L'Assassinat de l'évêque de Liège

peinture d'Eugène Delacroix

L'Assassinat de l'évêque de Liège est un tableau réalisé par le peintre romantique français Eugène Delacroix en 1828 ou 1829. Cette huile sur toile représente une scène de Quentin Durward, roman historique de Walter Scott. Exposée au Salon parisien de 1831, elle est aujourd'hui conservée au musée du Louvre, à Paris.

L'Assassinat de l'évêque de Liège
Artiste
Date
Entre et Voir et modifier les données sur Wikidata
Matériau
Dimensions (H × L)
91 × 116 cmVoir et modifier les données sur Wikidata
Propriétaire
No d’inventaire
RF 1961-13, RF 1961 13Voir et modifier les données sur Wikidata
Localisation
Salle 942 (d)Voir et modifier les données sur Wikidata

Création

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Esquisse par Delacroix, v.1827.

Delacroix voyage en Angleterre de mai à , deux ans après la parution de Quentin Durward. Il se passionne alors pour la littérature britannique, en particulier pour Shakespeare et Walter Scott. Quentin Durward lui inspire plusieurs œuvres[1] dont deux esquisses conservées :

L'Assassinat de l'évêque de Liège, une huile sur toile[2], 91 × 116 cm (1829), Paris, musée du Louvre[3], est commandée par le duc d'Orléans, futur roi Louis-Philippe, qui en devient le propriétaire. Elle reste un certain temps exposée chez l'éditeur et marchand d'art Henri Gaugain[4] avant d'être présentée au Salon de 1831[5].

Description

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La scène, tirée du chapitre XXII de Quentin Durward, représente l'assassinat de Louis de Bourbon, prince-évêque de Liège, par les hommes du chef de guerre Guillaume de La Marck, le « sanglier des Ardennes », pendant les guerres de Liège au XVe siècle. Alors que La Marck festoie dans la grande salle du palais épiscopal, l'évêque, amené captif, est menacé et injurié par les soldats et les rebelles liégeois : il rejette les propositions de La Marck et montre un maintien « entre celui d'un noble féodal et celui d'un martyr chrétien » avant d'être abattu par le boucher Nikkel, complice de La Marck.

La grande salle s'inspire de celles du palais de justice de Rouen et de Westminster Hall à Londres[6]. Delacroix a composé son tableau en clair-obscur : la nappe blanche du banquet forme une tache éblouissante dans la demi-obscurité de la salle. Delacroix a dû reprendre son œuvre plusieurs fois pour arriver à ce contraste saisissant. Dans sa correspondance, il se montre inquiet : cette composition sera son Austerlitz ou son Waterloo. Il ne l'achève qu'une fois sûr d'avoir atteint son « Austerlitz »[7].

Place dans l'œuvre de Delacroix

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Le peintre s'inscrit dans la révolution romantique marquée par une prédilection pour les scènes ténébreuses et violentes, comme celles qu'il avait peintes dans La Mort de Sardanapale et L'Exécution du doge Marino Faliero. Il compose L'Assassinat de l'évêque de Liège dans la même période que Boissy d’Anglas tenant tête à l’émeute, qui montre pareillement une scène de violence révolutionnaire, et La Bataille de Nancy, également inspirée des guerres de la fin du Moyen Âge. Ces trois œuvres utilisent le clair-obscur. Boissy d'Anglas, comme L'Assassinat de l'évêque de Liège, dépeint une scène d'émeute dans une grande salle obscure dont le centre est occupé par une tache lumineuse, ici le drapeau tricolore brandi par les émeutiers[7].

Accueil

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Pour Étienne-Jean Delécluze, « cette petite toile hurle, vocifère, blasphème… on entend les chansons obscènes de cette soldatesque avinée. Quelles figures de brigands !… Quelle bestialité joviale et sanguinaire ! Comme cela fourmille et glapit, comme cela flamboie et pue[8] ! »

Théophile Gautier s'enthousiasme : ce tableau, « pour le mouvement et la fureur de la composition, est un chef-d’œuvre inimitable, c’est un tourbillon peint, tout remue et tout se démène frénétiquement dans ce petit cadre, d’où il semble entendre sortir des mugissements et des tonnerres ; jamais on n’a jeté sur une toile une foule plus drue, plus fourmillante, plus hurlante et plus enragée […] Cette peinture est réellement tumultueuse et sonore ; on l’entend aussi bien qu’on la voit[9]. »

Au contraire, la critique classique se déchaîne contre cette œuvre trop novatrice : « Le Pont de Taillebourg était l'œuvre d'un sauvage, et l'Assassinat de l'évêque de Liège, la débauche furieuse d'un barbare. Lui—même, qu'était-il? Un singe affublé de la défroque de Titien. »[10]

Cette œuvre est considérée aujourd'hui « par son sujet comme son exécution fiévreuse, l’un des manifestes romantiques de Delacroix[2]. »

Expositions

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Notes et références

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  1. a et b « Eugène Delacroix », sur lanouvelleathenes.fr (consulté le 25 juillet 2016).
  2. a et b « L'Assassinat de l'évêque de Liège », sur museeduluxembourg.fr, 2016 (consulté le 25 juillet 2016).
  3. « Eugène Delacroix », sur cartelfr.louvre.fr (consulté le 25 juillet 2016).
  4. Linda Whiteley, « Art et commerce d'art en France avant l'époque impressionniste » in: Romantisme, 1983, no 40. L'argent. p. 71 [1]
  5. Gustave Planche, Salon de 1831, sur gallica.bnf.fr, Paris, Pinard, 1831, p. 114-116.
  6. Barthélémy Jobert, Delacroix, Princeton University Press, 1997, p. 116-118.
  7. a et b René Huyghe, Delacroix ou le combat solitaire, Hachette, 1964, p. 187-189.
  8. Étienne-Jean Delécluze, cité dans « L'Assassinat de l'évêque de Liège », sur idixa.net (consulté le 25 juillet 2016).
  9. Théophile Gautier, « Exposition du Louvre », sur theophilegautier.fr, La Presse, 22 mars 1838 (consulté le 25 juillet 2016).
  10. Eugène Delacroix à l'Exposition du Boulevard des Italiens, Paris, 1864, p.7. [2]

Liens externes

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