« Méthanation » : différence entre les versions

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{{Confusion|texte=Ne doit pas être confondue avec la [[méthanisation]], processus naturel biologique de dégradation de la matière organique en absence d'oxygène.}}
 
La '''méthanation''' est une [[Réaction chimique|réaction]] de synthèse du [[méthane]] (CH<sub>4</sub>{{CH4}}) à partir de [[dihydrogène]] ({{H2}}) et de [[monoxyde de carbone]] (CO) ou de [[dioxyde de carbone]] ({{CO2}}) en présence d'un [[catalyse]]ur. En tant que [[procédé industriel]], elle est principalement utilisée dans les sites de [[Procédé Haber|synthèse d'ammoniac]]<ref>{{harvsp|Smil|2001|id=Smil2001|p=120}}.</ref> et intéresse les producteurs de [[méthanol]] et de [[Méthoxyméthane|DME]]<ref name="Amouroux2017" />.
 
La méthanation du dioxyde de carbone voit son champ d'intérêt s'élargir par le développement des énergies [[énergie éolienne|éolienne]] et [[énergie solaire|solaire]], qui nécessitent de pouvoir [[Stockage de l'électricité|stocker l'électricité]] produite en surplus. On parle alors de [[conversion d'électricité en gaz]], qui contribue à la [[transition énergétique]] par une diminution des rejets globaux de {{CO2}}<ref name=Nizio2016Plasma/>.
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Pour obtenir un taux de conversion et une sélectivité en méthane élevés la réaction (très [[Réaction exothermique|exothermique]]) a lieu à des températures comprises entre {{tmp|320|°C}} et {{tmp|430|°C}}, à une pression de 5 à {{nobr|15 bar}} et en présence d'un mécanisme catalytique qui a été très étudié<ref name=EtatsLieux2017/>. En 2017, on estime que deux types de mécanismes coexistent ou dominent (selon les cas) :
# L'un postule que la réaction passe par le CO (comme intermédiaire ensuite converti en méthane via une méthanation du CO)<ref>A. Beuls, C. Swalus, M. Jacquemin, G. Heyen, A. Karelovic et P. Ruiz (2012), ''Methanation of {{CO2}}: Further insight into the mechanism over Rh/{{ind|γ}}-{{fchim|Al|2|O|3}} catalyst'', ''Appl. Catal. B: Environmental'', {{vol.}}113–114, {{p.}}2-10, [https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0926337311001032 résumé].</ref>{{,}}<ref>S. Eckle, H.-G. Anfang et R.J. Behm (2011), ''What drives the selectivity for CO methanation in the methanation of {{CO2}}-rich reformate gases on supported Ru catalysts?'', ''Appl. Catal. A: General'', {{vol.}}391, {{n°}}1-2, {{p.}}325-333, [https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0926860X10005107 résumé].</ref>. (La méthanation du monoxyde de carbone n'est pas encore bien comprise, ou son explication ne fait pas consensus en 2017<ref>I. Alstrup (1995), ''On the Kinetics of Co Methanation on Nickel Surfaces'', ''J. Catal.'', {{vol.}}151, {{n°}}1, {{p.}}216-225.</ref>{{,}}<ref>A. Karelovic et P. Ruiz (2013), ''Mechanistic study of low temperature {{CO2}} methanation over Rh/TiO<sub>2</sub> catalysts'', ''J. Catal.'', 301, {{p.}}141-153.</ref>{{,}}<ref>W. Wang, S. Wang, X. Ma et J. Gong (2011), ''[https://www.researchgate.net/profile/Shengping_Wang2/publication/51063290_Recent_Advances_in_Catalytic_Hydrogenation_of_Carbon_Dioxide/links/549c2dcf0cf2fedbc30fd990.pdf Recent advances in catalytic hydrogenation of carbon dioxide]'', ''Chemical Society Reviews'', 40(7), 3703-3727 ; ''Chem. Soc. Rev.'', 40, {{p.}}3703, [http://pubs.rsc.org/en/content/articlelanding/2011/cs/c1cs15008a/unauth#!divAbstract résumé].</ref>) ;
# L'autre suppose une conversion directe du {{CO2}} en méthane (via la formation de [[carbonate]]s et de [[formiate]]s en surface du catalyseur).
Dans ces deux cas, l'hydrogène est adsorbé et dissocié à la surface de la phase active.
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La découverte de la réaction de base date d'il y a plus d'un siècle, mais la réaction de conversion est complexe et très exothermique (tout en exigeant que le [[Réacteur (chimie)|réacteur]] reste dans une fourchette précise de température). Ses catalyseurs solides se dégradent en outre assez rapidement. Ceci explique qu'en 2017, ses développements industriels semblent encore assez lents<ref name=EtatsLieux2017/>.
 
Les premières méthanations à échelle industrielle ont été faites en période de crise de l'énergie (en Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale pour produire du [[{{lien|trad=Substitute natural gas|fr=gaz naturel de synthèse]]}} (SNGGNS) via la gazéification du charbon puis dans la décennie 1960–1970 alors que le prix du gaz venait de connaître une hausse importante<ref name=EtatsLieux2017/>.
 
Les premiers procédés de méthanation, utilisés pour la production de [[gaz naturel]] de synthèse (SNG), à partir de la gazéification du charbon, ont vu le jour en Allemagne lors de la Seconde Guerre mondiale. Ce n'est cependant qu'à partir des {{nobr|années 1960}}-1970, à la suite d'une forte hausse du prix du gaz, que la synthèse de SNG à partir de charbon a reçu un réel intérêt industriel, avec la mise au point de chaines de réacteurs [[adiabatique]]s ; pour améliorer le rendement de conversion, ces réacteurs sont soit séparés par de nombreux échangeurs de chaleur (destinés à refroidir les gaz) soit comprennent un système de gestion du surplus de chaleur au sein du réacteur (alors presque toujours à lit fluidisé). <br />Ces technologies datent principalement des {{nobr|années 1970}}-1980 (méthanation du [[syngas]], un mélange CO/{{H2}}/{{CO2}} ; tentatives de produire du méthane à partir de [[charbon]] ; deux cas où c'est la conversion du CO qui était principalement recherchée)<ref name=EtatsLieux2017/>.
 
De nouveaux réacteurs sont plus récemment apparus (de type « réacteurs-échangeurs », associant intimement la gestion de la réaction chimique et celle de l'échange thermique. L'intérêt pour ces techniques est relancé par la [[conversion d'électricité en gaz]]<ref name=EtatsLieux2017/>.
 
Différents catalyseurs ont été testés ; ils comprennent une phase active métallique (le siège de la réaction) plus ou moins finement distribuée sur un support (poreux ou non) qui est un [[oxyde]] ({{ex}} oxyde d'[[alumine]] ({{fchim|Al|2|O|3}}), de [[silice]] ({{fchim|SiO|2}}) ou [[oxyde de cérinecérium(IV)]] ({{fchim|CeO|2}})).
De nombreux métaux nobles et de transition du {{nobr|groupe VIII B}} ont été plus ou moins efficacement testés comme phase active du catalyseur ({{ex}} le Ru, le Rh, le Pd, le Pt, le Co, le Fe, le Mn, le W, ou surtout le Ni car il est le moins coûteux)<ref name=EtatsLieux2017/>.
 
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On recherche donc encore un procédé peu consommateur d'énergie fonctionnant à pression atmosphérique et à une température peu élevée, ce qui demande un catalyseur très actif, sélectif, stable, peu coûteux, facile à mettre en forme<ref name=Nizio2016Plasma/>.
 
Plusieurs familles de [[catalyseur]]s ont été testées dont à base de [[Nickelnickel]] ({{ex}} Ni/<sub>γ</sub>{{fchim|Al<sub>|2</sub>|O<sub>|3</sub>}} (''« 5Ni-alumine'' ») ou de type « Rh-CZ », ou à base de Nickelnickel supporté sur des oxydes de Cérium[[cérium]]-Zirconium[[zirconium]] (ou ''[[Oxyde mixte|oxydes mixtes]] cérinecérium-[[zircone]]'' ; avec diversdiverses proportionproportions de [[cérium]] et/ou [[zirconium]]), avec comme précurseurs possibles pour la synthèse du substrat catalytique le Nitratenitrate hexahydratéhexa[[hydrate|hydraté]] de nickel (II) ou l'acétate tétrahydraté de nickel (II)<ref name=Ocampo2011>F. Ocampo, ''Développement de catalyseurs pour la réaction de méthanation du dioxyde de carbone'', thèse de doctorat, université de Strasbourg, France, 2011, {{p. }}201.</ref>. Le dopage du catalyseur à l'[[oxyde de cérium]] permet le stockage et la mobilité de l’oxygène<ref name=Nizio2016Plasma/>. Le nickel peut être un catalyseur supporté sur des oxydes mixtes de Cériumcérium-Zirconiumzirconium (Ce<sub>{{mvar|x}}</sub> Zr<sub>1-{{mvar|x}}</sub>-xOO<sub>2</sub>), sur des [[hydrotalcite]]s, des [[zéolite]]s ou divers oxydes mésoporeux présentant le double intérêt d'avoir une [[surface spécifique]] suffisante, une grande stabilité thermique aux gammes de températures nécessaires<ref name=Nizio2016Plasma/>.
 
L'utilisation d'un {{Citation|plasma catalytique}} (c'est-à-dire d'un {{Citation|couplage plasma DBD (décharge à barrière diélectrique)/catalyseur}}, peu consommateur d'énergie) a été proposée par Magdalena Nizio en 2016 à l'[[université Pierre-et-Marie-Curie]]-{{lnobr rom|Paris VI}}<ref name=Nizio2016Plasma>{{en}} Magdalena Nizio, ''[https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01612734/document Plasma catalytic process for {{CO2}} methanation]'', thèse de doctorat en chimie et génie des procédés, université Pierre-et-Marie-Curie - {{nobr rom|Paris VI}}, 2016 (résumé en français) NNT : 2016PA066607, tel-01612734</ref>{{,}}<ref name="Amouroux2017">{{en}} J. Amouroux et S. Cavadias, « ''Electro catalytic reduction of carbon dioxide under plasma DBD process'' », ''Journal of Physics D: Applied Physics'', 2017.</ref>. Ce plasma non thermique peut être activé par une {{Citation|[[énergie électrique]] fournie au catalyseur via un courant [[sinusoïdal]] à haute tension ({{unité|14 kV}})}}. Cette énergie produit des {{Citation|{{Citation étrangère|langue=en|streamers}}, responsables de la polarisation positive ou négative des sites catalytiques}}, laquelle va relancer l'adsorption des réactifs du milieu sur le catalyseur, et d'autre part une désorption de l'eau du catalyseur (à basse température (moins de {{tmp|200|°C}}), ce qui augmente aussi la durée d'activité du catalyseur). Selon Magdalena Nizio dans des conditions adiabatiques à {{tmp|120|°C}}-{{tmp|150|°C}} la conversion du {{CO2}} en {{CH4}} est alors de 85 % environ, avec une sélectivité proche de 100 % (pour un gaz initial comprenant {{nobr|20 % vol}} de {{CO2}} et {{nobr|80 % vol}} de {{H2}}<ref name=Nizio2016Plasma/>.
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* lors de la synthèse de l'[[ammoniac]], pour éliminer le monoxyde et le dioxyde de carbone résiduels, qui sont des [[Inhibiteur (chimie)|poisons catalytiques]] ;
* dans la gazéification du charbon<ref name=EtatsLieux2017>Ducamp J., Bengaouer A., Baurens P., Fechete I., Turek P. et Garin F. (2017), [http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1631074817301571 ''Statu quo sur la méthanation du dioxyde de carbone : une revue de la littérature''], ''Comptes Rendus Chimie''.</ref> ;
* dans la production d'un [[Bois énergie#Un gaz naturel de synthèse|gaz naturel de synthèse (GNS)]] à partir de [[gaz de bois]] ;
* pour la [[Procédé Fischer-Tropsch|synthèse Fischer–Tropsch]] ;
* comme vecteur de stockage et de transport de l'électricité d'origine renouvelable et intermittente<ref name=OpectsIntermittences2011/> (produite de plus en plus massivement). Dans le scénario [[Association négaWatt|négaWatt]]<ref>[http://www.negawatt.org/scenario-negawatt-2011-p46.html ''Scénario négaWatt 2011''].</ref>, ce procédé pourrait bientôt permettre d'utiliser le méthane de synthèse, injectable dans les réseaux de distribution de gaz et dans les dispositifs de stockage existants. De tels projets sont développés par divers opérateurs gaziers, sous la dénomination générique « ''{{Langue|en|texte=Power to gas}}'' » ([[conversion d'électricité en gaz]]) (cf. ''infra'') ;
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Le principe de la [[conversion d'électricité en gaz]] est de stocker l'électricité excédentaire (par exemple produite par le solaire ou l'éolien) sous forme d'hydrogène transformé en méthane (par adjonction de {{CO2}}). Ce méthane peut être stocké en réservoir souterrain et distribué par le réseau de [[gaz naturel]] existant. En cas de manque d'électricité, il peut alimenter des turbines et en produire. Il peut aussi être utilisé pour l'industrie, le chauffage ou comme carburant de véhicules<ref name=EtatsLieux2017/>. L'efficacité et l'efficience des centrales ''{{lang|en|power to gas}}'' dépendra fortement du processus de méthanation du {{CO2}} et donc de l'efficience des catalyseurs utilisés.
 
(''{{Langue|en|texte=Power to gas}}''), et notamment le projet allemand ''Volt Gaz Volt''<ref name="TI83378">{{lien web |auteur=Matthieu Combe |url=http://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/environnement-thematique_191/le-projet-volt-gaz-volt-repond-a-l-intermittence-des-enr-article_83378/ |titre=Le projet Volt Gaz Volt répond à l’intermittence des ENR |site=[[Éditions techniques de l'ingénieur|Techniques de l'ingénieur]] |date=6 juin 2013 |consulté le=13 novembre 2014}}.</ref>, est en cours d'expérimentation à [[Stuttgart]] dans un prototype de {{unité|250|kW}} qui sera suivi (2013) d'une unité de méthanation industrielle de {{unité|6.3|MW}} ({{date-|juin 2013}}) évaluée à 20 à {{nobr|30 millions}} d'euros en coûts d'[[investissement]]. Elle devrait produire un méthane de qualité pour {{nobrnb|0,25 centimes€/kWh}} d'euro par kilowatt-heure de gaz. L'objectif des auteurs du projet monté avec Audi, SolarFuel et EWE serait de diminuer ce prix de revient à {{nobrnb|80,08 centimes€/kWh}} du kilowatt-heure en 2018<ref name="TI83378"/> afin de rendre cette solution compétitive.
 
En France, l’AFUL Chantrerie, située à Nantes, a mis en service en {{date-|novembre 2017}} le démonstrateur MINERVE. Cette unité de méthanation de {{unité|14 [[Normo mètre cube|Nm]]3Nm3/j}} a été réalisée par Top industrie, avec l'appui de Leaf. Cette installation permet d’alimenter une station GNV et d'injecter du méthane dans la chaudière gaz naturel de la chaufferie<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Un démonstrateur Power to gas en service à Nantes|url=https://www.lemoniteur.fr/article/un-demonstrateur-power-to-gas-en-service-a-nantes-35321848|date=2018|site=Le Moniteur|consulté le= 9 février 2018}}.</ref>.
 
[[GRTgaz]] développe également sur le port de Marseille un projet similaire de stockage d'électricité sous forme de méthane, baptisé « JUPITER 1000 »<ref>{{lien web |titre=GRTgaz va développer sur le Port de Marseille un projet de stockage d'électricité sous forme de gaz |site=Le Parisien|date=30 mars 2016|url=http://www.leparisien.fr/marseille-13000/grtgaz-va-developper-sur-le-port-de-marseille-un-projet-de-stockage-d-electricite-sous-forme-de-gaz-30-03-2016-5673459.php}}.</ref>{{,}}<ref>{{lien web |titre=Une alternative aux batteries basée sur l'hydrogène et le captage de {{CO2}} |site=[[Les Échos]] |date=18 décembre 2015|url= https://www.lesechos.fr/18/12/2015/LesEchos/22090-090-ECH_une-alternative-aux-batteries-basee-sur-l-hydrogene-et-le-captage-de-co2.htm }}.</ref>. L'unité de méthanation de {{unité|500|kW}} est fabriquée dans le cadre d'un partenariat entre le CEA et [[Atmostat|ATMOSTAT]]. La mise en service de l'installation est prévue en 2018.
 
La méthanation est notamment promue en France par l'eurodéputée [[Corinne Lepage]] et le {{Pr}} [[Robert Bell (Brooklyn College)|Robert I. Bell]] qui ont lancé mi-2013 un projet de ''fond de régénération intergénérationnel'' qui serait abondé par les gains de productivité produits par ces nouvelles technologies : il peut aussi valoriser le surplus d'électricité nucléaire périodiquement produit en France la nuit ou quand la consommation est faible<ref>{{lien web |site=Énergie 2007 |url= http://energie2007.fr/actualites/fiche/4443 |titre=Intermittence des EnR et stockage: projet Volt Gaz Volt |date=28 mars 2013 |consulté le= 28 août 2013}}.</ref>.
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