Allégations de crimes de guerre commis par Israël

crimes contre le droit international commis par l'État d'Israël

Les allégations de crimes de guerre israéliens font référence aux accusations de crimes de guerre ayant pu être commis par Israël.

La Cour pénale internationale (CPI) accuse l'armée israélienne d'avoir commis des actes pouvant constituer des crimes de guerre et peut-être, dans certaines circonstances, des crimes contre l'humanité.

Historique modifier

Manifestation à Washington en novembre 2023 contre les crimes de guerre imputés à Israël.

Enquêtes d'ONG modifier

Dans un rapport de 249 pages sur la guerre du Liban de 2006, Human Rights Watch a demandé au secrétaire général de l'ONU de créer une commission d'enquête internationale chargée d'enquêter sur les informations faisant état de violations de la loi de guerre par Israël, y compris d'éventuels crimes de guerre[1].

Le rapport reconnaît qu'Israël a exigé des civils de partir[2] et que les combattants du Hezbollah circulent sans porter d'uniformes[2], mais estime que cela ne justifie pas pour autant les attaques d'Israël contre les civils[2].

Par ailleurs, Human Rights Watch a enquêté sur trois raids israéliens au cours de la crise israélo-palestinienne de 2021 qui ont tué 62 civils palestiniens sans cible militaire claire à proximité, et a conclu que ces attaques « ont violé les lois de la guerre et semblent constituer des crimes de guerre[3] ».

En 2021, Amnesty International, qui a documenté « quatre attaques meurtrières d'Israël contre des maisons d'habitation sans avertissement », a appelé la Cour pénale internationale à enquêter immédiatement sur ces attaques, qui peuvent constituer des crimes de guerre ou crimes contre humanité[4].

Enquêtes au sein des Nations unies modifier

Selon Michael Lynk, rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits humains dans les Territoires palestiniens occupés depuis 1967, « les colonies israéliennes violent l’interdiction absolue faite à une puissance occupante de transférer une partie de sa population civile vers un territoire occupé ». La communauté internationale a donc été invitée à considérer l'établissement de colonies israéliennes comme un crime de guerre selon le Statut de Rome de 1998 de la Cour pénale internationale[5],[6].

Lors de la guerre Israël-Hamas de 2023, le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme considère que les bombardements du camp de réfugiés de Jabaliya par l'armée israélienne visant à l'« élimination » d'un dirigeant du Hamas, sont susceptibles d'être un crime de guerre : les frappes aériennes pourraient être jugées disproportionnées, compte tenu du nombre élevé de victimes civiles et de l'ampleur des destructions matérielles[7],[8]. Par ailleurs, pour Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations unies aux Droits de l'Homme, « la punition collective infligée par Israël aux civils palestiniens est également un crime de guerre, tout comme l'évacuation forcée illégale de civils »[9].

Enquêtes de la CPI modifier

Richard J. Goldstone, juge à la Cour pénale internationale (CPI), a enquêté sur l'opération Plomb Durci (2008-2009) et a rendu son rapport en avril 2009. Le rapport accuse l'armée israélienne et des groupes armés palestiniens (en particulier le Hamas) d'avoir commis des actes pouvant constituer des crimes de guerre et peut-être, dans certaines circonstances, des crimes contre l'humanité[10],[11],[12].

Le rapport est critiqué par Israël, en particulier sur ses conclusions[13].

Le juge Richard Goldstone se rétracte publiquement en 2011[13],[14]. Il déclare : « Si j'avais su ce que je sais désormais, le rapport Goldstone aurait été extrêmement différent[15] ». Il fait référence au fait que l'enquête ne se basait que sur les informations fournies du côté palestinien, Israël ayant refusé de coopérer ; entre-temps, les enquêtes faites par Israël auraient changé la donne[15]. Le juge estime que des civils palestiniens sont morts à Gaza, mais que cibler délibérement des civils n'était aucunement une politique de Tsahal[15].

Le , l’État de Palestine déclare qu'il reconnait la compétence de la Cour pénale internationale concernant d'éventuels crimes « dans les territoires palestiniens occupés, y compris Jérusalem-Est, depuis le 13 juin 2014 »[16].

En , la CPI ouvre une enquête préliminaire sur des « allégations de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité en Israël et dans les territoires palestiniens »[17]. Le 3 mars 2021, la procureure de la CPI, Fatou Bensouda, ouvre une enquête sur les crimes de guerre présumés israéliens dans les Territoires palestiniens occupés depuis le 13 juin 2014, mais aucun mandat d'arrêt n'a été délivré[18],[19],[20].

Pour les juristes Ghislain Poissonnier et Éric David, la CPI se doit de déterminer, à travers cette enquête, si la politique de colonisation d'Israël en Cisjordanie constitue un « crime de transfert, direct ou indirect, par une puissance occupante d’une partie de sa population civile, dans le territoire qu’elle occupe ? »[16].

En , lors du blocus de Gaza par Israël et à la suite de l'attaque du Hamas, Karim Khan, procureur de la Cour pénale internationale, considère qu'« empêcher l’accès de l’aide humanitaire peut constituer un crime ». De plus, il indique que « les écoles, les hôpitaux et les mosquées » ne doivent pas être des cibles militaires[21].

Réactions modifier

En 2019, Benyamin Netanyahou indique que l'enquête sur les crimes de guerre présumés israéliens est « une décision scandaleuse et sans fondement », il considère que « la CPI est devenue une arme politique dans la lutte contre Israël ». Par contre, l’Autorité palestinienne annonce qu'elle sera partie prenante dans d'éventuelles audiences devant la Cour[17].

Références modifier

  1. (en) « Amnesty report accuses Israel of war crimes », The Guardian, (consulté le )
  2. a b et c (en) « Israel/Lebanon: Israeli Indiscriminate Attacks Killed Most Civilians », Human Rights Watch (consulté le )
  3. « [...] violated the laws of war and apparently amount to war crimes. » (en) « Gaza: Apparent War Crimes During May Fighting », Amnesty International (consulté le )
  4. (en) « Israel/ OPT: Pattern of Israeli attacks on residential homes in Gaza must be investigated as war », Amnesty International, (consulté le )
  5. Piotr Smolar, « Israël mis en cause par une commission de l’ONU pour de possibles crimes de guerre à Gaza », sur Le Monde, (consulté le )
  6. (en) « Israeli Settlements Should be Classified as War Crimes, Says Special Rapporteur on the Situation », United Nations, (consulté le )
  7. « Guerre Hamas-Israël : pour l’ONU, les bombardements du camp de Jabalia «pourraient être des crimes de guerre» », sur Libération, (consulté le ).
  8. « L’ONU estime que les bombardements de Jabaliya « pourraient être des crimes de guerre » », sur L'Obs, (consulté le ).
  9. Áine Gallagher, « Guerre Israël - Gaza : Des crimes de guerre sont-ils commis et que dit le droit ? », sur BBC, (consulté le ).
  10. Gaza : L'ONU a des preuves de crimes de guerre commis par les deux côtés sur Un.org.
  11. AFP, « Israël a commis des "crimes de guerre", conclut l'ONU », L'Express, 15 septembre 2009.
  12. Rapport de la Mission d’établissement des faits de l’Organisation des Nations unies sur le conflit de Gaza, résumé, Assemblée générale des Nations unies, 23 septembre 2009, article 75 et 108.
  13. a et b (en) Asaf Siniver, Routledge Companion to the Israeli-Palestinian Conflict, Taylor & Francis, (ISBN 978-0-429-64861-8, lire en ligne), p. 446
  14. Owen Bowcott, « Richard Goldstone: the judge who 'regrets' his Gaza report » Accès libre [html], sur The Guardian,
  15. a b et c Richard Goldstone, Reconsidering the Goldstone Report on Israel and war crimes, Washington Post, 1er Avril 2011
  16. a et b Ghislain Poissonnier et Eric David, « Les colonies israéliennes en Cisjordanie, un crime de guerre ? », sur Revue des Droits de l'Homme - N° 16, (consulté le )
  17. a et b Stéphanie Maupas, « La CPI veut enquêter sur d’éventuels « crimes de guerre » dans les territoires palestiniens », sur Le Monde, (consulté le )
  18. Louis Imbert, « L’ouverture par la CPI d’une enquête sur les territoires palestiniens provoque un séisme diplomatique », sur Le Monde,
  19. « Crimes de guerre : quelles lois s'appliquent au conflit israélo-palestinien ? », sur lorientlejour.com, (consulté le )
  20. (en) « ICC launches war crimes probe into Israeli practices », Associated Press, (consulté le )
  21. « À Rafah, le procureur de la Cour pénale internationale appelle au respect des lois de la guerre », sur Le Monde, (consulté le ).

Bibliographie modifier

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  • Scott R. Morris, Killing Egyptian Prisoners of War: Does the Phrase Lest We Forget Apply to Israeli War Criminals, Vanderbilt Journal of Transnational Law, no 29, 1996, p. 90
  • Muna Hamzeh, Todd May, Operation Defensive Shield: Witnesses to Israeli War Crimes, Pluto Press, 2003 (ISBN 978-0-7453-2064-9)
  • Jeff Handmaker, In Search of À Human Face in the Middle East: Addressing Israeli Impunity for War Crimes, Armed Conflict and International Law: In Search of the Human Face: Liber Amicorum in Memory of Avril McDonald. T.M.C. Asser Press, 2013, p. 155–168. (ISBN 978-90-6704-918-4).
  • Ghislain Poissonnier et Éric David, Les colonies israéliennes en Cisjordanie, un crime de guerre ?, La Revue des Droits de l'Homme N°16, (présentation en ligne) Document utilisé pour la rédaction de l’article.
  • Shiri Krebs, All Is Fair in Law and War? Légal Cynicism in the Israeli-Palestinian conflict, Cynical International Law? Abusez and Circumvention in Public International and European Law. Springer, 2021, p. 235–259 (ISBN 978-3-662-62128-8).

Articles connexes modifier

Liens externes modifier