Utilisateur:Michel Abada/Article en cours de modification/Flavia Domitilla (femme de Titus Flavius Clemens)

Flavia Domitilla est une membre de la famille impériale romaine des Flaviens, morte après 95, considérée comme une héroïne du judaïsme.

Elle a longtemps été considérée comme une sainte par l'Église catholique romaine, mais à la suite des travaux des historiens et des résultats de l'archéologie, celle-ci reconnaît depuis 2001 que la sainte chrétienne est une autre femme nièce du consul Titus Flavius Clemens[1]. C'est en revanche toujours elle qui est considérée comme sainte par l'Église orthodoxe, qui la fête le 12 mai[2].

Toutefois certains critiques hésitent toujours entre deux Flavia Domitilla au sujet de son identité exacte. Elle pourrait être la fille de Domitilla la Jeune, donc petite fille de Vespasien et nièce de Titus et Domitien épouse de son cousin Titus Flavius Clemens, mentionnée chez Dion Cassius[3] et qui peut être aussi la « Domitilla » mentionnée chez Suétone[4]. Mais certaines sources chrétiennes antiques se réfèrent à une sainte Flavia Domitilla qui aurait été la nièce du consul Titus Flavius Clemens et non pas sa femme. Il est donc possible qu'il y ait deux Flavia Domitilla, toutes deux converties à la forme de judaïsme que l'on commence déjà à appeler christianisme à cette époque: l'une étant la femme du consul qui aurait seulement été exilée sur l'île Pandateria en 95, l'autre qui aurait été sa nièce qui aurait été exilée sur l'île de Pontia l'année suivante (toutes deux des Îles Pontines), puis exécutée au début du règne de Trajan.

Selon les sources classiques modifier

Flavia Domitilla, fille de Domitilla la Jeune et donc petite fille de Vespasien et nièce de Titus et Domitien épouse son cousin Titus Flavius Clemens[5],[6], un petit-neveu de Vespasien. Ils ont eu sept enfants[7] dont deux des fils, tous deux appelés Titus Flavius, nés vers 88 et 90, qui sont éduqués par Quintilien[8] on suppose que c'est pour cette raison que les ornamenta consularia lui ont été décernés[9],[10]. Selon Suétone dans la vie des douze Césars, Domitien les a ouvertement reconnus, alors qu'ils étaient très jeunes, comme ses successeurs, changeant leur nom, l'un en Vespasien et l'autre en Domitien[11]. Titus Flavius Clemens est consul en 95, avec Domitien mais ce dernier le fait exécuter pour une raison futile dès la fin de son consulat[12], qui se termine le 1er mai 95[11]. L'historien romain Dion Cassius est plus explicite : si Flavius Clemens a été exécuté et sa femme exilée dans l'île de Pandateria, c'est parce qu'ils étaient « athées, une accusation pour laquelle beaucoup de ceux qui tendaient vers le judaïsme étaient condamnés[13] ».

Selon l'épigraphie modifier

Il semble que ce soit elle qui a donné son nom aux catacombes de Domitilla. On a trouvé sur le terrain où ces catacombes ont ensuite été creusées, « deux inscriptions mentionnant des concessions faites en vue de sépulture e beneficio et ex indulgentia Flaviae Domitillae[14], c'est-à-dire grâce à la générosité de Flavia Domitilla. Dans le voisinage, on avait déjà trouvé au XVIe siècle l'épitaphe en vers du nain phrygien Hector, dévot de Cybèle et d'Attis, d'abord cocher et lutteur, puis, semble-t-il, bouffon au service de Domitilla, qu'il remercie, dans son inscription funéraire, d'avoir permis que son petit corps pût reposer dans une terre non exiguë[15]. Flavia Domitilla prit donc une part active à la destination cimétériale de sa propriété de la voie Ardéatine[16]. »

À cette époque, la catacombe n'existe pas encore et les inhumations ont lieu sur le terrain qui dans la terminologie chrétienne va devenir un des cœmeteria (dortoirs), puisque dans la croyance des premiers chrétiens, les morts étaient seulement endormis jusqu'au retour imminent de Jésus-Christ qui devait se produire alors que certains de ses auditeurs ne seraient pas encore morts. C'est aussi sur ce terrain qu'a été enseveli sainte Pétronille, une descendante de Titus Flavius Petro, le grand-père de l'empereur Vespasien. Vers 96, c'est à côté de cette tombe que sont ensevelis les saints Nérée et Achillée, chambellans d'une Flavia Domitilla, dont on ne sait s'il s'agit de la femme de Titus Flavius Clemens ou s'il s'agit de sa nièce.

Une Flavia Domitilla, peut-être la même que la propriétaire du cimetière, possédait probablement une résidence sur le mont Palatin où on a retrouvé plusieurs tuiles estampillées à son nom[17],[18].

Arbre généalogique modifier

 
 
 
Titus Flavius Petro
(fl Ier siècle av. J.-C.)
 
 
 
Tertulla, fille de Tertullus
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Vespasia Polla (en)
 
Titus Flavius Sabinus
(env. 20 av. J.-C. - fl Ier siècle av. J.-C.)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Titus Flavius Sabinus
 
empereur Vespasien
( – † )
 
 
 
Domitilla l'Aînée
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Titus Flavius Sabinus
 
 
empereur Titus
(30 déc. 3913 sept. 81)
 
Domitilla la Jeune
 
Kelomenos
Clemens
(exécuté en 96)
 
empereur Domitien
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Julia Flavia
 
Titus Flavius Sabinus marié à Julia Flavia, fille de Titus
 
Titus Flavius Clemens
(exécuté en 95)
 
Flavia Domitilla
propriétaire du cimetière
 
Onkelos selon la tradition rabbinique (aussi appelé Aquila dans le Talmud de Babylone, peut-être Aquila de Sinope)
 
 
 
 

Selon la tradition juive modifier

Les auteurs juifs médiévaux ont identifié la femme du consul appelé Kelemenos dans le Talmud à Flavia Domitilla et son mari Kelemenos à Titus Flavius Clemens, considérés comme des convertis au judaïsme[19]. Kelemenos étant une déformation possible du nom Clemens. Toutefois certains historiens comme Simon Claude Mimouni estiment que cette identification n'est pas assurée dans la mesure où il semble y avoir eu de nombreux Clemens. D'autres critiques, font remarquer que dans le Talmud la femme de Kelemenos/Clemens est une sœur de Titus, alors que Flavia Domitilla n'est pas une sœur de Titus, mais une de ses nièces.

Dans sa Vie d'Apollonios de Tyane Philostrate d'Athènes dit que lClemens avait pour femme une sœur de Domitien — et donc de Titus — :

« Le moment était venu où les dieux allaient précipiter Domitien du haut de sa puissance. Il venait de faire périr Clément, personnage consulaire, auquel il avait donné sa sœur en mariage; et trois ou quatre jours après, il avait donné l'ordre de mettre à mort la veuve de Clément. Étienne, affranchi de cette matrone, qui était désigné par le signe céleste, soit pour venger la première victime, soit pour sauver les survivants, conçut contre le tyran un projet aussi hardi que celui des plus fiers citoyens d'Athènes »(Vie d'Apollonios de Tyre, livre VIII, chapitre 25)[20],[21]

Dion Cassius informe que la femme de ce Flavius Clemens qui fut exécuté par Domitien s'appelait Flavia Domitilla et qu'elle était « parente » (συγγενῆ) de Domitien[22],[23]. Suétone dit que Stephanus/Στέφανος/Étienne, l'assassin principal de Domitien, était intendant d'une Domitilla, de laquelle il ne dit rien de plus[24].

Flavia Domitilla, juive ou chrétienne modifier

Pour Peter Lampe, Suetone et Bruttius ne savaient rien de l'appartenance au christianisme de Titus Flavius Clemens[25]. Pour lui, le silence de Bruttius est particulièrement éloquent, car celui-ci mentionne que plusieurs proches parents de Domitilla comme motif de leur condamnation[25]. Il est donc improbable qu'il n'ait pas fourni aussi cette raison pour Titus Flavius Clemens si cela avait été un des motifs de sa condamnation[25]. De plus, si Bruttius avait mentionné que Titus Flavius Clemens était chrétien Eusèbe de Césarée qui rapporte ses propos n'aurait pas manqué de le mentionner[25]. Ce n'est qu'au IXe siècle qu'est mentionné pour la première fois la foi chrétienne du consul, sous la plume de Georges le Syncelle[25].

Avec Flavia Domitilla il est possible de résoudre la contradiction entre Dion Cassius et Bruttius de deux façons différentes: soit nous sommes en train de traiter de deux Flavia Domitilla, soit d'une seule[25].

Notes et références modifier

  1. Martyrologium Romanum, Typis Vaticanis, 2001, p. 259.
  2. "Ἡ Ἁγία Δομιτίλλα ἡ Μάρτυς" dans Μέγας Συναξαριστής, version en ligne d'une publication homonyme de l'Église de Grèce
  3. Dion Cassius dit qu'elle fut accusée d'athéisme et réléguée à l'île Pandataria (Histoire romaine 67.14, dont il n'existe maintenant que l'épitomé faite par le byzantin Jean Xiphilin dans le XIIe siècle : traduction française du passage ; texte original en grec).
  4. Sans l'appeler femme de Flavius Clemens ni mère de ses fils, Suétone mentionne une Domitilla une seule fois, en identifiant Stephanus, le principal assassin de Domitien, comme « intendant de Domitilla » (Suétone, Vie de Domitien, chapitre XVII).
  5. PIR² F 418.
  6. Brian Jones, The Emperor Domitian, 1993, Routledge, Londres, p. 47-48.
  7. Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées ILS_1839
  8. (en) Quintilian, Institutio Oratoria , iv. 1, § 2
  9. Ausonius, Grat. Act, 10.7.204.
  10. Brian Jones, The Emperor Domitian, 1993, Routledge, Londres, p. 48.
  11. a et b Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées Brian Jones1993_p47
  12. Suétone, « Vie des douze Césars, Domitien, 15 », sur Biblioteca Classica Selecta
  13. Dion Cassius traduit par Théodore Reinach, « Dans Fontes rerum judaicarum : Histoire romaine ([[wikt:épitomé|épitomé]] de [[Xiphilin]]), livre 67, page 195 », Ernest Leroux,
  14. Corpus Inscriptionum latinarum (CIL), VI, 8942 et 16246.
  15. Corpus Inscriptionum latinarum (CIL), 1098.
  16. Jean Éracle, Une grande dame de l'ancienne Rome: Flavia Domitilla, petite fille de Vespasien, p. 114.
  17. CIL, XV 1139.
  18. Jean Éracle, Une grande dame de l'ancienne Rome: Flavia Domitilla, petite fille de Vespasien, p. 116.
  19. (en) Richard Gottheil et Samuel Krauss, « Flavia Domitilla », Jewish Encyclopedia
  20. Version française par A. Chassang
  21. Texte original avec traduction en anglais
  22. Épitomé de Jean Xiphilin de Dion Cassius, Histoire romaine, 67.14
  23. traduction française du passage
  24. Suétone, Vie de Domitien, chapitre XVII
  25. a b c d e et f Peter Lampe, Christians at Rome in the First Two Centuries: From Paul to Valentinus, T & T Clark International, 2003, Mohr Siebeck, Tübingen, p. 200.