Wikipédia:Lumière sur/Alfred North Whitehead

Ce « Lumière sur » a été ou sera publié sur la page d'accueil de l'encyclopédie le jeudi 6 octobre 2016.


Photographie d'Alfred North Whitehead.
Photographie d'Alfred North Whitehead.

Alfred North Whitehead (1861-1947) est un philosophe, logicien et mathématicien britannique. Il est le fondateur de l'école philosophique connue sous le nom de la philosophie du processus, un courant influent dans toute une série de disciplines : l'écologie, la théologie, l'éducation, la physique, la biologie, l'économie et la psychologie.

Au début de sa carrière, Whitehead écrit principalement sur les mathématiques, la logique et la physique. Son premier grand ouvrage A Treatise of Universal Algebra (1898) porte sur l'algèbre qu'il se propose d'unifier tout comme David Hilbert l'a fait avec les géométries non euclidiennes. Son œuvre la plus remarquable dans ces domaines demeure les Principia Mathematica (1910-1913), en trois volumes, œuvre majeure écrite en collaboration avec son ancien étudiant Bertrand Russell. Les Principia Mathematica sont considérés comme l'une des œuvres les plus importantes du XXe siècle en logique mathématique.

Durant la période allant de la fin des années 1910 au début des années 1920, Whitehead s'est progressivement tourné vers la philosophie des sciences et la métaphysique. Peu à peu il s'éloigne du logicisme et s'oriente vers la philosophie de la nature dans ses œuvres An Inquiry concerning the Principles of Natural Knowledge (1919) et The Concept of Nature (1920). Dans The Principles of Relativity (1922), il discute et critique la théorie einsteinienne de la relativité. Sa pensée, partie des mathématiques, s'oriente vers une métaphysique dans laquelle l'idée de « process », parfois traduite en français par « procès », tient une place prépondérante. Il a développé un système de métaphysique complet, radicalement nouveau dans la philosophie occidentale. Aujourd'hui, les travaux philosophiques de Whitehead — notamment Procès et réalité (Process and Reality, 1929) — sont considérés comme les textes fondateurs de la philosophie du process.

Sa métaphysique est centrée sur les notions de préhensions (un mot qu'il crée pour indiquer qu'une perception consciente ou inconsciente incorpore certains aspects de la chose perçue) et de relations. Le fait qu'il ne cherche pas les conditions de possibilité d'une connaissance, mais comment rendre compte de l'expérience, constitue une différence forte entre les métaphysiques de Kant et de Whitehead. Par rapport à Aristote et à Leibniz, chez lui l'harmonie de l'ordre du monde n'est pas donnée une fois pour toutes, mais doit évoluer pour répondre aux changements du monde. Dans cette optique, la notion de créativité occupe une place clé. Concernant sa théologie, elle est centrée sur une double nature de Dieu : sa nature primordiale et sa nature conséquente. La première est immuable alors que la seconde en lien avec le monde est muable. L'ordre du monde est fondé sur des relations entre ces deux natures et le monde qui, d'une certaine façon, coopère avec Dieu.

La philosophie du process de Whitehead insiste sur le fait qu'« il est urgent de voir le monde comme un réseau de processus interdépendants dont nous sommes partie intégrante, et que tous nos choix et nos actions ont des conséquences sur le monde qui nous entoure ». Pour cette raison, l'une des applications les plus prometteuses de sa pensée au cours des années 2000 concerne l'écologie, notamment l'éthique de l'environnement de John B. Cobb, Jr.