Wikipédia:Lumière sur/La Maison d'Âpre-Vent

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Couverture du premier numéro, mars 1852
Couverture du premier numéro, mars 1852

La Maison d'Âpre-Vent, en anglais Bleak House, est le neuvième roman publié par Charles Dickens d'abord en vingt feuilletons entre et , puis en un volume en 1853.

Bleak House, premier des grands romans panoramiques de Dickens, décrit l'Angleterre comme une bleak house, c'est-à-dire une « demeure de désolation », que ravage un système judiciaire irresponsable et vénal, incarné par le chancelier (Chancellor), engoncé dans sa gloire « embrumée » de la Chancellerie (Court of Chancery). L'histoire décrit une succession contestée devant le tribunal, l'affaire « Jarndyce contre Jarndyce », qui affecte de près ou de loin tous les personnages et concerne un testament obscur et de grosses sommes d'argent. Les attaques dirigées par l'auteur contre l'appareil judiciaire s'appuient sur l'expérience que Dickens en avait acquise en tant que clerc. Sa mise en scène sans complaisance des lenteurs, du caractère byzantin de la loi et de la cour de justice reflète l'exaspération montante de son époque vis-à-vis du système, et il a parfois été jugé que le roman avait préparé les esprits aux réformes des années 1870. Mais Dickens écrit à un moment où le système est déjà en train de changer : si les « six clercs et maîtres » cités dans le premier chapitre ont été respectivement supprimés en 1842 et en 1852, la question d'une réforme encore plus radicale est à l'ordre du jour. Ce contexte pose le problème de la période dans laquelle La Maison d'Âpre-Vent est supposé se dérouler ; à s'en tenir aux seuls faits historiques, l'action se situerait avant 1842, ce dont un certain nombre de lecteurs auraient eu conscience, mais cette datation bute sur d'autres aspects, si bien que le débat reste ouvert.

L'une des grandes originalités de ce roman est qu'il utilise deux narrateurs, l'un à la troisième personne rendant compte des démêlés de la loi et du beau monde, l'autre, à la première personne, incarné par Esther Summerson qui raconte son histoire personnelle. Par le stratagème de la double narration, que Paul Schlicke juge « audacieux », Dickens lie, tout en les opposant, l'expérience domestique d'Esther aux grands problèmes publics. Le récit d'Esther culmine en la découverte de ses origines : enfant illégitime d'une aristocrate, Lady Dedlock, abandonnée à sa naissance et élevée par une tante malveillante, cette jeune femme reste peu sûre d'elle-même, accueillant avec gratitude la petite considération qu'elle reçoit de la société patriarcale qui l'entoure. Sa situation reflète celle de la communauté tout entière, que minent des privilèges ancestraux faisant fi de ses aspirations et besoins, avec des institutions sclérosées vouant les enfants à l'orphelinat et les habitants aux taudis, tandis qu'une prétendue philanthropie asservit plus qu'elle ne libère ses récipiendaires...