« Première dynastie de Babylone » : différence entre les versions
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=== Une crise grave et durable ===
Les souverains suivants, [[Abi-eshuh]] (1711-1684), [[Ammi-ditana]] (1683-1647) et [[Ammi-ṣaduqa]] (1646-1626) ne réussissent pas à enrayer le déclin du royaume, qui se traduit par son rétrécissement progressif et un accroissement des difficultés économiques et sociales, ce qui ne les empêche pas pour autant d'avoir des règnes relativement longs. Les événements militaires sont très mal connus, les sources officielles de cette période étant peu nombreuses. Ils réussissent encore à préserver l'influence babylonienne vers le nord, dans la région de la Diyala et du Moyen [[Euphrate]]. De nouvelles populations viennent perturber encore plus l'équilibre du royaume : les [[Kassites]] (auxquels il faut rattacher des entités apparaissant à la fin de la période, les Samharu et les Bimatu), les [[Hourrites]] et les [[Hittites]]. Au sud, ce sont les rois du [[première dynastie du Pays de la Mer|Pays de la Mer]] qui constituent une menace importante, justifiant notamment la construction de plusieurs fortins aux marges méridionales du royaume,
=== La fin de la Première dynastie ===
La crise économique que connaît la Babylonie n'est toujours pas résolue, et le royaume est toujours en déclin. Les traditions mésopotamienne et hittite ultérieures rapportent que la chute de Babylone qui survient alors, datée selon la chronologie moyenne de 1595, est due à une attaque menée par les [[Hittites]], venus d'[[Anatolie]] centrale, conduits par leur roi [[Mursili Ier|Mursili {{Ier}}]], sans expliciter le motif de ce conflit entre deux adversaires très éloignés l'un de l'autre.
== Administration ==
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{{encadré texte|align=right|width=300px|texte=« §6 : Si quelqu'un a volé un bien d'un dieu ou du palais, cet homme sera mis à mort ; celui qui aura reçu de sa main le bien volé sera aussi mis à mort. §8 : Si quelqu'un a volé un bœuf ou un mouton ou un âne ou un porc ou un bateau, que ce soit celui d'un dieu ou celui du palais, il restituera trente fois ; si c'est celui d'un homme du peuple, il restituera dix fois. Si le voleur n'a pas de quoi restituer, il sera mis à mort. »|légende=La protection des biens des dieux (donc des temples) et des palais dans le [[Code de Hammurabi]]<ref>M.-J. Seux, ''Lois de l'Ancien Orient'', Paris, 1986, p. 33</ref>.}}
Les activités économiques dans la [[Mésopotamie]] ancienne sont prises en charge par des acteurs relevant de deux secteurs : celui des institutions que l'on qualifie souvent de « grands organismes » à la suite de A. L. Oppenheim, qui sont les palais (royaux et provinciaux) et les temples ici compris en tant qu'institutions et acteurs économiques, et qui sont gérés de façon similaire<ref>A. L. Oppenheim, ''La Mésopotamie, Portrait d'une civilisation'', Paris, 1970, p. 108-122</ref> ; et un secteur privé en dehors du cadre des grands organismes. Concrètement, la limite entre « secteur public » et « secteur privé » n'est guère
Du point de vue administratif, le palais gérait ses terres de différentes façons<ref>{{harvsp|id=HAM|Charpin|2003|p=250-257}}. {{harvsp|id=JOA2|Joannès|2006|p=161-162}}. Études de cas : {{en}} R. de Boer, « From the Yaḫrūrum Šaplûm Archives: The Administration of Harvest Labor Undertaken by Soldiers from Uruk and Malgium », dans ''Zeitschrift für Assyriologie und vorderasiatische Archäologie'' 106, 2016, p. 138-174 ; B. Fiette, « Le domaine royal de Hammurabi de Babylone, Apports de la documentation cunéiforme à l’histoire agraire », dans ''Histoire & Sociétés Rurales'' 2018/1 Vol. 49, p. 9-53.</ref>. Un premier groupe était concédé à des « tributaires » (''naši biltim''), qui recevaient en même temps du matériel d'exploitation et qui versaient une redevance en nature et en argent au palais. Les troupeaux d'animaux du palais étaient gérés selon un principe similaire. Le second groupe de terres était attribué à des personnes effectuant un service (''ilkum'') pour l'État, de type militaire, administratif, artisanal, etc., donc des agents du pouvoir royal. Cela servait à assurer leur subsistance et les frais nécessaires à l'exercice de leur charge, plutôt que de les rémunérer par un salaire ou des rations d'entretien. L'organisation du travail artisanal est moins bien documentée, mais on sait que les palais paléo-babyloniens disposaient d'ateliers, notamment pour le textile, et employaient des artisans extérieurs au palais pour des tâches qu'ils devaient exercer en complément de leur activité privée.
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[[Fichier:Tablet and enveloppe Ashmolean 1930.407.jpg|thumb|left|Tablette cunéiforme et l'enveloppe qui la contenait : lettre relative à la dissolution d'un partenariat d'affaires. [[Kish (Mésopotamie)|Kish]], [[période paléo-babylonienne]] (v. 1900-1600 av. J.-C.). [[Ashmolean Museum]].]]
Le « quai »<ref name=karu/> était aussi une institution regroupant les marchands d'une ville, donc une sorte de « guilde », dirigée par un chef des marchands (''wakil tamkarim'') qui agit pour le compte du roi. Les marchands pouvaient s'organiser en associations de courte durée pour financer des opérations commerciales, comme l'association-''tappūtum'' figurant dans le [[Code de Hammurabi]], qui voit un bailleur de fonds remettre une somme à un agent commercial, les partenaires devant ensuite partager le profit à parts égales<ref>C. Michel, « Associations commerciales », dans {{harvsp|id=DIC|Joannès (dir.)|2001|p=87}}</ref>. Certains Babyloniens se livrent aussi à des activités financières privées. Le Code de Hammurabi légifère sur les activités de prêts (en cas de problème de remboursement, ou sur les garanties du prêt). Les taux d'intérêt pouvaient s'élever à 20 % pour les prêts d'argent et 33 % 1/3 pour les denrées alimentaires<ref>S. Lafont, « Prêt », dans {{harvsp|id=DIC|Joannès (dir.)|2001|p=680}}</ref>. La Code aborde également les activités des cabaretières ou tavernières (''sābītum'') spécialisées dans la fabrication et la vente de bière, et qui jouent le rôle de commerce de proximité. Le pouvoir les surveille car les tavernes sont des lieux où des fauteurs de troubles peuvent se rencontrer<ref>B. Lion, « Les cabarets à l'époque paléo-babylonienne », dans ''Cahier des thèmes transversaux ArScAn'' XI, 2013, {{pp.|393-400}}</ref>.
Les produits commercialisés au niveau local sont surtout des denrées alimentaires diverses, ou encore des matières premières textiles comme la laine, vendues en partie par le palais comme vu plus haut. Les métaux devaient en revanche être cherchés hors de Mésopotamie, mais on est peu renseignés sur leur commerce pour cette période en Babylonie. Le commerce dans le [[golfe Persique]], qui servait à importer du cuivre de [[Dilmun]] ([[Bahreïn]]), décline sous la période de domination babylonienne alors qu'il avait contribué au développement de villes méridionales comme [[Larsa]] ou [[Ur (Mésopotamie)|Ur]] durant les périodes précédentes. Au nord, la ville de [[Sippar]] devient une place de première importance pour l'importation de produits étrangers en Babylonie, et exporte également des produits textiles vers l'[[Assyrie]], tout comme [[Babylone]]<ref>C. Michel, « Commerce international », dans {{harvsp|id=DIC|Joannès (dir.)|2001|p=198}}</ref>.
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L'entretien quotidien des dieux dans le sanctuaire prend différentes formes<ref>{{harvsp|id=JOA2|Joannès|2006|p=43-44 et 165-166}}</ref> : un entretien alimentaire (boissons et nourriture) et vestimentaire, la purification du lieu saint du temple et de la statue, et une célébration par divers rituels accompagnés à l'occasion de chants et de musique. Les offrandes faites aux dieux proviennent de particuliers, et en priorité du roi. Il peut s'agir d'aliments, de vêtements, de mobilier, d'objets d'art, de propriétés foncières, etc. Le souverain a de plus pour rôle de construire et restaurer les temples<ref>J. García Recio, ''op. cit.'', p. 56</ref>. Le [[calendrier mésopotamien|calendrier liturgique]] des différentes villes de Basse Mésopotamie était également marqué par des rituels et fêtes religieuses plus ou moins grandioses, certains associant le souverain à leur déroulement.
Le roi joue un rôle majeur dans le culte. Élu des dieux, qu'il représente sur terre, il doit s'assurer de l'entretien de leurs temples et de leur culte en signe de gratitude. Il n'est donc pas étonnant que les instructions royales fassent une large place aux actes de piété royale, qu'il s'agisse de constructions ou restaurations d'édifices cultuels, ou d'offrandes. Le roi exerce un contrôle sur les activités des temples, leur personnel et leurs ressources, qu'il peut d'ailleurs mobiliser à son profit si besoin<ref>{{harvsp|id=ALT|Charpin|Edzard|Stol|2004|p=247-248}}</ref>.
Le personnel des temples est généralement divisé entre le personnel chargé du culte et le personnel chargé de l'administration du patrimoine du temple, qui peut être très important comme vu plus haut<ref>{{harvsp|id=JOA2|Joannès|2006|p=166-168}}. [[Dominique Charpin|D. Charpin]], ''Le clergé d'Ur au siècle d'Hammurabi ({{sp-|XIX|-|XVIII}}s av. J.-C.)'', Genève et Paris, 1986 est une étude fondamentale sur le clergé et les activités cultuelles de cette période. {{de}} W. Sallaberger et E. Huber Vulliet, « Priester. A. 1. Mesopotamien », dans ''RLA'' X, 2006-2008, p. 617-640 pour une analyse des différentes charges cultuelles connues.</ref>. Mais la séparation entre les deux n'est pas forcément rigide, d'autant plus que les richesses du temple sont destinées en grande partie à son culte. Les prêtres chargés du culte ordinaire sont désignés sous le terme <small>SANGA</small>/''šangûm'', et sont dirigés par un chef. Ils peuvent être assistés par des prêtres spécialisés : les ''pašišum'' qui semblent s'occuper de l'entretien de la statue de la divinité, ou encore les lamentateurs (''kalûm'') et chantres (''nârum'') qui participent aux rituels, avant tout par leurs chants<ref>{{harvsp|id=JOA2|Joannès|2006|p=169-172}}. J. García Recio, ''op. cit.'', p. 56-57</ref>.
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Suivant les croyances des Anciens mésopotamiens, les spectres des morts se dirigeaient vers un Au-delà situé sous terre, ce qui explique sans doute pourquoi ils ensevelissaient les cadavres des défunts, la plupart du temps sous terre, parfois dans des marécages<ref>J. Bottéro, ''Mésopotamie, L'écriture, la raison et les dieux'', Paris, 1987, p. 323-346. C. Castel et F. Joannès, « Sépultures et rites funéraires », dans {{harvsp|id=DIC|Joannès (dir.)|2001|p=769 et 772-773}}. {{harvsp|id=HAM|Charpin|2003|p=232-233}}.</ref>. Ne pas disposer de tombe et de culte funéraire était vu comme un grand malheur. Des tombes ont pu être fouillées sur plusieurs sites. Les plus simples sont en terre, parfois maçonnées en briques, tandis que les plus élaborées sont des caveaux familiaux voûtés. Beaucoup ont été retrouvées sous des résidences, permettant ainsi de préserver les liens entre morts et vivants d'une maisonnée. Les défunts étaient généralement accompagnés dans leur dernière demeure par des objets funéraires, qui illustrent les inégalités sociales : les plus pauvres n'ont généralement que des céramiques, tandis que les plus aisés ont des bijoux, parures, des sceaux-cylindres, parfois des armes{{, etc.}}<ref>[[Evelyn Klengel-Brandt|E. Klengel-Brandt]], « La culture matérielle à l'époque kassite », dans {{harvsp|id=EXPO|Babylone|2008|p=111}}</ref>.
Cela s'accompagnait de rituels liés au culte des ancêtres, dont le plus courant est le ''kispum'', banquet funéraire présidé par le chef de famille renforçant le lien entre les vivants et leurs aïeux. De tels rituels assuraient le bien-être des défunts et
== Le milieu lettré et savant ==
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