communiste et le [[république du Viêt Nam]] (Sud Viêt Nam) ; au [[Royaume du Laos|Laos]], le [[Pathet lao]], dirigé secrètement par le [[Parti révolutionnaire du peuple lao|Parti du peuple lao]] communiste, cohabite difficilement avec la droite pro-américaine et les neutralistes. [[Norodom Sihanouk]] s'efforce de préserver la neutralité du [[Royaume du Cambodge (1953-1970)|Cambodge]] mais sa volonté d'échapper à l'influence américaine, de plus en plus lourde dans la région, le conduit à se rapprocher des pays communistes ; il noue des relations amicales avec la [[république populaire de Chine]], tout en réprimant sur le plan intérieur les communistes cambodgiens (surnommés {{citation|[[Khmers rouges]]}}). Le Nord Viêt Nam soutient la rébellion au Sud Viêt Nam, tandis que les [[États-Unis]] soutiennent financièrement le régime de [[Ngô Đình Diệm]] et tentent en vain de lui faire amender ses pratiques autoritaires. La répression anticommuniste s'intensifiant, les mouvements de guérilla sudistes forment en [[1960]] le [[Front national de libération du Sud Viêt Nam]] (FNL, surnommé par ses adversaires ''Việt Cộng'', abréviation de ''communistes vietnamiens'')<ref>{{harvsp|Cesari|1995|p=126-135}}</ref>.
[[Fichier:Viet Cong002.jpg|vignette|Soldats du [[Front national de libération du Sud Viêt Nam|Việt Cộng]] durant la [[guerre du Viêt Nam]].]]
L'[[Asie du Sud-Est]] reste dans les [[années 1960]] un foyer de tensions et de conflits meurtriers. Après la [[guerre d'Indochine]], le Viêt Nam a été divisé entre deux États autoritaires, la [[République démocratique du Viêt Nam]] (Nord Viêt Nam) communiste et le [[République du Viêt Nam]] (Sud Viêt Nam) ; au [[Royaume du Laos|Laos]], le [[Pathet lao]], dirigé secrètement par le [[Parti révolutionnaire du peuple lao|Parti du peuple lao]] communiste, cohabite difficilement avec la droite pro-américaine et les neutralistes. [[Norodom Sihanouk]] s'efforce de préserver la neutralité du [[Royaume du Cambodge (1953-1970)|Cambodge]] mais sa volonté d'échapper à l'influence américaine, de plus en plus lourde dans la région, le conduit à se rapprocher des pays communistes ; il noue des relations amicales avec la [[République populaire de Chine]], tout en réprimant sur le plan intérieur les communistes cambodgiens (surnommés {{citation|[[Khmers rouges]]}}). Le Nord Viêt Nam soutient la rébellion au Sud Viêt Nam, tandis que les [[États-Unis]] soutiennent financièrement le régime de [[Ngô Đình Diệm]] et tentent en vain de lui faire amender ses pratiques autoritaires. La répression anticommuniste s'intensifiant, les mouvements de guérilla sudistes forment en [[1960]] le [[Front national de libération du Sud Viêt Nam]] (FNL, surnommé par ses adversaires ''Việt Cộng'', abréviation de ''communistes vietnamiens'')<ref>{{harvsp|Cesari|1995|p=126-135}}</ref>.
 
La [[guerre civile laotienne]] ayant repris et la contre-insurrection donnant peu de résultats au Sud Viêt Nam, les États-Unis craignent un basculement de la région dans le camp communiste, selon la logique de la [[théorie des dominos]]. L'impopularité de Diệm pousse des généraux de son armée à organiser - avec la bénédiction de la [[Central Intelligence Agency|CIA]] - un putsch contre lui : le président sud-vietnamien est tué le [[{{date|1er novembre]] [[1963]]}}. Le chaos politique au Sud tandis que la [[piste Hô Chi Minh]] - voie de communication passant le territoire laotien avec l'aide du Pathet Lao et par le territoire cambodgien avec l'autorisation de Sihanouk qui espère préserver sa neutralité - permet au Nord Viêt Nam de ravitailler le Việt Cộng. En [[1964]], la [[guerre du Viêt Nam]] est réellement lancée ; l'[[incident du golfe du Tonkin]] permet au président [[Lyndon B. Johnson]] de faire passer une [[Résolution du golfe du Tonkin|résolution]] qui lui donne toute latitude pour régler la situation en Asie du Sud-Est. Les États-Unis interviennent massivement au Viêt Nam<ref>{{harvsp|Cesari|1995|p=136-159}}</ref>. Des [[Opération Rolling Thunder|bombardements intensifs du territoire nord-vietnamien]] ne parviennent cependant pas à éviter l'enlisement du conflit, tandis que le [[Front national de libération du Sud Viêt Nam|Việt Cộng]] et l'[[Armée populaire vietnamienne]] misent sur une guerre d'usure. Avec les années, la guerre du Viêt Nam suscite dans le monde une contestation grandissante qui finit par s'étendre à l'opinion publique américaine. Le conflit touche le reste de la péninsule indochinoise : le [[Pathet lao]], soutenu par le Nord Viêt Nam, poursuit sa lutte contre la monarchie et en [[1967]], les [[Khmers rouges]] lancent une [[Guerre civile cambodgienne (1967-1975)|insurrection au Cambodge]] contre Sihanouk. En [[1968]], l'[[offensive du Tết]] prend de court les Américains : si le FNL n'obtient que des résultats mitigés et sort décimé des combats, l'ampleur de l'attaque inquiète les États-Unis qui perdent espoir de terminer rapidement la guerre<ref name="Brown337">{{harvsp|Brown|2009|p=337-350}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Cesari|1995|p=169-187}}</ref>.
 
La guerre froide a également des conséquences en [[Indonésie]] : le [[Parti communiste indonésien]], réconcilié avec le président [[Soekarno]] et qui participe désormais au gouvernement, demeure le PC le plus important d'Asie du Sud-Est. L'Indonésie se rapproche de la Chine, préoccupant les Américains, tandis que le poids des communistes suscite une tension croissante avec l'armée indonésienne. Les communistes indonésiens craignent un coup d'État militaire, et tentent dès lors de réaliser, le {{date|30 septembre 1965}}, un [[Mouvement du 30 septembre 1965 en Indonésie|soulèvement préventif]]. Le général [[Soeharto]] obtient alors les pleins pouvoirs et mène, avec l'aide des groupes musulmans conservateurs et le soutien de la CIA, une [[Massacres de 1965 en Indonésie|répression extrêmement sanglante]] : {{unité|700000|personnes}} sont arrêtées, et plusieurs centaines de milliers de communistes ou supposés tels massacrés en quelques mois. Le Parti communiste indonésien, dont les principaux cadres sont assassinés ou exécutés, est anéanti<ref>{{harvsp|Service|2007|p=392}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Soulet|1996|p=228-229}}</ref>{{,}}<ref>[[Jean-Louis Margolin]], [http://www.cairn.info/revue-internationale-de-politique-comparee-2001-1-page-59.htm Indonésie 1965 : un massacre oublié]. Revue internationale de politique comparée 1/2001 ({{abréviation discrète|vol.|volume}} 8), {{p.|59-92}}.</ref>.
 
===== La Révolutionrévolution culturelle =====
{{article détaillé|Révolution culturelle}}
[[Fichier:China - Xian 13 - Maos red book on sale at the market (135950846).jpg|vignette|gauche|Exemplaires du [[Petit Livre rouge]].]]
En [[Républiquerépublique populaire de Chine]], après le désastre du [[Grand Bond en avant]] — dont l'étendue demeure cachée durant des décennies — la Chine suit une politique de {{citation|réajustement économique}}, sous l'égide de [[Liu Shaoqi]] et [[Deng Xiaoping]]. [[Mao Zedong]], relativement mis à l'écart, décide de récupérer son influence, en s'en prenant au [[Parti communiste chinois]] lui-même et aux cadres qui discutent ses orientations<ref name="Lew372"/>. À l'automne [[1962]], il pose le principe que les [[Classe sociale|classes]] et la [[lutte des classes]] subsistent à l'intérieur du [[socialisme]], et désigne comme ennemi le {{citation|révisionnisme chinois}} ; le PCC lance dans les campagnes un {{citation|[[mouvement d'éducation socialiste]]}} afin d'éliminer les {{citation|pratiques capitalistes}} réapparues depuis 1960. À partir de 1964, Mao en appelle à une {{citation|guerre d'extermination}} contre les {{citation|bourgeois}} au sein de la bureaucratie du PCC, dont des cadres sont contraints de faire leur [[autocritique]] publique<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=263-278}}</ref>.
 
[[Fichier:Mao slogan, Xinhuamen.jpg|vignette|Slogan sur un mur à [[Pékin]] : {{citation|Vive l'invincible [[maoïsme|pensée Mao Zedong]]}} !]]
 
S'étant assuré de l'appui de l'armée et des services de sécurité, Mao fait lancer de violentes attaques contre les intellectuels. Il entretient sa propagande en diffusant par centaines de millions d'exemplaires un recueil de ses citations, le {{citation|[[Petit Livre rouge]]}}. En août [[1966]], il proclame officiellement la {{citation|[[révolution culturelle|Grande Révolution Culturelle Prolétarienne]]}}, en jouant des frustrations de la jeunesse - notamment étudiante et ouvrière - qu'il mobilise contre le Parti<ref>{{harvsp|Service|2007|p=334}}</ref>. Mao entreprend d'évincer [[Liu Shaoqi]], [[Deng Xiaoping]] et leurs partisans ; des milliers de jeunes Chinois sont embrigadés pour constituer les [[Garde rouge (Chine)|gardes rouges]], encadrés par l'armée. Ces militants, qui se présentent comme l'avant-garde de la révolution, font régner un climat de terreur et organisent de nombreuses manifestations au cours desquels des {{citation|intellectuels droitiers}} et des responsables locaux du Parti sont publiquement humiliés. Les appareils du PCC sont démantelés, Mao se servant de la Révolution culturelle pour épurer le régime. Face à un désordre dont il ne semblait pas avoir prévu l'ampleur, il décide cependant de mettre le mouvement sous tutelle militaire : l'aile la plus radicale doit se soumettre à l'[[Armée populaire de libération]]. [[Jiang Qing]], l'épouse de Mao, régente la culture chinoise durant cette période, tandis que le chef de l'armée, [[Lin Biao]], apparaît comme l'étoile montante du régime. Le Premier ministre [[Zhou Enlai]] doit quant à lui assumer la charge des affaires de l'État, en pleine désorganisation. Les gardes rouges, devenus trop indépendants, sont finalement démantelés et nombre d'entre eux sont [[Mouvement d'envoi des zhiqing à la campagne|envoyés dans les campagnes]] pour être {{citation|rééduqués}}. En 1969, au {{IXe}} congrès du PCC, la pensée du {{citation|Grand Timonier}} Mao est réintroduite dans les statuts du Parti. Destitué, le président de la République [[Liu Shaoqi]] meurt en prison. Lin Biao fait un temps figure de successeur potentiel de Mao, mais il tombe en disgrâce dès 1970 et meurt dans un accident d'avion, dans des circonstances obscures. La Révolution culturelle se termine officiellement en 1969 ; le Parti communiste chinois, épuré, revient ensuite au premier plan, et son rôle dirigeant est à nouveau mis en avant<ref name="Lew372"/>{{,}}<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=278-309}}</ref>{{,}}<ref name="Brown313"/>.
S'étant assuré de l'appui de l'armée et des services de sécurité, Mao fait lancer de violentes attaques contre les intellectuels. Il entretient sa propagande en diffusant par centaines de millions d'exemplaires un recueil de ses citations, le {{citation|[[Petit Livre rouge]]}}. En août [[1966]], il proclame officiellement la {{citation|[[révolution culturelle|grande révolution culturelle prolétarienne]]}}, en jouant des frustrations de la jeunesse - notamment étudiante et ouvrière - qu'il mobilise contre le Parti<ref>{{harvsp|Service|2007|p=334}}</ref>. Des milliers de jeunes Chinois sont embrigadés pour constituer les [[Garde rouge (Chine)|gardes rouges]], encadrés par l'armée. Ces militants, qui se présentent comme l'avant-garde de la révolution, font régner un climat de terreur et organisent de nombreuses manifestations au cours desquels des {{citation|intellectuels droitiers}} et des responsables locaux du Parti sont publiquement humiliés. Les appareils du PCC sont démantelés, Mao se servant de la révolution culturelle pour épurer le régime. Face à un désordre dont il ne semblait pas avoir prévu l'ampleur, il décide cependant de mettre le mouvement sous tutelle militaire : l'aile la plus radicale doit se soumettre à l'[[Armée populaire de libération]]. Les gardes rouges, devenus trop indépendants, sont finalement démantelés et nombre d'entre eux sont [[Mouvement d'envoi des zhiqing à la campagne|envoyés dans les campagnes]] pour être {{citation|rééduqués}}. En 1969, au {{IXe}} congrès du PCC, la pensée du {{citation|Grand Timonier}} Mao est réintroduite dans les statuts du Parti. Destitué, le président de la République [[Liu Shaoqi]] meurt en prison. [[Lin Biao]] fait un temps figure de successeur potentiel de Mao, mais il tombe en disgrâce dès 1970. La révolution culturelle se termine officiellement en 1969 ; le Parti communiste chinois, épuré, revient ensuite au premier plan, et son rôle dirigeant est à nouveau mis en avant<ref name="Lew372"/>{{,}}<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1987|p=278-309}}</ref>{{,}}<ref name="Brown313"/>.
 
===== En Afrique et au Moyen-Orient =====
En [[Afrique subsaharienne|Afrique noire]], la pénétration du communisme est laborieuse : l'[[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]] accroit après-guerre son intérêt pour l'Afrique et joue dans la carte du soutien à la [[décolonisation]]. L'URSS fonde quelque espoir sur ses alliances avec quelques pays comme la [[Guinée]], le [[Ghana]] et le [[Mali]] mais ceux-ci, bien que se réclamant du [[socialisme]], ne revendiquent pas une identité strictement marxiste-léniniste et montrent peu de cohérence idéologique. La Guinée s'éloigne de l'URSS dès [[1961]]<ref>{{harvsp|Droz|1978|p=333-338}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Soulet|1996|p=220-226}}</ref>. Le communisme gagne cependant en influence en Afrique lusophone durant les [[guerres coloniales portugaises]] : parmi les mouvements indépendantistes, le [[Front de libération du Mozambique]], le [[Mouvement populaire de libération de l'Angola]] et le [[Parti africain pour l'indépendance de la Guinée et du Cap-Vert]] évoluent, à des degrés divers, vers le marxisme<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=392-398}}</ref>. En [[République d'Afrique du Sud (1961-1994)|Afrique du Sud]], le [[Parti communiste sud-africain]], interdit depuis les [[années 1950]], s'allie avec l'[[Congrès national africain|ANC]] dans la lutte contre l'[[Apartheid]]<ref name="Brown359">{{harvsp|Brown|2009|p=359-363}}</ref>.
 
L'alliance entre [[Israël]] et les [[États-Unis]] amène l'URSS à soutenir les [[monde arabe|pays arabes]] contre l'État hébreu. Cependant, l'influence de l'URSS dans la région ne se traduit pas par des progrès spectaculaires de l'idéologie communiste dans le monde arabo-musulman. Malgré les efforts de [[Nikita Khrouchtchev|Khrouchtchev]] et les alliances avec des pays comme l'[[Égypte]] de [[Gamal Abdel Nasser|Nasser]], aucun État arabe ne rejoint le {{citation|camp socialiste}}. Ce n'est qu'en [[1967]], après l'humiliation subie par les [[nationalisme arabe|nationalistes arabes]] lors de la [[guerre des Six Jours]], que l'idéologie communiste fait de véritables progrès dans les pays arabes, avec l'apparition de mouvements marxistes-léninistes comme le [[Front populaire de libération de la Palestine]] et la proclamation au sud du [[Yémen]] de la [[Républiquerépublique démocratique populaire du Yémen]] (''Yémen du Sud''), seul régime communiste du Moyen-Orient. Bien que gagnant du terrain, le communisme n'acquiert cependant aucune prééminence dans le monde arabe. En [[Syrie]], le [[Parti communiste syrien|Parti communiste]] est allié au [[Parti Baas (Syrie)|Baas]], mais lui demeure subordonné. En [[République d'Irak (1968-2003)|Irak]], après le retour au pouvoir du [[Parti Baas (Irak)|Baas]] en [[1968]], le [[Parti communiste irakien]] se rapproche du nouveau régime, mais il est ensuite violemment réprimé sous la présidence de [[Saddam Hussein]]<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=377, 471-472}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Droz|1978|p=303-307}}</ref>.
 
===== Le Printemps de Prague =====
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===== Stagnation politique en URSS =====
[[Fichier:General Secretary Brezhnev - NARA - 194524 cropped.jpg|vignette|[[Léonid Brejnev]] en [[1973]].]]
En URSS, l'ère [[Léonid Brejnev|Brejnev]] se traduit par une certaine stagnation politique : Brejnev lui-même, qui s'appuie sur un système de [[clientélisme]], apparaît avant tout au sein du [[Parti communiste de l'Union soviétique|PCUS]] comme une figure consensuelle et conservatrice. Les réformes économiques marquent progressivement le pas et l'industrie comme l'agriculture s'essoufflent. Sur le plan international, l'URSS poursuit la politique de [[Détente (guerre froide)|détente]] avec l'Occident et tente une réconciliation avec la [[Républiquerépublique populaire de Chine]] tout en s'efforçant de consolider ses positions dans le tiers-monde. Des [[négociations sur la limitation des armements stratégiques]] sont poursuivies avec les États-Unis : l'accord SALT-1 de 1972 consacre la reconnaissance de l'URSS comme grande puissance. Malgré ses succès diplomatiques, l'URSS souffre en interne du faible taux de renouvellement de son élite dirigeante, quasi immuable et de plus en plus vieillissante, comme de ses lourdeurs bureaucratiques. Des dissidences se développent en URSS, à des degrés très divers : [[Alexandre Soljenitsyne]], expulsé d'Union soviétique après avoir publié en 1973 ''[[L'Archipel du Goulag]]'', en est l'exemple le plus célèbre. Au sein même de l'appareil soviétique, de nombreux cadres souhaitent des réformes, sans pouvoir exprimer ouvertement leurs opinions<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=475-535}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=405-418}}</ref>.
 
===== Politiques du régime castriste à Cuba =====
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Le régime de [[Fidel Castro]] réalise des avancées sociales en créant un système de santé performant et en améliorant l'éducation. Mais si les inégalités de [[niveau de vie]] ont été réduites, les problèmes économiques demeurent profonds<ref name="Vayssière307">{{harvsp|Vayssière|2001|p=307-312}}</ref>. La population est encadrée par un ensemble d'organisations et de lois répressives - visant entre autres les [[Homosexualité|homosexuels]] ou les {{citation|hippies}} - et par une surveillance policière à grande échelle. Les compagnons de route de Castro rétifs au virage marxiste tombent en disgrâce et sont souvent emprisonnés. Le [[Parti communiste de Cuba]] reste parti unique<ref>{{harvsp|Vayssière|2001|p=148-149}}</ref>, les frères Castro et leur entourage refusant tout pluralisme<ref name="Vayssière307"/>.
 
Sur le plan international, Cuba, qui se présente comme une tête de pont du combat [[tiers-mondisme|tiers-mondiste]] contre l'[[impérialisme américain]], prône l'exportation de la révolution, jouant un jeu de balancier entre son alliance étroite avec le bloc de l'Est et son appartenance au [[Mouvement des non-alignés]]. De nombreux coopérants civils et militaires sont envoyés en Afrique : dans les [[années 1970]], les troupes cubaines viennent soutenir le [[Mouvement populaire de libération de l'Angola|MPLA]] dans la [[guerre civile angolaise]]<ref>{{harvsp|Vayssière|2001|p=165-169}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=365-366}}</ref>. En septembre [[1979]], Castro est élu à la présidence du Mouvement des non-alignés. Au sommet de son rayonnement international, il ambitionne de faire du Mouvement un nouvel axe anti-américain et pro-soviétique : mais, quelques mois après son élection, sa position est affaiblie par l'[[Guerre d'Afghanistan (1979-1989)|invasion soviétique de l'Afghanistan]]. Forcé de prendre position alors que l'URSS attaque un pays non-aligné, Castro choisit de soutenir les Soviétiques, ce qui le décrédibilise durant son mandat<ref>Brian Latell, ''{{Lang|en|texte=After Fidel}}'', Palgrave MacMillan, 2007, pagesp. 194-200</ref>.
 
===== Basculements du Viêt Nam, du Laos et du Cambodge =====
{{Article connexe|Crimes du régime khmer rouge}}
[[Fichier:South China Sea....A refugee woman cares for three small children on the replenishment oiler USS Wabash, AOR-5.... - NARA - 558538.tifjpg|vignette|[[Boat-people]] vietnamiens en 1979.]]
En [[1975]], la fin de la [[guerre du Viêt Nam]] et des conflits annexes au Laos et au Cambodge entraîne une avancée spectaculaire du communisme en [[Asie du Sud-Est]]. En 1969, l'enlisement du conflit vietnamien contribue à la décision du président américain [[Lyndon B. Johnson]] de ne pas se représenter. Le nouveau président, [[Richard Nixon]], vise à mettre un terme à la guerre mais, en attendant de pouvoir ouvrir des négociations, continue de vouloir contenir les communistes dans la péninsule : les territoires laotien, puis cambodgien, sont massivement bombardés pour tenter de couper la [[piste Hô Chi Minh]]. Au Cambodge, où l'insurrection progresse, Sihanouk est renversé par un coup d'État avec l'approbation des États-Unis ; en parallèle, les bombardements américains poussent de nombreux Cambodgiens à rejoindre les [[Khmers rouges]]. Sihanouk, réfugié à Pékin, forme avec les Khmers rouges, sur le conseil des Chinois, un {{citation|[[Front uni national du Kampuchéa|Front uni national]]}} sans connaître réellement ses nouveaux alliés<ref>{{harvsp|Cesari|1995|p=187-219}}</ref>{{,}}<ref name="Margolin631">Jean-Louis Margolin, ''Cambodge : au pays du crime déconcertant'', {{harvsp|Le Livre noir du communisme|1997|p=631-695}}</ref>. En janvier [[1973]], les négociations entre Américains et Nord-Vietnamiens aboutissent à la signature des [[accords de paix de Paris]], qui prévoient le retrait des troupes américaines. Au Laos, le [[Pathet lao]] obtient de former un gouvernement d'union nationale avec les monarchistes. Les Khmers rouges, soutenus par la Chine, refusent en revanche de participer aux pourparlers. Au printemps [[1975]], les communistes prennent le pouvoir au Viêt Nam, au Cambodge et au Laos. Les Khmers rouges s'emparent de la capitale cambodgienne, tandis que les Nord-Vietnamiens repassent à l'offensive contre le Sud Viêt Nam et [[Chute de Saïgon|prennent Saïgon]]. Au Laos, le Pathet Lao réalise un coup d'État et abolit la monarchie. En 1976, le [[Gouvernement révolutionnaire provisoire de la République du Sud Viêt Nam|Gouvernement révolutionnaire provisoire]] du [[Front national de libération du Sud Viêt Nam|FNL]] et le [[République démocratique du Viêt Nam|Nord Viêt Nam]] fusionnent : le [[Viêt Nam]] est réunifié sous le nom de ''Républiquerépublique socialiste du Viêt Nam'' et le [[Parti communiste vietnamien]] devient [[parti unique]]<ref>{{harvsp|Cesari|1995|p=221-247}}</ref>{{,}}<ref name="Brown337"/>.
 
[[Fichier:Skulls at Tuol Sleng.JPG|vignette|gauche|Crânes des victimes des [[Khmers rouges]] dans la prison de [[Tuol Sleng]].]]
Plusieurs centaines de milliers de {{citation|[[boat-people]]}} fuient au fil des années le [[Viêt Nam]]<ref>{{Lien web|langue=en |url=http://necrometrics.com/20c300k.htm#VN75 |titre= Vietnam, post-war Communist regime (1975 et seq.): 365,000 |mois= mars |année= 2011 |éditeur= Secondary Wars and Atrocities of the Twentieth Century |consulté le= 27 mai 2008}}.</ref>. Au [[Laos]], la prise de pouvoir par les communistes provoque la fuite à l'étranger, en quelques années, d'environ {{formatnum:400000}} Laotiens, soit 10 % de la population<ref>Carine Hahn, ''Le Laos'', Karthala, 1999, pages 36, 126-127</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=342-344}}</ref>. Le Laos devient un satellite du Viêt Nam et les deux pays s'alignent sur l'URSS<ref>{{harvsp|Soulet|1996|p=231-233}}</ref> ; le Viêt Nam rejoint en 1978 le [[Conseil d'assistance économique mutuelle]]<ref>{{harvsp|Service|2007|p=402-404}}</ref>.
 
Plusieurs centaines de milliers de {{citation|[[boat-people]]}} fuient au fil des années le [[Viêt Nam]]<ref>{{Lien web|langue=en |url=http://necrometrics.com/20c300k.htm#VN75 |titre= Vietnam, post-war Communist regime (1975 et seq.): 365,000 |mois= mars |année= 2011 |éditeur= Secondary Wars and Atrocities of the Twentieth Century |consulté le= 27 mai 2008}}.</ref>. Au [[Laos]], la prise de pouvoir par les communistes provoque la fuite à l'étranger, en quelques années, d'environ {{formatnum:400000}} Laotiens, soit 10 % de la population<ref>Carine Hahn, ''Le Laos'', Karthala, 1999, p. 36, 126-127</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=342-344}}</ref>. Le Laos devient un satellite du Viêt Nam et les deux pays s'alignent sur l'URSS<ref>{{harvsp|Soulet|1996|p=231-233}}</ref> ; le Viêt Nam rejoint en 1978 le [[Conseil d'assistance économique mutuelle]]<ref>{{harvsp|Service|2007|p=402-404}}</ref>.
Au Cambodge, dès leur victoire, les [[Khmers rouges]] appliquent une politique particulièrement extrémiste : ils font évacuer toutes les villes du pays et obligent la population à s'installer dans les campagnes, dans des conditions désastreuses qui causent la mort de milliers de personnes. Norodom Sihanouk, officiellement chef de l'État, ne revient au pays qu'au bout de plusieurs mois : il réalise tardivement la situation, puis est mis en résidence surveillée. Le pays est rebaptisé [[Kampuchéa démocratique]] en janvier [[1976]] ; en avril, le secrétaire de l'[[Parti communiste du Kampuchéa|Angkar]], Saloth Sâr alias {{citation|[[Pol Pot]]}}, véritable maître du pays depuis avril 1975, devient Premier ministre<ref name="Margolin631"/>{{,}}<ref name="Brown337"/>{{,}}<ref name="cesari249">{{harvsp|Cesari|1995|p=249-274}}</ref>. Le régime, qui tente de faire passer directement le pays au stade du communisme intégral, fonctionne dans l'arbitraire le plus total. La population, mise au travail forcé aux champs, survit dans des conditions relevant de l'[[esclavage]], sans droit à la propriété privée ni même à la vie privée. L'incompétence des Khmers rouges contribue à provoquer au Cambodge une terrible famine : s'y ajoutent les exécutions gratuites {{Incise|tout peut devenir prétexte à l'application immédiate de la peine de mort}} les persécutions ethniques et religieuses et les purges sanglantes de l'appareil, ce qui entraîne [[Crimes du régime Khmer rouge|la mort entre 1975 et 1979]], de centaines de milliers de personnes. Les estimations du nombre de victimes varient beaucoup : le chiffre le plus crédible se monte à 1,7 million, soit 21 % de la population cambodgienne de l'époque<ref name="Margolin631"/>{{,}}<ref name="Brown337"/>{{,}}<ref>Frank Chalk, Kurt Jonassohn, ''{{Lang|en|texte=The History and Sociology of Genocide: Analyses and Case Studies}}'', {{Lang|en|texte=Yale University Press}}, 1990, page 406</ref>.
 
Au Cambodge, dès leur victoire, les [[Khmers rouges]] appliquent une politique particulièrement extrémiste : ils font évacuer toutes les villes du pays et obligent la population à s'installer dans les campagnes, dans des conditions désastreuses qui causent la mort de milliers de personnes. Norodom Sihanouk, officiellement chef de l'État, ne revient au pays qu'au bout de plusieurs mois : il réalise tardivement la situation, puis est mis en résidence surveillée. Le pays est rebaptisé [[Kampuchéa démocratique]] en janvier [[1976]] ; en avril, le secrétaire de l'[[Parti communiste du Kampuchéa|Angkar]], Saloth Sâr alias {{citation|[[Pol Pot]]}}, véritable maître du pays depuis avril 1975, devient Premier ministre<ref name="Margolin631"/>{{,}}<ref name="Brown337"/>{{,}}<ref name="cesari249">{{harvsp|Cesari|1995|p=249-274}}</ref>. Le régime, qui tente de faire passer directement le pays au stade du communisme intégral, fonctionne dans l'arbitraire le plus total. La population, mise au travail forcé aux champs, survit dans des conditions relevant de l'[[esclavage]], sans droit à la propriété privée ni même à la vie privée. L'incompétence des Khmers rouges contribue à provoquer au Cambodge une terrible famine : s'y ajoutent les exécutions gratuites {{Incise|tout peut devenir prétexte à l'application immédiate de la peine de mort}} les persécutions ethniques et religieuses et les purges sanglantes de l'appareil, ce qui entraîne [[Crimes du régime Khmer rouge|la mort entre 1975 et 1979]], de centaines de milliers de personnes. Les estimations du nombre de victimes varient beaucoup : le chiffre le plus crédible se monte à 1,7 million, soit 21 % de la population cambodgienne de l'époque<ref name="Margolin631"/>{{,}}<ref name="Brown337"/>{{,}}<ref>Frank Chalk, Kurt Jonassohn, ''{{Lang|en|texte=The History and Sociology of Genocide: Analyses and Case Studies}}'', {{Lang|en|texte=Yale University Press}}, 1990, p. 406</ref>.
 
Les mauvaises relations des Khmers rouges avec le Viêt Nam voisin tournent bientôt au conflit ouvert : le {{date|25 décembre 1978}}, l'[[Armée populaire vietnamienne]] [[Guerre Cambodge-Viêt Nam|envahit le Cambodge]] et les [[Khmers rouges]] sont chassés du pouvoir en moins de deux semaines. Un nouveau régime communiste cambodgien, la [[Républiquerépublique populaire du Kampuchéa]], est mis en place avec le soutien du Viêt Nam et de l'URSS<ref name="Margolin631"/>{{,}}<ref name="Brown337"/>{{,}}<ref name="cesari249"/>.
 
===== Progrès du communisme dans le tiers-monde =====
[[Fichier:Coat of armsEmblem of Mozambique (1975-1982).svg|vignette|gauche|Premières armoiries de la [[Républiquerépublique populaire du Mozambique]].]]
Entre la fin des [[années 1960]] et le milieu des [[années 1970]], le communisme fait également d'importants progrès en [[Afrique subsaharienne|Afrique noire]]. La [[République démocratique somalie]], présidée par le général [[SiyaadMohamed Siad Barre]], est proclamée en octobre [[1969]], et la [[Républiquerépublique populaire du Congo]], le [[31 décembre]] de la même année. En novembre [[1974]], [[Mathieu Kérékou]], président du [[République du Dahomey|Dahomey]], proclame l'adhésion au [[marxisme-léninisme]] de son pays, rebaptisé l'année suivante [[Républiquerépublique populaire du Bénin]]. La [[Empire d'Éthiopie|monarchie éthiopienne]] est renversée en septembre [[1974]] par la junte militaire du [[Gouvernement militaire provisoire de l'Éthiopie socialiste|Derg]], qui forme le [[Gouvernement militaire provisoire de l'Éthiopie socialiste]]. Un vieux conflit territorial entre la Somalie et l'Éthiopie débouche, en 1977, sur la [[guerre de l'Ogaden]] : l'[[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]] et [[Cuba]] choisissent de soutenir l'Éthiopie de [[Mengistu Haile Mariam]], pays plus développé et qui leur paraît un allié plus intéressant. La Somalie rompt alors avec l'URSS : tout en continuant de se dire {{citation|marxiste-léniniste}}, elle se rapproche de l'Occident et des monarchies arabes. Le soutien à l'Éthiopie cause cependant des problèmes aux Soviétiques, le régime de Mengistu n'ayant ni institutions stables ni vraie idéologie. Le dirigeant éthiopien mène par ailleurs une [[Terreur rouge (Éthiopie)|répression extrêmement meurtrière]], tandis que le pays est [[Guerres civiles en Éthiopie|ravagé par une série de guerres]]<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=480-486}}</ref>{{,}}<ref name="Courtois70">{{harvsp|Courtois|2007|p=70-75}}</ref>{{,}}<ref name="Soulet221">{{harvsp|Soulet|1996|p=221-226}}</ref>{{,}}<ref name="Brown364">{{harvsp|Brown|2009|p=364-369}}</ref>. En décembre [[1975]], [[Didier Ratsiraka]] devient le président de la [[Républiquerépublique démocratique de Madagascar]], régime d'inspiration nettement marxiste-léniniste<ref>Revue ''Madagascar Océan Indien'' {{numéro}}4, l'Harmattan, 1991, pagep. 117</ref>.
 
Dans les colonies portugaises, l'indépendance est accélérée par la [[révolution des Œillets]] en métropole, elle-même provoquée en partie par les guerres coloniales. En [[1975]], la victoire des indépendantistes marxistes est suivie de l'apparition de nouveaux régimes communistes : le [[Front de libération du Mozambique|FRELIMO]] proclame l'indépendance de la [[Républiquerépublique populaire du Mozambique]] mais doit par la suite mener une [[Guerre civile du Mozambique|guerre civile]] contre la [[Résistance nationale du Mozambique|RENAMO]] ; le [[Mouvement populaire de libération de l'Angola|MPLA]] proclame quant à lui la [[Républiquerépublique populaire d'Angola]] mais se trouve lui aussi en [[Guerre civile angolaise|guerre civile]] avec l'[[Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola|UNITA]], mouvement indépendantiste concurrent. Le MPLA est soutenu par l'URSS et Cuba, tandis que l'UNITA reçoit l'appui des États-Unis et de l'[[République d'Afrique du Sud (1961-1994)|Afrique du Sud]]<ref name="Brown364"/>{{,}}<ref name="Soulet221"/>{{,}}<ref name="Priestland469">{{harvsp|Priestland|2009|p=469-480}}</ref>{{,}}<ref name="Courtois70"/>. Les régimes communistes africains n'ont guère de cohérence idéologique, le marxisme-léninisme professé par leurs dirigeants étant assez superficiel<ref name="Soulet221"/> : l'URSS a quelque difficulté à classer politiquement ses alliés africains, pour lesquels elle crée l'appellation {{citation|États d'orientation socialiste}}<ref>Yves Santamaria, ''Afrocommunismes : Éthiopie, Angola, Mozambique'', in {{harvsp|Le Livre noir du communisme|1997|p=747}}</ref>{{,}}<ref name="Courtois70"/>.
 
En [[Inde]], les deux PC locaux, le [[Parti communiste d'Inde]] et le [[Parti communiste d'Inde (marxiste)]], s'implantent durablement, bien que leurs électorats restent concentrés dans certaines régions. Le PCI oscille entre l'opposition au [[Parti du Congrès|Congrès]] et l'alliance avec celui-ci. Le PCI(m), initialement proche de la Chine, s'en éloigne au moment de la [[révolution culturelle]]. Les [[maoïsme|maoïstes]] radicaux, qui multiplient les actions violentes, sont exclus en [[1968]] du PCI(m) : constituant la tendance dite [[naxalisme|naxalite]], ils se lancent dans [[Rébellion naxalite|la lutte armée contre le gouvernement]]. Le PCI(m) recentre quant à lui ses positions et s'en tient, comme le PCI, à la voie parlementaire ; à partir des [[années 1970]], ses scores électoraux dépassent ceux du PC d'origine qui s'allie de plus en plus avec le Congrès. À la même époque, le PCI(m) gagne les élections au [[Kerala]] et au [[Bengale-Occidental]], où il gouvernera ensuite durant plusieurs décennies. Les PC indiens adoptent cependant tous deux des positions de plus en plus [[réformisme|réformiste]]s<ref>{{harvsp|Droz|1978|p=135-142}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=357-358}}</ref>{{,}}<ref>[[Christophe Jaffrelot]] (directeur), ''L'inde contemporaine, de 1950 à nos jours'', Fayard-Ceri, 2006, pagep. 451</ref>.
 
===== Évolution politique en Chine =====
[[Fichier:Deng Xiaoping and Jimmy Carter sign diplomatic agreements between the United States and China. - NARA - 183276.tiff|vignette|[[Deng Xiaoping]] rencontrant le président américain [[Jimmy Carter]] en [[1979]].]]
En [[Républiquerépublique populaire de Chine]], [[Mao Zedong]], vieillissant, délègue de plus en plus ses responsabilités ; il se contente pour l'essentiel de tenir l'équilibre entre ses partisans, regroupés autour de son épouse [[Jiang Qing]], et les cadres plus modérés dirigés par [[Zhou Enlai]] et [[Deng Xiaoping]], ce dernier étant revenu sur le devant de la scène en 1973. Peu à peu, la balance penche en faveur des modérés tandis que la Chine se remet lentement de la [[Révolutionrévolution culturelle]]. Les relations avec l'URSS demeurent très mauvaises et dégénèrent même, en 1969, en un bref [[Conflit frontalier sino-soviétique de 1969|conflit frontalier]]. [[Zhou Enlai]] mène alors une politique d'ouverture en direction des [[États-Unis]] : la Républiqueépublique populaire peut sortir de l'isolement diplomatique et, en 1971, récupère le siège de la Chine à l'[[Organisation des Nations unies|ONU]] au détriment de [[République de Chine (Taïwan)|Taïwan]]. En [[1972]], la [[Visite de Richard Nixon en Chine en 1972|visite en Chine du président Nixon]] scelle le rapprochement sino-américain<ref name="Lew372"/>{{,}}<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1995|p=361-390}}</ref>.
 
[[Zhou Enlai]] meurt en janvier [[1976]], et [[Mao Zedong]] en septembre de la même année. Dès octobre, le camp des radicaux est décapité avec l'arrestation de la {{citation|[[Bande des Quatre]]}} (la veuve de Mao, [[Jiang Qing]], et trois de ses alliés). [[Deng Xiaoping]], chef de file des réformateurs du [[Parti communiste chinois]], devient ensuite l'homme fort du régime, évinçant [[Hua Guofeng]] qui avait succédé à Mao et Zhou Enlai. Tout en maintenant le caractère autoritaire du régime et la domination du [[Parti communiste chinois|PCC]], Deng réorganise l'économie chinoise. Recherchant avant tout l'efficacité, il prône le passage à une {{citation|[[économie socialiste de marché]]}}. Sur le plan international, la Républiquerépublique populaire de Chine cultive ses bons rapports avec l'Occident. Le communisme chinois est progressivement vidé de sa substance idéologique et subsiste essentiellement en tant que régime dictatorial<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1995|p=390-398, 407-448, 632-644}}</ref>.
 
===== Dans le monde occidental =====
====== Les principaux partis européens ======
[[Fichier:Mineo pci.jpg|vignette|Siège historique de la section du [[Parti communiste italien]], à [[Mineo]] ([[Sicile]]).]]
Dans la majorité des démocraties d'Europe de l'Ouest, les partis communistes sont des mouvements très minoritaires, à l'influence limitée : ils demeurent cependant puissants dans plusieurs pays. En [[Finlande]], en vertu de la [[Finlandisation|politique d'amitié avec l'URSS]] du président [[Urho Kekkonen|Kekkonen]], le [[Parti communiste de Finlande (1918)|Parti communiste de Finlande]] participe à plusieurs gouvernements de coalition entre [[1966]] et [[1983]]<ref>David Childs (dir.), ''{{Lang|en|texte=The Changing Face of Western Communism}}'', Croom Helm Ltd, 1980, pagep. 172</ref>.
 
En [[France]], le [[Parti communiste français]] conserve, jusque dans les [[années 1970]], une position dominante à gauche. Il se rapproche du [[Parti socialiste (France)|Parti socialiste]] avec lequel il signe en juin 1972 un [[programme commun]] de gouvernement : l'alliance PCF-PS frôle la victoire lors de la [[Élection présidentielle française de 1974|présidentielle de 1974]]. [[Georges Marchais]], chef du PCF, oscille cependant entre des influences antagonistes, privilégiant selon le contexte son alliance avec le PS ou l'état des relations avec l'URSS<ref>{{harvsp|Courtois|Lazar|1993|p=347-351}}</ref>.
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En [[Italie]], la nouvelle génération de cadres du [[Parti communiste italien]], comme [[Enrico Berlinguer]] ou [[Giorgio Napolitano]], prône un recentrage. Tout en demeurant allié de l'URSS, le PCI, qui conserve d'importants bastions et gagne même des électeurs, devient avec les années l'un des partis communistes occidentaux les plus modérés et les plus indépendants, jusqu'à s'apparenter dans les faits à un parti [[Social-démocratie|social-démocrate]]<ref>{{harvsp|Colarizi|2000|p=367-368}}</ref>. En 1972, Berlinguer devient secrétaire général du PCI, dont il accentue l'évolution ; en 1973, il propose un {{citation|[[compromis historique]]}} à la [[Démocratie chrétienne (Italie)|Démocratie chrétienne]] pour parvenir à un accord de gouvernement<ref name="Courtois441"/>.
 
La chute de plusieurs dictatures durant les [[années 1970]] permet à des divers PC de sortir de la clandestinité, mais pas d'accéder au pouvoir. Après la chute, en [[1974]], de la [[dictature des colonels]], le [[Parti communiste de Grèce]] est autorisé. Toujours strictement aligné sur l'URSS, il continue d'attirer environ 10 % de l'électorat mais n'est plus, comme avant-guerre, le parti dominant de la gauche grecque : la place lui est ravie par le [[Mouvement socialiste panhellénique|PASOK]]<ref>Nikos Marantzidis, in ''Communist and post-communist parties in Europe'', Vandenhoeck & Ruprecht, 2008, {{p.|246-253}}</ref>. Au [[Portugal]], la chute du régime de l'[[Estado Novo (Portugal)|Estado Novo]] en [[1974]] est favorisée par les [[Guerres coloniales portugaises|guerres coloniales]] : après la [[révolution des Œillets]], le [[Parti communiste portugais]] dirigé par [[Álvaro Cunhal]], est autorisé et rejoint la coalition au pouvoir. Son activisme fait un temps croire à un possible basculement du Portugal dans le camp communiste, mais le PCP est largement distancé par la gauche modérée lors des [[Élections constituantes portugaises de 1975|élections constituantes de 1975]] ; une nouvelle révolution au Portugal apparaît bientôt improbable<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=475-476}}</ref>. Le [[Parti communiste d'Espagne]] connaît une situation comparable : autorisé après la fin du [[Espagne franquiste|franquisme]], le PCE ne parvient pas à prendre le leadershipcontrôle de la gauche espagnole, qui revient aux [[Parti socialiste ouvrier espagnol|socialistes]]<ref>[http://countrystudies.us/spain/83.htm Country studies : SPAIN], site de la [[Bibliothèque du Congrès]]</ref>. [[Saint-Marin]] constitue à nouveau une exception : le [[Parti communiste saint-marinais]], qui avait déjà gouverné entre 1945 et 1957, revient en effet au pouvoir en [[1978]]. En [[1986]], ne disposant plus d'une majorité suffisante, il forme une coalition avec les [[Parti démocrate-chrétien saint-marinais|démocrates-chrétiens]] locaux<ref name="sanmarino"/>.
 
====== L'extrême-gauche en Occident ======
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De multiples mouvements d'[[extrême gauche]] apparaissent à l'époque. Des partis [[Maoïsme|maoïstes]] opposés à la [[déstalinisation]] naissent dans les [[années 1960]] après la [[rupture sino-soviétique]]<ref>{{harvsp|Bourseiller|2008|p=108-109}}</ref>. Le maoïsme, par sa radicalité et son apparente nouveauté, attire de nombreux militants, guère informés sur les réalités chinoises<ref name="Service371"/> : il séduit certaines personnalités de l'[[intelligentsia]] et du monde culturel comme [[Jean-Paul Sartre]]. Au début des [[années 1970]], les mouvements maoïstes ont une influence et une visibilité disproportionnée par rapport à leurs modestes effectifs. Cependant, ils disparaissent pour la plupart avec le temps<ref>{{harvsp|Bourseiller|2008|p=210-334}}</ref>. Dans les [[années 1980]], des groupes radicaux opposés à la libéralisation du régime chinois continuent d'exister, mais n'ont plus guère de visibilité en Occident<ref>{{harvsp|Bourseiller|2008|p=412-414}}</ref>.
 
Les mouvements [[Trotskisme|trotskistes]] français se renforcent à partir des années 1960, sans pour autant sortir de la marginalité ni surmonter leurs divisions. La [[Ligue communiste révolutionnaire]], dirigée par [[Alain Krivine]], subit ainsi la concurrence de [[Lutte ouvrière]] dont [[Arlette Laguiller]] est la porte-parole. Les [[Courant lambertiste|lambertistes]] détiennent quant à eux des positions dans divers appareils syndicaux. Militants de la LCR et lambertistes essaiment dans les syndicats, les associations et les partis socialistes modérés, où ils pratiquent l'[[entrisme]] ; cependant, de nombreux militants s'éloignent du trotskisme pour intégrer les partis de la gauche modérée<ref>{{harvsp|Raynaud|2010|p=74-93}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Nick|2002|p=485-557}}</ref>. Diverses causes que les partis communistes orthodoxes condamnent ou négligent à l'époque, comme le [[féminisme]] ou le [[militantisme homosexuel]], sont portées dans les [[années 1970]] par des milieux d'[[extrême gauche]] ou naissent en leur sein, et ne s'imposent que progressivement au reste de la gauche, communistes compris<ref>{{harvsp|Raynaud|2010|p=34-35}}</ref>.
 
Au cours de la période des {{citation|[[Années de plomb (Italie)|années de plomb]]}} qui se déroule principalement durant les [[années 1970]], divers groupes d'[[extrême gauche]] passent, dans des pays occidentaux ou occidentalisés, à l'action violente en commettant attentats et assassinats. C'est le cas des [[Brigades rouges]] en [[Italie]] ou de la [[Fraction armée rouge]] en [[Allemagne de l'Ouest]], mais aussi, hors d'Europe, de l'[[Armée rouge japonaise]] qui participe au [[conflit israélo-palestinien]] en s'alliant avec le [[Front populaire de libération de la Palestine]]<ref name="Priestland464"/>{{,}}<ref name="Courtois566">{{harvsp|Courtois|2007|p=566-567}}</ref>. Parmi ces groupes [[Terrorisme|terroristes]], certains reçoivent l'aide des services secrets de l'Est, comme la Fraction armée rouge soutenue par la [[Ministère de la Sécurité d'État|Stasi]] [[République démocratique allemande|est-allemande]]<ref name="Priestland464"/>{{,}}<ref name="Courtois566"/>.
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===== La fausse victoire des Soviétiques à Helsinki =====
[[Fichier:Bundesarchiv Bild 183-K0617-0001-163, Berlin, VIII. SED-Parteitag, Breshnew, Honecker.jpg|vignette|[[Léonid Brejnev]] rencontrant en [[1971]] [[Erich Honecker]], dirigeant de la [[République démocratique allemande|RDA]].]]
En [[1975]], dans un contexte international où les États-Unis sont affaiblis politiquement par la [[guerre du Viêt Nam]] et l'[[Scandale du Watergate|affaire du Watergate]] et alors que le nombre de régimes communistes dans le monde est plus élevé que jamais, l'URSS et ses alliés du [[bloc de l'Est]] remportent ce qui apparaît alors comme un grand succès diplomatique. Les [[accords d'Helsinki]] reconnaîtreconnaissent en effet de manière définitive les frontières européennes issues de la [[Seconde Guerre mondiale]], les signataires s'engageant à ne pas les modifier par la force. Les accords contiennent cependant en germe des problèmes futurs pour le bloc de l'Est, et certains éléments de sa future dissolution : les textes affirment en effet les principes des [[droits de l'homme]] et du droit à la libre information, et précisent que les frontières peuvent être modifiées par des voies pacifiques, en accord avec la loi internationale<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=460-464}}</ref>.
 
===== Crises en Amérique latine =====
En [[1970]], l'influence communiste semble s'accroître en Amérique latine quand le socialiste [[Salvador Allende]], candidat de la coalition de l'[[Unidad Popular]] qui comprend le [[Parti socialiste du Chili|Parti socialiste]] et le [[Parti communiste du Chili|Parti communiste]], est élu président du [[Chili]]. Si Allende plaide pour une transition démocratique vers le socialisme, le soutien que lui apporte [[Fidel Castro]] brouille l'image de son gouvernement, tandis que sa politique de nationalisations contribue à causer une crise économique dans le pays. Le général [[Augusto Pinochet]], soutenu par la [[Central Intelligence Agency|CIA]], renverse le gouvernement lors d'un [[Coup d'État du 11 septembre 1973 au Chili|coup d'État]], aule cours11 duquelseptembre 1973 ; pour ne pas être capturé, Allende trouvese lasuicide mortlors du coup<ref>{{harvsp|Service|2007|p=406-409}}</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |langue=fr-ca |prénom=Zone International- |nom=ICI.Radio-Canada.ca |titre=L'ex-président chilien Salvador Allende s'est bien suicidé, confirme l'autopsie |url=https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/524025/augusto-pinochet-suicide-autopsie |site=Radio-Canada |date=2011-07-19 |consulté le=2024-01-12}}</ref>.
 
Après cet échec d'une conquête démocratique du pouvoir, les mouvements de guérilla latino-américains (d'inspiration castriste, guévariste, ou [[maoïsme|maoïste]]) connaissent un regain d'activité durant le reste des [[années 1970]], tout particulièrement en [[Crise en Amérique centrale|Amérique centrale]]. Le succès de la [[révolution sandiniste]] au [[Nicaragua]] leur apporte un second souffle décisif<ref name="Vayssière188">{{harvsp|Vayssière|2001|p=188-200}}</ref>{{,}}<ref name="Soulet219">{{harvsp|Soulet|1996|p=219-220}}</ref> : en [[1979]], le [[Front sandiniste de libération nationale]], d'inspiration castriste, parvient à renverser le régime en place. Soutenus par les pays communistes et notamment par Cuba, les sandinistes entreprennent de mettre en œuvre un projet {{citation|révolutionnaire}} et connaissent une dérive autoritaire, mais sans pour autant interdire l'opposition ni procéder à une étatisation totale de l'économie, n'allant pas au bout de la transformation du Nicaragua en pays communiste. Ils doivent en outre affronter la guérilla des [[Contras]], soutenue par les États-Unis<ref name="Vayssière239">{{harvsp|Vayssière|2001|p=239-260}}</ref>{{,}}<ref name="Service469">{{harvsp|Service|2007|p=469}}</ref>. Au [[Pérou]], la guérilla [[maoïsme|maoïste]] du [[Sentier lumineux]], à l'idéologie particulièrement extrémiste, se développe dans les [[années 1980]] et fait régner la terreur dans certaines régions<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=566-567}}</ref>.
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====== Le cas du Cambodge ======
{{article connexe|Conflit cambodgien (1978-1999)}}
En Asie, le Cambodge devient, après son invasion par le [[Viêt Nam]], un théâtre de la rivalité sino-soviétique en [[Asie du Sud-Est]]. En février [[1979]], peu après le renversement des [[Khmers rouges]] avec lesquels elle était alliée, la [[Républiquerépublique populaire de Chine]] attaque le Viêt Nam en représailles : le bref [[guerre sino-vietnamienne|conflit sino-vietnamien]] s'achève par le retrait des troupes chinoises. Dans les années qui suivent, les [[Khmers rouges]], qui ont reconstitué leurs forces en Thaïlande, reprennent le combat contre les Vietnamiens. Le [[Conflit cambodgien (1978-1999)|conflit au Cambodge]], qui oppose d'une part les Khmers rouges et les Sihanoukistes soutenus aussi bien par la Chine que par les États-Unis, et d'autre part le Viêt Nam et la [[Républiquerépublique populaire du Kampuchéa]] soutenus par l'URSS, s'enlise et pèse sur les finances vietnamiennes et soviétiques<ref name="Cesari249">{{harvsp|Cesari|1995|p=249-283}}</ref>.
 
====== La Yougoslavie et l'Albanie ======
[[Fichier:Bunker in Albanian Alps.jpg|vignette|gauche|L'un des {{formatnum:700000}} [[Bunkers d'Albanie|bunkers albanais]] construits sous le régime d'[[Enver Hoxha]] : l'[[République populaire socialiste d'Albanie|Albanie communiste]] fonctionnait selon une logique de fermeture et d'[[autarcie]].]]
En Europe de l'Est, plusieurs régimes communistes suivent des voies particulières. En dehors du [[bloc de l'Est]], la [[Républiquerépublique fédérative socialiste de Yougoslavie]] adopte une organisation de plus en plus [[décentralisation|décentralisée]] — notamment après le mouvement de contestation du [[printemps croate]] de [[1971]] - la personne du maréchal [[Josip Broz Tito|Tito]], président à vie, demeurant le principal ciment politique du pays. En [[1979]], l'économie du pays, jusque-là relativement prospère, est durement touchée par le [[deuxième choc pétrolier]]<ref>{{harvsp|Fejtö|1972|p=225-244}}</ref>.
 
Après la mort de Tito en [[1980]], la Yougoslavie adopte un système de présidence fédérale tournante, sans parvenir à résoudre ses problèmes de stabilité politique et d'équilibre entre nationalités. Dans les [[années 1980]], les tensions entre les républiques et les nationalités de la fédération sont de plus en plus vives<ref name="fejto2">{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=228-235}}</ref>.
 
Si la Yougoslavie, bien que demeurant un État autoritaire à [[parti unique]], fait figure de régime modéré, la [[Républiquerépublique populaire socialiste d'Albanie]] demeure au contraire gouvernée de manière [[stalinisme|stalinienne]] et professe un [[marxisme-léninisme]] dogmatique. Ayant [[rupture sino-albanaise|rompu avec la Chine]] par hostilité aux réformes de [[Deng Xiaoping]], elle fait le choix de l'isolement à la fin des [[années 1970]] et demeure le pays le plus fermé d'Europe. Les dernières années d'Enver Hoxha, qui meurt en [[1985]], sont accompagnées de purges politiques : en 1981, il fait éliminer le premier ministre [[Mehmet Shehu]] et l'entourage de ce dernier<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=328-330}}</ref>.
 
====== Le régime de Ceaușescu en Roumanie ======
[[Fichier:Wojciech Jaruzelski & Nicolae CeauşescuCeaușescu.jpg|vignette|[[Wojciech Jaruzelski]], dirigeant de la [[Républiquerépublique populaire de Pologne]] et [[Nicolae Ceaușescu]], dirigeant de la [[Républiquerépublique socialiste de Roumanie]].]]
Au sein du bloc de l'Est, la Roumanie (rebaptisée [[Républiquerépublique socialiste de Roumanie]] en 1965) occupe une place particulière de par son autonomie. [[Nicolae Ceaușescu]], successeur de [[Gheorghe Gheorghiu-Dej]], poursuit la politique d'ouverture diplomatique de ce dernier<ref name="fejto" />, conserve de bonnes relations avec les pays occidentaux et fait un temps figure de modéré. Mais, avec les années, le président roumain adopte un style de gouvernement de plus en plus autoritaire et [[autocratie|autocratique]] : le {{citation|ConducatorConducător}} Ceaușescu multiplie les mesures aberrantes, ravage le paysage rural et urbain du pays en prétendant le remodeler, soumet sa population à une surveillance policière constante et fait l'objet d'un [[culte de la personnalité]] aux accents parfois délirants<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=206-214}}</ref>.
 
====== Pologne : des émeutes de 1970 au mouvement de Solidarność ======
{{Article connexe|État de siège en Pologne (1981-1983)}}
Au partir de [[1970]], la population de la [[Républiquerépublique populaire de Pologne]] exprime son mécontentement de manière de plus en plus ouverte. En décembre [[1970]], un important mouvement de grèves est lancé dans les ports de la [[mer Baltique]] : la répression contribue à [[Émeutes de la Baltique de 1970|transformer la contestation en émeutes]]. [[Władysław Gomułka]], dépassé par la situation, doit quitter le pouvoir. Son successeur, [[Edward Gierek]], entreprend de se concilier les ouvriers en améliorant leurs conditions de vie, mais l'économie polonaise se dégrade à nouveau à partir de [[1976]]. Les opposants au régime communiste sont notamment galvanisés par l'élection du pape polonais [[Jean-Paul II]]. En juillet [[1980]], la contestation s'accroît : fin août, le pouvoir cède et autorise l'existence de [[Syndicat professionnel|syndicat]]s indépendants. [[Solidarność]] est constitué dans la foulée, sous lela leadershiphoulette de [[Lech Wałęsa]], et se mue rapidement en mouvement de masse. Edward Gierek est remplacé par [[Stanisław Kania]], qui ne parvient pas davantage à ramener le calme. En [[1981]], le général [[Wojciech Jaruzelski]] devient successivement chef du gouvernement, puis du [[Parti ouvrier unifié polonais]] ; en décembre, il décrète l'[[État de siège en Pologne (1981-1983)|état de siège]] et fait réprimer Solidarność. Jaruzelski lève la loi martiale en [[1983]] mais, malgré ses efforts, le mécontentement demeure fort et l'opposition ne désarme pas<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=423-437}}</ref>.
 
====== Intervention soviétique en Afghanistan ======
{{Article connexe|Guerre d'Afghanistan (1979-1989)}}
En [[1978]], les communistes du [[Parti démocratique populaire d'Afghanistan]] prennent le pouvoir lors de la [[révolution de Saur]] et proclament la [[république démocratique d'Afghanistan]]. Mais le nouveau régime dresse rapidement contre lui une partie de la population, tout en étant parcouru de conflits internes. [[Hafizullah Amin]], tenant de l'aile radicale, fait renverser et tuer le président [[Nour Mohammad Taraki]], plus modéré et proche des Soviétiques. La situation chaotique, dans un pays à la frontière de l'[[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]], pousse Moscou à intervenir : l'[[Armée rouge]] envahit l'Afghanistan en décembre [[1979]]. Hafizullah Amin est tué et remplacé par le pro-soviétique [[Babrak Karmal]]. L'invasion amplifie la révolte contre le régime : de nombreux [[moudjahid]]ines afghans prennent les armes et reçoivent bientôt le renfort de combattants islamiques étrangers. L'URSS se trouve dès lors impliquée dans une [[Guerre d'Afghanistan (1979-1989)|guerre d'Afghanistan]] désastreuse pour son image dans le monde. Le conflit, qui devient bientôt un gouffre financier et humain, suscite un mécontentement croissant au sein de la société soviétique<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=350-356}}</ref> ; il a également pour conséquence d'aggraver brutalement les tensions avec l'Occident, mettant un terme à la [[Détente (guerre froide)|détente]] et favorisant l'élection à la présidence des États-Unis de [[Ronald Reagan]], candidat au discours vivement anticommuniste<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=525-528}}</ref>.
[[Fichier:Emblem of Afghanistan (1978-1980).svg|vignette|gauche|Premières armoiries de la [[République démocratique d'Afghanistan]].]]
En [[1978]], les communistes du [[Parti démocratique populaire d'Afghanistan]] prennent le pouvoir lors de la [[révolution de Saur]] et proclament la [[République démocratique d'Afghanistan]]. Mais le nouveau régime dresse rapidement contre lui une partie de la population, tout en étant parcouru de conflits internes. [[Hafizullah Amin]], tenant de l'aile radicale, fait renverser et tuer le président [[Nour Mohammad Taraki]], plus modéré et proche des Soviétiques. La situation chaotique, dans un pays à la frontière de l'[[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]], pousse Moscou à intervenir : l'[[Armée rouge]] envahit l'Afghanistan en décembre [[1979]]. Hafizullah Amin est tué et remplacé par le pro-soviétique [[Babrak Karmal]]. L'invasion amplifie la révolte contre le régime : de nombreux [[moudjahid]]ines afghans prennent les armes et reçoivent bientôt le renfort de combattants islamiques étrangers. L'URSS se trouve dès lors impliquée dans une [[Guerre d'Afghanistan (1979-1989)|guerre d'Afghanistan]] désastreuse pour son image dans le monde. Le conflit, qui devient bientôt un gouffre financier et humain, suscite un mécontentement croissant au sein de la société soviétique<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=350-356}}</ref> ; il a également pour conséquence d'aggraver brutalement les tensions avec l'Occident, mettant un terme à la [[Détente (guerre froide)|détente]] et favorisant l'élection à la présidence des États-Unis de [[Ronald Reagan]], candidat au discours vivement anticommuniste<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=525-528}}</ref>.
 
===== Le contexte au tournant des années 1980 =====
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L'URSS et les pays du bloc de l'Est abordent les [[années 1980]] dans un contexte difficile, sous les effets conjugués du conflit afghan, de la situation en Pologne, de la détérioration des relations avec les États-Unis, et de problèmes intérieurs. L'économie soviétique stagne et ne parvient à atteindre aucun des objectifs fixés par le pouvoir, notamment en termes agricoles<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=493-500}}</ref>. Les économies des pays du bloc, lourdement déficitaires, sont très endettés auprès du système bancaire occidental<ref>{{harvsp|Service|2007|p=417}}</ref>. L'appareil soviétique, handicapé par sa [[bureaucratie]] envahissante, est de plus en plus sclérosé ; l'élite politique prend, sous [[Léonid Brejnev|Brejnev]], l'allure d'une {{citation|[[gérontocratie]]}}<ref name="Brown481">{{harvsp|Brown|2009|p=481-486}}</ref>.
 
Dans les pays occidentaux, les principaux PC déclinent. En France, le [[Parti communiste français|PCF]] est désormais dépassé dans les urnes par le Parti socialiste. En [[1981]], après l'élection de [[François Mitterrand]], il participe au gouvernement d'[[union de la gauche]] mais ne parvient guère à peser sur les décisions ; il rompt avec ses alliés socialistes en [[1984]] et, à nouveau dans l'opposition, poursuit son déclin électoral<ref name="Courtois386" />. En Italie, le [[Parti communiste italien|PCI]], très recentré, reste le principal parti à gauche mais s'essouffle dans les [[années 1980]], faute de rénovation en profondeur de son projet et du fait de la concurrence du [[Parti socialiste italien|PSI]]<ref name="Courtois441"/>{{,}}<ref>[[Michel Dreyfus]], ''L'Europe des socialistes'', Complexe, 1991, pagep. 277</ref>.
 
En [[1979]], un parti communiste prend le pouvoir à la [[Grenade (pays)|Grenade]], dans la [[Caraïbes|Caraïbe]] : le [[New Jewel Movement]], parti pro-castriste dirigé par [[Maurice Bishop]], prend le pouvoir et proclame le [[Gouvernement révolutionnaire populaire de la Grenade]]. Soutenu par [[Cuba]], le régime grenadien se rapproche de l'URSS et des autres pays communistes. Mais, en [[1983]], Bishop est renversé et tué par ses rivaux au sein du Parti. Les États-Unis saisissent l'occasion pour [[invasion de la Grenade|envahir la Grenade]], mettant un terme au gouvernement communiste<ref>{{harvsp|Vayssière|2001|p=165-166}}</ref>.
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[[Léonid Brejnev]], malade depuis plusieurs années, meurt en novembre [[1982]] ; [[Iouri Andropov]], jusque-là directeur du [[KGB]], lui succède. La tension avec les [[États-Unis]] est à l'époque particulièrement forte : elle atteint des sommets lors de la [[crise des euromissiles]] et de la destruction par l'aviation soviétique du [[vol 007 Korean Airlines|vol Korean Airlines 007]]. Andropov montre des intentions réformatrices, mais sa mauvaise santé ne lui laisse pas le temps de les concrétiser ; il meurt en février [[1984]] et est remplacé par un conservateur proche de Brejnev, [[Konstantin Tchernenko]], qui meurt lui-même en mars [[1985]]<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=528-534}}</ref>{{,}}<ref name="Brown481"/>. [[Mikhaïl Gorbatchev]], un membre de l'entourage d'Andropov, succède à Tchernenko à la tête du [[Parti communiste de l'Union soviétique|PCUS]]. Décidé à débarrasser le système politique de l'Union soviétique de ses scléroses, Gorbatchev adopte les mots d'ordre ''uskorenie'' (''accélération''), ''[[perestroïka]]'' (''reconstruction'') et ''[[glasnost]]'' (''ouverture'', ou ''transparence'', soit une {{citation|critique saine des insuffisances}}) ; sa politique, qui lui vaut des tensions avec les conservateurs, constitue dans les faits une poursuite de la [[déstalinisation]]. Des pans cachés de l'histoire soviétique sont rendus publics, et l'URSS connaît un important dégel culturel<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=537-546}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=486-502}}</ref>.
 
Entre [[1985]] et [[1987]], les rapports Est-Ouest s'améliorent de façon spectaculaire. Mikhaïl Gorbatchev rencontre à plusieurs reprises le président américain [[Ronald Reagan]], avec qui il signe en décembre 1987 le [[traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire]], engageant un réel processus de désarmement. Il met en outre un terme à la [[Guerre d'Afghanistan (1979-1989)|guerre d'Afghanistan]] en annonçant en [[1988]] le retrait des troupes soviétiques. Les relations de l'[[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]] avec la [[Républiquerépublique populaire de Chine]] sont également normalisées<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=563-567}}</ref>. Gorbatchev procède à de nombreux [[limogeage]]s de cadres conservateurs, s'efforce de faire de l'URSS un [[État de droit]], allège la censure et facilite les voyages à l'étranger des citoyens soviétiques. En 1988, un important projet de réforme constitutionnelle est lancé. La perestroïka ne règle cependant pas la question du multipartisme : de nombreux {{citation|groupes informels}} apparaissent pour exprimer diverses revendications. Les mesures de libéralisation se révèlent en outre insuffisantes pour redresser l'économie soviétique, gangrénée par la [[coercition]] et la [[corruption]]<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=550-563}}</ref>.
 
La glasnost, en libérant la mémoire historique et en encourageant la critique des défauts du système, contribue également à déstabiliser en profondeur l'URSS<ref name="Werth546550">{{harvsp|Werth|2004|p=546-550}}</ref>. Une réflexion sur la [[Histoire de l'URSS sous Staline|période stalinienne]] est entamée, mais c'est bientôt le rôle historique de [[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]] lui-même qui est remis en cause<ref name="Ferretti">Maria Ferretti, ''La Mémoire refoulée. La Russie devant le passé stalinien'', in ''Nazisme et communisme : Deux régimes dans un siècle'', ouvrage dirigé par Marc Ferro, Hachette, Pluriel, 1999, pagesp. 260-271</ref>. Des revendications identitaires se manifestent dans presque toutes les [[République socialiste soviétique|Républiques soviétiques]], tout particulièrement dans les [[pays baltes]]. En mars [[1990]], la [[République socialiste soviétique de Lituanie|Lituanie]] défie le pouvoir central en proclamant son [[indépendantisme|indépendance]] ; elle est imitée par la [[République socialiste soviétique de Lettonie|Lettonie]] et l'[[République socialiste soviétique d'Estonie|Estonie]]<ref name="Werth546550"/>.
 
===== Conséquences sur les autres pays communistes =====
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Les réformes politique et structurelles en URSS ont un effet décisif sur les {{citation|pays frères}}. Mikhaïl Gorbatchev encourage les [[Bloc de l'Est|États satellites d'Europe de l'Est]] à mener leur propre {{citation|[[perestroïka]]}} et diminue l'assistance matérielle à l'ensemble des alliés du camp communiste dans le monde. Les régimes [[Afrique|africains]] précipitent leur abandon du communisme. En [[Amérique latine]], Gorbatchev encourage à des solutions négociées aux conflits, ce qui conduit la plupart des guérillas à déposer les armes et, pour certaines, à se transformer en partis politiques<ref name="Vayssière239"/>. La diminution, puis l'arrêt, de l'aide soviétique, plongent [[Cuba]] dans une très grave crise économique à partir de [[1989]]<ref name="Soulet360">{{harvsp|Soulet|1996|p=360-373}}</ref>. Le rapprochement avec la Chine conduit également l'URSS à cesser de soutenir l'occupation du Cambodge par les Vietnamiens, qui retirent alors leurs troupes ; des négociations débutent pour mettre un terme au [[Conflit cambodgien (1978-1999)|conflit cambodgien]]<ref name="Cesari249"/>. Le [[Viêt Nam]] lance lui aussi, à partir de [[1986]], un mouvement de réforme de son économie, le [[Đổi mới]], et s'intègre de manière croissante à l'[[économie de marché]] mondialisée. Le [[Laos]] s'engage dans la même voie en [[1989]]<ref name="Brown606">{{harvsp|Brown|2009|p=606-607}}</ref>.
 
En [[Républiquerépublique populaire de Chine]], les tensions s'accroissent au sein du [[Parti communiste chinois|PCC]], dont les dirigeants sont en désaccord quant à la portée des réformes à mener. Un important [[Manifestations de la place Tian'anmen|mouvement de contestation étudiante]], aux origines plus sociales que politiques, se déclenche en [[1989]] à [[Pékin]], encore galvanisé par la visite en Chine de Mikhaïl Gorbatchev. [[Deng Xiaoping]] choisit finalement l'épreuve de force : les manifestations de Pékin sont écrasées par la troupe en juin 1989, faisant plus de {{nombre|1000|victimes}} dans la capitale ; de nombreuses personnes sont arrêtées. Malgré l'indignation internationale suscitée par la répression, les liens de la Chine avec l'Occident ne sont pas rompus et le camp de Deng Xiaoping peut maintenir le cap de ses réformes économiques, tout en conservant un régime politique autoritaire<ref>{{harvsp|Domenach|Richer|1995|p=547-572}}</ref>.
 
===== Effondrement du bloc soviétique =====
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[[Fichier:Bundesarchiv Bild 183-1987-0529-029, Berlin, Tagung Warschauer Pakt, Gruppenfoto.jpg|vignette|gauche|Les dirigeants des pays du [[Pacte de Varsovie]] en 1987 : de gauche à droite, [[Gustáv Husák]] ([[République socialiste tchécoslovaque|Tchécoslovaquie]]), [[Todor Jivkov]] ([[République populaire de Bulgarie|Bulgarie]]), [[Erich Honecker]] ([[République démocratique allemande|Allemagne de l'Est]]), [[Mikhaïl Gorbatchev]] ([[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]]), [[Nicolae Ceaușescu]] ([[République socialiste de Roumanie|Roumanie]]), [[Wojciech Jaruzelski]] ([[République populaire de Pologne|Pologne]]), [[János Kádár]] ([[République populaire de Hongrie|Hongrie]]).]]
[[Fichier:Berlin 1989, Fall der Mauer, Chute du mur 18.jpg|vignette|Chute du [[mur de Berlin]] en novembre 1989.]]
Dans les {{citation|[[démocratie populaire|démocraties populaires]]}} du [[bloc de l'Est]], politiquement sclérosées et économiquement déficientes<ref name="Ducoulombier125to133">{{harvsp|Ducoulombier|2011|p=125-133}}</ref>, les réformes en URSS ont des répercussions profondes, jusqu'à provoquer l'écroulement généralisé des régimes à partir de 1989. Les PC locaux, privés du soutien soviétique et dépassés par les contestations internes, abandonnent le pouvoir et, pour la plupart, renoncent à leurs identités communistes ; entre 1989 et 1992, des nouvelles constitutions sont adoptées dans tous les pays, mettant fin aux régimes marxistes-léninistes. En [[République populaire de Hongrie]], [[János Kádár]], âgé et malade, quitte le pouvoir en [[1988]], et les cadres réformateurs du [[Parti socialiste ouvrier hongrois]] prennent bientôt le dessus. L'[[insurrection de Budapest]] et la mémoire d'[[Imre Nagy]] sont réhabilitées l'année suivante. En [[République populaire de Pologne]], le pouvoir entame des négociations avec [[Solidarność]]. En mai, des élections législatives partiellement libres sont organisées : Solidarność remporte quasiment tous les sièges ouverts à la compétition électorale. En août, [[Tadeusz Mazowiecki]] devient le premier Premier ministre non communiste de la République populaire de Pologne : une nouvelle constitution entre en vigueur le [[31 décembre]]<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=253-259}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=531-534}}</ref>. En mai [[1989]], la Hongrie démantèle la barrière du [[rideau de fer]] le long de sa frontière avec l'[[Autriche]] ; les citoyens de la [[République démocratique allemande]] passent dès lors à l'Ouest via la frontière hongroise ou prennent d'assaut l'ambassade d'[[Allemagne de l'Ouest]] à Budapest. La RDA est confrontée à la fuite de ses citoyens et à une [[Opposition et résistance en RDA|opposition interne]] qui s'exprime [[Die Wende|de plus en plus ouvertement]], notamment via les [[manifestations du lundi]]. En octobre, le chef du [[Parti socialiste unifié d'Allemagne|SED]] [[Erich Honecker]] démissionne. Le gouvernement de la RDA, dépassé, se résout en novembre à faire abattre le [[mur de Berlin]]. Le SED s'autodissout et le régime est-allemand se délite totalement : l'Allemagne est [[réunification allemande|réunifiée]] en octobre 1990<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=534-538}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=275-288}}</ref>. En [[République socialiste tchécoslovaque]], la contestation débouche en novembre 1989 sur la [[révolution de velours]] ; devant l'ampleur des manifestations contre le régime, l'ensemble du bureau politique du [[Parti communiste tchécoslovaque]] démissionne. [[Gustáv Husák]] quitte ses fonctions le [[10 décembre]] ; le [[28 décembre]], [[Alexander Dubček]] devient président de l'assemblée et, le lendemain, [[Václav Havel]] est élu président de la République<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=290-304}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=538-541}}</ref>. En [[République populaire de Bulgarie]], [[Todor Jivkov]], au pouvoir depuis [[1954]], est démis de ses fonctions par les réformateurs du [[Parti communiste bulgare]] ; le PC devient le [[Parti socialiste bulgare]] et remporte les premières élections libres en juin 1990, mais perd le pouvoir lors d'un nouveau scrutin en octobre 1991<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=305-312, 368-370}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=541-542}}</ref>. Si la plupart des révolutions au sein du bloc de l'Est sont pacifiques, le régime de [[Nicolae Ceaușescu]] en [[République socialiste de Roumanie]] est, au contraire, renversé par un soulèvement. Les membres réformateurs du [[Parti communiste roumain]] prennent bientôt la direction de la révolte contre le régime : Ceaușescu et son épouse [[Elena Ceaușescu|Elena]] sont fusillés le [[25 décembre]] après un simili-procès expéditif<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=313-327}}</ref>.
 
Dans les {{citation|[[démocratie populaire|démocraties populaires]]}} du [[bloc de l'Est]], politiquement sclérosées et économiquement déficientes<ref name="Ducoulombier125to133">{{harvsp|Ducoulombier|2011|p=125-133}}</ref>, les réformes en URSS ont des répercussions profondes, jusqu'à provoquer l'écroulement généralisé des régimes à partir de 1989. Les PC locaux, privés du soutien soviétique et dépassés par les contestations internes, abandonnent le pouvoir et, pour la plupart, renoncent à leurs identités communistes ; entre 1989 et 1992, des nouvelles constitutions sont adoptées dans tous les pays, mettant fin aux régimes marxistes-léninistes. En [[république populaire de Hongrie]], [[János Kádár]] quitte le pouvoir en [[1988]], et les cadres réformateurs du [[Parti socialiste ouvrier hongrois]] prennent bientôt le dessus. L'[[insurrection de Budapest]] et la mémoire d'[[Imre Nagy]] sont réhabilitées l'année suivante. En [[république populaire de Pologne]], le pouvoir entame des négociations avec [[Solidarność]]. En mai, des élections législatives partiellement libres sont organisées : Solidarność remporte quasiment tous les sièges ouverts à la compétition électorale. En août, [[Tadeusz Mazowiecki]] devient le premier Premier ministre non communiste de la république populaire de Pologne : une nouvelle constitution entre en vigueur le [[31 décembre]]<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=253-259}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=531-534}}</ref>. En mai [[1989]], la Hongrie démantèle la barrière du [[rideau de fer]] le long de sa frontière avec l'[[Autriche]]. La RDA est confrontée à la fuite de ses citoyens et à une [[Opposition et résistance en RDA|opposition interne]] qui s'exprime [[Die Wende|de plus en plus ouvertement]], notamment via les [[manifestations du lundi]]. En octobre, le chef du [[Parti socialiste unifié d'Allemagne|SED]] [[Erich Honecker]] démissionne. Le gouvernement de la RDA, dépassé, se résout en novembre à faire abattre le [[mur de Berlin]]. Le SED s'autodissout et le régime est-allemand se délite totalement : l'Allemagne est [[réunification allemande|réunifiée]] en octobre 1990<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=534-538}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=275-288}}</ref>. En [[République socialiste tchécoslovaque]], la contestation débouche en novembre 1989 sur la [[révolution de velours]] ; devant l'ampleur des manifestations contre le régime, l'ensemble du bureau politique du [[Parti communiste tchécoslovaque]] démissionne. [[Gustáv Husák]] quitte ses fonctions le [[10 décembre]] ; le [[28 décembre]], [[Alexander Dubček]] devient président de l'assemblée et, le lendemain, [[Václav Havel]] est élu président de la République<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=290-304}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=538-541}}</ref>. En [[république populaire de Bulgarie]], [[Todor Jivkov]], au pouvoir depuis [[1954]], est démis de ses fonctions par les réformateurs du [[Parti communiste bulgare]] ; le PC devient le [[Parti socialiste bulgare]] et remporte les premières élections libres en juin 1990, mais perd le pouvoir lors d'un nouveau scrutin en octobre 1991<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=305-312, 368-370}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=541-542}}</ref>. Si la plupart des révolutions au sein du bloc de l'Est sont pacifiques, en Roumanie le régime de [[Nicolae Ceaușescu]] est, au contraire, renversé par un soulèvement et Ceausescu fusillé<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=313-327}}</ref>.
La vague de changements atteint également l'Albanie et la Yougoslavie, situées en dehors du bloc de l'Est. En [[République fédérative socialiste de Yougoslavie]], les problèmes de stabilité politique et d'équilibre entre nationalités n'ont jamais été résolus depuis la mort de [[Josip Broz Tito|Tito]]<ref name="fejto2" /> ; au début de [[1990]], les membres de la [[Ligue des communistes de Yougoslavie]] se séparent en plein congrès, pour ne plus jamais se réunir. Des élections libres sont organisées en Slovénie et en Croatie, portant au pouvoir l'opposition séparatiste. Dès [[1991]], les problèmes territoriaux commencent à déboucher sur des conflits armés entre les États de la fédération, déclenchant la série des [[Guerres de Yougoslavie|guerres civiles yougoslaves]]. La Yougoslavie abandonne toute référence communiste et cesse ensuite d'exister en tant qu'État<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=377-389}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=546-548}}</ref>. En [[République populaire socialiste d'Albanie]], la contestation se développe également, et le [[Parti du travail d'Albanie]] accepte d'autoriser les partis d'opposition. Les communistes, qui continuent de contrôler les campagnes, gagnent les premières élections libres en [[1991]], puis abandonnent l'idéologie marxiste-léniniste ; en [[1992]], de nouvelles élections, organisées dans des conditions plus libres, sont remportées par l'opposition<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=374-377}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=544-546}}</ref>.
 
La vague de changements atteint également l'Albanie et la Yougoslavie, situées en dehors du bloc de l'Est. En [[république fédérative socialiste de Yougoslavie]], les problèmes de stabilité politique et d'équilibre entre nationalités n'ont jamais été résolus depuis la mort de [[Josip Broz Tito|Tito]]<ref name="fejto2" /> ; au début de [[1990]], les membres de la [[Ligue des communistes de Yougoslavie]] se séparent en plein congrès, pour ne plus jamais se réunir. Des élections libres sont organisées en Slovénie et en Croatie, portant au pouvoir l'opposition séparatiste. Dès [[1991]], les problèmes territoriaux commencent à déboucher sur des conflits armés entre les États de la fédération, déclenchant la série des [[Guerres de Yougoslavie|guerres civiles yougoslaves]]. La Yougoslavie abandonne toute référence communiste et cesse ensuite d'exister en tant qu'État<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=377-389}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=546-548}}</ref>. En [[république populaire socialiste d'Albanie]], la contestation se développe également, et le [[Parti du travail d'Albanie]] accepte d'autoriser les partis d'opposition. Les communistes, qui continuent de contrôler les campagnes, gagnent les premières élections libres en [[1991]], puis abandonnent l'idéologie marxiste-léniniste ; en [[1992]], de nouvelles élections, organisées dans des conditions plus libres, sont remportées par l'opposition<ref>{{harvsp|Fejtö|Kulesza-Mietkowski|1992|p=374-377}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=544-546}}</ref>.
 
Hors d'Europe, la plupart des pays communistes abandonnent également leur idéologie. La [[République populaire mongole]] connaît sa propre {{citation|[[Révolution démocratique de 1990 en Mongolie|révolution démocratique]]}} ; les communistes gagnent les premières élections libres, puis renoncent au [[marxisme-léninisme]] et se convertissent à l'[[économie de marché]]<ref name="Soulet360"/>. Au Cambodge, les [[Accords de Paris sur le Cambodge de 1991|accords de Paris de 1991]] mettent fin au conflit ; une transition politique est lancée, les différentes factions se partageant le pouvoir. Le pays supprime toute référence marxiste-léniniste et la monarchie est restaurée en [[1993]] : les anciens cadres communistes de la [[république populaire du Kampuchéa]] demeurent en place tandis que les [[Khmers rouges]], sont exclus du jeu politique après avoir tenté de saboter les élections<ref name="Cesari249"/>. La [[république démocratique d'Afghanistan]] parvient à résister un temps après le départ des troupes soviétiques mais cesse d'exister en [[1992]], au bout de [[Guerre civile d'Afghanistan (1989-1992)|trois années supplémentaires de guerre civile]]. Le [[République démocratique populaire du Yémen|Yémen du Sud]] communiste se [[Réunification du Yémen|réunifie]] en [[1990]] avec le [[République arabe du Yémen|Yémen du Nord]]. Les régimes communistes [[Afrique|africains]] cessent également d'exister ; les guerres civiles du Mozambique et de l'Angola prennent fin (provisoirement pour ce qui est de l'Angola) et le [[Front de libération du Mozambique]] comme le [[Mouvement populaire de libération de l'Angola]], convertis au libéralisme, demeurent au pouvoir. Le Bénin, la république du Congo et Madagascar adoptent également le multipartisme et les élections libres. Dans la [[corne de l'Afrique]], le régime de la [[république démocratique populaire d'Éthiopie]] de [[Mengistu Haile Mariam|Mengistu]] est renversé militairement, comme celui de la [[République démocratique somalie]] de [[Mohamed Siad Barre]]<ref name="Soulet360"/>.
 
Hors d'Europe, la plupart des pays communistes abandonnent également leur idéologie. La [[République populaire mongole]] connaît sa propre {{citation|[[Révolution démocratique de 1990 en Mongolie|révolution démocratique]]}} ; les communistes, seul parti réellement organisé, gagnent les premières élections libres, puis renoncent au [[marxisme-léninisme]] et se convertissent à l'[[économie de marché]]<ref name="Soulet360"/>. Au Cambodge, les [[Accords de Paris sur le Cambodge de 1991|accords de Paris de 1991]] mettent fin au conflit ; une transition politique est lancée, les différentes factions se partageant le pouvoir. Le pays supprime toute référence marxiste-léniniste et la monarchie est restaurée en [[1993]] : les anciens cadres communistes de la [[République populaire du Kampuchéa]] demeurent en place tandis que les [[Khmers rouges]], sont exclus du jeu politique après avoir tenté de saboter les élections<ref name="Cesari249"/>. La [[République démocratique d'Afghanistan]] parvient à résister un temps après le départ des troupes soviétiques mais cesse d'exister en [[1992]], au bout de [[Guerre civile d'Afghanistan (1989-1992)|trois années supplémentaires de guerre civile]]. Le [[République démocratique populaire du Yémen|Yémen du Sud]] communiste se [[Réunification du Yémen|réunifie]] en [[1990]] avec le [[République arabe du Yémen|Yémen du Nord]]. Les régimes communistes [[Afrique|africains]] cessent également d'exister ; les guerres civiles du Mozambique et de l'Angola prennent fin (provisoirement pour ce qui est de l'Angola) et le [[Front de libération du Mozambique]] comme le [[Mouvement populaire de libération de l'Angola]], convertis au libéralisme, demeurent au pouvoir. Le Bénin, la République du Congo et Madagascar adoptent également le multipartisme et les élections libres. Dans la [[corne de l'Afrique]], le régime de la [[République démocratique populaire d'Éthiopie]] de [[Mengistu Haile Mariam|Mengistu]] est renversé militairement, comme celui de la [[République démocratique somalie]] de [[Siyaad Barre]]<ref name="Soulet360"/>.
[[Fichier:Август-91-Калининский-проспект.jpg|vignette|Manifestation contre le [[putsch de Moscou]] en août [[1991]].]]
 
En URSS même, les réformes politiques mènent à un délitement du système : dans les [[pays baltes]] et en [[République socialiste soviétique de Géorgie|Géorgie]], les premières élections législatives libres sont remportées par les nationalistes et indépendantistes. En juin [[1991]], [[Boris Eltsine]], ancien cadre communiste limogé et passé à l'opposition, est élu président de la [[République socialiste fédérative soviétique de Russie]], battant largement le candidat du [[Parti communiste de l'Union soviétique|PCUS]] et menaçant désormais l'autorité de Gorbatchev<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=552-553}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=575-576}}</ref>.
En URSS même, les réformes politiques mènent à un délitement du système : dans les [[pays baltes]] et en [[République socialiste soviétique de Géorgie|Géorgie]], les premières élections législatives libres sont remportées par les nationalistes et indépendantistes. En juin [[1991]], [[Boris Eltsine]], ancien cadre communiste limogé et passé à l'opposition, est élu président de la [[république socialiste fédérative soviétique de Russie]], battant largement le candidat du [[Parti communiste de l'Union soviétique|PCUS]] et menaçant désormais l'autorité de Gorbatchev<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=552-553}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=575-576}}</ref>.
 
Les conservateurs soviétiques, face à la déliquescence du pouvoir central et de l'autorité du Parti, réagissent et mènent en août un [[putsch de Moscou|putsch]] contre [[Mikhaïl Gorbatchev]], qui est placé en résidence surveillée. Le coup de force, très mal préparé, échoue totalement : le président russe Boris Eltsine défie aussitôt les putschistes, soutenu à Moscou par des dizaines de milliers de manifestants. Les conspirateurs sont arrêtés et Gorbatchev libéré. Eltsine se trouve en position de force et, dans les jours qui suivent l'échec du putsch, huit des républiques de l'URSS proclament leur indépendance. Le [[Parti communiste de l'Union soviétique]] et le [[KGB]] sont dissous. Le 21 décembre, un sommet entre chefs d'État de l'Union entérine la fin de l'URSS. Gorbatchev, qui n'avait même pas été convié au sommet, démissionne de ses fonctions de président le [[25 décembre]], et l'URSS cesse d'exister<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=576-577}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=575-573}}</ref>.
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{{Article connexe|Post-communisme|Néocommunisme}}
 
Le communisme continue d'exister en tant que courant politique après la chute de la majorité des régimes. De nombreux partis, de dimensions très variables, s'en revendiquent à titres divers. Cinq [[État communiste|régimes communistes]], en [[Républiquerépublique populaire de Chine]], au [[Viêt Nam]], au [[Laos]], en [[Corée du Nord]] et à [[Cuba]], existent encore à ce jour<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=606}}</ref>.
 
La [[république populaire de Chine]], toujours gouvernée par le [[Parti communiste chinois]], a acquis depuis les [[années 1990]] une place essentielle au sein de l'économie mondiale, apparaissant bientôt comme une [[Perspectives de la Chine comme superpuissance potentielle|superpuissance émergente]]. La Chine contemporaine est désormais très éloignée des principes du [[collectivisme économique]] et s'est au contraire pleinement intégrée au [[capitalisme]] international<ref name="brown605">{{harvsp|Brown|2009|p=605-606}}</ref>. Le PCC n'en demeure pas moins fermement aux commandes de l'État chinois, et son rôle dirigeant est encore réaffirmé et renforcé sous la présidence de [[Xi Jinping]]<ref>[http://abonnes.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2017/10/24/en-chine-la-consecration-de-xi-jinping_5205125_3216.html En Chine, la consécration de Xi Jinping], ''[[Le Monde]]'', 24 octobre 2017</ref>. Le Viêt Nam et le Laos ont eux aussi libéralisé leurs économies, sans laisser davantage d'espace aux libertés publiques<ref name="brown605"/>.
 
La [[République populaire de Chine]], toujours gouvernée par le [[Parti communiste chinois]], a acquis depuis les [[années 1990]] une place essentielle au sein de l'économie mondiale, apparaissant bientôt comme une [[Perspectives de la Chine comme superpuissance potentielle|superpuissance émergente]]. La Chine contemporaine est désormais très éloignée des principes du [[collectivisme économique]] et s'est au contraire pleinement intégrée au [[capitalisme]] international<ref name="brown605">{{harvsp|Brown|2009|p=605-606}}</ref>. Le PCC n'en demeure pas moins fermement aux commandes de l'État chinois, et son rôle dirigeant est encore réaffirmé et renforcé sous la présidence de [[Xi Jinping]]<ref>[http://abonnes.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2017/10/24/en-chine-la-consecration-de-xi-jinping_5205125_3216.html En Chine, la consécration de Xi Jinping], ''[[Le Monde]]'', 24 octobre 2017</ref>. Le Viêt Nam et le Laos ont eux aussi libéralisé leurs économies, sans laisser davantage d'espace aux libertés publiques<ref name="brown605"/>.
[[Fichier:Propaganda North Korea 02.jpg|vignette|gauche|Affiche de [[Propagande en Corée du Nord|propagande]] en [[Corée du Nord]].]]
[[Fichier:Fidel Castro8.jpeg|vignette|[[Fidel Castro]] en [[2003]].]]
 
La [[Corée du Nord]] demeure au contraire un pays très fermé et rétif à toute démocratisation, au point de faire figure de {{citation|dernier régime [[Stalinisme|stalinien]] de la planète}}<ref>[https://www.franceinter.fr/emission-le-telephone-sonne-la-coree-du-nord-et-ses-menaces-de-guerre-nucleaire?page=0 La Corée du Nord et ses menaces de guerre nucléaire], Franceinter.fr, 11 avril 2013</ref> : les difficultés causées par l'arrêt de l'aide soviétique n'ont fait que convaincre le régime de persister dans ses choix idéologiques. Victime dans les [[années 1990]] d'une [[Famine en Corée du Nord|terrible famine]] qui a nécessité le recours à l'aide internationale, le pays demeure soutenu par la Chine. Il se maintient également par le biais du chantage à la guerre, en développant son armement. Après la mort de [[Kim Il-sung]] en [[1994]], son fils [[Kim Jong-il]] devient le numéro un du régime et gouverne en fonction d'une doctrine [[militarisme|militariste]], la [[politique de songun]]<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=565}}</ref>. En [[2011]], [[Kim Jong-un]], fils de Kim Jong-il, succède à ce dernier<ref>[https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2011/12/29/la-coree-du-nord-intronise-son-nouveau-chef-devant-une-foule-de-militaires_1623519_3216.html#ens_id=1545482 « La Corée du Nord intronise son nouveau chef devant une foule de militaires »], ''[[Le Monde]]'', 29 décembre 2011.</ref> et demeure dans la même logique militariste, notamment en intensifiant le [[Armes nucléaires en Corée du Nord|programme nucléaire]] nord-coréen<ref>[http://www.lefigaro.fr/international/2017/09/03/01003-20170903ARTFIG00078-les-etapes-de-la-montee-en-puissance-du-programe-nucleaire-nord-coreen.php Les étapes de la montée en puissance du programme nucléaire nord-coréen], ''Le Figaro'', 3 septembre 2017</ref>.
 
À [[Cuba]], malgré les graves difficultés économiques dues entre autres à la fin de l'aide soviétique et à l'embargo américain, [[Fidel Castro]] refuse en [[1989]] tout passage au [[multipartisme]] et réaffirme l'orthodoxie communiste la plus stricte. Pour redresser son économie, Cuba mise principalement sur le [[tourisme]]<ref name="Soulet360"/>{{,}}<ref>{{harvsp|Vayssière|2001|p=323-333}}</ref>. Fidel Castro, octogénaire et malade, cède le pouvoir à son frère [[Raúl Castro]]. Un ensemble de mesures de libéralisation économique est annoncé en [[2011]]<ref>[http://www.lexpress.fr/actualites/2/monde/cuba-publie-les-grandes-lignes-des-reformes-economiques_990976.html Cuba publie les grandes lignes des réformes économiques], ''L'Express'', 9 mai 2011</ref>. En décembre [[2014]], Cuba et les États-Unis entament un rapprochement diplomatique<ref>[http://www.lepoint.fr/monde/etats-unis-cuba-les-secrets-du-rapprochement-18-12-2014-1890855_24.php États-Unis-Cuba : les secrets du rapprochement], ''Le Point'', 18 décembre 2014</ref>.
 
[[Fichier:Billboard opposit USA interest office.jpg|vignette|gauche|{{citation|Messieurs les impérialistes, nous n'avons absolument pas peur de vous !}} : panneau de propagande [[antiaméricanisme|anti-américaine]] à [[La Havane]] ([[Cuba]]) installé devant les locaux de la Section des intérêts des États-Unis.]]
En [[Amérique latine]], de nombreux leaders politiques de gauche ou de centre-gauche - dont certains affichent, sans se dire communistes, des références marxistes plus ou moins affirmées - arrivent au pouvoir dans les [[années 2000]]. [[Hugo Chávez]], président du [[Venezuela]] de [[1999]] à sa mort en [[2013]], et partisan d'une {{citation|[[révolution bolivarienne]]}} d'inspiration socialiste, multiplie volontiers les références à [[Fidel Castro]] dont il est personnellement proche, voire à [[Mao Zedong]]<ref>{{harvsp|Vayssière|2001|p=352-356}}</ref>. Sous les présidences de Chávez et de son successeur [[Nicolás Maduro]], le régime castriste bénéficie des largesses économiques du Venezuela, et acquiert une influence grandissante sur les affaires internes de ce pays<ref>[https://www.lemonde.fr/idees/article/2013/03/19/quel-avenir-pour-cuba-apres-la-mort-d-hugo-chavez_1850669_3232.html Quel avenir pour Cuba après la mort d'Hugo Chavez ?], ''Le Monde'', 19 mars 2013</ref>{{,}}<ref>[http://america-latina.blog.lemonde.fr/2013/04/16/comment-nicolas-maduro-est-devenu-lelu-de-cuba-au-venezuela/ Comment Nicolas Maduro est devenu l’élu de Cuba au Venezuela], et [http://america-latina.blog.lemonde.fr/2014/04/30/le-role-de-cuba-dans-la-crise-au-venezuela/ Le rôle de Cuba dans la crise au Venezuela], blog ''America latina'' sur ''Le Monde'', 16 avril 2013 et 30 avril 2014</ref>{{,}}<ref>[http://www.ft.com/cms/s/0/b7141b78-c497-11e3-b2fb-00144feabdc0.html#axzz2zdEZvOUp {{lang|en|texte=Cuba fed a president’s fears and took over Venezuela}}], ''Financial Times'', 15 avril 2014</ref>.
 
En [[Amérique latine]], de nombreux leaders politiques de gauche ou de centre-gauche, plus ou moins proches de l'esprit marxiste sans se réclamer communistes, arrivent au pouvoir dans les [[années 2000]]. [[Hugo Chávez]], président du [[Venezuela]] de [[1999]] à sa mort en [[2013]], et partisan d'une {{citation|[[révolution bolivarienne]]}} d'inspiration socialiste, multiplie volontiers les références à [[Fidel Castro]] dont il est personnellement proche, voire à [[Mao Zedong]]<ref>{{harvsp|Vayssière|2001|p=352-356}}</ref>. Sous les présidences de Chávez et de son successeur [[Nicolás Maduro]], le régime castriste bénéficie des largesses économiques du Venezuela, et acquiert une influence grandissante sur les affaires internes de ce pays<ref>[https://www.lemonde.fr/idees/article/2013/03/19/quel-avenir-pour-cuba-apres-la-mort-d-hugo-chavez_1850669_3232.html Quel avenir pour Cuba après la mort d'Hugo Chavez ?], ''Le Monde'', 19 mars 2013</ref>{{,}}<ref>[http://america-latina.blog.lemonde.fr/2013/04/16/comment-nicolas-maduro-est-devenu-lelu-de-cuba-au-venezuela/ Comment Nicolas Maduro est devenu l’élu de Cuba au Venezuela], et [http://america-latina.blog.lemonde.fr/2014/04/30/le-role-de-cuba-dans-la-crise-au-venezuela/ Le rôle de Cuba dans la crise au Venezuela], blog ''America latina'' sur ''Le Monde'', 16 avril 2013 et 30 avril 2014</ref>{{,}}<ref>[http://www.ft.com/cms/s/0/b7141b78-c497-11e3-b2fb-00144feabdc0.html#axzz2zdEZvOUp {{lang|en|texte=Cuba fed a president’s fears and took over Venezuela}}], ''Financial Times'', 15 avril 2014</ref>.
Dans les pays anciennement communistes, que ce soit en Europe, en Afrique ou au Cambodge, de nombreux cadres des anciens régimes demeurent actifs en politique. Le [[Parti communiste de la Fédération de Russie]] conserve un poids électoral, mais reste dans l'opposition. Dans la majorité des anciens pays du [[bloc de l'Est]], les anciens PC au pouvoir ont, à l'exception du [[Parti communiste de Bohême et Moravie]] héritier du [[Parti communiste tchécoslovaque|PCT]], renoncé à l'identité communiste ; beaucoup se sont rebaptisés ''Parti socialiste''. D'anciens cadres des PC sont revenus au pouvoir dans leur pays à la faveur d'élections libres, mais aucun de ces dirigeants {{citation|[[Post-communisme|post-communistes]]}} des ex-satellites soviétiques ne s'est plus présenté comme communiste ou n'a tenté de restaurer les anciens régimes. La {{citation|décommunisation}} des anciens pays du bloc s'est déroulée dans des conditions difficiles : les réformes de libéralisation économique et les [[privatisation]]s, menées à un rythme souvent trop rapide, ont parfois durement affecté une population longtemps tenue à l'écart de l'[[économie de marché]], entraînant des phénomènes de nostalgie — dite en Allemagne ''[[Ostalgie]]'' — sinon des anciens régimes, du moins de la sécurité économique qu'ils garantissaient. Le passage à la démocratie s'est souvent accompagné du maintien d'une partie de l'ancienne élite à de nombreux postes-clés et la libéralisation économique a souvent aggravé la [[corruption]]. Malgré de graves imperfections et inégalités, la transition démocratique et économique s'est cependant poursuivie dans les anciens pays communistes<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=361-369}}</ref>{{,}}<ref>[http://lexpansion.lexpress.fr/economie/l-ostalgie-fait-son-business_207042.html L'Ostalgie fait son business], ''L'Expansion'', 9 novembre 2009</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=556-566}}</ref>{{,}}<ref>[http://www.smh.com.au/world/nostalgia-for-communism-on-rise-20091103-hv9t.html. {{Lang|en|texte=Nostalgia for communism on rise}}], ''{{Lang|en|texte=Sydney Morning Herald}}'', 4 novembre 2009.</ref>{{,}}<ref name="Ducoulombier125to133"/>{{,}}. Dans l'une des anciennes [[République socialiste soviétique|républiques soviétiques]], la [[Moldavie]], le [[Parti des communistes de la République de Moldavie]] est au pouvoir entre 2001 et 2009, mais sans rétablir l'ancien régime ni entraver l'économie de marché<ref>[http://news.bbc.co.uk/2/hi/europe/country_profiles/1113586.stm {{Lang|en|texte=Moldova timeline}}], {{Lang|en|texte=BBC}}, 19 mars 2012</ref>.
 
Dans les pays anciennement communistes, que ce soit en Europe, en Afrique ou au Cambodge, de nombreux cadres des anciens régimes demeurent actifs en politique. Le [[Parti communiste de la fédération de Russie]] conserve un poids électoral, mais reste dans l'opposition. Dans la majorité des anciens pays du [[bloc de l'Est]], les anciens PC au pouvoir ont, à l'exception du [[Parti communiste de Bohême et Moravie]] héritier du [[Parti communiste tchécoslovaque|PCT]], renoncé à l'identité communiste ; beaucoup se sont rebaptisés ''Parti socialiste''. D'anciens cadres des PC sont revenus au pouvoir dans leur pays à la faveur d'élections libres, mais aucun de ces dirigeants {{citation|[[Post-communisme|post-communistes]]}} des ex-satellites soviétiques ne s'est plus présenté comme communiste ou n'a tenté de restaurer les anciens régimes. La {{citation|décommunisation}} des anciens pays du bloc s'est déroulée dans des conditions difficiles : les réformes de libéralisation économique et les [[privatisation]]s, menées à un rythme souvent trop rapide, ont parfois durement affecté une population longtemps tenue à l'écart de l'[[économie de marché]], entraînant des phénomènes de nostalgie — dite en Allemagne ''[[Ostalgie]]'' — sinon des anciens régimes, du moins de la sécurité économique qu'ils garantissaient. Le passage à la démocratie s'est souvent accompagné du maintien d'une partie de l'ancienne élite à de nombreux postes-clés et la libéralisation économique a souvent aggravé la [[corruption]]. Malgré de graves imperfections et inégalités, la transition démocratique et économique s'est cependant poursuivie dans les anciens pays communistes<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=361-369}}</ref>{{,}}<ref>[http://lexpansion.lexpress.fr/economie/l-ostalgie-fait-son-business_207042.html L'Ostalgie fait son business], ''L'Expansion'', 9 novembre 2009</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=556-566}}</ref>{{,}}<ref>[http://www.smh.com.au/world/nostalgia-for-communism-on-rise-20091103-hv9t.html. {{Lang|en|texte=Nostalgia for communism on rise}}], ''{{Lang|en|texte=Sydney Morning Herald}}'', 4 novembre 2009.</ref>{{,}}<ref name="Ducoulombier125to133"/>{{,}}.
 
Dans les pays démocratiques où les PC locaux bénéficiaient d'un électorat important, le communisme connaît des fortunes inégales après 1989. Le [[Parti communiste de Finlande (1918)|Parti communiste de Finlande historique]] cesse d'exister en [[1992]], remplacé par l'[[Alliance de gauche (Finlande)|Alliance de gauche]]. Le [[Parti communiste italien]] disparaît en [[1991]] pour devenir un parti de [[centre gauche]]. Ses anciens cadres qui refusent d'abandonner l'identité communiste créent alors le [[Parti de la refondation communiste]]. Le PRC et une scission de ce dernier, le [[Parti des communistes italiens]], participent ensuite en diverses occasions à des coalitions de gauche au pouvoir, mais dans des positions subalternes. De nombreux anciens cadres du PC italien font partie de mouvements de centre gauche, et ont adopté des positions [[Social-démocratie|social-démocrates]] ou [[Socialisme libéral|social-libérales]] très éloignées de celles du PCI historique<ref>{{harvsp|Colarizi|2000|p=498-504, 626-627}}</ref>{{,}}<ref name="Courtois441"/>.
 
[[Fichier:UCPN (Maoist) 7th General Convention Nepal.jpg|vignette|Convention du [[Parti communiste unifié du Népal (maoïste)]] en [[2013]].]]
A contrario, le [[Parti communiste français]] ne change pas d'identité politique et, ayant mal négocié le tournant de 1989, continue de décliner. Bien qu'ayant participé entre [[1997]] et [[2002]] au [[gouvernement Lionel Jospin]], le PCF subit une série d'humiliations électorales dans les [[années 2000]]<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=434-441}}</ref>. Il ne trouve un nouveau souffle qu'en tant que composante du [[Front de gauche (France)|Front de gauche]], dont le principal dirigeant est le leader du [[Parti de gauche (France)|Parti de gauche]], l'ancien socialiste [[Jean-Luc Mélenchon]], et qui s'appuie l'appareil militant du PCF<ref>[http://tempsreel.nouvelobs.com/politique/20110408.OBS1006/avec-melenchon-le-pcf-fait-le-choix-de-la-raison.html "Avec Mélenchon, le PCF fait le choix de la raison"], ''Le Nouvel Observateur'', 8 avril 2011</ref>{{,}}<ref>[http://tempsreel.nouvelobs.com/election-presidentielle-2012/20120423.OBS6915/front-de-gauche-derriere-la-deception-des-raisons-d-esperer.html Front de gauche : derrière la déception, des raisons d'espérer], ''Le Nouvel Observateur'', 23 avril 2012</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Raynaud|2010|p=228}}</ref>. Lors de la [[Élection présidentielle française de 2017|présidentielle 2017]], Mélenchon rompt cependant avec les communistes et se présente sous l'étiquette de [[La France insoumise]]<ref>[http://abonnes.lemonde.fr/politique/article/2017/06/21/les-communistes-ne-s-allient-pas-a-la-france-insoumise-a-l-assemblee-nationale_5148873_823448.html Les communistes ne s’allient pas à La France insoumise à l’Assemblée nationale], ''Le Monde'', 21 juin 2017</ref>. Le courant [[trotskisme en France|trotskiste français]] bénéficie par ailleurs d'un certain poids électoral : lors de la [[Élection présidentielle française de 2002|présidentielle de 2002]], les trois courants trotskistes ([[Lutte ouvrière|LO]], la [[Ligue communiste révolutionnaire|LCR]] et le [[Parti des travailleurs (France)|PT]] lambertiste) cumulent à eux trois environ 10 % des suffrages<ref>{{harvsp|Raynaud|2010|p=63-64}}</ref>. Les résultats des élections suivantes sont cependant décevants<ref name="raynaud">{{harvsp|Raynaud|2010|p=226-229}}</ref> et lors de la [[Élection présidentielle française de 2012|présidentielle de 2012]], les candidats trotskistes sont marginalisés par le Front de gauche<ref>[http://www.lepoint.fr/fil-info-reuters/l-ascension-de-melenchon-concurrence-malvenue-pour-hollande-23-03-2012-1444419_240.php L'ascension de Mélenchon, concurrence malvenue pour Hollande], ''Le Point'', 23 mars 2012</ref>.
 
A contrario, le [[Parti communiste français]] ne change pas d'identité politique et, ayant mal négocié le tournant de 1989, continue de décliner. Bien qu'ayant participé entre [[1997]] et [[2002]] au [[gouvernement Lionel Jospin]], le PCF subit une série d'humiliations électorales dans les [[années 2000]]<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=434-441}}</ref>. Il ne trouve un nouveau souffle qu'en tant que composante du [[Front de gauche (France)|Front de gauche]], dont le principal dirigeant est le leader du [[Parti de gauche (France)|Parti de gauche]], l'ancien socialiste [[Jean-Luc Mélenchon]], et qui s'appuie l'appareil militant du PCF<ref>[http://tempsreel.nouvelobs.com/politique/20110408.OBS1006/avec-melenchon-le-pcf-fait-le-choix-de-la-raison.html "Avec Mélenchon, le PCF fait le choix de la raison"], ''Le Nouvel Observateur'', 8 avril 2011</ref>{{,}}<ref>[http://tempsreel.nouvelobs.com/election-presidentielle-2012/20120423.OBS6915/front-de-gauche-derriere-la-deception-des-raisons-d-esperer.html Front de gauche : derrière la déception, des raisons d'espérer], ''Le Nouvel Observateur'', 23 avril 2012</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Raynaud|2010|p=228}}</ref>. Lors de la [[Élection présidentielle française de 2017|présidentielle 2017]], Mélenchon rompt cependant avec les communistes et se présente sous l'étiquette de [[La France insoumise]]<ref>[http://abonnes.lemonde.fr/politique/article/2017/06/21/les-communistes-ne-s-allient-pas-a-la-france-insoumise-a-l-assemblee-nationale_5148873_823448.html Les communistes ne s’allient pas à La France insoumise à l’Assemblée nationale], ''Le Monde'', 21 juin 2017</ref>. Le courant [[trotskisme en France|trotskiste français]] bénéficie par ailleurs d'un certain poids électoral, lors de la [[Élection présidentielle française de 2002|présidentielle de 2002]] les partis trotskistes cumulent environ 10 % des suffrages<ref>{{harvsp|Raynaud|2010|p=63-64}}</ref>. Les résultats des élections suivantes sont cependant décevants<ref name="raynaud">{{harvsp|Raynaud|2010|p=226-229}}</ref> et lors de la [[Élection présidentielle française de 2012|présidentielle de 2012]], les candidats trotskistes sont marginalisés par le Front de gauche<ref>[http://www.lepoint.fr/fil-info-reuters/l-ascension-de-melenchon-concurrence-malvenue-pour-hollande-23-03-2012-1444419_240.php L'ascension de Mélenchon, concurrence malvenue pour Hollande], ''Le Point'', 23 mars 2012</ref>.
Outre les cas de la France et de l'Italie, plusieurs PC sont ou ont été associés au pouvoir dans des démocraties, comme le [[Parti communiste sud-africain]], allié à l'[[Congrès national africain|ANC]], après la chute de l'[[apartheid]]<ref name="Brown359"/> ou le [[Parti communiste du Brésil]], allié au [[Parti des travailleurs (Brésil)|PT]], à partir de [[2003]]<ref>Tom Lansford (dir), ''Political Handbook of the World 2014'', CQ Press, 2014, page 184</ref>. À [[Chypre (pays)|Chypre]], le [[Parti progressiste des travailleurs]] (AKEL) est au pouvoir de 2008 à 2013, période durant laquelle ce pays est le seul État de l'[[Union européenne]] à avoir un président communiste. Chypre n'en est pas moins resté acquise à l'[[économie de marché]] et l'élection de 2013 est remportée, sur fond de crise économique, par le candidat conservateur<ref>[http://www.lexpress.fr/actualite/monde/le-communiste-christofias-elu-president-de-chypre_470463.html Le communiste Christofias élu président de Chypre], ''L'Express'', 25 février 2008</ref>{{,}}<ref>[http://fr.euronews.com/2013/02/25/chypre-les-banques-priorite-n1-apres-l-election-presidentielle/ Chypre, les banques, priorité {{numéro|1}} après l'élection présidentielle], Euronews, 25 février 2013</ref>.
 
Outre les cas de la France et de l'Italie, plusieurs PC sont ou ont été associés au pouvoir dans des démocraties, comme le [[Parti communiste sud-africain]], allié à l'[[Congrès national africain|ANC]], après la chute de l'[[apartheid]]<ref name="Brown359"/> ou le [[Parti communiste du Brésil]], allié au [[Parti des travailleurs (Brésil)|PT]], à partir de [[2003]]<ref>Tom Lansford (dir), ''Political Handbook of the World 2014'', CQ Press, 2014, p. 184</ref>. À [[Chypre (pays)|Chypre]], le [[Parti progressiste des travailleurs]] (AKEL) est au pouvoir de 2008 à 2013, période durant laquelle ce pays est le seul État de l'[[Union européenne]] à avoir un président communiste. Chypre n'en est pas moins resté acquise à l'[[économie de marché]] et l'élection de 2013 est remportée, sur fond de crise économique, par le candidat conservateur<ref>[http://www.lexpress.fr/actualite/monde/le-communiste-christofias-elu-president-de-chypre_470463.html Le communiste Christofias élu président de Chypre], ''L'Express'', 25 février 2008</ref>{{,}}<ref>[http://fr.euronews.com/2013/02/25/chypre-les-banques-priorite-n1-apres-l-election-presidentielle/ Chypre, les banques, priorité {{numéro|1}} après l'élection présidentielle], Euronews, 25 février 2013</ref>.
 
Au niveau européen, divers PC se réunissent depuis [[2004]] au sein du [[Parti de la gauche européenne]], qui ne se limite cependant pas aux seuls partis communistes et compte également des formations [[socialisme|socialistes]] et [[Écologie politique|écologistes]] relevant de la [[Gauche radicale (politique)|gauche radicale]], comme [[SYRIZA]] en Grèce<ref>[http://www.european-left.org/about-el/member-parties site web] du PGE</ref>. Au niveau international, les [[Conférences internationales des partis communistes et ouvriers]] (réseau ''Solidnet'') réunissent depuis [[1999]] des PC de plusieurs continents<ref>[http://www.solidnet.org/15-imcwp/15-imcwp-list-of-participants Liste de participants] au {{15e|meeting}} international Solidnet, 2013</ref>.
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Au [[Népal]], le [[Parti communiste du Népal (maoïste)]], dirigé par [[Pushpa Kamal Dahal]] dit {{citation|Prachanda}}, mène durant plusieurs années une [[guerre civile népalaise|guerre civile]] contre le gouvernement monarchique ; la transition politique qui suit les accords de paix permet ensuite aux maoïstes de remporter le [[Élection de l'Assemblée constituante népalaise de 2008|scrutin de 2008]]. Le Népal, pays très pauvre et dépendant des échanges avec l'[[Inde]], n'est pas pour autant devenu un pays communiste, conservant un système d'[[économie mixte]] et des élections libres. Entre 2008 et 2013, le [[Parti communiste unifié du Népal (maoïste)]] alterne au pouvoir avec une coalition formée par le [[Parti communiste du Népal (marxiste-léniniste unifié)]] et le [[Congrès népalais]]<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=603-604}}</ref> : lors de l'[[Élection de l'Assemblée constituante népalaise de 2013|élection de 2013]], le Congrès arrive en tête, battant nettement les maoïstes<ref>[https://www.nytimes.com/2013/11/26/world/asia/maoists-are-routed-in-nepalese-election.html?_r=0 Election Results in Nepal Signal a Political Right Turn], ''The New York Times'', 25 novembre 2013</ref>.
 
== Théories et courants ==
== Variations de l'idéologie communiste avant et après 1989 ==
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=== Après 1917 : domination du courant léniniste ===
[[File:20-lenin-infantilesickness.jpg|vignette|gauche|Couverture d'une édition en langue anglaise du livre de [[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]], ''[[La Maladie infantile du communisme (le « gauchisme »)]]''.]]
[[File:Gramsci-by-origa.jpg|vignette|Portrait d'[[Antonio Gramsci]].]]
Le concept de communisme et les idées qui y sont associées ont connu, au cours de l'histoire, de nombreuses transformations, depuis les formes de [[communisme chrétien]] prônées par [[Wilhelm Weitling]] ou [[Étienne Cabet]], le [[blanquisme]], les conceptions [[anarchisme|anarchistes]], les premiers temps du [[marxisme]], et jusqu'à l'époque actuelle. À compter de la [[révolution d'Octobre]], et malgré l'existence d'écoles de pensée concurrentes, le communisme s'identifie essentiellement avec le [[léninisme]]. Les différentes familles de pensée de la [[Gauche communiste]] - qui découle en partie du [[luxemburgisme]] - sont marginalisées dès les [[années 1920]] : le [[communisme de conseils]], porté par des théoriciens comme [[Anton Pannekoek]], [[Herman Gorter]] ou [[Karl Korsch]], se pose en école de pensée alternative au léninisme, mais n'est pas en mesure de rivaliser avec lui<ref name="Winock 64-65"/>. Le courant léniniste connaît cependant de nombreuses variations en son sein <ref name="Colas105118"/>.
 
[[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]] avait pu, de son vivant, faire l'objet de critiques au sein de la direction du [[Parti communiste de l'Union soviétique|Parti communiste]], y compris après la [[révolution d'Octobre]]. Dès lors que le chef des [[bolcheviks]] est écarté par la maladie, sa pensée est exaltée en tant que doctrine officielle du mouvement par les différents cadres dirigeants du Parti, qui cherchent chacun à affirmer leur légitimité dans la perspective de la succession. L'idéologie léniniste, déjà dominante au sein de l'[[Internationale communiste]], s'impose comme une référence indépassable au sein du Parti soviétique<ref>Nina Tumarkin, ''Lenin Lives ! : The Lenin Cult in Soviet Russia'', Harvard University Press, 1997, pagep. 122</ref>. Après la mort de Lénine, [[Joseph Staline|Staline]] remporte la bataille pour la succession de ce dernier et réalise une synthèse doctrinale du léninisme, qu'il systématise en un tout cohérent, fixant ainsi pour plusieurs décennies l'orthodoxie communiste. Ainsi résumée, la pensée léniniste et les conceptions marxistes de l'Histoire, de l'économie et des rapports sociaux sont codifiées selon une logique de lois historiques rigides et immuables ; le [[matérialisme dialectique]], de simple outil d'analyse philosophique, devient une doctrine à laquelle doivent se conformer l'ensemble des sciences<ref>{{harvsp|Service|2004|p=244-245}}</ref>{{,}}<ref name="Colas105118"/>. Le [[marxisme-léninisme]], qui se présente comme une pensée scientifique englobant la réalité dans son ensemble, demeure la tendance dominante au sein de la mouvance communiste, et le reste jusqu'à la fin de la [[guerre froide]]<ref name="Colas105118"/>.
 
Dans l'[[entre-deux-guerres]], le [[trotskisme]] se réclame également du léninisme : à la différence de la mouvance marxiste-léniniste et [[stalinisme|stalinienne]] qui vise avant tout à [[Socialisme dans un seul pays|consolider les acquis révolutionnaires en URSS]] avant d'envisager une révolution internationale, l'école de pensée trotskiste considère, en vertu du concept de [[révolution permanente]], qu'une révolution mondiale est un préalable indispensable à la réalisation du socialisme. De rares intellectuels communistes liés à la mouvance pro-soviétique continuent de faire preuve dans leurs travaux d'une relative indépendance de pensée, à l'image de [[Georg Lukács]], qui entreprend de nuancer le [[matérialisme historique]] et souligne l'importance des aspects subjectifs et culturels du marxisme. [[Antonio Gramsci]] suit la même logique en s'écartant de l'[[économisme]] dominant chez le marxistes, et en considérant que l'histoire n'est pas déterminée par la structure économique mais par l'interprétation que l'on donne de cette structure et des lois qui la régissent ; il insiste par ailleurs sur l'importance de l'action dans le domaine culturel. Élaborée pour l'essentiel en prison, l'œuvre théorique de Gramsci ne devient cependant réellement influente qu'après la mort de son auteur. Lukács est quant à lui soumis à de nombreuses attaques au sein du mouvement communiste, son hégélianisme l'exposant à des accusations d'[[Idéalisme (philosophie)|idéalisme]]<ref>{{harvsp|Furet|1995|p=151}}</ref>{{,}}<ref name="Colas105118"/>{{,}}<ref name="priestland" />{{,}}<ref name="Prisons">[https://www.lemonde.fr/livres/article/2014/04/30/gramsci-code_4409576_3260.html Gramsci Code. « Les Deux Prisons de Gramsci », de Franco Lo Piparo], ''Le Monde'', 30 avril 2014</ref>.
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[[File:Tito bust cropped.png|vignette|gauche|140px|Buste du maréchal [[Josip Broz Tito|Tito]], en [[Macédoine (pays)|Macédoine]].]]
[[File:Mao Zedong in front of crowd.jpg|vignette|Image de [[Propagande de la République populaire de Chine|propagande]] de [[Mao Zedong]].]]
Au début de la [[guerre froide]], le [[stalinisme]] connaît une période d'apogée en URSS comme dans les autres régimes communistes et dans l'ensemble des PC<ref>{{harvsp|Werth|2004|p=378-387}}</ref> ; dans les années de l'immédiate après-guerre, l'influence communiste atteint des sommets dans les milieux intellectuels de divers pays occidentaux, où ils gagnent de très nombreux {{citation|[[compagnon de route|compagnons de route]]}}. Après la [[rupture Tito-Staline]], le [[titisme]], pratique politique davantage que doctrine cohérente, suscite l'intérêt d'une partie de la gauche occidentale qui voit avec sympathie la naissance d'un régime communiste anti-[[stalinisme|stalinien]]<ref name="Priestland318"/>. Après la mort de Staline, la [[déstalinisation]] qui s'ensuit n'est accompagnée d'aucune révision théorique en URSS. Dans le reste du monde, la dénonciation des crimes de Staline diminue l'attrait du communisme soviétique auprès des intellectuels. De nombreux courants se développent qui, tout en se réclamant du communisme, cherchent une alternative au {{citation|modèle soviétique}}, qu'il s'agisse de réfléchir à des formes anti-staliniennes de communisme ou au contraire de dénoncer la déstalinisation et de revenir à l'orthodoxie. La pensée marxiste connaît un renouveau théorique : certaines démarches intellectuelles continuent de se situer dans une ligne stalinienne, mais d'autres au contraire alimentent la démarche du marxisme critique, qui contribue à faire progressivement perdre leur aura d'autorité aux interprétations soviétiques du marxisme<ref>{{harvsp|Raynaud|2010|p=124-145}}</ref>.
 
En [[Républiquerépublique populaire de Chine]], [[Mao Zedong|Mao]] se positionne en défenseur d'une conception {{citation|[[anti-révisionnisme|anti-révisionniste]]}} du [[marxisme-léninisme]] et dénonce toute compromission avec le [[capitalisme]] : au moment du [[Grand Bond en avant]], il prône une politique de développement à marche forcée de son pays via une mobilisation de l'ensemble de la population ; durant la [[Révolutionrévolution culturelle]], il se fait l'avocat de la base militante contre la [[bureaucratie]] du Parti communiste. En Occident, au sein ou à l'extérieur des appareils militants, des philosophes comme [[Herbert Marcuse]], [[Lucio Colletti]] ou [[Louis Althusser]] proposent diverses lectures de l'œuvre de Marx et des théories marxistes<ref name="Service371" />.
 
Une partie de l'[[extrême gauche]] occidentale <math>-</math> en premier lieu le [[trotskisme]] <math>-</math> continue de se réclamer des théories [[léninisme|léninistes]] tout en s'opposant à l'interprétation qui en est donnée par l'URSS. Divers courants d'{{citation|[[ultragauche]]}} critiquent non seulement le communisme soviétique mais également le léninisme : [[Cornelius Castoriadis]] et [[Claude Lefort]], issus du mouvement [[trotskisme|trotskiste]] qu'ils quittent par la suite, animent la revue ''[[Socialisme ou barbarie]]'', dans laquelle ils se livrent à une critique pointue du système bureaucratique soviétique et cherchent des alternatives dans les pratiques [[communisme de conseils|conseillistes]]<ref name="nick" />{{,}}<ref name="Bourseiller2009143"/>. [[Guy Debord]] et l'[[Internationale situationniste]] reprennent également le credo du communisme de conseils<ref>[[Laurent Chollet]], ''Les Situationnistes : l'utopie incarnée'', Gallimard, coll. « [[Découvertes Gallimard]] / Culture et société » ([[Liste des volumes de « Découvertes Gallimard » (2e partie)|{{nº|463}}]]), 2004, pagesp. 41-42</ref>. Au sein même du [[Parti communiste français|PCF]], dans les [[années 1960]], les approches philosophiques du communisme divergent : [[Roger Garaudy]], tenant d'un {{citation|marxisme humaniste}}, s'oppose aux partisans d'Althusser, ce dernier se situant dans la mouvance [[structuralisme|structuraliste]] et s'attachant à relire les œuvres de Marx pour en dégager le fond {{citation|[[Science|scientifique]]}} ; les disciples d'Althusser se rapprochent ensuite des thèses pro-chinoises<ref>{{harvsp|Courtois|Lazar|1993|p=322}}</ref>.
 
La redécouverte de l'œuvre de [[Antonio Gramsci|Gramsci]], après-guerre, contribue à nourrir en [[Italie]] une pensée communiste moins orthodoxe, et plus riche sur le plan théorique, que dans la plupart des autres pays. Ses écrits, recueillis dans ses ''[[Cahiers de prison]]'', font de lui, après la Seconde Guerre mondiale, un penseur marxiste de première importance. L'œuvre de Gramsci a cependant été éditée, et apparemment remaniée, par [[Palmiro Togliatti]] : tout en faisant du gramscisme la base de sa {{citation|voie italienne du communisme}}, Togliatti s'est efforcé de rattacher le marxisme hétérodoxe de Gramsci au courant [[léninisme|léniniste]], et semble, sur certains points, en avoir altéré le sens<ref name="Colas105118"/>{{,}}<ref name="priestland" />{{,}}<ref name="Prisons" />. Le gramscisme fait, notamment après [[1968]], l'objet de nombreux débats et d'interprétations divergentes quant à la portée de son [[historicisme]], à son éventuelle appartenance à la famille du léninisme, et à la nature de ses concepts sociologiques<ref>{{harvsp|Labica|Bensussan|1985|p=509-513}}</ref>.
 
L'[[opéraïsme]] (soit {{citation|ouvriérisme}}, de l'[[langue italienne|italien]] ''{{Lang|it|texte=operaio}}'' signifiant ''ouvrier''), courant d'origine italienne dont [[Toni Negri]] est le théoricien le plus connu, apparaît dans les [[années 1960]], dans le contexte du [[miracle économique italien]] et de l'industrialisation du pays. Negri, qui prône l'usage de la [[lutte armée]] dans un cadre plus vaste de luttes sociales radicales, exerce une influence sur une partie de l'extrême gauche italienne durant les [[Années de plomb (Italie)|années de plomb]]<ref>Guigou J. Wajnsztejn, ''L'individu et la communauté humaine : Anthologie de textes de Temps critiques'', l'Harmattan, 1998, pagesp. 71-72</ref>{{,}}<ref>[[Pierre Milza]], ''Histoire de l'Italie'', Fayard, 2005, pagesp. 963-964</ref>.
 
Dans les contextes de la [[décolonisation]], de la [[révolution cubaine]] et de la [[guerre du Viêt Nam]], l'association du communisme à un discours [[tiers-mondiste]], puis à une lutte contre l'[[impérialisme américain]], lui permet d'exercer une nouvelle séduction dans les [[années 1960]]-[[Années 1970|70]] ; [[Mao Zedong]], [[Hô Chi Minh]], ainsi que [[Fidel Castro]] et [[Che Guevara]], font figure d'icônes [[anti-impérialisme|anti-impérialistes]]<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=102-104}}</ref>. À l'époque de la [[Révolutionrévolution culturelle]], le [[maoïsme]] est considéré par de nombreux militants occidentaux - séduits par son radicalisme verbal et qui ne disposent sur les réalités chinoises que d'informations en provenance du régime - comme une alternative au communisme soviétique. Plus largement, les références communistes se mêlent souvent à l'époque, chez une partie des sympathisants occidentaux d'extrême gauche ou plus largement dans la mouvance de la [[Nouvelle gauche]], à des discours [[tiers-mondisme|tiers-mondistes]] et idéalistes, souvent en décalage avec la réalité des régimes politiques ou des personnalités auxquels ils se réfèrent<ref name="Service371"/>.
 
Alors que le régime chinois entame sa libéralisation à la fin des [[années 1970]], le maoïsme tombe progressivement en désuétude : toujours officiellement en vigueur en Chine, il est, dans les faits, vidé de son contenu idéologique. Totalement marginalisé en Occident, il conserve néanmoins davantage de partisans dans le [[tiers-monde]]. Après sa rupture avec la Chine, l'[[République populaire socialiste d'Albanie|Albanie]] d'[[Enver Hoxha]] se pose en gardienne de l'orthodoxie ; d'anciens groupes maoïstes et d'autres partis staliniens {{citation|[[Anti-révisionnisme|anti-révisionnistes]]}}, de dimensions généralement modestes, constituent une tendance d'extrême gauche {{citation|[[Hoxhaïsme|pro-albanaise]]}}<ref>Uwe Backes, Patrick Moreau, ''{{Lang|en|texte=Communist and post-communist parties in Europe}}'', Vandenhoeck & Ruprecht, 2008, pagep. 28</ref>.
 
La doctrine du [[Juche]], élaborée par [[Kim Il-sung]] en [[Corée du Nord]], représente un cas particulier : hostile à la [[déstalinisation]], le dirigeant nord-coréen a progressivement évacué les références au [[marxisme-léninisme]] pour développer sa propre idéologie, à usage essentiellement local. Tout en conservant des références au socialisme et au communisme, le Juche se veut une doctrine originale : il constitue avant tout une idéologie [[Nationalisme|nationaliste]], fondée sur le concept d'[[autosuffisance]] et dans laquelle l'adulation de la personne du dirigeant tient un rôle essentiel<ref name="Priestland302"/>.
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[[Fichier:Partido Comunista de la Argentina.JPG|vignette|gauche|Manifestation du [[Parti communiste (Argentine)|Parti communiste argentin]] en 2010.]]
[[Fichier:Alain Badiou cropped.jpg|vignette|150px|[[Alain Badiou]] en 2010.]]
[[File:3669 - Gay Pride di Milano, 2007 - Foto Giovanni Dall'Orto, 23-Jun-2007.jpg|vignette|Un militant du [[Parti de la refondation communiste]] en 2007, lors de la [[Marche des fiertés|gay pridePride]] de [[Milan]].]]
[[File:Eric Hobsbawm cropped.jpg|vignette|gauche|L'historien communiste britannique [[Eric Hobsbawm]].]]
Après la [[glasnost]], la chute du bloc de l'Est et les avancées considérables de l'historiographie, la réalité historique du communisme est devenue beaucoup plus accessible qu'auparavant ; les visions idéalisées du communisme en tant que phénomène historique, ou en tant qu'alternative politique, n'ont cependant pas totalement disparu. En [[1995]], [[François Furet]] juge, dans ''[[Le Passé d'une illusion]]'', que {{citation|l'idée de communisme n'a cessé de protéger à toutes ses époques l'histoire du communisme, jusqu'à ce moment ultime où la seconde, par l'arrêt pur et simple de son cours, a entraîné la première dans sa disparition, puisqu'elle l'avait si longtemps incarnée. Mais la fin du monde soviétique ne change rien à la demande démocratique d'une autre société, et pour cette raison même il y a fort à parier que cette vaste faillite continuera à jouir dans l'opinion du monde de circonstances atténuantes, et connaîtra peut-être un renouveau d'admiration. Non que, sous la forme où elle est morte, l'idée communiste puisse renaître : la révolution prolétarienne, la science marxiste-léniniste, l'élection idéologique d'un parti, d'un territoire et d'un Empire ont sans doute terminé leur cours avec l'Union soviétique. Mais la disparition de ces figures familières à notre siècle ferme une époque, plutôt qu'elle ne clôt le répertoire de la démocratie}}<ref name="Furet572"/>.
 
Malgré les crimes commis en son nom, le communisme, en tant qu'idéal voire en tant que système politique, n'a pas fait l'objet de la même condamnation morale unanime que le [[nazisme]] : une distinction est en effet couramment faite entre l'idéal du communisme, supposé généreux, et la réalité politique concrète qui s'en est réclamée<ref>[[Anne Applebaum]], ''{{Lang|en|texte=Gulag : a History}}'', {{Lang|en|texte=Penguin Books}}, 2003, pagesp. 5-8</ref>. L'historien des idées [[Alain Besançon]] parle à cet égard d'{{citation|[[amnésie]]}} des crimes du communisme, par opposition à l'{{citation|[[hypermnésie]]}} des crimes du nazisme<ref>Alain Besançon, ''Le malheur du siècle : sur le communisme, le nazisme et l’unicité de la Shoah'', Fayard, 1998, pagep. 10</ref>. [[Jean-François Revel]] dénonce pour sa part en 1999 un {{citation|[[négationnisme]]}} pro-communiste qui tendrait à occulter, voire à nier, les dimensions criminelles du communisme en tant que phénomène historique pour en préserver la {{citation|couverture utopique}}<ref>Jean-François Revel, ''La Grande parade. Essai sur la survie de l'utopie socialiste'', Plon, 2000, 996-114</ref>. Certains secteurs d'opinion marqués à [[Gauche (politique)|gauche]] ont, suivant un processus que le politologue [[Philippe Raynaud]] attribue à {{citation|un certain [[gauchisme]]}}, contribué à attribuer la faillite du communisme non au communisme lui-même, mais au {{citation|[[stalinisme]]}}<ref>{{harvsp|Raynaud|2010|p=222}}</ref>. La figure de [[Che Guevara]] conserve une [[Culte de la personnalité de Che Guevara|capacité d'attraction]] en tant que symbole révolutionnaire<ref>{{harvsp|Priestland|2009|p=569}}</ref>.
 
Un phénomène parfois désigné sous le nom de {{citation|[[néocommunisme]]}} tend, depuis la fin de la [[guerre froide]], à se développer ; d'une part avec la permanence ou l'apparition de partis aux références communistes plus ou moins affichées comme ''[[Die Linke]]'' ; d'autre part avec la récupération, par les tendances les plus diverses de la [[Gauche (politique)|gauche]] et de l'[[extrême gauche]], d'une partie de l'univers référentiel, des idéaux et des engagements communistes. Ceux-ci peuvent se manifester dans la mouvance [[altermondialisme|altermondialiste]] — ou plus largement celle de la [[gauche antilibérale]] — ainsi que via divers engagements — qu'il s'agisse de la réduction des inégalités, de la lutte contre le [[racisme]] ou de la défense des [[droits de l'homme]] — sans qu'aucune de ces causes ne soit réductible à un engagement communiste. Divers partis communistes, comme le [[Parti communiste français|PCF]] en France ou [[Parti de la refondation communiste|Refondation communiste]] en Italie, participent à ce courant, en concentrant leur discours sur l'[[anticapitalisme]] et la dénonciation du [[néolibéralisme]], ainsi que sur l'[[antiracisme]], l'[[écosocialisme]], le [[féminisme]], la défense des [[Immigration|immigrés]] et des minorités ethniques et sexuelles, et autres thèmes communs à l'ensemble de la [[Gauche radicale (politique)|gauche radicale]], voire à une partie de la gauche modérée. La [[Ligue communiste révolutionnaire|LCR]], en France, connaît une mutation comparable : dans les [[années 2000]], elle évolue vers une rhétorique axée de manière plus large sur la dénonciation des injustices sociales, jusqu'à s'éloigner dans les [[années 2000]] de son identité strictement [[trotskisme|trotskiste]] pour devenir le [[Nouveau Parti anticapitaliste]]<ref name="raynaud" />. S'inscrivant dans un contexte global de critique des méfaits du [[libéralisme économique|libéralisme]] et de la [[mondialisation économique]], cette tendance peut s'exprimer à travers des évènements comme le [[Forum social mondial]]<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=406-408}}</ref>, autour de nouvelles causes comme celle des [[Armée zapatiste de libération nationale|zapatistes]] au [[Chiapas]] et, plus largement, dans le contexte de la vague des nouveaux leaders de gauche en [[Amérique latine]] dans les [[années 2000]]<ref>{{harvsp|Raynaud|2010|p=27-28}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Vayssière|2001|p=356-364}}</ref>.
 
Quelques mouvements européens d'[[extrême gauche]]{{Qui|date=12 janvier 2024}} ont par ailleurs tissé des liens avec des milieux [[islamisme|islamistes]]<ref>Christophe Bourseiller, ''À gauche, toute ! : Trotskistes, néo-staliniens, libertaires, « ultra-gauche », situationnistes, altermondialistes…'', CNRS éditions, 2009, p. 87-92</ref>.
Un phénomène parfois désigné sous le nom de {{citation|[[néocommunisme]]}} tend, depuis la fin de la [[guerre froide]], à se développer ; d'une part avec la permanence ou l'apparition de partis aux références communistes plus ou moins affichées comme ''[[Die Linke]]'' ; d'autre part avec la récupération, par les tendances les plus diverses de la [[Gauche (politique)|gauche]] et de l'[[extrême gauche]], d'une partie de l'univers référentiel, des idéaux et des engagements communistes. Ceux-ci peuvent se manifester dans la mouvance [[altermondialisme|altermondialiste]] — ou plus largement celle de la [[gauche antilibérale]] — ainsi que via divers engagements — qu'il s'agisse de la réduction des inégalités, de la lutte contre le [[racisme]] ou de la défense des [[droits de l'homme]] — sans qu'aucune de ces causes ne soit réductible à un engagement communiste. Divers partis communistes, comme le [[Parti communiste français|PCF]] en France ou [[Parti de la refondation communiste|Refondation communiste]] en Italie, participent à ce courant, en concentrant leur discours sur l'[[anticapitalisme]] et la dénonciation du [[néolibéralisme]], ainsi que sur l'[[antiracisme]], l'[[écosocialisme]], le [[féminisme]], la défense des [[Immigration|immigrés]] et des minorités ethniques et sexuelles, et autres thèmes communs à l'ensemble de la [[Gauche radicale (politique)|gauche radicale]], voire à une partie de la gauche modérée. La [[Ligue communiste révolutionnaire|LCR]], en France, connaît une mutation comparable : dans les [[années 2000]], elle évolue vers une rhétorique axée de manière plus large sur la dénonciation des injustices sociales, jusqu'à s'éloigner dans les [[années 2000]] de son identité strictement [[trotskisme|trotskiste]] pour devenir le [[Nouveau Parti anticapitaliste]]<ref name="raynaud" />. S'inscrivant dans un contexte global de critique des méfaits du [[libéralisme économique|libéralisme]] et de la [[mondialisation économique]], cette tendance peut s'exprimer à travers des évènements comme le [[Forum social mondial]]<ref>{{harvsp|Courtois|2007|p=406-408}}</ref>, autour de nouvelles causes comme celle des [[Armée zapatiste de libération nationale|zapatistes]] au [[Chiapas]] et, plus largement, dans le contexte de la vague des nouveaux leaders de gauche en [[Amérique latine]] dans les [[années 2000]]<ref>{{harvsp|Raynaud|2010|p=27-28}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Vayssière|2001|p=356-364}}</ref>.
Quelques mouvements européens d'[[extrême gauche]] ont par ailleurs tissé des liens avec des milieux [[islamisme|islamistes]]<ref>Christophe Bourseiller, ''À gauche, toute ! : Trotskistes, néo-staliniens, libertaires, « ultra-gauche », situationnistes, altermondialistes…'', CNRS éditions, 2009, pages 87-92</ref>.
 
Dans le domaine de la vie intellectuelle, les réflexions autour de thèmes liés au marxisme, au communisme ou à leur univers référentiel demeurent présentes, dans le cadre d'une critique plus vaste du [[capitalisme]] et de la [[mondialisation économique|mondialisation de l'économie]], notamment à l'occasion des [[Crise financière|crises financières]] et [[crise économique|crises économiques]]. Dans les [[années 2000]], [[Toni Negri]] et [[Michael Hardt]] abordent les thèmes de la globalisation et des {{citation|multitudes}} en tant que masses populaires opprimées<ref>{{harvsp|Raynaud|2010|p=147-170}}</ref> ; [[Alain Badiou]] consacre des écrits au thème de {{citation|l'hypothèse communiste}} ; il donne cependant du {{citation|communisme}} une définition parfois abstraite, en le présentant par exemple comme {{citation|tout devenir qui fait prévaloir l'en-commun sur l'égoïsme}}<ref>{{harvsp|Raynaud|2010|p=171-195, 233-234}}</ref>. En [[2009]], un colloque réunissant à [[Londres]] des philosophes, parmi lesquels Alain Badiou, autour de {{citation|l'idée du communisme}}, remporte un succès public inattendu<ref>[http://www.guardian.co.uk/uk/2009/mar/12/philosophy {{Lang|en|texte=Move over Jacko, Idea of Communism is hottest ticket in town this weekend}}], ''{{Lang|en|texte=the Guardian}}'', 12 mars 2009</ref>, s'inscrivant dans une démarche qui tend à réhabiliter le concept de communisme et à critiquer la notion de [[totalitarisme]], et plus généralement la pensée {{citation|antitotalitaire}} comme ayant nui à la gauche<ref name="Raynaud217">{{harvsp|Raynaud|2010|p=217-234}}</ref>. En [[2013]], le philosophe marxiste [[Lucien Sève]] continue de réaffirmer {{citation|l'urgence historique de penser avec Marx le communisme}}, l'entrée dans {{citation|la phase historique terminale du capitalisme}} imposant à ses yeux d'{{citation|actualiser la visée du communisme}}<ref>[https://www.humanite.fr/politique/lucien-seve-l-urgence-historique-de-penser-avec-ma-547866 Lucien Sève "L’urgence historique de penser avec Marx le communisme"], ''L'Humanité'', 30 août 2013</ref>.
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Le politologue [[Philippe Raynaud]], commentant en 2010 les conclusions tirées quinze ans plus tôt par [[François Furet]], s'interroge pour sa part sur l'éventuel {{citation|avenir d'une illusion}}, soit sur une radicalité révolutionnaire toujours présente dans les idéaux et la vie intellectuelle et qui, après la chute du communiste soviétique, adopte de nouveaux visages. Raynaud tend à confirmer le jugement de François Furet quant à l'échec des tentatives de redonner vie au communisme sous son ancienne forme, voire à revitaliser la théorie marxiste : {{citation|chez aucun des auteurs, brillants ou laborieux, nous n'avons rencontré ce qui faisait la force de l'illusion communiste : la certitude d'être au service d'une cause à la fois juste et scientifiquement fondée, qui devait inéluctablement conduire à l'émergence d'une société radicalement différente}} ; il souligne cependant, au-delà des écrits de philosophes {{citation|néocommunistes}} comme [[Alain Badiou]] ou [[Slavoj Žižek]], la permanence de l'idée communiste, sinon en tant que projet politique concret et unifié, du moins en tant que référence de l'imaginaire social et politique<ref name="Raynaud217"/>. L'historien [[Robert Service]] souligne, pour sa part que les conditions historiques qui ont permis la naissance et le développement de la mouvance communiste, parmi lesquelles les injustices politiques et économiques, sont toujours présentes : si le retour du communisme en tant que régime politique sous la forme qu'il a adopté au {{XXe siècle}} lui paraît improbable, il estime néanmoins que son empreinte dans l'histoire et sur les esprits est suffisamment profonde pour permettre à l'idéal communiste de demeurer présent et de ressurgir sous d'autres formes<ref>{{harvsp|Service|2007|p=481-482}}</ref>.
 
== CritiquesDifférentes du communismeformes ==
{{Section vide ou incomplète}}
 
== Analyses ==
=== Critiques ===
 
{{Article détaillé|Critiques du communisme|Anticommunisme}}
 
[[Fichier:CDU Wahlkampfplakat - kaspl011.JPG|vignette|Affiche électorale de la [[Union chrétienne-démocrate d'Allemagne|CDU]] [[Allemagne de l'Ouest|ouest-allemande]] (1953).]]
 
Du fait de la diversité du phénomène, les critiques du communisme peuvent porter tant sur ses aspects théoriques que sur ses réalités politiques concrètes. Au {{XIXe siècle}}, le concept de société communiste est critiqué, non seulement par des [[Conservatisme|conservateurs]], mais aussi dans les rangs [[socialisme|socialistes]] et [[anarchisme|anarchistes]]. [[Félicité Robert de Lamennais|Lamennais]] dénonce ainsi le communisme, au sens de société fondée sur la propriété commune, comme un retour à l'[[esclavage]] et au {{citation|travail forcé, rétribué au gré de l'État qui l'impose}}<ref>{{harvsp|Droz|1972|p=379}}</ref>. [[Pierre-Joseph Proudhon]], théoricien du [[socialisme libertaire]], considère quant à lui dès [[1846]] que le projet de société communiste débouche sur la {{citation|dictature partout}}<ref>Pierre-Joseph Proudhon, ''Système des contradictions économiques'', tome II, 1846, pagep. 301</ref>. [[Max Stirner]], l'un des fondateurs de l'[[anarchisme individualiste]], écrit pour sa part : « en abolissant la propriété personnelle, le communisme ne fait que me rejeter plus profondément sous la dépendance d'autrui, autrui s'appelant désormais la généralité ou la communauté »<ref>Charles Bontemps, ''Écrits sur l'anarchie'', Seghers, 1964, pagep. 41</ref>. Un autre théoricien anarchiste, [[Mikhaïl Bakounine]], estime pour sa part en [[1866]] que {{citation|l'État despotique, mis en place par le communisme d'État, fera naître une classe exploitante et privilégiée : la [[bureaucratie]]}}<ref name="DupuyEncrevé"/> ; en [[1873]], il se définit comme {{citation|collectiviste et pas du tout communiste}}, le communisme étant à ses yeux {{citation|la négation de la liberté}} en ce qu'il {{citation|fait absorber toutes les puissances de la société dans l'État [et] aboutit nécessairement à la centralisation de la propriété entre les mains de l'État}}<ref>Danic Parenteau, ''Les Idéologies Politiques : Le Clivage Gauche-Droite'', [[Presses de l'Université du Québec]], 2008, pagep. 113.</ref>.
 
[[Yves Guyot]] qualifie en 1893 le principe de [[Collectivisme économique|collectivisme]] de « tyrannique » et juge que le communisme, en rejetant la [[propriété privée]], contredit la [[déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789]] qui compte la propriété parmi les {{citation|droits naturels et imprescriptibles de l'homme}}<ref>[[Yves Guyot]], ''La Tyrannie collectiviste'', 1893. On peut également se référer aux ''Principes de 1789 et le socialisme''.</ref>. Commentant l'interprétation soviétique du passage à la société communiste, l'économiste [[André Piettre]] écrit en [[1966]] : {{citation|on retrouve là le rêve saint-simonien du {{citation|gouvernement des hommes}} disparaissant dans {{citation|l'administration des choses}}. Reste à savoir si, dans cet immense mécanisme social, l'homme lui-même ne risque pas d'être traité comme une chose ?}}<ref>{{harvsp|Piettre|1966|p=179}}</ref>. Pour le philosophe [[André Comte-Sponville]], le communisme, en tant qu'idée, ne peut déboucher que sur l'utopie ou sur le totalitarisme : les deux seules options étant d'une part la {{citation|niaiserie}}, d'autre part la {{citation|dictature}}<ref>André Comte-Sponville, ''Dictionnaire philosophique'', Presses universitaires de France, pagep. 118</ref>.
 
Au {{XXe siècle}}, la notion de communisme ne se rapporte plus à une forme théorique de société, mais à une réalité politique concrète : les critiques visent désormais des courants de pensée distincts, et des régimes politiques existants. Les [[État communiste|régimes communistes]] ont été critiqués en tant que systèmes [[dictature|dictatoriaux]], voire [[totalitarisme|totalitaires]], violant à grande échelle les [[droits de l'homme]], réprimant toute forme d'opposition, et surveillant la population suivant des pratiques d'[[État policier|États policiers]]<ref name="Service476">{{harvsp|Service|2007|p=476}}</ref>. Dès la [[révolution d'Octobre]], des critiques se sont élevées, y compris à gauche, contre les méthodes des [[bolcheviks]] : en 1920, lors du [[Congrès de Tours (SFIO)|congrès de Tours]], [[Léon Blum]] reproche au gouvernement de [[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]] de détourner la notion de [[dictature du prolétariat]] pour en faire {{citation|une dictature exercée par un parti centralisé, où toute l'autorité remonte d'étage en étage et finit par se concentrer entre les mains d'un comité patent ou occulte}} alors que la dictature du prolétariat, chez Marx, est conçue comme la {{citation|dictature d'une classe}} et non la {{citation|dictature de quelques individus, connus ou inconnus}}<ref>{{harvsp|Winock|1992|p=82-83}}</ref>. Pour [[Milovan Djilas]], le système de gouvernement communiste ne peut qu'être intrinsèquement [[totalitarisme|totalitaire]], car reposant sur la domination sans partage d'une nouvelle [[oligarchie]] qui mène une {{citation|guerre civile}} quotidienne contre sa propre structure sociale et doit, pour subsister, entretenir une militarisation de la société<ref>[[Milovan Djilas]], ''{{Lang|en|texte=The New Class — An analysis of the communist system}}'', HBJ Book, édition de 1985, pagesp. 37-100</ref>. [[Boris Souvarine]] qualifie en 1977 les régimes communistes de {{citation|pires oppresseurs des peuples désarmés}} et dénonce l'imposture que constitue leur référence à [[Karl Marx|Marx]] ; il souligne également la responsabilité d'{{citation|une prétendue [[intelligentsia]] européenne}} qui {{citation|ne craint pas de justifier les pires brutalités des descendants de [[Joseph Staline|Staline]] et de [[Mao Zedong|Mao]] en se référant à Marx, à [[Georg Wilhelm Friedrich Hegel|Hegel]] ou à [[Sigmund Freud|Freud]], qui n'en peuvent mais}}<ref>{{harvsp|Souvarine|1985|p=611-612}}</ref>.
 
Sur le plan idéologique, le [[marxisme-léninisme]] est l'objet de critiques pour ses aspects à la fois dogmatiques et {{citation|[[Pseudo-science|pseudo-scientifiques]]}} : l'historien [[Nicholas Riasanovsky]] juge à cet égard qu'outre son caractère de pseudo-science, l'idéologie officielle de l'URSS et ses autres régimes communistes possède un caractère de pseudo-religion, qui se présente comme une explication à la fois {{citation|scientifique}} et totalisante de la réalité, tout en s'arrogeant le droit de décréter ce qui est bien et ce qui est mal, et présentant une vision de type religieux, où le prolétariat joue le rôle du [[Messie]], la société sans classes celui du [[Paradis]], le Parti celui de l'Église, et les œuvres de Marx, Engels, Lénine - et, jusqu'à une certaine époque, Staline - celui des [[Saintes Écritures]]<ref>Nicholas Riasanovsky, ''Histoire de la Russie'', Robert Laffont, 1999, pagep. 509</ref>. Dans les [[années 1960]], le marxologue [[Kostas Papaïoannou]] souligne que le marxisme-léninisme, malgré son dogmatisme affiché, est paradoxalement devenu une pensée singulièrement dépourvue de contenu, au point de faire figure d'{{citation|idéologie sans doctrine}} et d'{{citation|orthodoxie sans dogme}}, l'orthodoxie en vigueur dans les pays communistes n'étant plus définie que par les impératifs idéologiques du moment et les déviances qu'il s'agit de dénoncer : la doctrine s'en trouve dès lors ramenée au rang d'outil servant à dénoncer tel ou tel adversaire, tandis que la théorie marxiste elle-même est réduite à l'état de {{citation|catéchisme primaire à l'usage des agitateurs}}<ref>Kostas Papaïoannou, ''L'idéologie froide. Essai sur le dépérissement du marxisme'', Jean-Jacques Pauvert, 1967, pagesp. 99-107</ref>.
 
Des intellectuels [[marxisme|marxistes]] critiques de l'URSS, comme [[Charles Bettelheim]], ont jugé que le maintien d'inégalités sociales et la reproduction en tant que telle de la classe [[bureaucratie|bureaucratique]] aboutissaient à ce que le {{citation|socialisme}} de type soviétique ne soit en réalité qu'une forme de [[capitalisme d'État]], où la classe sociale dominante était constituée par une bourgeoisie d'État. Selon ces critiques, formulées dans le cadre d'une analyse de type [[marxien]], l'URSS ne pouvait prétendre au titre de pays socialiste<ref>[[Georges Labica]], [[Gérard Bensussan]] (dir), ''[[Dictionnaire critique du marxisme]]'', Presses universitaires de France, 1982, pagesp. 816-821</ref>{{,}}<ref>Daniel Aarao Reis, Denis Rolland, ''Modernités alternatives : L'historien face aux discours et représentations de la modernité'', L'Harmattan, 2009, pagep. 96</ref>. De manière plus générale, le thème du contraste entre la réalité des sociétés mises en place sous les régimes communistes et l'idéal égalitaire dont ils se réclament revient de manière récurrente. Ainsi, un dicton populaire de l'époque communiste en Roumanie était que dans ce régime {{citation|toutes les briques de l'édifice sont théoriquement égales, mais pratiquement celles d'en bas doivent supporter le poids de celles d'en haut}}<ref>cité dans ''Bancuri din iepoca odiosului'' ("Humour du temps de l'odieux"), Orientul Latin, Braşov, Roumanie, 1992 et dans Dana Maria Niculescu-Grasso, ''Bancuri politice'' ("Humour politique"), Fundaţia Culturală Română, Bucarest 1999.</ref>.
 
Le communisme [[Stalinisme|stalinien]] est dénoncé dans des romans comme ''[[La Ferme des animaux]]'' et ''[[1984 (roman)|1984]]'' de [[George Orwell]], ''[[Le Zéro et l'Infini]]'' d'[[Arthur Koestler]] ou ''[[Vie et Destin]]'' de [[Vassili Grossman]]<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=122-123, 504, 508}}</ref>. [[Alexandre Zinoviev]] a pour sa part critiqué la société communiste sur la base de la vie quotidienne en [[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]], revendiquant {{citation|d'avoir observé la réalité soviétique, d'avoir perçu comment le communiste idéaliste était vaincu par le communisme réel et d'en avoir conclu que la société soviétique excluait toute possibilité de créer le communisme idéal}}. Sans nier les progrès sociaux dont des familles comme la sienne avaient bénéficié en URSS, Zinoviev s'est livré, dans des ouvrages comme ''[[Les Hauteurs béantes]]'', à une satire du système soviétique<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=67-68}}</ref>. Pour Zinoviev, le {{citation|communisme réel}} est, contrairement à la théorie marxiste de disparition de l'État, une {{citation|organisation générale de toute la population du pays dans un système de commandement et de soumission}} au sein d'un {{citation|Super-État}}, où tous les citoyens sont soumis au système de pouvoir du Parti et de la [[nomenklatura]], qui s'accompagne d'un {{citation|[[lavage de cerveau]]}} permanent<ref>Alexandre Zinoviev, ''Les Confessions d'un homme en trop'', Olivier Orban, 1990, p. 452-463</ref> : à ses yeux, si le {{citation|communisme réel}} est bien une dictature dont le pouvoir émane {{citation|par le haut}}, le système se différencie du totalitarisme proprement dit en ce que la violence y est également imposée {{citation|par le bas}}, la population, bien que mécontente de son sort, étant incapable d'imaginer un autre système et percevant le régime comme son milieu naturel<ref>[[Hervé Coutau-Bégarie]], [http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342x_1983_num_48_3_3339_t1_0740_0000_1 Aleksandr Aleksandrovitch Zinoviev. Le communisme comme réalité -. Sans illusions -. Nous et l'Occident -. Notes d'un veilleur de nuit -. Homo sovieticus], recension parue dans ''[[Politique étrangère (revue)|Politique étrangère]]'', année 1983, volume 48, numéro 3</ref>.
 
Le communisme [[Stalinisme|stalinien]] est dénoncé dans des romans comme ''[[La Ferme des animaux]]'' et ''[[1984 (roman)|1984]]'' de [[George Orwell]], ''[[Le Zéro et l'Infini]]'' d'[[Arthur Koestler]] ou ''[[Vie et Destin]]'' de [[Vassili Grossman]]<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=122-123, 504, 508}}</ref>. [[Alexandre Zinoviev]] a pour sa part critiqué la société communiste sur la base de la vie quotidienne en [[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]], revendiquant {{citation|d'avoir observé la réalité soviétique, d'avoir perçu comment le communiste idéaliste était vaincu par le communisme réel et d'en avoir conclu que la société soviétique excluait toute possibilité de créer le communisme idéal}}. Sans nier les progrès sociaux dont des familles comme la sienne avaient bénéficié en URSS, Zinoviev s'est livré, dans des ouvrages comme ''[[Les Hauteurs béantes]]'', à une satire du système soviétique<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=67-68}}</ref>. Pour Zinoviev, le {{citation|communisme réel}} est, contrairement à la théorie marxiste de disparition de l'État, une {{citation|organisation générale de toute la population du pays dans un système de commandement et de soumission}} au sein d'un {{citation|Super-État}}, où tous les citoyens sont soumis au système de pouvoir du Parti et de la [[nomenklatura]], qui s'accompagne d'un {{citation|[[lavage de cerveau]]}} permanent<ref>Alexandre Zinoviev, ''Les Confessions d'un homme en trop'', Olivier Orban, 1990, pages 452-463</ref> : à ses yeux, si le {{citation|communisme réel}} est bien une dictature dont le pouvoir émane {{citation|par le haut}}, le système se différencie du totalitarisme proprement dit en ce que la violence y est également imposée {{citation|par le bas}}, la population, bien que mécontente de son sort, étant incapable d'imaginer un autre système et percevant le régime comme son milieu naturel<ref>[[Hervé Coutau-Bégarie]], [http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342x_1983_num_48_3_3339_t1_0740_0000_1 Aleksandr Aleksandrovitch Zinoviev. Le communisme comme réalité -. Sans illusions -. Nous et l'Occident -. Notes d'un veilleur de nuit -. Homo sovieticus], recension parue dans ''[[Politique étrangère (revue)|Politique étrangère]]'', année 1983, volume 48, numéro 3</ref>.
[[File:Berlin- The Berlin Wall Museum - 2899.jpg|vignette|gauche|Des restes du [[mur de Berlin]].]]
 
[[Jacques Julliard]] pointe du doigt, au moment de la chute de l'URSS, {{citation|les pleureuses du communisme}} qui tendraient, au sein de la [[Gauche (politique)|gauche]], à en regretter la disparition et à en excuser les crimes au nom de l'idéal poursuivi, et écrit : {{citation|le phénomène n'est toujours pas entré dans nos esprits avec sa véritable dimension. Quarante millions de morts. Il y faut un peu d'imagination, car nous manquons de références. Depuis le commencement du monde, aucun régime, aucune dynastie, aucun monarque n'avait réussi pareille performance. Même le nazisme qui, sur la fin, fut pris par le temps. Histoire de fixer les idées, constatons que le bilan global du communisme, en matières de massacres, cela fait environ vingt fois Auschwitz. Quarante millions ! Combien de victimes supplémentaires fallait-il aux pleureuses du communisme pour qu'on nous donne le droit d'applaudir à la chute du bourreau ?}}<ref>Jacques Julliard, ''[http://referentiel.nouvelobs.com/archives_pdf/OBS1402_19910919/OBS1402_19910919_058.pdf Les Pleureuses du communisme]'', ''[[Le Nouvel Observateur]]'', 19 septembre 1991</ref>. L'écrivain [[Vladimir Volkoff]] parle pour sa part, en [[1992]], de {{citation|quelque deux cent millions de morts}} imputables au communisme, et juge que {{citation|jamais davantage de mal n'a été fait à l'humanité par un groupe d'hommes se voulant expressément solidaires les uns des autres}}<ref>Vladimir Volkoff, ''La Bête et le venin, ou la fin du communisme'', Éditions de Fallois / L'Âge d'Homme, 1992, pages 9 et 159</ref>.
[[Jacques Julliard]] pointe du doigt, au moment de la chute de l'URSS, {{citation|les pleureuses du communisme}} qui tendraient, au sein de la [[Gauche (politique)|gauche]], à en regretter la disparition et à en excuser les crimes au nom de l'idéal poursuivi, et écrit : {{citation|le phénomène n'est toujours pas entré dans nos esprits avec sa véritable dimension. Quarante millions de morts. Il y faut un peu d'imagination, car nous manquons de références. Depuis le commencement du monde, aucun régime, aucune dynastie, aucun monarque n'avait réussi pareille performance. Même le nazisme qui, sur la fin, fut pris par le temps. Histoire de fixer les idées, constatons que le bilan global du communisme, en matières de massacres, cela fait environ vingt fois Auschwitz. Quarante millions ! Combien de victimes supplémentaires fallait-il aux pleureuses du communisme pour qu'on nous donne le droit d'applaudir à la chute du bourreau ?}}<ref>Jacques Julliard, ''[http://referentiel.nouvelobs.com/archives_pdf/OBS1402_19910919/OBS1402_19910919_058.pdf Les Pleureuses du communisme]'', ''[[Le Nouvel Observateur]]'', 19 septembre 1991</ref>. L'écrivain [[Vladimir Volkoff]] parle pour sa part, en [[1992]], de {{citation|quelque deux cent millions de morts}} imputables au communisme, et juge que {{citation|jamais davantage de mal n'a été fait à l'humanité par un groupe d'hommes se voulant expressément solidaires les uns des autres}}<ref>Vladimir Volkoff, ''La Bête et le venin, ou la fin du communisme'', Éditions de Fallois / L'Âge d'Homme, 1992, p. 9 et 159</ref>.
 
[[File:The Memorial to the Victims of Communism, Prague.jpg|vignette|Mémorial des victimes du communisme à [[Prague]].]]
 
Les régimes communistes se voient également reprocher l'échec de leurs [[économie planifiée|économies planifiées]], qui n'ont jamais réussi à résoudre leurs dysfonctionnements : durant la [[guerre froide]], les organisations économiques des pays communistes se sont traduites par des phénomènes de pénurie et ont contraint les travailleurs et les consommateurs à pallier eux-mêmes aux carences du système en usant de méthodes qui relevaient de la débrouillardise ou de l'[[économie parallèle]]<ref name="Ducoulombier125to133"/>.
 
Une [[Comparaison entre le nazisme et le communisme|comparaison du communisme avec le nazisme]], sous l'angle des pratiques dictatoriales des deux régimes — l'[[Troisième Reich|Allemagne]] de [[Adolf Hitler|Hitler]] et l'[[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]] de [[Joseph Staline|Staline]] étant comparées en tant que régimes à [[parti unique]], gouvernés par un chef tout-puissant<ref>[[Ernst Nolte]], ''La Guerre civile européenne : National-socialisme et bolchevisme 1917-1945'', Perrin, 2011, pagesp. 479-510</ref> — a été pratiquée dès l'[[entre-deux-guerres]], le mot {{citation|[[totalitarisme]]}} ayant lui-même été utilisé dès [[1929]] pour désigner conjointement les régimes fasciste et communiste<ref name="Wolikow709">Serge Wolikow, ''Le communisme dans l'histoire politique du {{s-|XX|e}}'', Michel Dreyfus et Roland Lew, ''Communisme et violence'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=709-736}}</ref>. La comparaison entre communisme et nazisme, idéologies s'étant violemment affrontées au cours du {{XXe siècle}}, a été, du fait de sa charge politique, l'objet de vives polémiques à la suite de son évocation par [[François Furet]] dans ''[[Le Passé d'une illusion]]'' puis par [[Stéphane Courtois]] dans ''[[Le Livre noir du communisme]]''<ref name="Courtois55"/>. L'historien [[Serge Wolikow]] juge pour sa part que, s'agissant de l'étude des pratiques autoritaires et répressives, la comparaison des idéologies fasciste et communiste {{citation|est légitime à condition de ne pas l'entendre comme une procédure qui sert à les assimiler}}<ref name="Wolikow709"/>. Pour les chercheurs [[Bruno Groppo]] et [[Bernard Pudal]], {{citation|constat d'évidence, les études comparatives sont éminemment souhaitables. Elles peuvent faire progresser sérieusement la recherche. On remarque que dans la période récente s'est affirmée une tendance à comparer communisme et nazisme, ou stalinisme et nazisme. Cette tendance n'est pas nouvelle, et s'inscrit au moins partiellement dans la filiation de la théorie du [[totalitarisme]], que ce soit pour la revendiquer ou pour la rejeter. L'intérêt principal de cette démarche est probablement de faire profiter les études sur le communisme des avancées méthodologiques réalisées dans le domaine des études sur le nazisme}}<ref>Bruno Groppo et Bernard Pudal, ''Une réalité multiple et controversée'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=23-30}}</ref>.
 
Dès l'entre-deux-guerres, l'[[Église catholique]] a fermement condamné le communisme : dans l'[[encyclique]] ''[[Divini Redemptoris]]'', publiée le 19 mars 1937, le pape [[Pie XI]] dénonce le communisme comme « intrinsèquement pervers », estimant que « l'on ne peut admettre sur aucun terrain la collaboration avec lui de la part de quiconque veut sauver la civilisation chrétienne »<ref>[http://www.vatican.va/holy_father/pius_xi/encyclicals/documents/hf_p-xi_enc_19031937_divini-redemptoris_fr.html Encyclique {{Lang|la|texte=DIVINI REDEMPTORIS}} - Pie XI]</ref>.
 
Dans plusieurs anciens pays du bloc de l'Est, comme la [[Hongrie]], la [[Lituanie]], l'[[Estonie]] et la [[Lettonie]], l'usage des symboles du communisme est désormais puni par la loi<ref>[https://www.courrierinternational.com/article/2010/03/12/monuments-sovietiques-a-la-decharge-de-l-histoire Monuments soviétiques à la décharge de l’Histoire], ''Courrier international'', 12 mars 2010</ref>{{,}}<ref>[http://www.presseurop.eu/fr/content/news-brief/272701-en-prison-pour-un-tee-shirt-du-che En prison pour un tee-shirt du Che ?], Presseurop, Rzeczpospolita, 14 juin 2010</ref>{{,}}<ref>''[http://www15.fr.rian.ru/analysis/20080620/111432990.html Gorbatchev, Eltsine et l'hymne russe… interdits en Lituanie]'', Ria Novosti, 20 juin 2008</ref>{{,}}<ref>[http://www.liberation.fr/monde/010168055-estonie-nazisme-et-communisme-interdits ''Estonie : nazisme et communisme interdits''], ''Libération'', {{1er}} décembre 2006</ref>{{,}}<ref>[http://news.bbc.co.uk/2/low/europe/7459976.stm ''{{Lang|en|texte=Lithuanian ban on Soviet symbols}}'', ''{{Lang|en|texte=BBC News}}'']</ref>{{,}}<ref>[http://www.themoscowtimes.com/news/article/latvia-bans-soviet-symbols/482086.html Latvia Bans Soviet Symbols], ''The Moscow Times'', 23 juin 2013</ref>.
 
=== Crimes de masse et violation des droits de l'homme sous les régimes communistes ===
[[Fichier:Gulag Location Map.svg|vignette|Carte indiquant la localisation des principaux camps du [[Système concentrationnaire soviétique avant 1930|système concentrationnaire soviétique]] - puis du [[Goulag]] - ayant existé en URSS entre 1923 et 1961.]]
[[Fichier:GolodomorKharkiv.jpg|vignette|gauche|[[Famines soviétiques de 1931-1933|La grande famine]] en [[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]] ; scène de rue à [[Kharkiv]] durant l'{{citation|[[Holodomor]]}} en [[République socialiste soviétique d'Ukraine|Ukraine]] ([[1933]]).]]
[[Fichier:EmblemaEmblem of the Stasi.svg|vignette|gauche|Emblème de la [[Ministère de la Sécurité d'État|Stasi]], le [[service de renseignements]] de la [[République démocratique allemande|RDA]].]]
Les régimes communistes se sont tous, à des degrés très divers selon les pays et les époques, signalés par des violations des [[droits de l'homme]] et des pratiques meurtrières, certains s'étant rendus coupables de massacres à grande échelle envers leurs opposants, voire envers leurs populations. Les [[camp de concentration|camps de concentration]] comme, à diverses époques, le [[Goulag]] soviétique, le [[Laogai]] chinois ou le [[Kwanliso]] nord-coréen, ont fait partie de l'arsenal répressif des pays communistes. À une moindre échelle, la [[prison de Pitești]] en [[République socialiste de Roumanie|Roumanie]] ou le [[camp de concentration de Béléné]] en [[République populaire de Bulgarie|Bulgarie]] sont restés dans les mémoires pour leurs atrocités. Dès l'époque de la fondation de la [[République socialiste fédérative soviétique de Russie|Russie soviétique]], dirigée par [[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]] dans un contexte de guerre civile et d'extrême violence, le Parti communiste s'est arrogé le monopole du pouvoir, tandis que la [[police politique]] (la [[Tchéka]], à laquelle ont succédé par la suite le [[Guépéou]], puis le [[NKVD]] et enfin le [[KGB]]) devenait un organe de contrôle absolu<ref>{{harvsp|Winock|1992|p=148}}</ref>.
 
Le régime des [[bolcheviks]] a mené un politique particulièrement meurtrière à l'encontre de ses adversaires réels ou supposés et des catégories sociales jugées hostiles, de la [[Terreur rouge (Russie)|Terreur rouge]] à la [[décosaquisation]] et au développement d'un [[Système concentrationnaire en Union soviétique avant 1930|système concentrationnaire]]<ref>{{harvsp|Figes|1998|p=627-649}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Carrère d'Encausse|1998|p=431-433}}</ref>. Le [[Goulag]], la [[dékoulakisation]] et les [[Grandes Purges]] se sont, sous [[Joseph Staline|Staline]], avérés nettement plus meurtriers<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=75-76}}</ref>. Outre la répression des opposants politiques et des {{citation|[[Ennemi de classe|ennemis de classe]]}}, les [[religion]]s ont également été persécutées en URSS, les [[Politique anti-religieuse soviétique (1928-1941)|campagnes antireligieuses]] atteignant des sommets à l'époque stalinienne<ref>{{harvsp|Service|2004|p=268}}</ref>. Les [[Famine soviétique de 1932-33|terribles famines]] provoquées par les politiques de [[Collectivisation en Union soviétique|collectivisation]] de Staline ont également causé des millions de morts en URSS, au point que l'[[Holodomor]] ukrainien est souvent dénoncé - sans qu'aucun consensus n'existe à ce sujet - comme ayant été sciemment provoqué pour soumettre une population jugée rebelle<ref name="duc89" />.
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Si, après la [[déstalinisation]], la répression de l'opposition a été moins meurtrière en URSS, la [[liberté d'expression]] a continué d'y être sévèrement limitée. La critique du système exposait ceux qui s'y risquaient à diverses sanctions : l'exclusion du [[Parti communiste de l'Union soviétique|Parti communiste]] pour ceux qui en étaient membres, la perte de leur emploi, voire l'incarcération, ou d'autres formes de privation de liberté. Ainsi, certains dissidents soviétiques, bien que parfaitement sains d'esprit, ont été [[Psychiatrie punitive en URSS|déclarés fous et internés d'office]] dans des [[Hôpital psychiatrique|hôpitaux psychiatriques]]<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=575-577}}</ref>.
 
[[Fichier:Vidin-communism-victims-memorial.jpg|vignette|Mémorial des victimes du communisme à [[Vidin]] ([[Bulgarie]]).]]
En [[République populaire de Chine]], le [[Grand Bond en avant]] s'est traduit par un désastre économique et humanitaire, causant plusieurs dizaines de millions de morts au cours de l'[[Grande famine en Chine|une des plus grandes famines de l'histoire]]<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=316-318}}</ref>, tandis que la [[Révolution culturelle]] s'est traduit par une période d'abus à grande échelle, détruisant la vie de millions de citoyens chinois<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=324-331}}</ref>. Le [[Kampuchéa démocratique|régime cambodgien]] des [[Khmers rouges]] s'est lui aussi rendu coupable de massacres de grande ampleur, provoquant également des famines par son impéritie et causant la mort d'une proportion importante de la population du pays. [[Pol Pot]] et [[Ieng Sary]], deux des principaux dirigeants khmers rouges, ont été condamnés par [[contumace]] pour {{citation|[[génocide]]}} lors d'un procès organisé par leurs ennemis vietnamiens ; le terme de génocide, couramment employé pour qualifier les [[crimes du régime khmer rouge]], n'est pas reconnu au niveau international, mais le qualificatif de [[crime contre l'humanité]] a été repris dans le cadre du [[Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens|procès des dirigeants chefs Khmers rouges]]. {{citation|[[Kang Kek Ieu|Douch]]}}, l'un des exécutants du régime, a été condamné en 2012 pour crime contre l'humanité<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=345-350}}</ref>{{,}}<ref name="Margolin631"/>{{,}}<ref>[http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20120203.FAP0277/cambodge-douch-condamne-a-la-prison-a-vie.html ''Cambodge: "Douch" condamné à la prison à vie''], ''le Nouvel Observateur'', 3 février 2012</ref>, de même que deux des anciens dirigeants Khmers rouges, [[Nuon Chea]] et [[Khieu Samphân]], deux ans plus tard<ref>[https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2014/08/07/deux-anciens-chefs-khmers-rouges-condamnes-pour-crimes-contre-l-humanite_4467791_3216.html Deux ex-dirigeants khmers rouges condamnés pour crimes contre l'humanité], ''Le Monde'', 7 août 2014</ref>. En novembre 2018, Nuon Chea et Khieu Samphân sont à nouveau condamnés à la perpétuité, cette fois pour [[génocide]] à l'encontre de diverses minorités cambodgiennes parmi lesquelles les communautés [[Viêt|vietnamienne]] et [[Cham (peuple)|cham]] musulmane<ref>[https://www.francetvinfo.fr/monde/deux-anciens-dirigeants-khmers-rouges-condamnes-a-la-perpetuite-pour-genocide_3037265.html Deux anciens dirigeants khmers rouges condamnés à la perpétuité pour "génocide"], France Télévisions, 16 novembre 2018</ref>{{,}}<ref>[https://www.liberation.fr/planete/2018/11/16/deux-anciens-dirigeants-khmers-rouges-condamnes-a-la-perpetuite-pour-genocide_1692410 Deux anciens dirigeants khmers rouges condamnés à la perpétuité pour «génocide» ], ''Libération'', 16 novembre 2018</ref>{{,}}<ref>{{article|périodique=Le Monde|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2018/11/16/cambodge-verdict-historique-dans-le-proces-des-derniers-chefs-khmers-rouges_5384158_3216.html|titre=Le génocide cambodgien reconnu pour la première fois par le tribunal international|auteur=AFP|jour=16|mois=novembre|année=2018}}</ref>
 
En [[République populaire de Chine]], le [[Grand Bond en avant]] s'est traduit par un désastre économique et humanitaire, causant plusieurs dizaines de millions de morts au cours de l'[[Grande famine en Chine|une des plus grandes famines de l'histoire]]<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=316-318}}</ref>, tandis que la [[révolution culturelle]] s'est traduit par une période d'abus à grande échelle, détruisant la vie de millions de citoyens chinois<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=324-331}}</ref>. Le [[Kampuchéa démocratique|régime cambodgien]] des [[Khmers rouges]] s'est lui aussi rendu coupable de massacres de grande ampleur, provoquant également des famines par son impéritie et causant la mort d'une proportion importante de la population du pays. [[Pol Pot]] et [[Ieng Sary]], deux des principaux dirigeants khmers rouges, ont été condamnés par [[contumace]] pour {{citation|[[génocide]]}} lors d'un procès organisé par leurs ennemis vietnamiens ; le terme de génocide, couramment employé pour qualifier les [[crimes du régime khmer rouge]], n'est pas reconnu au niveau international, mais le qualificatif de [[crime contre l'humanité]] a été repris dans le cadre du [[Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens|procès des dirigeants chefs Khmers rouges]]. {{citation|[[Kang Kek Ieu|Douch]]}}, l'un des exécutants du régime, a été condamné en 2012 pour crime contre l'humanité<ref>{{harvsp|Brown|2009|p=345-350}}</ref>{{,}}<ref name="Margolin631"/>{{,}}<ref>[http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20120203.FAP0277/cambodge-douch-condamne-a-la-prison-a-vie.html ''Cambodge: "Douch" condamné à la prison à vie''], ''le Nouvel Observateur'', 3 février 2012</ref>, de même que deux des anciens dirigeants Khmers rouges, [[Nuon Chea]] et [[Khieu Samphân]], deux ans plus tard<ref>[https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2014/08/07/deux-anciens-chefs-khmers-rouges-condamnes-pour-crimes-contre-l-humanite_4467791_3216.html Deux ex-dirigeants khmers rouges condamnés pour crimes contre l'humanité], ''Le Monde'', 7 août 2014</ref>. En novembre 2018, Nuon Chea et Khieu Samphân sont à nouveau condamnés à la perpétuité, cette fois pour [[génocide]] à l'encontre de diverses minorités cambodgiennes parmi lesquelles les communautés [[Viêt|vietnamienne]] et [[Cham (peuple)|cham]] musulmane<ref>[https://www.francetvinfo.fr/monde/deux-anciens-dirigeants-khmers-rouges-condamnes-a-la-perpetuite-pour-genocide_3037265.html Deux anciens dirigeants khmers rouges condamnés à la perpétuité pour "génocide"], France Télévisions, 16 novembre 2018</ref>{{,}}<ref>[https://www.liberation.fr/planete/2018/11/16/deux-anciens-dirigeants-khmers-rouges-condamnes-a-la-perpetuite-pour-genocide_1692410 Deux anciens dirigeants khmers rouges condamnés à la perpétuité pour «génocide» ], ''Libération'', 16 novembre 2018</ref>{{,}}<ref>{{article|périodique=Le Monde|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2018/11/16/cambodge-verdict-historique-dans-le-proces-des-derniers-chefs-khmers-rouges_5384158_3216.html|titre=Le génocide cambodgien reconnu pour la première fois par le tribunal international|auteur=AFP|jour=16|mois=novembre|année=2018}}</ref>
Dans ''[[Le Livre noir du communisme]]'', l'historien [[Stéphane Courtois]], cumulant les exactions commises sous les différents régimes communistes, les famines provoquées par leurs politiques, et les divers crimes liés aux mouvances se réclamant de cette idéologie, avance, pour le bilan humain du communisme, un chiffre approximatif proche {{citation|la barre des cent millions de morts}}<ref>Stéphane Courtois, ''Les Crimes du communisme'', in {{harvsp|Le Livre noir du communisme|1997|p=14}}</ref>. Ce chiffrage a fait l'objet de nombreuses polémiques et de critiques d'ordre méthodologique, en ce qu'il additionne des éléments provenant de régimes et de phénomènes politiques très divers, s'étalant sur plusieurs décennies<ref>[[Marc Lazar]], ''Le Livre noir du communisme en débat'', ''[[Communisme (revue)|Communisme]]'' {{numéro|59}}-60, avril 2000</ref>. Le chiffre de 85 millions de morts - évoqué sur le bandeau du ''Livre noir du communisme'', et qui correspond à l'addition des 20 millions de victimes en URSS et de 65 millions en Chine, évoquées par Stéphane Courtois - a été avancé en tant que bilan des crimes du communisme<ref>[[Éric Conan]], [http://www.lexpress.fr/actualite/monde/europe/le-bilan-des-crimes-communistes_497981.html Le bilan des crimes communistes dans le monde], ''L'Express'', 6 novembre 1997</ref>{{,}}<ref>[[Jean-François Revel]] et [[François Dufay]], [http://www.lepoint.fr/actualites-politique/2007-01-25/85-millions-de-morts/917/0/86899 85 millions de morts !], ''Le Point'', 15 novembre 1997</ref>. Les auteurs de l'ouvrage ''[[Le Siècle des communismes]]'' contestent quant à eux le comptage des victimes par le ''Livre noir du communisme'', considérant que le terme de communisme recouvre un ensemble bien trop varié de réalités politiques pour faire l'objet d'un jugement unique et collectif<ref>{{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=9-18}}</ref>.
 
Dans ''[[Le Livre noir du communisme]]'', l'historien [[Stéphane Courtois]], cumulant les exactions commises sous les différents régimes communistes, les famines provoquées par leurs politiques, et les divers crimes liés aux mouvances se réclamant de cette idéologie, avance, pour le bilan humain du communisme, un chiffre approximatif proche {{citation|la barre des cent millions de morts}}<ref>Stéphane Courtois, ''Les Crimes du communisme'', in {{harvsp|Le Livre noir du communisme|1997|p=14}}</ref>. Ce chiffrage a fait l'objet de nombreuses polémiques et de critiques d'ordre méthodologique, y compris par ses propres auteurs<ref>{{Article|langue=fr|titre=« Le Livre noir du communisme » : retour à l’histoire|périodique=Le Monde.fr|date=1997-11-14|lire en ligne=https://www.lemonde.fr/archives/article/1997/11/14/communisme-retour-a-l-histoire_3810094_1819218.html|consulté le=2024-01-12}}</ref>, en ce qu'il additionne des éléments provenant de régimes et de phénomènes politiques très divers, s'étalant sur plusieurs décennies<ref>[[Marc Lazar]], ''Le Livre noir du communisme en débat'', ''[[Communisme (revue)|Communisme]]'' {{numéro|59}}-60, avril 2000</ref>. Le chiffre de 85 millions de morts - évoqué sur le bandeau du ''Livre noir du communisme'', et qui correspond à l'addition des 20 millions de victimes en URSS et de 65 millions en Chine, évoquées par Stéphane Courtois - a été avancé en tant que bilan des crimes du communisme<ref>[[Éric Conan]], [http://www.lexpress.fr/actualite/monde/europe/le-bilan-des-crimes-communistes_497981.html Le bilan des crimes communistes dans le monde], ''L'Express'', 6 novembre 1997</ref>{{,}}<ref>[[Jean-François Revel]] et [[François Dufay]], [http://www.lepoint.fr/actualites-politique/2007-01-25/85-millions-de-morts/917/0/86899 85 millions de morts !], ''Le Point'', 15 novembre 1997</ref>. Les auteurs de l'ouvrage ''[[Le Siècle des communismes]]'' contestent quant à eux le comptage des victimes par le ''Livre noir du communisme'', considérant que le terme de communisme recouvre un ensemble bien trop varié de réalités politiques pour faire l'objet d'un jugement unique et collectif<ref>{{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=9-18}}</ref>.
Stéphane Courtois estime que l'une des raisons pour lesquelles la {{citation|dimension criminelle du communisme}} a longtemps été occultée tient au fait que l'[[Union soviétique]] a participé avec les démocraties occidentales à la défaite du [[nazisme]]. De fait, les communistes se sont engagés dans toute l'Europe dans la [[résistance au nazisme]], et en ont payé le prix du sang ; les résistants d'autres convictions politiques, qui avaient créé des liens de solidarité avec eux, n'ont pu, de par la mémoire du combat commun, se montrer trop critiques envers leurs anciens frères d'armes une fois la guerre finie. L'URSS elle-même profitait pleinement de cette situation, et a largement mis en avant sa contribution — réelle, et la plus importante — à la défaite du nazisme pour museler toute critique à son égard. L'alibi de l'[[antifascisme]] a ainsi permis au régime communiste soviétique d'échapper aux critiques que les démocrates auraient pu lui porter, sur sa complicité initiale avec le régime [[Adolf Hitler|hitlérien]] lors du [[Pacte Germano-Soviétique|pacte germano-soviétique]], ou encore sur le [[massacre de Katyń]] ; lors du [[procès de Nuremberg]], aucun rappel n'est fait des crimes commis durant la période 1939-41 par les Soviétiques, qui sont au contraire les procureurs, avec les puissances occidentales, des exactions commises par leurs anciens alliés<ref name=WWII>Stéphane Courtois, ''Les Crimes du communisme'', in {{harvsp|Le Livre noir du communisme|1997|p=31-32}}</ref>.
 
Selon l'étude publiée par ''[[Le Figaro Magazine]]'' du 18 novembre 1978, ce coût humain du communisme serait plus élevé encore, atteignant les 150 millions de vies humaines, ce qui équivaudrait, d'après ses auteurs, au « plus grand génocide dans l'histoire de l'humanité »<ref>{{Article|titre=Les 150 millions de morts du communisme"|périodique=Le Figaro Magazine|date=18 novembre 1978}}.</ref>.
La résolution 1481 de l'[[Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe]], datée du 25 janvier 2006 durant la session d'hiver, {{Citation|condamne avec force les crimes des régimes communistes totalitaires}}<ref>{{en}} [http://assembly.coe.int/Mainf.asp?link=/Documents/AdoptedText/ta06/Eres1481.htm Résolution 1481 (2006)], [http://assembly.coe.int/defaultF.asp Conseil de l'Europe]</ref>. En juin 2008, la [[Déclaration de Prague|Déclaration de Prague sur la conscience européenne et le communisme]], signée par un ensemble de personnalités politiques et d'intellectuels, dont d'anciens opposants au bloc de l'Est comme [[Václav Havel]] et [[Joachim Gauck]], a appelé l'Europe à un plus grand travail de mémoire sur les crimes du communisme : le [[Parlement européen]] a réagi en septembre de la même année en faisant du 23 août - jour anniversaire de la signature du [[pacte germano-soviétique]] - la [[Journée européenne de commémoration des victimes du stalinisme et du nazisme]], en mémoire des victimes de tous les régimes totalitaires et autoritaires<ref>[http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P6-TA-2008-0439+0+DOC+XML+V0//FR Déclaration du Parlement européen sur la proclamation du 23 août comme journée européenne de commémoration des victimes du stalinisme et du nazisme]</ref>. Par ailleurs, confirmant {{Citation|la nécessité d'une condamnation internationale des crimes des régimes communistes totalitaires}}, le Parlement européen a voté le 2 avril 2009 une résolution condamnant {{Citation|fermement et sans réserve tous les crimes contre l'humanité et les innombrables violations des droits de l'homme commis par tous les régimes totalitaires et autoritaires}}<ref>[http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P6-TA-2009-0213+0+DOC+XML+V0//FR&language=FR Résolution du Parlement européen du 2 avril 2009 sur la conscience européenne et le totalitarisme.] [[Parlement européen]]. Consultée le 27 mars 2010.</ref>{{,}}<ref>[http://www.euractiv.com/en/culture/europe-ponders-remembrance-day-communist-nazi-past/article-180794 {{en}} Europe ponders 'remembrance day' for communist, Nazi past]</ref>{{,}}<ref>[https://www.courrierinternational.com/article/2009/04/30/le-totalitarisme-condamne-dans-l-indifference Le totalitarisme condamné dans l'indifférence], Courrier international du 30 avril 2009</ref>. Le [[Cambodge]] a adopté, en juin [[2013]], une loi punissant de deux ans de prison {{citation|tout individu qui ne reconnaît pas, qui minimise ou qui nie}} les [[Crimes du régime Khmer rouge|crimes des Khmers rouges]]<ref>[https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2013/06/07/le-cambodge-interdit-le-revisionnisme-sur-les-khmers-rouges_3425936_3216.html Le Cambodge interdit le révisionnisme sur les Khmers rouges], ''Le Monde'', 7 juin 2013</ref>.
 
=== Procès du communisme ===
Devant le terrible bilan humain du communisme, un certain nombre d'intellectuels, en particulier le dissident russe [[Vladimir Boukovski]] dans son livre ''Jugement à Moscou'', l'historien français [[Stéphane Courtois]], les essayistes français [[Thierry Wolton]]<ref>{{Lien web |auteur=Thierry Wolton |titre=Pourquoi il n'y a pas eu de Procès de Nuremberg du communisme soviétique |url=https://www.lefigaro.fr/vox/histoire/thierry-wolton-pourquoi-il-n-y-a-pas-eu-proces-de-nuremberg-du-communisme-sovietique-20220508?utm_source=app&utm_medium=sms&utm_campaign=fr.playsoft.lefigarov3 |site=lefigaro.fr |date=08/05/2022 |consulté le=17/02/2024}}</ref> et [[Pascal Bruckner]]<ref>{{Lien web |auteur=Pascal Bruckner |titre=Ce négationnisme qui échappe aux procès |url=https://www.lepoint.fr/editos-du-point/sebastien-le-fol/pascal-bruckner-ce-negationnisme-qui-echappe-aux-proces-12-05-2019-2312046_1913.php |site=lepoint.fr |date=12/05/2019 |consulté le=17/02/2024}}</ref>, ou le chercheur polonais [[:en:Łukasz_Kamiński|Lukasz Kaminski]], se sont étonnés et inquiétés qu'aucun [[Procès de Nuremberg|procès]] équivalent à celui de Nuremberg pour le nazisme n'ait jamais été initié contre les auteurs de crimes commis au nom du communisme, au risque de voir poursuivis ces crimes dans le futur.
 
Stéphane Courtois estime que l'une des raisons pour lesquelles la {{citation|dimension criminelle du communisme}} a longtemps été occultée tient au fait que l'[[Union soviétique]] a participé avec les démocraties occidentales à la défaite du [[nazisme]]. De fait, les communistes se sont engagés dans toute l'Europe dans la [[résistance au nazisme]], et en ont payé le prix du sang ; les résistants d'autres convictions politiques, qui avaient créé des liens de solidarité avec eux, n'ont pu, de par la mémoire du combat commun, se montrer trop critiques envers leurs anciens frères d'armes une fois la guerre finie. L'URSS elle-même profitait pleinement de cette situation, et a largement mis en avant sa contribution — réelle, et la plus importante — à la défaite du nazisme pour museler toute critique à son égard. L'alibi de l'[[antifascisme]] a ainsi permis au régime communiste soviétique d'échapper aux critiques que les démocrates auraient pu lui porter, sur sa complicité initiale avec le régime [[Adolf Hitler|hitlérien]] lors du [[Pacte Germano-Soviétique|pacte germano-soviétique]], ou encore sur le [[massacre de Katyń]] ; lors du [[procès de Nuremberg]], aucun rappel n'est fait des crimes commis durant la période 1939-1941 par les Soviétiques, qui sont au contraire les procureurs, avec les puissances occidentales, des exactions commises par leurs anciens alliés<ref name="WWII">Stéphane Courtois, ''Les Crimes du communisme'', in {{harvsp|Le Livre noir du communisme|1997|p=31-32}}.</ref>.
 
La résolution 1481 de l'[[Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe]], datée du 25 janvier 2006 durant la session d'hiver, {{Citation|condamne avec force les crimes des régimes communistes totalitaires}}<ref>{{en}} [http://assembly.coe.int/Mainf.asp?link=/Documents/AdoptedText/ta06/Eres1481.htm Résolution 1481 (2006)], [http://assembly.coe.int/defaultF.asp Conseil de l'Europe].</ref>.
 
En juin 2008, la [[Déclaration de Prague|Déclaration de Prague sur la conscience européenne et le communisme]], signée par un ensemble de personnalités politiques et d'intellectuels, dont d'anciens opposants au bloc de l'Est comme [[Václav Havel]] et [[Joachim Gauck]], a appelé l'Europe à un plus grand travail de mémoire sur les crimes du communisme : le [[Parlement européen]] a réagi en septembre de la même année en faisant du 23 août - jour anniversaire de la signature du [[pacte germano-soviétique]] - la [[Journée européenne de commémoration des victimes du stalinisme et du nazisme]], en mémoire des victimes de tous les régimes totalitaires et autoritaires<ref>[http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P6-TA-2008-0439+0+DOC+XML+V0//FR Déclaration du Parlement européen sur la proclamation du 23 août comme journée européenne de commémoration des victimes du stalinisme et du nazisme]</ref>.
 
Par ailleurs, confirmant {{Citation|la nécessité d'une condamnation internationale des crimes des régimes communistes totalitaires}}, le Parlement européen a voté le 2 avril 2009 une résolution condamnant {{Citation|fermement et sans réserve tous les crimes contre l'humanité et les innombrables violations des droits de l'homme commis par tous les régimes totalitaires et autoritaires}}<ref>[http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P6-TA-2009-0213+0+DOC+XML+V0//FR&language=FR Résolution du Parlement européen du 2 avril 2009 sur la conscience européenne et le totalitarisme.] [[Parlement européen]]. Consultée le 27 mars 2010.</ref>{{,}}<ref>[http://www.euractiv.com/en/culture/europe-ponders-remembrance-day-communist-nazi-past/article-180794 {{en}} Europe ponders 'remembrance day' for communist, Nazi past]</ref>{{,}}<ref>[https://www.courrierinternational.com/article/2009/04/30/le-totalitarisme-condamne-dans-l-indifference Le totalitarisme condamné dans l'indifférence], Courrier international du 30 avril 2009</ref>.
 
Le [[Cambodge]] a adopté, en juin [[2013]], une loi punissant de deux ans de prison {{citation|tout individu qui ne reconnaît pas, qui minimise ou qui nie}} les [[Crimes du régime Khmer rouge|crimes des Khmers rouges]]<ref>[https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2013/06/07/le-cambodge-interdit-le-revisionnisme-sur-les-khmers-rouges_3425936_3216.html Le Cambodge interdit le révisionnisme sur les Khmers rouges], ''Le Monde'', 7 juin 2013</ref>.
 
Le 20 avril 2023, un an après le début de l'offensive russe contre l'[[Ukraine]], et devant le parallélisme entre les conditions de cette offensive et la politique de l'[[Union des républiques socialistes soviétiques|Union soviétique]], une proposition de loi est déposée au Sénat français afin de créer, chaque 9 novembre, jour anniversaire de la chute du [[Mur de Berlin]], une ''Journée nationale d'hommage aux victimes du communisme''<ref>{{Lien web |titre=Journal nationale d'hommage aux victimes du communisme |url=https://www.senat.fr/leg/exposes-des-motifs/ppl22-544-expose.html |site=senat.fr |date=20/04/2023 |consulté le=17/02/2024}}</ref>. Cette proposition de loi réitérait une autre proposition de loi similaire déposée à l'Assemblée nationale le 21 novembre 2007<ref>{{Lien web |titre=Proposition de loi de M. Bernard Carayon visant à instituer une journée nationale d'hommage aux victimes du communisme |url=https://www.assemblee-nationale.fr/13/propositions/pion0422.asp |site=assemblée-nationale.fr |consulté le=17/02/2024}}</ref>.
 
== Historiographie ==
[[File:Lenin z Poronina.jpg|vignette|Statue de [[Vladimir Ilitch Lénine|Lénine]] au musée du communisme à [[Kozłówka (Lublin)|Kozłówka]] ([[Pologne]]).]]
L'[[historiographie]] du communisme a connu de nombreuses évolutions au fil des décennies. L'histoire de la révolution russe a donné lieu à des interprétations conflictuelles, dont beaucoup ont, avant la Seconde Guerre mondiale, servi des démarches politiques, de justification ou de glorification. Après-guerre, l'analyse du phénomène communiste en tant que réalité politique s'est faite couramment en Occident sous l'angle du paradigme [[totalitarisme|totalitaire]] : cette approche a été en concurrence, à partir des [[années 1970]], avec une école {{citation|révisionniste}} relativisant le caractère déterminé d'une partie des phénomènes de terreur et tendant à contester le lien de filiation direct entre [[léninisme]] et [[stalinisme]]<ref name="Studer33">Brigitte Studer, ''Totalitarisme et stalinisme'', in {{harvsp|Le Siècle des communismes|2004|p=33-54}}</ref>. La réflexion sur le phénomène communiste, et tout particulièrement sur les dimensions totalitaires du phénomène stalinien ainsi que sur [[Comparaison entre le nazisme et le communisme|ses points communs]] avec le [[Troisième Reich|régime nazi]], a longtemps été freinée, en France, par l'influence du [[Parti communiste français|PCF]] dans le monde intellectuel<ref>[[Henry Rousso]], ''La Légitimité d'une comparaison empirique'', in ''Stalinisme et nazisme : histoire et mémoire comparées'', Complexe, 1999, pagep. 11</ref>.
 
L'historiographie du communisme a, de manière générale, longtemps pâti du manque de documentation, et de l'existence de régimes communistes qui bloquaient l'accès à leurs archives, limitant la connaissance des politiques internes, des prises de décision, des responsabilités personnelles des dirigeants et des phénomènes sociaux au sein du monde communiste. Du fait du contexte de la [[guerre froide]], l'étude des phénomènes communistes a été handicapée par les attitudes antagonistes - pro-communisme ou [[anticommunisme]] - qui existaient jusque dans le monde intellectuel. À l'étude du communisme dans son ensemble s'est par ailleurs superposée la discipline de la [[soviétologie]], soit le champ d'études portant spécifiquement sur l'URSS. Du fait des difficultés d'accès aux archives et plus largement du contexte politique international, des phénomènes historiques de première importance, comme la [[Grande famine en Chine|dramatique famine]] provoquée par le [[Grand Bond en avant]], n'ont été connues qu'avec beaucoup de retard<ref>{{lien web|auteur=Jean-Luc Domenach|url=http://www.histoire.presse.fr/livres/livre-du-mois/36-millions-de-morts-de-faim-01-09-2012-47785|titre=36 millions de morts|site=histoire.presse.fr|date=01-09-2012}} {{citation|Mais les autorités chinoises ont tout fait pour cacher la vérité et c'est lentement que les bouches se sont déliées. A l'étranger, deux livres ont joué un rôle important : d'abord celui de [[Jasper Becker]] qui a fait voir l'immensité du drame et, surtout, celui de [[Frank Dikotter]] qui l'a pour la première fois analysé, avec une remarquable lucidité.}}</ref>. Dans une introduction, rédigée en [[1966]], au troisième tome des ''[[Les Origines du totalitarisme|Origines du totalitarisme]]'', [[Hannah Arendt]] souligne le manque criant d'archives qui permettraient de connaître de l'intérieur avec précision le fonctionnement de l'appareil d'État soviétique sous Staline. Elle montre également une méconnaissance {{Incise|qui était alors la norme en Occident}} de la réalité du régime chinois, en indiquant, alors que le Grand Bond en avant ne datait que de quelques années, l'absence de famines et de crimes de très grande ampleur dans l'histoire chinoise récente<ref>Ce point amène Hannah Arendt à classer la Chine de Mao dans la catégorie des dictatures et non dans celle des régimes totalitaires. Cf Hannah Arendt, ''Le Système totalitaire'', Seuil, 1972, p. 10-12</ref>.
|auteur=Jean-Luc Domenach
|url=http://www.histoire.presse.fr/livres/livre-du-mois/36-millions-de-morts-de-faim-01-09-2012-47785
|titre=36 millions de morts
|éditeur=''[[L'Histoire]]''
|date=1{{er}} septembre 2012
}} {{citation|Mais les autorités chinoises ont tout fait pour cacher la vérité et c'est lentement que les bouches se sont déliées. A l'étranger, deux livres ont joué un rôle important : d'abord celui de [[Jasper Becker]] qui a fait voir l'immensité du drame et, surtout, celui de [[Frank Dikotter]] qui l'a pour la première fois analysé, avec une remarquable lucidité.}}</ref>. Dans une introduction, rédigée en [[1966]], au troisième tome des ''[[Les Origines du totalitarisme|Origines du totalitarisme]]'', [[Hannah Arendt]] souligne le manque criant d'archives qui permettraient de connaître de l'intérieur avec précision le fonctionnement de l'appareil d'État soviétique sous Staline. Elle montre également une méconnaissance {{Incise|qui était alors la norme en Occident}} de la réalité du régime chinois, en indiquant, alors que le Grand Bond en avant ne datait que de quelques années, l'absence de famines et de crimes de très grande ampleur dans l'histoire chinoise récente<ref>Ce point amène Hannah Arendt à classer la Chine de Mao dans la catégorie des dictatures et non dans celle des régimes totalitaires. Cf Hannah Arendt, ''Le Système totalitaire'', Seuil, 1972, pages 10-12</ref>.
 
En URSS même, la période de la [[glasnost]] a permis d'élargir la réflexion sur la période stalinienne, mais également sur l'époque de Lénine et sur le rôle historique de ce dernier : le travail de mémoire sur la période communiste est cependant demeuré très inégal et soumis aux intérêts politiques du moment, y compris en Russie post-soviétique<ref name="Ferretti"/>. L'ouverture après 1989 des [[archives soviétiques]], et de celle des anciens pays du bloc de l'Est a, malgré son caractère inégal, ouvert de nouvelles dimensions aux chercheurs. Elle a permis à ces derniers d'avoir accès à une masse colossale d'informations jusque-là occultées, en apportant notamment des informations plus précises sur les phénomènes sociaux en URSS, les processus de décision au sein du pouvoir, les périodes de la guerre civile et du stalinisme, et le nombre des victimes durant ces périodes<ref>{{harvsp|Courtois|2002|p=34-35}}</ref>{{,}}<ref>{{harvsp|Ducoulombier|2011|p=163-168}}</ref>{{,}}<ref>[[Nicolas Werth]], [http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/receo_0338-0599_1999_num_30_1_2956 L'historiographie de l'U.R.S.S. dans la période post-communiste], Revue d’études comparatives Est-Ouest, Année 1999, Volume 30, Numéro 30-1</ref>.
 
Les approches historiques continuent de faire l'objet de controverses méthodologiques. La parution en 1997 du ''[[Le Livre noir du communisme|Livre noir du communisme]]'' a été accompagnée d'un vif débat, aussi bien historiographique que politique, portant tant sur l'approche choisie que sur la teneur de certaines contributions<ref name="Courtois55">{{harvsp|Courtois|2002|p=55-89}}</ref>. Le grand nombre d'ouvrages parus sur les divers aspects du phénomène communiste souligne la multiplicité des approches possibles, dont aucune n'est en position de revendiquer l'exclusivité<ref name="Studer33"/>.
 
En 2018, le communisme fait à nouveau l'objet d'un ouvrage en 3trois tomes. L'auteur de cette ''Histoire mondiale du communisme'', [[Thierry Wolton]], y fait une étude complète de ce qu'il nomme lui-même "{{Citation|la plus grande aventure politique qui a conduit à la plus grande catastrophe humaine" dans histoire mondiale du communisme}}<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Thierry WOLTONWolton|titre=Une histoire mondiale du communisme|éditeur=GRASSETGrasset|date=14 Octobre -10-2015|pages totales=1136|isbn=|lire en ligne=https://www.grasset.fr/livres/histoire-mondiale-du-communisme-tome-1-9782246732211}}</ref>.
 
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== Voir aussi ==
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=== Bibliographie ===
 
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{{légende plume}}
 
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* {{Ouvrage|auteur1=[[Georges Labica]]|responsabilité1=directeur|auteur2=[[Gérard Bensussan]]|responsabilité2=directeur|titre=[[Dictionnaire critique du marxisme]]|éditeur=Presses universitaires de France|année=1985|isbn=978-2-13-038739-8}} {{plume}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Lucio Colletti]]|titre=Le Déclin du marxisme|éditeur=PUF|lieu=Paris|année=1984|isbn=}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Michel Winock]]|titre=Le Socialisme en France et en Europe|sous-titre=XIXe{{sp-XXe siècle|XIX|-|XX}}|éditeur=Seuil|année=1992|pages totales=426|isbn=978-2-02-014658-6}} {{plume}}
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Christophe Bourseiller]]|titre=Les Maoïstes|sous-titre=La folle histoire des gardes rouges français|éditeur=Plon|lieu=Paris|année=2008|pages totales=505|isbn=978-2-7578-0507-7}} {{plume}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Christophe Bourseiller]]|titre=À gauche, toute !|sous-titre=Trotskistes, néo-staliniens, libertaires, « ultra-gauche », situationnistes, altermondialistes…|éditeur=CNRS éditions|année=2009|passage=978-2271068477|isbn=}}
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Philippe Raynaud]]|titre=L'Extrême gauche plurielle|sous-titre=Entre démocratie radicale et révolution|éditeur=Perrin|lieu=Paris|année=2010|pages totales=272|isbn=978-2-262-02932-6}} {{plume}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Daniel Bensaïd]]|titre=Les Trotskismes|éditeur=Presses universitaires de France|collection=[[Que sais-je ?]]|année=2002|pages totales=127|isbn=978-2-13-052544-8|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Christophe Nick]]|titre=Les Trotskistes|éditeur=Fayard|année=2002|pages totales=614|isbn=978-2-213-61155-6|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Raymond Aron]]|titre=Marxismes imaginaires|éditeur=Gallimard|lieu=Paris|année=1970|isbn=978-2-07-040491-9}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Pierre Broué]]|titre=Communistes contre Staline|sous-titre=massacre d'une génération|éditeur=Fayard|lieu=Paris|année=2003|pages totales=439|isbn=978-2-213-61544-8}}
 
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* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Eduard Bernstein]]|titre={{Lang|en|texte=Cromwell and Communism: Socialism and Democracy in the Great English Revolution}}|éditeur=Routledge|lieu=Paris|année=1964|mois=septembre|jour=25|pages totales=287}}
* {{Ouvrage|prénom1=Pierre|nom1=Kropotkine|lien auteur1=Pierre Kropotkine|titre=[[La Conquête du pain]]|éditeur=|année=1892}} ([[s:La Conquête du pain|texte sur Wikisource]])
* [[Vladimir Ilitch Lénine]], ''[[Que faire ? (Lénine)|Que faire ?]]'', 1902
* {{Ouvrage|prénom1=Vladimir Ilitch|nom1=Lénine|lien auteur1=Vladimir Ilitch Lénine|titre=[[L'État et la Révolution]]|éditeur=Gonthier|année=1917}} (édition de 1964) {{plume}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Nikolaï Boukharine]]|titre=L'ABC du communisme (première partie)|éditeur=Les Nuits rouges|année=1919}} (édition de 2007) {{plume}}
* [[Antonio Gramsci]], ''Cahiers de prison'' (5 volumes), Gallimard, Bibliothèque de Philosophie, 1996, {{ISBN|978-2070731978}}
* [[Mao Zedong]], ''[[Petit Livre rouge|Citations du Président Mao Zedong]]'', 1964
* [[Louis Althusser]], ''Pour Marx'', Maspero, coll. « Théorie », 1965
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* {{Ouvrage|prénom1=Georges|nom1=Ripka|titre=Vivre savant sous le Communisme|éditeur=Belin|année=2011|pages totales=301|isbn=978-2-7011-3053-8}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Panaït Istrati]]|auteur2=[[Boris Souvarine]]|auteur3=[[Victor Serge]]|titre=Vers l'autre flamme, confessions pour vaincus|éditeur=|année=1929|isbn=978-2-07-032412-5}}
* {{Ouvrage|auteur1=Bernard Vasseur|titre=Le communisme a de l'avenir...avenir… si on le libère du passé|éditeur=L'Humanité|année=2020|isbn=978-2902174508}}
 
==== Histoire générale ====
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* {{Ouvrage|auteur1=Jean Vigreux|directeur1=oui|auteur2=Serge Wolikow|directeur2=oui|et al.=oui|titre=Cultures communistes au {{s-|XX}}|sous-titre=Entre guerre et modernité|éditeur=La Dispute|lieu=Paris|année=2003|isbn=978-2-84303-067-3}}
* {{Ouvrage|titre=Le Communisme (Anthologie)|éditeur=Éditions Entremonde|collection=Lausanne|année=2009|isbn=978-2-940426-00-3|id=Le_Communisme2009}}
* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=Axel|nom1=van den Berg|titre=The Immanent Utopia|sous-titre=From Marxism on the State to the State of Marxism|éditeur=Transaction Publishers|lieu=New Brunswick|année=2003|pages totales=580|isbn=978-0-7658-0517-1|id=Berg2003|libellé=Berg 2003}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Moshe Lewin]]|titre=Le Siècle Soviétique|éditeur=Fayard|année=2003|isbn=978-2-213-61107-5}}
* {{Ouvrage|langue=fr|langue originale=de|auteur1=[[Ernst Nolte]]|titre=La Guerre civile européenne|sous-titre=National-socialisme et bolchevisme 1917-1945|éditeur=Perrin|lieu=Paris|année=2011|pages totales=937|isbn=978-2-262-03458-0}}
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* Georges Vidal, ''Histoire des communismes au {{s-|XX|e}}'', Paris, éditions Ellipses, 2013, 368 p.
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Thierry Wolton]]|titre=Histoire mondiale du communisme, tome 1|sous-titre=Les bourreaux|éditeur=Grasset|lieu=Paris|année=2015|pages totales=1128|isbn=978-2-246-73221-1}}
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Thierry Wolton|lien auteur1=Thierry Wolton|titre=Histoire mondiale du communisme, tome 2|sous-titre=Les victimes|éditeur=Grasset|lieu=Paris|année=2015|pages totales=1132|isbn=978-2-246-80424-6}}
* [[François Kersaudy]], ''Dix Faces cachées du communisme,'' 2023, Perrin, 432 p. {{ISBN|978-2-262-10429-0}}
 
==== Histoires nationales ====
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* {{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[Orlando Figes]]|titre=A People's tragedy|sous-titre=the Russian revolution 1891-1924|éditeur=Penguin Books|année=1998|pages totales=923|isbn=978-0-7126-7327-3}} {{plume}}
* [[John Silas Reed|John Reed]], ''[[Dix jours qui ébranlèrent le monde]]'', Éditions sociales, 1986 {{ISBN|2-2090-5494-X}} {{ISBN|978-2-2090-5494-7}} - (''Ten Days that Shook the World''), 1919
* {{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[Richard Pipes]]|titre=The Russian revolution|éditeur=Vintage|année=1991|pages totales=944|isbn=978-0-679-73660-8}}
* {{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[Sheila Fitzpatrick]]|titre=The Russian Revolution|éditeur=Oxford University Press|année=2008|pages totales=224|isbn=978-0-19-923767-8|lire en ligne=https://books.google.com/books?id=MkYVDAAAQBAJ&printsec=frontcover}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Nicolas Werth]]|titre=Histoire de l'Union soviétique|sous-titre=de l'Empire russe à la communauté des états indépendants, 1900-1991|éditeur=Presses universitaires de France|année=2004|pages totales=588|isbn=978-2-13-056120-0}} {{plume}}
* {{Ouvrage|langue=fr|langue originale=it|auteur1=[[Andrea Graziosi]]|titre=Histoire de l'URSS|éditeur=Presses universitaires de France|lieu=Paris|année=2010|pages totales=559|isbn=978-2-13-051813-6}}
* {{Ouvrage|langue=fr|langue originale=ru-Latn|auteur1=[[Roy Medvedev]]|titre=Le Stalinisme|sous-titre=origines, histoire, conséquences|éditeur=Seuil|lieu=Paris|année=1972|pages totales=277|isbn=2-226-00848-9}}
* {{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[Robert Conquest]]|titre=The Great Terror|sous-titre=A Reassessment|éditeur=Pimlico|année=2008|pages totales=576|isbn=978-1-84595-144-3}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Martin Malia]]|titre=La Tragédie soviétique. Histoire du socialisme en Russie, 1917-1991|éditeur=Seuil|année=1995|pages totales=633|isbn=978-2-02-036283-2}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[François Fejtö]]|titre=Histoire des démocraties populaires, tome 1|sous-titre=l'ère de Staline|éditeur=Seuil|année=1952|pages totales=380|isbn=978-2-02-014443-8}} {{plume}}
* {{Ouvrage|prénom1=François|nom1=Fejtö|titre=Histoire des démocraties populaires, tome 2|sous-titre=après Staline|éditeur=Seuil|année=1972|pages totales=378|isbn=978-2-02-014444-5}} {{plume}}
* {{Ouvrage|prénom1=François|nom1=Fejtö|prénom2=Ewa|nom2=Kulesza-Mietkowski|titre=La fin des démocraties populaires|éditeur=Seuil|année=1992|isbn=978-2-02-031185-4}} {{plume}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Marc Ferro]]|titre=Naissance et effondrement du régime communiste en Russie|éditeur=Librairie générale française|année=1997|pages totales=152|isbn=978-2-253-90538-7}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Jean-François Soulet]]|titre=Histoire comparée des États communistes de 1945 à nos jours|éditeur=Armand Colin|collection=U|année=1996|pages totales=405|isbn=978-2-200-01465-0|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Jean-Luc Domenach]]|auteur2=[[Philippe Richer]]|titre=La Chine, tome 1, 1949-1971|éditeur=Seuil|collection=Points Histoire|année=1987|isbn=978-2-02-019895-0|plume=oui}}
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* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=Robert|nom1=Service|titre=Stalin|sous-titre=a biography|éditeur=Pan Books|année=2004|pages totales=715|isbn=978-0-330-51837-6}} {{plume}}
* {{Ouvrage|langue=en|prénom1=Robert|nom1=Service|titre=[[Trotski (Robert Service)|Trotski : a biography]]|éditeur=Pan Books|année=2009|pages totales=600|isbn=978-0-330-43969-5}} {{plume}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Jean-Jacques Marie]]|titre=Lénine|éditeur=Balland|année=2004|pages totales=503|isbn=978-2-7158-1488-2}}
* Ross Terrill, ''Mao: A Biography'', Stanford University Press, 2000 {{ISBN|978-0804729215}}
* [[Jung Chang]] et [[Jon Halliday]], ''[[Mao : l'histoire inconnue]]'', Gallimard, 2005 {{ISBN|978-2070775057}}
* Francis Wheen et [[Roland Desné]], ''Karl Marx : Biographie inattendue'', Calmann-Lévy, 2003 {{ISBN|978-2702133606}}
* {{Ouvrage |prénom1=Tristram |nom1=Hunt |titre=Engels, Le gentleman révolutionnaire |éditeur=Flammarion |année=2009 |isbn=978-2-08-122481-0}}.
* [[Pierre Broué]], ''[[Trotsky (Pierre Broué)|Trotsky]]'', Fayard, 1988 {{ISBN|2-213-02212-7}}
* [[Isaac Deutscher]], ''[[Trotsky (Isaac Deutscher)|Trotsky]] t. 1 Le prophète armé, 1879-1921'', Éd. Omnibus, 1996 ({{1re}} éd. : 1954) {{ISBN|2-0000-2288-X}}
* Isaac Deutscher, ''Trotsky t. 2 Le prophète désarmé, 1921-1929'', éd. Omnibus, 1996 ({{1re}} éd. : 1959) {{ISBN|2-0000-2289-8}}
* Isaac Deutscher, ''Trotsky t. 3 Le prophète hors-la-loi, 1929-1940'', éd. 10-18, 1998 ({{1re}} éd. : 1963) {{ISBN|2-2640-0288-3}}
* Jean-Jacques Marie, ''Trotsky : Révolutionnaire sans frontières'', Payot, Paris, 2006 {{ISBN|2-2289-0038-9}}
* [[François Kersaudy]], ''Staline'', Perrin, 2012, {{ISBN|978-2262038670}}
 
==== Articles ====
Ligne 1 050 ⟶ 1 131 :
* [[Dictature du prolétariat]]
* [[Dirigisme]]
* [[Déstalinisation]]
* [[Doctrine Brejnev]]
* [[Doctrine Jdanov]]
Ligne 1 190 ⟶ 1 270 :
 
=== Liens externes ===
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== Références ==
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