Reichsexekution

capacité de l'empire à suspendre et attaquer un état membre

La Reichsexekution ou exécution d'Empire est une disposition légale en vigueur dans le Saint-Empire germanique (962 - 1806) qui permet à l'empereur de suspendre les droits d'un État membre et d'engager une intervention militaire contre lui. Des mesures similaires ont été appliquées dans la Confédération germanique au XIXe siècle (Bundesexekution) et sous la république de Weimar au XXe siècle.

Justin Göbler, Keyserlicher vnd des H. Reichs Rechten (Traité des droits de l’empereur et du Saint-Empire), 1557.

Saint-Empire

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Le chevalier Götz von Berlichingen devant le magistrat impérial, dessin de Richard Parkes Bonington, 1802-1828.

La Diète d'Empire, réunissant les représentants des États membres, dans sa session de Worms en 1495 à la demande de l'empereur Maximilien Ier, promulgue la loi de paix perpétuelle (Ewiger Landfriede) qui autorise l'empereur à agir contre quiconque troublerait la paix de l'Empire. Cette disposition est précisée par les ordonnances impériales de 1512 et 1555. Après un jugement prononcé par un des deux tribunaux impériaux, la Chambre impériale ou le Conseil aulique, l'empereur peut demander à un ou plusieurs États appartenant au même cercle impérial d'agir contre le contrevenant. Si ce n'est pas suffisant, il peut faire appel aux cercles voisins puis engager une « guerre d'exécution » (Exekutionskrieg ou Reichsexekutionskrieg) en convoquant l'armée du Saint-Empire. La Reichsexekution peut servir à appliquer une mise au ban de l'Empire (Reichsacht)[1].

À partir des traités de Westphalie (1648), la convocation de l'armée de l'Empire requiert l'approbation de la Diète.

Plusieurs ordres de Reichsexekution sont promulgués sous le Saint Empire, notamment :

Confédération germanique, révolution de mars et unité allemande

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Le chancelier prussien Bismarck imposant la loi prussienne aux États allemands annexés, caricature allemande du Kladderadatsch, 1867.

La Confédération germanique, instituée par le traité de Vienne de 1815 et son acte additionnel (Wiener Schlussakte (de)) de 1820, prévoit, dans son article 26, la possibilité d'une exécution confédérale (Bundesexekution (de)) contre un État membre. Cette disposition est appliquée plusieurs fois :

Aucune mesure confédérale de Bundesexekution n'est prise pendant les révolutions allemandes de 1848-1849. Les délégués nationalistes libéraux du Parlement de Francfort ( - ) promulguent une constitution qui rétablit le droit de Reichsexekution mais n'entre jamais en vigueur[6] sauf, de façon ponctuelle, lorsque le Parlement envoie un commissaire d'Empire (Reichskommissar) avec 700 soldats dans le landgraviat de Hesse-Hombourg, le , pour faire appliquer une ordonnance de fermeture des casinos[7].

Les dispositions similaires prévues par les constitutions de la Confédération de l'Allemagne du Nord (Bundesexekution) et de l'Empire allemand (Reichsexekution) ne sont jamais appliquées[6]. Dans la constitution bismarckienne de 1871, elle fait l'objet de l'article 19 : elle doit être ordonnée par la chambre haute du parlement, le Bundesrat.

République de Weimar

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États de la République de Weimar en 1925.

Sous la république de Weimar (1918-1933), l'article 48, paragraphe 1 de la constitution de Weimar prévoit le droit de Reichsexekution. Il est appliqué à plusieurs reprises[8],[9] :

L'autonomie des États est abolie de fait sous le Troisième Reich lors de la Gleichschaltung (« mise au pas ») de 1934.

Littérature

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Goethe, dans son drame Götz von Berlichingen (1773), évoque la mesure de Reichsexekution prise contre le personnage éponyme :

« GÖTZ : Lis la lettre édifiante : l'Empereur a ordonné une exécution contre moi qui demande de découper ma chair en morceaux pour la donner aux oiseaux sous le ciel et aux bêtes dans les champs[10]. »

Notes et références

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  1. Sébastien Schick, "Reichsexekution", in Falk Bretschneider and Christophe Duhamelle (dir.), « Les mots du Saint-Empire » – un glossaire, Histoire du Saint-Empire: regards croisés franco-allemands, 2014.
  2. Peer Schmidt, Spanische Universalmonarchie oder "teutsche Libertet", 2001, Franz Steiner, Stuttgart, p. 37.[1]
  3. "Mecklenburg" in Meyers Großes Konversations-Lexikon, 1905 [2]
  4. Ostermann, 2009, p. 8-9.
  5. Ostermann, 2009, p. 14.
  6. a et b Ostermann, 2009, p. 7.
  7. Heinrich August Pierer & Julius Löbe (éd.), "Hessen-Homburg", Universal-Lexikon der Gegenwart und Vergangenheit, 4e éd., vol. 8, Altenburg, 1859, p. 322–323 [3]
  8. Christian Baechler, L'Allemagne de Weimar: 1919-1933, Fayard, (ISBN 978-2-213-63927-7, lire en ligne)
  9. (de) Horst Möller, Die Weimarer Republik: Demokratie in der Krise, Piper ebooks, (ISBN 978-3-492-99049-3, lire en ligne)
  10. Goethe, Götz von Berlichingen mit der eisernen Hand, acte III.

Voir aussi

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Sources et bibliographie

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  • (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Reichsexekution » (voir la liste des auteurs) dans sa version du .
  • Sébastien Schick, "Reichsexekution", in Falk Bretschneider and Christophe Duhamelle (eds.), « Les mots du Saint-Empire » – un glossaire, Histoire du Saint-Empire: regards croisés franco-allemands, 2014 [4]
  • Tim Ostermann, Die verfassungsrechtliche Stellung des Deutschen Kaisers nach der Reichsverfassung von 1871, Peter Lang, 2009 [5]