Discussion:Georges Lapassade
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Lucette Colin
modifierCommentaire d'un lecteur : Merci madame pour votre excellent article. Je crois qu'il a sa place dans un ch. Introductif de l'article concernant M. Georges Lapassade.
GEORGES LAPASSADE
Né le 10 mai 1924 à Arbus (près de Pau), Georges Lapassade s'est éteint le 30 juillet 2008 à Stains. Avec lui, c'est une des grandes figures de la psychosociologie, de l'ethnologie et de la pédagogie qui disparaît. Son action en milieu étudiant dans les années 1958-1968 a eu un rôle non négligeable dans le surgissement des évènements de Mai 1968. Inventeur à côté de Félix Guattari , du mouvement de l'analyse institutionnelle, qu'il fonde ensuite avec l'aide de René Lourau, puis de Remi Hess, il se donne corps et âme au développement de Vincennes, puis de l'université de Saint-Denis.
Enfant, Georges Lapassade a fréquenté le mouvement des Auberges de jeunesse où il développe ses talents de musicien : il joue de la guitare, du piano, de l'accordéon, chante le répertoire de Trenet, Mariano. Il devient instituteur béarnais, puis poursuit des études de philosophie qui lui donnent l'occasion de vivre de l'intérieur l'existentialisme, la phénoménologie. Il participe aux mouvements d'avant-garde des années 1950-60 à Saint-Germain des Prés. Agrégé de l'Université, docteur ès lettres (1962), il a été maître-assistant de sociologie à Tours à partir de 1966, puis professeur de sciences de l'éducation à l'Université de Paris VIII à partir de 1971. G. Lapassade a été élu professeur à Vincennes par une assemblée générale d'étudiants !
Lorsqu'il prend sa retraite, en 1992, il quitte son petit appartement de
l'île
Saint-Louis pour s'installer à Saint-Denis dans une maison en face de
l'université
où il a enseigné plus de vingt ans. A une époque où l'université ne dispose
pas encore de cité étudiante, il héberge chez lui de nombreux étudiants sans
abri et souvent sans papier. Il stimule, à la mesure de ses moyens,
l'activité
universitaire en aidant les étudiants à mettre en forme leurs travaux de
recherche, comme il l'avait déjà fait dans les années 1950, lorsqu'il était
animateur de la cité étudiante d'Antony.
Sur le plan de la recherche, son nom est associé à de nombreux domaines,
tant sur le front philosophique que sociologique, ethnologique ou
pédagogique. Son premier livre, L'Entrée dans la vie (nouvelle édition,
Anthropos, 1997) est une image de l'homme et de la vie. Il dit
l'inachèvement
de l'homme. Il montre que l'éducation est un processus tout au long de la
vie. Il critique le « mythe de l'adulte ». C'est pourquoi ce livre, paru en
1963, a une importance philosophique certaine. Il a joué un rôle dans
l'émergence
de la loi de 1971 sur l'éducation permanente. Ce livre reflète aussi
l'étrangeté de tout l'itinéraire de G. Lapassade. Au moment où l'institution
universitaire tente de l'écarter à cause de ses happenings (il fut exclu de
Royaumont, du Living Theatre.)., où sa réputation de non-sérieux, d'émeutier
et de marginal est un fait acquis (il obtient cependant les palmes
académiques le 10 mai 1968), ses thèses trouvent auprès des jeunes
générations - les étudiants en particulier - une audience grandissante. En
1965, G. Lapassade a publié Groupes, organisations, institutions (5°
édition, Anthropos, 2006), qui s'inscrit dans le « mouvement des groupes »
qui se développe alors en France. C'est un livre qui oppose à la montée du
phénomène bureaucratique une alternative : celle du mouvement des groupes et
l'autogestion pédagogique. Ce livre a une dimension « pédagogique ». Il
critique les relations bureaucratiques qui se développent au sein de
l'école. Ce livre a sa place à l'origine du mouvement de la pédagogie
institutionnelle.
Après 1968, les recherches de G. Lapassade s'organisent autour de quatre
axes qui constituent des moments de sa « personnalité multiple » : le
psychosociologique, l'ethnologique, le sociologique et la question de
l'implication. Reprenons ces quatre champs de recherche.
Le psychosociologique, c'est le domaine de l'intervention pédagogique ou
socianalytique dans des groupes. A partir de 1973, cet intérêt le conduit à
se pencher sur le « mouvement du potentiel humain » qui arrive des
Etats-Unis et qui a des origines dans la dernière période de W. Reich. A
partir de 1984, G. Lapassade découvre l'ethnométhodologie américaine,
l'ethnographie
de l'école, les nouveaux courants de la recherche-action anglaise. Pour
faire connaître ces nouveaux courants, il se met à l'étude de l'anglais à 60
ans et il traduit de nombreux textes qu'il synthétise.
La recherche ethnologique prend ses racines dans l'enseignement que G.
Lapassade assura à Tunis avant 1966. Dès cette époque, il s'intéresse aux
phénomènes de transe et aux rites de possession. Cette recherche se poursuit
ensuite au Maroc, en Italie du Sud, au Brésil. puis à nouveau au Maroc. Ce
pays est conscient de l'apport de G. Lapassade, pour réconcilier le pays
avec sa contre-culture gnaoua, puisque le Roi du Maroc l'a félicité de son
travail pour faire connaître la ville d'Essaouira où il a organisé tant de
festivals et manifestations durant vingt ans, faisant sortir cette
magnifique ville de l'oubli. Aujourd'hui, c'est une cité à la mode.
L'ouvre sociologique de G. Lapassade, c'est d'abord une recherche sur les
institutions. Une des institutions que G. Lapassade a étudié en profondeur,
c'est l'Université. À partir de 1976, la recherche de G. Lapassade a pris la
forme d'une analyse interne qu'il développe à l'Université de Paris VIII. Ce
chantier conduit G. Lapassade à devenir doyen de l'UFR de droit pour créer
de nouvelles formations ; n'ayant pas de bureau, il colle une étiquette «
bureau du doyen » sur une armoire à balais : ce qui lui permet de créer
L'administration
économique et sociale que personne ne veut assumer alors dans l'université.
Parce qu'il vit au milieu des étudiants de l'université, G. Lapassade est le
conseiller privilégié des différents présidents (Claude Frioux, Pierre
Merlin, Francine Demichel, Irère Sokologowski), toujours attentifs à ses
suggestions. Il écrit un journal de la réforme des DEUG en 1984. Cet
engagement pour l'analyse interne le conduira à travailler à l'analyse
interne de l'Ecole institutionnaliste qu'il a créé !
Quatrième axe de recherche de G. Lapassade, la question de l'implication. En
même temps qu'il tente son « autobiographie », l'autobiographe découvre
l'impossibilité de ce projet. En fait, la question qui hante G. Lapassade,
c'est
la fragmentation de son identité. Il aurait peut-être désiré posséder une
identité unifiée. Or, elle lui échappe. S'il se reconstruit dans l'écriture,
Georges Lapassade invente une théorie de la dissociation du sujet qui rompt
avec la perspective pathologique. Il fait l'éloge de la dissociation comme
ressource (notamment dans Le mythe de l'identité, éloge de la dissociation,
Anthropos, 2006, écrit en collaboration avec Patrick Boumard et Michel
Lobrot).
G. Lapassade fut surtout un grand pédagogue. Il a été l'« arpenteur »de
l'université
! L'Université de Paris 8 lui a rendu hommage dans un colloque qui lui fut
consacré en 2002 (ainsi qu'à René Schérer). Son engagement permanent pour
comprendre les jeunes a été l'occasion de nombreux ouvrages. Il fut le
premier en France à publier sur le rap, par exemple. Son engagement dans la
banlieue date de 1980, année du déménagement de Vincennes à Saint-Denis. Il
fut le premier sociologue français à publier sur les jeunes de banlieue.
A 84 ans, il avait toujours son bureau en sciences de l'éducation, à
l'université.
Il fréquentait le restau-U, la pratique de tango du jeudi soir où il venait
écouter les rythmes de musique de bal de son enfance, la bibliothèque
universitaire, les séminaires de master et enfin les réunions de comité de
rédaction des irrAIductibles du vendredi après-midi, revue qu'il avait créée
en 2002 avec ses disciples de l'analyse institutionnelle, et qui a publié
depuis 350 auteurs venant de 60 pays... Il participait aussi régulièrement à
la revue Pratiques de formation depuis sa création en 1980.
Dans son dernier entretien « De l'entrée dans la vie à une éducation tout au
long de la vie » (in L Colin et J.-L. Le Grand, L'éducation tout au long de
la vie, Anthropos, 2008), il revient sur son itinéraire et sur ses
fondements philosophiques.
Son ouvre rassemble une quarantaine d'ouvrages. G. Lapassade a été beaucoup
traduit, notamment en Italie où tous ses livres ont été édités. Ces dix
dernières années, les éditions Anthropos ont réédité ses ouvrages classiques
et édité dix de ses derniers livres. Ses inédits, ses ouvrages épuisés sont
mis ou seront mis en ligne sur le site de l'UFR8 de l'université de Paris 8.
Lucette Colin[1]
[1] Maître de conférence de sciences de l'éducation à l'université de Paris 8, Lucette Colin dirige des collections aux éditions Anthropos où ont été édités les ouvrages de G. Lapassade.
Une mauvaise page wikipedia et un bon article dans cette page de discussion !
modifierTriste article sur Lapassade, qui donne moins d'informations sur l'oeuvre de ce penseur que sur les insultes dont quelques situationnistes l'abreuvèrent. Dont on ne sait pas s'ils l'avaient lue puisqu'à part affirmer que "c'est un con", ils ne disent rien. Typique d'un certain positionnement, aussi méprisable dans son genre que le positionnement universitaire méprisant auquel ça croit répondre.
Merci à Lucette Colin pour son article : c'est celui-ci qui mériterait la page wikipedia ! Dommage qu'il faille aller le chercher dans la page "discussion" !
Quelqu'un aurait-il le temps de lui proposer de le retravailler avec elle pour enrichir la page wikipedia avec ? Si je peux filer un coup de main... — Le message qui précède, non signé, a été déposé par l'IP 90.3.53.57 (discuter), le 2 janvier 2020 à 13:41 (CET)