« Histoire des inégalités économiques » : différence entre les versions
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{{Infobox Discipline|pratiqué par=[[Économiste]], [[Historien]]|objets=Évolution de la répartition des richesses entre les hommes et entre les sociétés dans l'Histoire.|personnes=[[Branko Milanović]], [[Simon Kuznets]], [[Thomas Piketty]], [[Walter Scheidel]], [[Thorstein Veblen]], [[David Graeber]], [[Karl Marx]]|image=Evolution des inégalités de revenu dans le monde de 1820 à 2020.png|légende=Évolution des inégalités de revenu dans le monde, 1820-2020.}}
L''''histoire des inégalités économiques''' est un domaine d'étude [[Histoire économique|historico-économique]] cherchant à rendre compte de l'évolution de la répartition non-uniforme des richesses matérielles produites ou détenues au cours de l'Histoire entre les différents groupes d'une même société, ou entre différentes sociétés.
Les [[inégalités de richesse]] existent dès la [[Préhistoire]] avec des logiques de domination entre sociétés et entre individus. Bien que le
La révolution industrielle exacerbe aux niveaux international et intranationaux les inégalités économiques à des niveaux inédits jusqu'à atteindre son
Cependant les inégalités recommencent à augmenter au niveau mondial à partir de la fin du {{s-|XX}} jusqu'à nos jours, notamment à cause de la chute des régimes socialistes côté Est et du [[tournant de la rigueur]] côté Ouest. Des économistes, politiciens et millionnaires regrettent cette « hausse
Les économistes craignent par ailleurs que les inégalités ne cesseront d'augmenter à une échelle mondiale au cours du {{s-|XXI}}, accusant les politiciens de délibérément favoriser les plus riches, et accusant plus récemment les possibles conséquences de l'[[intelligence artificielle]] sur le [[marché du travail]].
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{{Article détaillé|Courbe de Kuznets}}
[[Fichier:Kuznets curve.png|vignette|La [[courbe de Kuznets]] .]]
D'après [[Simon Kuznets]], l'augmentation des inégalités est inévitable avec l'apparition de la [[révolution industrielle]], car cette dernière nécessite une forte concentration de capitaux pour permettre l'[[industrialisation]], avant que le
Cette évolution est dite « naturaliste » puisqu'elle devrait s'appliquer à tout pays à l'étape de son développement industriel, c'est-à-dire lors de son décollage économique (''{{lang|en|take-off}}'').
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=== Théorie des Quatre Cavaliers de l'Apocalypse ===
[[Fichier:Walter Scheidel - Annual Meeting of the New Champions 2012.jpg|vignette|redresse|[[Walter Scheidel]] en 2012.]]
L'historien [[Walter Scheidel]] rejette tout déterminisme des inégalités historiques quel qu’il soit {{incise|des cycles de l'égalité de Milanović à l'{{Citation|[[eschatologie]] marxiste}}}}, puisqu'il n'existe pas d'{{Citation|inégalités insoutenables}}. En effet selon l'historien, des régimes économiques hyper-inégalitaires ont pu se maintenir en place pendant des siècles<ref name=":19">{{Chapitre|auteur1=[[Louis Chauvel]]|titre chapitre=Préface|auteurs ouvrage=[[Walter Scheidel]]|titre ouvrage=une histoire des inégalités|sous-titre ouvrage=de l'âge de pierre au {{s-|XXI}} |année=2021|passage=III,VII-IX|isbn=978-2-330-14077-9}}.</ref>. En revanche les inégalités extrêmes sont un prérequis à l'apparition des « [[Quatre Cavaliers de l'Apocalypse]] », mais simplement une
Cependant, lorsque les inégalités économiques reculent, c'est systématiquement à partir de quatre phénomènes distincts{{Note|texte=En revanche la réciproque est fausse selon Scheidel, l'apparition d'un des « Cavaliers de l'Apocalypse » n'amène pas systématiquement à une baisse des inégalités. Par exemple, l'apparition de la peste dans les années 1630 en Italie n'a pas amené à une diminution des inégalités, ou encore la [[pandémie de Covid-19]] ([[Note du traducteur|NDT]]) qui a augmenté les inégalités au lieu de les réduire.|groupe=note}}, que Scheidel métaphorise comme des Cavaliers de l'Apocalypse étant donné qu'ils induisent chacun une explosion de violence : {{Citation|Tout comme leurs homologues bibliques, ils sont allés « ôter la paix de la terre » et « tuer par l'épée, par la famine, par la peste et pas les bêtes de la terre ». [...] Des centaines de millions d'hommes ont péri sur leur passage{{sfn|Scheidel|2021|p=21-24}}.}}<ref name=":19" /> :
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Ainsi, les [[Sumer|Sumériens]] du Sud de la [[Mésopotamie]], les Chinois des dynasties [[Dynastie Zhou de l'Ouest|Zhou occidentaux]] et [[Dynastie Shang|Shang]], les [[Aztèques]] du Mexique et les ''[[ayllu]]kuna'' du Pérou travaillent sur des terres agricoles collectives ou du moins réparties équitablement entre tous par la communauté{{sfn|Scheidel|2021|p=89}}.
=== La
[[Fichier:Agriculture work 1.jpg|vignette|L'[[agriculture]] a contribué à l'apparition des inégalités.]]
Les inégalités ont seulement commencé à augmenter à la fin de la période glacière lors de l'[[Holocène]] il y a {{Nombre|9000|ans}} avec l'introduction de l'agriculture, de l'élevage et plus spécifiquement des droits sur la propriété privée au profit des plus riches, concentrant de plus en plus de ressources et de richesse{{sfn|Scheidel|2022|p=}} grâce à des surplus agricoles et de bétail de plus en plus conséquents et réguliers grâce à la nouvelle atmosphère chaude{{sfn|Scheidel|2021|p=60}}. Ainsi, les sociétés de [[Chasseur-cueilleur|chasseurs-cueilleurs]] et d'[[horticulteur]]s possèdent en moyenne un [[coefficient de Gini]] patrimonial de 0,36 là où la société d'éleveurs et d'agriculteurs possède un coefficient compris entre 0,51 et 0,57{{sfn|Scheidel|2021|p=66}}.
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L'usure est également fréquente dans l'empire, où les taux d'intérêts annuels sont de 6 % en zone urbaine et peuvent atteindre le
Il existe certes une certaine redistribution au sein de l'empire, mais elle se faisait des riches vers les riches, grâce à des séries massives d'exécutions-expropriations parfois pour des motifs infondés{{sfn|Scheidel|2021|p=120}}.
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=== Afrique pré-coloniale ===
La période pré-coloniale en Afrique est une période de fortes inégalités déjà marquée par des [[Esclavage|sociétés esclavagistes]], l'historien [[Ewout Frankema]] estime ainsi que durant cette période, le [[coefficient de Gini]] était de 0,86 au total, et de 0,80 en excluant les esclaves, ce qui est un
== Époque moderne ==
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Les intellectuels contemporains à la [[Révolution française]] étaient parfaitement convaincus {{incise|qu'ils s'en lamentent ou qu'ils s'en réjouissent}} que l'abolition des privilèges permettra un grand niveau d'égalité notamment économique. Le [[Gironde (Révolution française)|girondin]] [[Nicolas de Condorcet]] affirme que l'abolition des privilèges permettra à tout agent économique de prospérer économiquement non plus à partir de son statut social mais de ses propres mérites ; dès lors, à effort égal, les Français transformeront très rapidement la France en un pays économiquement très égalitaire{{sfn|Piketty|2019|p=|loc={{chap.}} 4 et 10}}. Le [[sociologue]] [[Alexis de Tocqueville]], plus pessimiste, craint que la nouvelle démocratie ne fasse naître un {{Citation|goût dépravé pour l'égalité}} au détriment de la liberté ; étant donné que le régime politique ne donne pas le pouvoir aux particuliers mais à la masse, il est à prévoir l'apparition d'une certaine {{Citation|[[tyrannie de la majorité]]}}, permettant aux pauvres d'illégitimement et arbitrairement taxer les riches pour leur propre bénéfice{{sfn|Piketty|2019|p=|loc={{chap.}} 4 et 10}}{{,}}<ref>{{Ouvrage|auteur1=[[Alexis de Tocqueville]]|titre=[[De la démocratie en Amérique]]|année=1835 et 1840}}.</ref>.
Pourtant, quelques années à peine après la Révolution française, malgré les promesses d'une plus grande [[Égalité sociale|égalité]] entre tous, les pauvres continuent d'être autant marginalisés que dans l'[[Ancien Régime]]<ref>{{Ouvrage|prénom1=Julia|nom1=Cagé|prénom2=Thomas|nom2=Piketty|titre=Une histoire du conflit politique: élections et inégalités sociales en France, 1789-2022|éditeur=Éditions du Seuil|collection=Éco-histoires|date=2023|isbn=978-2-02-145454-3|consulté le=2024-03-17}}.</ref>{{,}}
{{Citation bloc|Sans doute la rédaction de la Déclaration d’{{date|août 1789}} s’est-elle enrichie de ces deux articles [sur la liberté, la propriété et la sécurité] parce que, sonnant bien, ils avaient séduit les députés. Il semble surtout qu’ils ont été retenus parce qu’ils évitaient de poser clairement la question de l’inégalité. Sous leur forme synthétique et allusive, ils rassemblaient l’opinion autour de la Déclaration sans rien promettre et sans engager la Révolution dans une démarche précise. L’État social n’était en effet pas cité, seul l’État de droit, dans lequel s’inscrivaient la liberté et l’égalité, était retenu. Plus qu’une avancée politique, il s’agit d’un tour de passe-passe [...]. Pour la quasi-totalité des députés, [la propriété privée] ne pouvait donc pas être abolie par principe politique. C’est ce que la Déclaration de 1795 exprime clairement en revendiquant un libéralisme ordinaire : « Article 1er. Les droits de l’homme en société sont la liberté, l’égalité, la sûreté, la propriété… Article 3. L’égalité consiste en ce que la loi est la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. L’égalité n’admet aucune distinction de naissance, aucune hérédité de pouvoir. » Ne nous étonnons donc pas que la Révolution n’ait pas trouvé une résolution aux inégalités entre les hommes puisque même ses déclarations les plus audacieuses ne les avaient pas affrontées clairement – sans parler des omissions caractérisées. [...] Les revendications avancées par les rébellions en France combinaient les oppositions aux mesures de la monarchie avec la défense d’habitudes communautaires les plus traditionnelles et les plus inégalitaires, si bien qu’il est vain, si l’on veut respecter les faits, de chercher dans les innombrables mouvements de contestation les prémisses claires d’une demande d’égalité politique que la période révolutionnaire aurait été chargée de satisfaire. [...] S’il y eut bien un moment de notre histoire, de l’histoire du monde osons-le, pendant lequel le désir, le besoin, même la nécessité de l’égalité furent proclamés, ce fut bien pendant les premières années de cette période révolutionnaire, avant que la réalisation de cette envie, la mise en forme de cette exigence et le respect de ce principe soient éludés, instrumentalisés et finalement reniés
À partir de la [[Révolution française]] s'est instauré un mouvement d'extension de la logique marchande dans les sociétés européennes qui envahira toutes les sphères de la vie, et notamment celles des terres : en France, le [[décret d'Allarde]] du [[Mars 1791|17 mars 1791]] autorise tout individu à développer son activité comme il le souhaite ; ainsi, les [[paysan]]s propriétaires de certaines terres peuvent exclure, notamment par des [[cloisonnement]]s, les autres paysans qui dépendent de la solidarité des propriétaires fonciers pour pouvoir laisser le bétail manger le reste des récoltes. Ainsi, la solidarité et le lien social se rompent et les inégalités entre individus augmentent rapidement{{sfn|Polanyi|2009|loc=}}. La loi [[Loi Le Chapelier|Le Chapelier]] du [[Juin 1791|14 juin 1791]] interdit les [[corporation]]s et les [[syndicat]]s patronaux et ouvriers{{sfn|Serfaty|2024|loc={{chap.}} 7}}.
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Les écarts de revenu d'un pays à un autre s'accroissent sensiblement : en 1870 le revenu moyen des pays les plus riches est 11 fois supérieur à celui des pays les plus pauvres<ref name=":12" />.
À partir du ''[[Gilded Age]]'', l’apparition de trusts rapproche le
D'un point de vue mondial, le ratio entre les revenus détenus par les 10 % les plus riches relativement aux revenus détenus par les 50 % les plus pauvres est passé de {{Nombre|1800|%}} à {{Nombre|4100|%}} de 1820 à 1900<ref name=":6">{{Lien web |titre=Rapport sur les inégalités mondiales 2022. World Inequality Lab. Avril 2022. — Sciences économiques et sociales |url=https://ses.ens-lyon.fr/actualites/rapports-etudes-et-4-pages/rapport-sur-les-inegalites-mondiales-2022-world-inequality-lab-avril-2022 |accès url=libre |site=ses.ens-lyon.fr |consulté le=2024-01-27}}.</ref>.
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=== Continuité du système capitaliste ===
[[Fichier:Revenu_top_10_us.png|vignette|Évolution de la part du revenu des 10 % les plus riches dans le revenu total aux [[États-Unis]] au cours du {{s-|xx}}<ref>{{Article|langue=en|auteur1=Thomas Piketty|auteur2=Emmanuel Saez|titre=The Evolution of Top Incomes: A Historical and International Perspective|périodique=NBER|numéro=11955|date=2006|lire en ligne=https://eml.berkeley.edu/~saez/piketty-saezAEAPP06.pdf|format=pdf}}.</ref>.]]
Le développement de l’[[État-providence]] et de la pensée [[Keynésianisme|keynésienne]] font chuter le
Les multiples chocs économiques à partir de 1973 commencent à remettre en doute les bienfaits du keynésianisme, au profit d'une résurgence de la logique libérale à partir du début des années 1980, réaugmentant jusqu'à nos jours le
==== Les Trente Glorieuses ====
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Sur le plan idéologique, la [[Grande Dépression|crise de 1929]] fait drastiquement changer la perception de beaucoup d’économistes et de politiciens sur la question du capitalisme, en parallèle les conséquences de la [[Seconde Guerre mondiale]] rendent nécessaires des réparations et réinvestissements massifs. C’est pourquoi plusieurs pays vont s’atteler à développer l'[[État-providence]] au cours de la seconde moitié du {{s-|XX}}.
Avec un contexte d'inflation extrêmement élevée causée par la [[Seconde Guerre mondiale]] (en France, les prix sont multipliés par six dès la fin de la guerre<ref>{{Article|auteur1=Pierre Villa|titre=Une histoire macroéconomique de la France au {{s-|XX}} |périodique=Cahiers du séminaire d'économétrie|éditeur=CNRS|date=1993|lire en ligne=https://www.cnrseditions.fr/catalogue/economie-droit/une-analyse-macroeconomique-de-la-france-au-xxe-siecle/|accès url=payant}}.</ref>{{,}}{{sfn|Serfaty|2024|loc={{chap.}} 10}}), d'un très haut niveau de capital détruit par les bombardements, les gouvernements n'ont d'autre choix que de massivement intervenir par des investissements publics massifs et des prélèvements obligatoires très élevés sur les grandes fortunes afin de réparer les dégât de la guerre. Ainsi apparaitra le compromis fordiste<ref group="note" name=":0">Terme inventé par [[Michel Aglietta]] pour parler d'une très forte hausse de la productivité permise par le [[fordisme]] mise en parallèle à une indexation des salaires sur la productivité.</ref>, un haut
[[Daron Acemoğlu]] considère que le [[fordisme]] du {{s-|XX}} permettait d’ouvrir de nouvelles tâches aux ouvriers à chaque fois qu’une tâche était automatisée, ce qui faisait croître effectivement le salaire des ouvriers contrairement au {{s-|XIX}}, permettant d'augmenter la [[consommation]], donc le revenu des entreprises, qui se mettaient dès lors à produire plus, et ainsi de suite, forgeant un [[cercle vertueux]] entre [[croissance économique]] et égalité économique{{sfn|Acemoğlu|Johnson|2023}}.
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Quant à l'[[impôt sur les sociétés]], en moyenne au niveau mondial, de 1985 à 2019, il a été divisé par deux, passant de 49 à 24 %{{sfn|Saez|Zucman|2020|loc={{chap.}} 4}}.
En Allemagne, le ralentissement de la croissance économique depuis le milieu des années 1970 coïncide avec une hausse du
Aux États-Unis, de 1980 à 2019, le salaire minimum fédéral s'abaisse de 30 %, ce qui s'est fortement répercuté sur les bas salaires, alors même que dans les années 1950 et 1960 le salaire minimum américain était le plus élevé au monde{{sfn|Piketty|2019|p=816}}.
La France reste cependant une exception dans le monde lors de cette période quant aux inégalités de revenu, puisque des années 1970 à 2019 ce
[[Milton Friedman]] justifie ces privatisations et ces baisses d'impôt en expliquant que l’État est autant sinon moins efficace que les entreprises privées, y compris les [[monopole]]s, et que l'[[Impôt négatif sur le revenu|impôt négatif]] est préférable à l'[[impôt progressif]], car ce dernier désinciterait les plus riches à travailler{{Note|texte=[[Milton Friedman|Friedman]] prétend que l'impôt négatif allie l'avantage de l'[[impôt progressif]] et de l'[[impôt proportionnel]], puisque l'impôt négatif serait socialement plus juste et serait moins désincitatif car l'imposition marginale serait constante : un revenu supplémentaire de 500 € ou de 1000 € sera taxé à un même pourcentage. L'impôt négatif de Friedman a connu une grande médiatisation et un grand succès depuis 1962, puisque ce principe est encore d'actualité de nos jours. En France notamment on retrouve cette logique dans le [[Revenu de solidarité active|RSA]].|groupe=note}}{{,}}<ref>{{Ouvrage|prénom1=Milton|nom1=Friedman|traducteur=André Fourçans|titre=[[Capitalisme et liberté]]|éditeur=Leduc.s éd|date=2010|année première édition=1962|isbn=978-2-84899-369-0|consulté le=2024-01-27}}.</ref>.
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=== Expériences socialistes ===
Les différents [[Socialisme|régimes socialistes]] à partir de la [[Révolution russe|révolution russe de 1917]] se fondent en opposition au [[Capitalisme|système capitaliste]], notamment en réponse aux inégalités économiques dont le
[[Fichier:Russia v India income share.png|vignette|redresse=1.5|La part des 1 % des revenus les plus élevés en Russie (rouge) et en Inde (bleu) de 1900 à 2022.]]
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Certains pays recourent même au [[collectivisme]] : notamment en [[Tanzanie]], la politique de [[Julius Nyerere]] menée du milieu des années 1970 à 1985 est la plus extrême, puisqu'elle consistait à collectiviser de force l'agriculture, l'éducation et la santé ; ou encore le [[gouvernement militaire provisoire de l'Éthiopie socialiste]], ouvertement [[Marxisme-léninisme|marxiste-léniniste]], ayant collectivisé l'agriculture. Les deux expériences se révèlent malgré tout être des échecs ayant abouti à des [[famine]]s{{sfn|Frankema|Haas|Waijenburg|2023}}{{,}}<ref>{{en}} [[Archie Brown]], ''The Rise and fall of communism'', Vintage Books, 2009, {{p.|367}}</ref>.
Selon [[Ewout Frankema]], dans les pays d'[[Afrique du Nord|Afrique du nord]] à l'exception du [[Maroc]], ces expériences ont permis le niveau d'inégalités historiquement le plus bas jamais enregistrées pour la région, et aurait même permis dans la plupart des cas de la [[croissance économique]]. En revanche, le reste des régimes socialistes africains ont abouti sur un échec à cause de [[dette]]s écrasantes, entraînant des [[Politiques d'Ajustement Structurel]] (PAS) et ''de facto'' une
==== Période post-communiste ====
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La [[Chute des régimes communistes en Europe|chute du bloc soviétique]] en 1991 pousse des économistes libéraux, tant venant du bloc soviétique que du bloc capitaliste, à privatiser les pays anciennement communistes le plus rapidement possible, notamment grâce à la [[Thérapie de choc (économie)|thérapie de choc]] consistant notamment à appliquer une politique de [[privatisation par coupons]] ({{anglais|voucher privatization}}) dès {{date|janvier 1993}} où l'intégralité des droits des entreprises collectivisées sont distribuées de manière équitable à tous, qui peuvent librement vendre leurs droits de propriétés pour un prix donné{{sfn|Piketty|2019|loc=|p=917}}{{,}}<ref>{{Ouvrage|prénom1=Jacques|nom1=Sapir|titre=Les économistes contre la démocratie: les économistes et la politique économique entre pouvoir, mondialisation et démocratie|éditeur=Albin Michel|collection=Biblioth`eque Albin Michel Economie|date=2002|isbn=978-2-226-13427-1|consulté le=2024-01-27}}.</ref>.
[[Thomas Piketty]] estime que la {{anglais|voucher privatization}} aurait précipité de riches propriétaires à racheter une très grande quantité de droits de propriété, augmentant ainsi très rapidement le
La [[Chine]] maoïste voit son niveau d'inégalités augmenter, en particulier grâce au pouvoir étatique chinois. Ainsi, [[Forbes (magazine)|''Forbes'']] estime qu'en 2015 le [[Haute fonction publique|haut fonctionnaire]] [[Zhou Yongkang]] aurait accumulé grâce au [[parti communiste chinois]] (PCC) une fortune supérieure à {{nobr|16 milliards}} de dollars, ce qui le placerait à la {{55e|place}} du [[Fortune Global 500|classement Forbes]] de 2015. Ce pouvoir n'est pas exclusif aux hauts fonctionnaires de l’État, ''Forbes'' révèle par exemple qu'un fonctionnaire intermédiaire a réussi à accumuler une fortune supérieure à {{nobr|180 millions}} de dollars{{sfn|Scheidel|2021|p=115}}.
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À partir du [[tournant de la rigueur]], les inégalités ont commencé à augmenter partout dans le Monde : la pauvreté et l’[[extrême pauvreté]] ont certes reculé, mais les inégalités entre pays développés et pays en développement, entre les capitalistes et les travailleurs, et entre travailleurs peu qualifiés et très qualifiés ont fortement augmenté, le revenu des 10 % les plus riches est passé de 1980 à 2021 en Europe est passé de 27 à 36 % et aux États-Unis de 35 à 47 %<ref>{{Lien web |auteur=[[Thomas Piketty]] |titre=Les inégalités de 1900 à 2020: Europe, Etats-Unis, Japon |url=http://piketty.pse.ens.fr/files/ideologie/pdf/G0.6.pdf |format=pdf |site=ens |date=2019 |consulté le=13 janvier 2024 |id=PikettyG06}}.</ref>.
Beaucoup d'[[économiste]]s craignent que les inégalités ne cesseront d'augmenter au {{s-|XXI}} si les États n'interviennent pas massivement.
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| colspan="5" align="right" |<small>''Source : {{Ouvrage|auteur1=[[Walter Scheidel]]|titre=Une histoire des inégalités|année=2021|passage=575-577}}''</small>
|}
À l'heure actuelle, les États-Unis connaissent en réalité un
Cette
Ainsi, dans le monde en 2005, l'[[Coefficient de Gini|indice de Gini]] est monté à 0,70 point contre 0,65 point auparavant<ref>{{Article|langue=en|prénom1=Branko|nom1=Milanovic|titre=Global inequality recalculated and updated: the effect of new PPP estimates on global inequality and 2005 estimates|périodique=The Journal of Economic Inequality|volume=10|numéro=1|pages=1–18|date=2012-03-01|issn=1573-8701|doi=10.1007/s10888-010-9155-y|lire en ligne=https://doi.org/10.1007/s10888-010-9155-y|consulté le=2024-01-26}}.</ref>. Plus précisément aux États-Unis, de 1970 à 2018, le coefficient de Gini associé aux revenus nets est passé de 0,65 à 0,75, tandis qu'en France ce coefficient est passé de 0,37 à 0,29<ref>{{Article |langue=en |auteur1=Antoine Bozio |auteur2=Bertrand Garbinti |auteur3=Jonathan Goupille-Lebret |auteur4=Malka Guillot |auteur5=Thomas Piketty |titre=Predistribution vs. Redistribution: Evidence from France and the United States |éditeur=[[Université de Liège]] |date=juillet 2023 |lire en ligne=https://orbi.uliege.be/bitstream/2268/311624/1/BGGGP_July2023_main.pdf |format=pdf |accès url=libre}}.</ref>.
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Le [[World Inequality Lab]] estime que la [[croissance économique]] aurait bénéficié depuis 1995 à hauteur de 38 % aux multimillionnaires, contre 2 % de la croissance ayant bénéficié aux 50 % les plus pauvres dans le monde, et depuis 2020, deux tiers de la croissance aurait bénéficié aux 1 % les plus riches<ref name=":7" />. L'augmentation des richesses aurait bénéficiait en particulier aux milliardaires, dont le nombre a été multiplié par près de 19 depuis 1987<ref name=":20">{{Article |prénom1=Simon |nom1=Kuper |titre=Time to tax billionaires |périodique=[[Financial Times]] |date=2024-02-08 |lire en ligne=https://www.ft.com/content/f0eee3a9-52b1-4edb-bc1c-b0155735ece5 |consulté le=2024-02-09 |accès url=payant}}.</ref>. [[Oxfam]] déplore notamment le fait que sur la seule période 2020-2023, la fortune des milliardaires a augmenté de {{Nombre|3300|milliards de dollars}} tandis que la fortune des cinq hommes les plus riches du monde a plus que doublé de {{nobr|405 milliards}} à {{nobr|869 milliards}} de dollars<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Des «inégalités obscènes» : avant Davos, Oxfam dénonce l'enrichissement des milliardaires |url=https://www.europe1.fr/economie/des-inegalites-obscenes-avant-davos-oxfam-denonce-lenrichissement-des-milliardaires-4225206 |accès url=libre |site=[[Europe 1]] |date=2024-01-15 |consulté le=2024-03-01}}.</ref>.
Le nombre de milliardaires est par ailleurs
{| class="wikitable sortable mw-collapsible mw-collapsed center alternance"
|+Nombre de milliardaires par région du monde en 2023
Ligne 679 :
|{{Nombre|4686502180|$}}<ref name=":0" />
|}
L'ensemble des revenus des [[milliardaire]]s américains est imposé à 23 %, un
Par ailleurs au sein des milliardaires les inégalités économiques augmentent également : en 2010, {{nobr|388 milliardaires}} possèdent ce que détient la moitié la plus pauvre du monde en patrimoine net ; en 2014, leur nombre se réduit à 85 milliardaires ; et en 2015 enfin, il ne suffit plus que de {{nobr|62 milliardaires}}{{sfn|Scheidel|2021|p=13}}.
====
Dans la continuité du [[tournant de la rigueur]], là où les [[taux de prélèvements obligatoires]] dans les autres pays développés n'ont pas varié depuis les années 1990, les impôts étasuniens continuent de baisser tendanciellement. Les économistes [[Emmanuel Saez]] et [[Gabriel Zucman]] chiffrent que dans les années 1990 le taux de prélèvements obligatoires était de 31,5 % du revenu national contre 28 % en 2019, ce qui selon eux est une baisse inouïe des prélèvements obligatoires ; plus spécifiquement, le taux effectif moyen d'imposition des revenus du capital est passé de 36 % dans les années 1990 à 26 % après le [[Présidence de Donald Trump|mandat de Donald Trump]] ; sur la même période, l'impôt sur les [[dividende]]s est passé de 39,6 % à 20 %. Les deux auteurs précisent par ailleurs que depuis le début du {{s-|XXI}}, pour la première fois de l'Histoire des États-Unis, le taux d'imposition sur les revenus du capital est plus faible que celui sur les revenus du travail (ce dernier est passé de 35 à 37 % des années 1990 à 2019), augmentant ainsi les inégalités entre détenteurs de patrimoine et travailleurs, donc ''de facto'' les disparités entre riches et pauvres{{sfn|Saez|Zucman|2020|loc={{chap.}} 5}}.
Outre une baisse de l'imposition pour les plus riches, on retrouve une
* États-Unis : depuis [[Présidence de Donald Trump|Donald Trump]], les [[Supplemental Nutrition Assistance Program|food stamps]] désormais alloués aux travailleurs effectuant plus de {{nobr|20 heures}} de travail dans les États où le chômage est inférieur à 10 % ;
Ligne 696 :
==== Essor de l'évasion fiscale ====
Cette
Pourtant, on pourrait assez facilement s’attaquer aux [[Paradis fiscal|paradis fiscaux]] notamment par la mise en place d’un impôt mondial et de réglementations sur des cabinets d'avocats et de sanctions dédiées aux pays refusant d’être fiscalement transparents. Le système fiscal actuel se ferait au détriment des 50 % les plus pauvres et favoriserait les 1 % les plus riches, ces derniers payent moins d'impôt relativement à leurs revenus<ref name=":20" />{{,}}{{sfn|Saez|Zucman|2020|loc={{chap.}} 8}}. Selon [[Gabriel Zucman]] et [[Emmanuel Saez]], si l’on ne lutte pas contre les paradis fiscaux, ce n’est pas par manque de solution, mais par choix politique délibéré{{sfn|Saez|Zucman|2020|loc={{chap.}} 4}}{{,}}{{sfn|Saez|Zucman|2020|loc={{chap.}} 6}}.
Ligne 707 :
=== Certaines sphères épargnées par la hausse des inégalités ===
[[Lucas Chancel]] considère qu'en 2021,
[[Fichier:Evolution_des_écarts_de_salaire_entre_les_hommes_et_les_femmes_dans_le_secteur_privé_en_France,_1995-2022.png|vignette|Évolution des écarts de salaire entre les hommes et les femmes dans le secteur privé en France, 1995-2022. En rouge, [[Salaire|revenu salarial]] ; en rose, salaire en [[Équivalent temps plein|EQTP]] ; en bleu, volume de travail annuel.]]
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[[Barack Obama]] en 2011 puis [[Hillary Clinton]] en 2016 ont proposé la [[règle Buffett]] une politique d'imposition plancher à taxer ''a minima'' à 30 % des revenus du contribuable touchant plus d'un million d'euros par an, ce qui concerne seulement 0,3 % des Américains{{sfn|Saez|Zucman|2020|loc={{chap.}} 7}}. Cette règle Buffett n'a cependant jamais encore été mise en place.
En 2013, lors de son second mandat, [[Barack Obama]] révèle son inquiétude quant à la
En {{date|mars 2024}}, [[Joe Biden]] propose pour les États-Unis une imposition minimale de 25 % sur les milliardaires, ainsi qu'une hausse de l'[[impôt sur les sociétés]] de 21 à 28 %<ref>{{Article|langue=en|titre=Joe Biden to propose big tax rises for billionaires and corporate America|périodique=[[Financial Times]]|date=7 mars 2024|lire en ligne=https://www.ft.com/content/65b77e89-6c4f-4820-b697-5c3852909ada|accès url=payant}}.</ref>.
===== Espagne =====
En 2022, en réaction à
==== Sphère diplomatique ====
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==== Intelligence artificielle et marché du travail ====
[[Fichier:OpenAI Logo (2).svg|vignette|L'intelligence artificielle, potentielle contributrice aux inégalités de revenu
Par ailleurs, l’[[intelligence artificielle]] risque également de fortement accroître les inégalités économiques ; en effet la massification scolaire a cessé de croître au profit des riches salariés et des entreprises du numérique<ref>{{Article|langue=en|auteur1=[[Claudia Goldin]]|auteur2=[[Lawrence F. Katz]]|titre=The Race between Education and Technology: The Evolution of U.S. Educational Wage Differentials, 1890 to 2005|périodique=National Bureau of Economic Research|date=2005|lire en ligne=https://www.nber.org/papers/w12984|accès url=libre}}.</ref>. Selon certaines estimations l’intelligence artificielle pourrait non seulement accroître les inégalités mais aussi précariser les travailleurs : on estimait en 2014-2015 que 7 % des emplois qualifiés seront menacés et 45 % des emplois en général le seront d'ici 2050<ref>{{Lien web |langue=en |titre=Four fundamentals of workplace automation |url=https://www.mckinsey.com/capabilities/mckinsey-digital/our-insights/four-fundamentals-of-workplace-automation |accès url=libre |site=[[McKinsey & Company|McKinsey]] |consulté le=2024-01-18}}.</ref>{{,}}<ref name=":2" />, mais ces chiffres datent d’avant l’accélération du développement de l’intelligence artificielle depuis [[OpenAI]], une étude du FMI de 2024 considère que 60 % des emplois seront fortement menacés par l’intelligence artificielle dans les pays développés d’ici 2040 (contre 40 % à une échelle mondiale), le FMI explique néanmoins que cela permettrait d’accroître fortement le revenu des salariés si l’intelligence artificielle permet de compléter leurs tâches<ref name=":3">{{Lien web |langue=en |titre=Gen-AI: Artificial Intelligence and the Future of Work |url=https://www.imf.org/en/Publications/Staff-Discussion-Notes/Issues/2024/01/14/Gen-AI-Artificial-Intelligence-and-the-Future-of-Work-542379 |accès url=libre |site=[[Fonds monétaire international]] |consulté le=2024-01-18}}.</ref>.
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