Discussion:André Corboz
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Texte à sourcer et neutraliser
modifierTrès érudit, exigeant avec lui-même comme avec les autres, il cultivera parfois ce que Rimbaud appelle un atroce scepticisme. Sous cet aspect révolté se cache un hypersensible. Il participera au Festival des sept, lancé par Jacques Guyonnet, en compagnie d'artistes tels qu’Henri Stierlin, Philippe Dériaz, Pierre Barde, Robert Dunand. Corboz dans sa jeunesse fait penser à Rimbaud. C'est un aspect très peu connu du personnage, on le connaît comme juriste au Département fédéral de l’intérieur, puis à l'Université de Genève dont il sera secrétaire. Son chemin de Damas, son grand coup de foudre sera l'architecture. Il la voit, un peu comme Paul Valéry, comme de la musique, une musique pétrifiée. L'originalité de Corboz réside dans le fait qu'il semble percevoir l'architecture, la ville, le territoire comme un organisme vivant. « L’architecture me saisit », dit-il, « d’abord, en tant que système volumétrique, puis comme création d’espaces. »
Le poète de vingt ans n'est pas mort, il est transposé. « Tout a un sens », dit-il. « Mon écriture relève de la poésie autant que de la science ». Il crée en effet des mots expressifs, chargés de sens : l'hyperville, la nébuleuse urbaine, le palimpseste (appliqué au territoire où traces et vestiges se superposent) et cette vision nouvelle remporte un grand succès dans le monde intellectuel. Ses publications se diffusent largement dans le monde universitaire et nous le voyons titulaire d'une chaire d'histoire de l'architecture à l’Université de Montréal de 1967 à 1980. Normal, les intelligences s'expatrient. Mais peu après on lui proposera la chaire d’histoire de l’urbanisme à l’École polytechnique fédérale de Zurich où il enseigne jusqu’en 1993. L’Académie d’architecture de Paris lui rend hommage en 2003.
Corboz est un original. Hypersensible, sous un masque parfois élitiste et genevois protestant, il se dévouera souvent pour aider ses amis et défendre les causes qui lui paraissent justes.
Il y a deux facettes intéressantes chez Corboz : le poète et le marginal. Il défend l'art de la dispersion, contrairement à ce qu'enseignent les écoles de management, et déconseille de ne faire qu'une seule chose à la fois. Tout au contraire, prône le fait d'« y aller par quatre chemins », de courir plusieurs lièvres simultanément, car nos curiosités s'entraident. Il est l'un des seuls à tenir le langage d'une culture explosée que, volens nolens, nous subissons. C'est un anti Lacan, un anti Pierre Boulez, il dépasse les systèmes figés, c'est un visionnaire adapté au monde pas un réducteur.
Marginal, il le dit lui-même en décrivant sa quête et son errance ignorante des frontières disciplinaires, voire un itinéraire sans dessein.
Et enfin, le coup de génie, explorer les dires du temple de Salomon ou déchiffrer comment, à partir de frontières brutales et non naturelles se construit l'homo americanus Cette impertinence avisée ne peut qu'enchanter. Le poète, par ailleurs, n'est pas mort puisqu'il nous dit que : « En somme, le noyau de la nébuleuse en expansion de mon itinéraire sans dessein est constitué d’une veine poétique ayant passé peu à peu de la littérature à d’autres secteurs de l’esprit ». Poète, lucide et inventeur, une belle trilogie!