Servage et esclavage au Tibet

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Dans l'ancien Tibet, la paysannerie était liée héréditairement aux domaines des seigneurs nobles et monastiques et du gouvernement tibétain, seuls propriétaires terriens, auxquels elle devait des redevances en argent ou en nature et des corvées[2]. Cette situation est qualifiée de servage et, dans le cas particulier de domestiques attachés à la maisonnée, d'esclavage, par des témoins directs, occidentaux ou tibétains, et par des tibétologues.

Selon Melvyn C. Goldstein, le monastère de Drepung en 1959 était propriétaire de 151 domaines agricoles et 540 pâturages auxquels étaient attachées de façon héréditaire des familles paysannes qui travaillaient les terres du monastère sans salaire sous le régime de la corvée[1].

Le système de servage en vigueur sous la théocratie tibétaine a été étudié par Melvyn C. Goldstein à partir de 1965, alors qu'on pouvait encore interroger un grand nombre de Tibétains réfugiés en Inde ayant connu ce système. Au bout de deux ans d'enquête, il conclut que l'organisation sociale traditionnelle du Tibet était une variante du servage, comportant trois sous-statuts[3] : les serfs qui louaient des terres à un domaine moyennant redevances et avaient de lourdes obligations (les khral-pa), ceux qui étaient attachés à un domaine mais ne détenaient pas de terres (les dud chung) et avaient donc moins d'obligations, et les serviteurs attachés de façon héréditaire à la maisonnée d'un seigneur (les nangsen).

La tibétologue Katia Buffetrille, pour sa part, déclare que dans l'ancien Tibet, « effectivement, il y avait du servage, de l'esclavage même », précisant que « la société était très hiérarchisée, seul le clergé et les nobles pouvaient être propriétaires terriens »[4]. De plus elle indique qu'« Il ne s'agissait pas du tout d'un système idéal, mais [qu']il n'avait rien à voir avec de l'esclavage » en signalant que « Le terme de serfs, appliqué aux paysans, est contesté par certains tibétologues occidentaux, qui préfèrent celui de gens du commun ou sujets […]. En fait, les paysans, la grande majorité du peuple, étaient héréditairement liés à la terre. En dépit de cette structure qui peut paraître rigide, il y avait en fait une grande flexibilité. Ces paysans avaient des devoirs mais jouissaient aussi de droits. Les seigneurs n'avaient aucunement pouvoir de vie et de mort sur eux »[5].

En 1959, le gouvernement chinois, selon A. Tom Grunfeld, donnait la répartition suivante : noblesse 5 %, clergé 15 %, nomades 20 %, serfs 60 % (dont 45 % devant s’acquitter de redevances, 45 % sous « bail humain » et 10 % divers)[6]. En 2009, l'historiographie officielle chinoise fixe le pourcentage de la population serve et esclave à 95 % de la population totale[7], les khral-pa et les dud chung représentaient 90 % de la population, et les nangsen 5 %, le statut de ces derniers étant celui d’esclave[note 1] et non de serf. Le journaliste Thomas Laird conteste le chiffre de 95 % de Tibétains et estime à 30 % de la population le nombre de paysans jouissant de terres et s'acquittant de redevances en nature et de corvées dues au gouvernement, à un monastère ou à des nobles, également à 30 % le taux de serfs sans terres mais inféodés à une famille aristocratique, à un monastère ou au gouvernement[8].

Dans les années 1900, le 13e dalaï-lama créa un Office de l'agriculture et permit aux serfs ayant fui leur domaine de se rattacher à l'Office moyennant le paiement d'un droit. Le 14e dalaï-lama « emploie couramment les termes serf et féodal pour décrire le Tibet d'avant 1959 », quoiqu'il juge le terme serf excessif. Il est d'avis que « le système de réincarnation comportait un aspect négatif : dans les richesses transmises au nom de l'institution, il y avait les serfs détenus par les monastères, ce qui entraînait bien des souffrances »[9].

Dans le cadre des « réformes démocratiques » approuvées par le gouvernement central en , le Comité préparatoire à l'établissement de la Région autonome du Tibet adopte, le , à Lhassa, la résolution votée le à l'Assemblée nationale populaire à Pékin et concernant d'une part la suppression de la corvée obligatoire (ulag) et de l'esclavage, ainsi que la réduction des loyers et des intérêts des prêts, d'autre part la redistribution des terres.

En 2009, la journée du est déclarée Journée d'émancipation des serfs au Tibet.

Une controverse existe quant aux termes à employer pour définir le statut et les conditions de vie de cette partie de la population. Des universitaires discutent de l'adéquation de la notion même de servage, au sens occidental, dans le cadre de l'ancien Tibet. Ce débat est devenu un argument politique dans la confrontation entre la République populaire de Chine et le Gouvernement tibétain en exil[10],[11],[12].

Territoire concerné

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Le gouvernement de la République populaire de Chine limite le « Tibet » au secteur qu’il désigne sous le nom de région autonome du Tibet, région créée en 1965 à partir des provinces de l'U, du Tsang et du Kham occidental qui formaient anciennement le Tibet politique, c'est-à-dire le territoire administré par les dalaï-lamas.

Pour sa part, le gouvernement tibétain en exil considère que d’autres secteurs à l'est où vivent des Tibétains appartiennent aussi au Tibet[13],[14], composé de trois régions :

  • L'Ü-Tsang qui correspond à l'actuelle Région autonome du Tibet créée en 1965.
  • L’Amdo, qui correspond aujourd'hui aux provinces chinoises du Qinghai, du sud du Gansu, et du nord du Sichuan.
  • Et enfin le Kham, qui correspond aujourd'hui à une partie de l'est de la région autonome et aux deux provinces chinoises du Yunnan et du Sichuan.

Le Tibet ethnologique ou ethnographique représente toutes les régions qui furent autrefois habitées uniquement ou majoritairement par des gens d’origine tibétaine : le Tibet géographique plus le Bhoutan, les régions orientale et occidentale du Népal, les régions indiennes du Ladakh, de Spiti et de Kinnaur, certaines parties de l’Arunachal Pradesh et du Sikkim, le Baltistan pakistanais[15],[16].

L'étendue territoriale concernée par le présent article est celles des trois provinces tibétaines traditionnelles.

Témoignages d'observateurs et travaux d'universitaires

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Une situation de servage[note 2] a été observée par des témoins directs, occidentaux ou tibétains, et décrite par des tibétologues s'intéressant au sujet.

Terminologie

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La traduction exacte du mot tibétain miser a suscité un débat chez les spécialistes du Tibet[17],[18]. Pour Alice Travers, chargée de recherche en histoire au CNRS, les différences d'usage du terme « servage » relèvent de la « fameuse opposition du de jure / de facto ». Ainsi ceux qui utilisent le terme servage, comme Melvyn Goldstein, « insistent sur la norme et les dispositions légales qui lient un miser au domaine dans une relation légale de dépendance et soumettent son autonomie à l'accord du seigneur ». Alors que ceux qui réfutent le terme, comme Béatrice Miller ou William Coleman, « mettent l'accent sur les possibilités réelles et fréquentes de mobilité géographique et sociale qui s'offraient aux intéressés, et donc sur un certain degré d'autonomie dans la pratique, et parfois dans la transgression de la loi »}}[19].

Selon Melvyn Goldstein, le terme miser peut désigner un « serf » (serf), un « sujet attaché (au domaine) » (bound subject) ainsi qu'un « citoyen » (citizen) en fonction du contexte. Ainsi, miser of a lord renvoie aux « serfs du seigneur » tandis que miser of Tibet renvoie aux « citoyens du Tibet »[20].

Pour l'universitaire norvégienne Heidi Fjeld, ce mot signifie « roturier » ou « citoyen ». De même l’anthropologue Barbara Aziz traduit ce mot tibétain par « roturier » ou « gens du commun »[21]. De même, pour l'historien William Monroe Coleman, « serf » est un terme trompeur pour traduire le mot tibetain mi ser[22].

Dans son autobiographie, Dalai Lama, My Son: A Mother's Story, Diki Tsering, la mère du dalaï-lama, parlant de ses années de jeunesse à Tsongkha dans l'Amdo, emploie l'expression bonded laborer (travailleur servile) comme synonyme de miser : « We did not have any miser, or bonded laborers, but servants were hired »[23].

Témoignages directs de l'existence et de la condition des serfs au XXe siècle

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L'explorateur et anthropologue russe Gombojab Tsybikov, dans un article sur le Tibet central et Lhassa publié en 1904, affirme qu'à cette époque « les princes » (c'est-à-dire les descendants des anciens chefs des principautés indépendantes, les descendants des pères des dalaï-lamas et des panchem lamas à qui la cour mandchoue a conféré le rang de prince de cinquième degré), sont, avec les monastères et leurs paroisses, de grands propriétaires terriens et que les paysans sont leurs serfs. Le gouvernement central, ou le dalaï-lama, possède davantage de terres et de serfs que les autres classes[24].

Le journaliste militaire britannique Edmund Candler, qui séjourna dans la capitale tibétaine en 1904 et en tira un livre, The Unveiling of Lhasa, décrit ainsi la société tibétaine de l'époque : « Le pays est régi par le système féodal. Les moines sont les seigneurs, les paysans leurs serfs »[25].

Le 13e dalaï-lama en 1910.

Perceval Landon, qui accompagna l'expédition militaire au Tibet en tant que correspondant spécial du quotidien britannique The Times, écrit ceci dans son livre The opening of Tibet, paru en 1905 : « dans tout le pays, il y a deux classes : les grands propriétaires terriens et les prêtres. Elles exercent chacune, dans ce qui est de son ressort, un pouvoir despotique sans appel. Le paysan d'un domaine est, dans presque tous les sens, un serf. Il est tenu de fournir à son maître la plus grande partie de sa production agricole, ne gardant pour lui-même et sa famille que la portion congrue. Il lui est interdit de quitter la terre ou le pays et il doit fournir gratuitement transport et provisions à tous les voyageurs ou visiteurs, qu'ils soient tibétains ou chinois »[26].

Séjournant au monastère de Badhur au sud de Shigatsé à l'été 1916, l'orientaliste tibétologue Alexandra David-Néel consigne dans une de ses lettres son impression du supérieur de l'établissement monastique : « Je pense à l'existence de ce haut Lama perché dans son belvédère régnant de là sur d'assez vastes propriétés, des trapas, des serfs villageois : une image du Moyen Âge »[27]. Dans À l'ouest barbare de la vaste Chine (1947), elle écrit que « certains Tibétains, commerçants, fonctionnaires ou membres de la noblesse ou du clergé sont aussi propriétaires de nombreux troupeaux » et que « leur bétail est confié aux soins de pasteurs dont la condition est approximativement celle de serfs à l'époque féodale »[28].

Ngawang Thondrup, un moine qui servit dans le gouvernement tibétain en 1948, rapporte que l'avocat Gendün Chomphel prônait la réforme d'un système où des gens sont propriétaires d'autres gens (en tibétain dagpo gyab), signifiant par là que les nobles avaient des serfs (en tibétain, les miser) et des domaines, et qu'ils étaient propriétaires des gens [qui y vivaient]. Les serfs de la famille Tsarong, par exemple, devaient demander la permission de leur maître s'ils voulaient partir. Et les serfs ne possédaient pas la terre. Selon Gendün Chomphel, les monastères n'avaient nul besoin de détenir des domaines[29].

Un ancien agent commercial britannique à Gyantsé, Meredith Worth, cité par le tibétologue Alex C. McKay, fait état, dans un enregistrement de ses souvenirs pour l'année 1933, de « la domination et la brutalité des lamas et des responsables officiels à l'égard de la population serve »[30],[31].

Dans Cultural heritage of Tibet, David Macdonald, qui fut agent commercial britannique à Yatoung et Gyantsé de 1909 à 1924, écrit : « Très peu de petits fermiers travaillent pour leur bénéfice personnel, la plupart étant les tenanciers des grands propriétaires terriens et des monastères qui leur extirpent jusqu'à leur dernier sou. Il n'est guère de cultivateur qui soit propriétaire de sa terre et qui entrevoie de le devenir un jour. Le servage est usuel d'un bout à l'autre du pays. La personne née dans une famille de serfs d'une grande maison ne peut jamais s'en libérer. De désespoir, certains tentent bien de s'enfuir »[32].

Le terme « serf » est employé en 1954 dans la traduction en français (tout comme serf dans celle en anglais) de Sieben Jahre in Tibet, les mémoires publiés en 1952 par l'explorateur autrichien Heinrich Harrer, qui séjourna au Tibet interdit[33] de 1944 à 1951 et qui enseigna l'anglais et la géographie au dalaï-lama[34],[35],[36] : « Les domaines des nobles sont tellement vastes qu'il faut souvent chevaucher pendant deux jours avant d'atteindre leurs limites. Des serfs les cultivent, mais ils possèdent également des champs dont la récolte leur appartient en propre. Les intendants – qui sont, eux aussi, des serfs – ont la confiance du propriétaire et font figure de potentats ; ce sont eux les véritables maîtres ; les nobles, retenus à Lhassa par leurs obligations et les charges qu'ils occupent dans l'administration, se soucient fort peu de leurs propriétés. (…) Quelques hobereaux vivent au milieu de leurs serfs dans de sombres châteaux ».

Robert W. Ford, un Britannique employé par le gouvernement tibétain comme opérateur radio dans la ville de Chamdo, dans le Kham, à la fin des années 1940, écrit dans ses mémoires, publiées en 1957, qu'« au Tibet, un propriétaire dispose de ceux qui sont sur ses terres comme de serfs ». Il rapporte que son boy, pour pouvoir entrer à son service, « avait dû obtenir une autorisation en bonne et due forme du propriétaire du domaine sur lequel il était né »[37]. Dans un compte rendu sur les réalisations des communistes au Tibet après l'entrée de l'armée populaire de libération en 1951, il fait état de l'abolition de la corvée de transport et de son avis que le servage lui aussi sans doute disparaîtra mais qu'en attendant « tout le monde est serf »[38].

Ngapo Ngawang Jigme, le chef de la délégation tibétaine aux négociations de paix de Pékin en 1951, déclara, dans le discours qu'il fit devant l'élite tibétaine après la signature de l'accord en 17 points sur la libération pacifique du Tibet : « Si nous appliquons cet accord, l’économie et le système politique changeront petit à petit […] nous autres, seigneurs féodaux, nous perdrons nos serfs, mais nos revenus iront en augmentant et non en diminuant »[39].

Dans un chapitre de son livre When Serfs Stood up in Tibet publié en 1959, la journaliste américaine Anna Louise Strong[40] évoque la condition servile de paysans de la région de Lhassa attachés à un manoir appartenant à la famille Khemey et divisés en tsaiba, duichun et nantsan. Le domaine comptait 303 âmes, dont 22 familles tsaiba, 45 familles duichun et 18 familles nantsan. Chaque année, 420 arpents étaient semés, dont 96 exploités en faire-valoir direct par l'intendant grâce au travail des nantsan. 25 arpents étaient alloués à 22 familles tsaiba en échange de corvées, et les quelque 300 arpents restant étaient loués aux tsaiba et aux duichun contre le quart de leur récolte. Mais quand les serfs s'étaient acquitté de ce qu'ils devaient pour les prêts, à taux usuraire, de semences, d'instruments agricoles, de bétail et de nourriture, environ 70 % de ce qu'ils produisaient allait au seigneur[41].

En 1962, Stuart et Roma Gelder, deux écrivains et journalistes britanniques autorisés à se rendre au Tibet, alors fermé aux voyageurs étrangers, rapportent avoir interrogé un ancien serf, Tsereh Wang Tuei, qui avait volé deux moutons appartenant au monastère de Drepung. En guise de peine, il avait eu les yeux énucléés et une main mutilée[42]. Pour le journaliste Warren W. Smith Jr, les Gelder ne savaient pas que d’anciens serfs faisant le récit de très mauvais traitements avaient été encouragés à s'étendre sur eux et avaient fait carrière en les racontant aux Chinois, aux Tibétains, et aux visiteurs étrangers[43].

Se fondant sur les entretiens qu'il a eus à partir de 1965 avec des Tibétains installés à Bylakuppe, un village de réfugiés situé dans l'État du Karnataka, en Inde, l'anthropologue américain Melvyn C. Goldstein affirme que dans l'ancien Tibet, jusqu'au milieu du XXe siècle, la totalité de la population laïque était attachée aux domaines fonciers[note 3] des seigneurs nobles et monastiques et du gouvernement tibétain, seuls propriétaires terriens, et qu'à l'exception de 250 à 300 familles nobles la population laïque était des serfs[2]. Goldstein déclare regrouper sous le vocable « serfs » l'expression bound peasants (« paysan attaché au domaine ») ou les termes tibétains miser, treba, düjung et nangsen[44].

La mère du 14e dalaï-lama, Diki Tsering, rapporte dans ses mémoires, parues en 2000, qu'« à Lhassa les miser (travailleurs attachés) faisaient tout le travail tandis que les maîtres les exploitaient et cela la mettait en colère de voir que certaines familles traitaient leurs miser avec mépris »[45]. Elle rapporte également que son fils Gyalo Thondup (le deuxième frère aîné du dalaï-lama), avant de quitter le Tibet pour l'Inde en 1952, fit le tour de toutes les propriétés foncières de la famille et donna aux miser ce qu'il y avait dans les réserves, leur disant qu'ils n'avaient plus de dettes. Sous leurs yeux, il brûla tous les documents relatifs à leur ancien statut[46].

L'actuel dalaï-lama lui-même use du terme de « serf », comme dans ces propos de 1991 : « Les rapports entre le propriétaire et le serf étaient bien plus doux au Tibet qu'en Chine et les conditions des pauvres étaient bien moins dures »[47], ou encore dans le livre d'entretiens avec Thomas Laird paru en 2007, où il déclare employer le terme maintenant mais que celui-ci n'était pas usité de son temps au Tibet[48]. Dans ce même livre, il confie à son interlocuteur que « le système de réincarnation comportait un aspect négatif : dans les richesses transmises au nom de l'institution, il y avait les serfs détenus par les monastères, ce qui entraînait bien des souffrances »[9].

Avis d'auteurs sur la question

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Auteurs utilisant le terme de « serf » sans restriction

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En 1907, le géographe français Jules Sion affirme que le paysan tibétain, resté dans une condition voisine du servage, entretient par les redevances, les réquisitions, la corvée, un lama par deux habitants mâles, sans compter l'aristocratie laïque[49].

En 1952, Hugues-Jean de Dianous évoque le Tibet comme étant une région « où règne un régime de type féodal et ecclésiastique et où l'on trouve de nombreux serfs »[50].

Claire Marquis-Oggier et Jacques Darbellay, auteurs, en 1999, de Courir pour Dieu, une biographie du missionnaire au Tibet Maurice Tornay (1910-1949), écrivent que les lamas, qui possèdent de vastes terrains, « imposent un régime féodal qui réduit le peuple au servage et même à l'esclavage »[51]. Les auteurs rapportent que l'acquisition par la mission catholique de Yerkalo de terres appartenant à lamaserie de Karmda dans la région de Batang (Sichuan), était pour l'habitant un moyen de changer de statut et d'être délivré des redevances féodales dues à la lamaserie[52].

Diki Tsering, la mère du 14e dalaï-lama, dans son autobiographie, donne bonded laborer (« travailleur attaché ») comme équivalent de miser et distingue ce dernier du peasant (« paysan ». Elle rapporte que sur le domaine de Duntse accordé à leur famille, ils possédaient environ 300 familles de miser. Elle exigeait de leurs serviteurs qu'ils s'adressent aux miser par leur nom véritable plutôt que par kei (homme) et mei (femme)[53].

Le professeur d'histoire Pierre Chapoutot porte un jugement sans nuances sur la société de l'ancien Tibet : « Jusqu'à ce qu'il tombe aux mains des communistes, le Tibet a été une société féodale extraordinairement arriérée et brutale, dans laquelle quelques dizaines de clans (laïques ou religieux) exploitaient une population réduite dans son écrasante majorité au servage et au silence »[54].

Pico Iyer, un journaliste et écrivain qui s'est penché sur le dalaï-lama pendant trente ans[55], utilise le terme de « servage » pour décrire la société au Tibet avant 1959 : « A peine arrivé en exil, en 1959, le Dalaï-Lama a saisi cette opportunité de se débarrasser de la bureaucratie et du servage qui avait cours au Tibet (...) »[56].

Dans son livre China's Tibet: Autonomy or Assimilation (2008), le journaliste américain Warren W. Smith reconnaît que la description du Tibet par les communistes chinois comme étant une société de servage est exacte mais que cette description est noircie par la nécessité de justifier la légitimité de leur domination du Tibet[57].

Michel Soutif, dans son livre Fondements des civilisations de l'Asie (2012), écrit qu'« à l'extérieur des temples, les nobles entretenaient entre eux des rapports de type féodal régis par une stricte hiérarchie, et [que] la population paysanne était réduite à l'état de serfs »[58].

Auteurs utilisant le terme de « serf » avec restriction

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Plusieurs auteurs contestent la traduction du terme « miser » par « serf »[59].

En 2005, l'universitaire norvégienne Heidi Fjeld affirme pour sa part que si Melvyn C. Goldstein traduit miser par « serf », la principale source chinoise sur l'histoire sociale du Tibet (la Maison d'édition du peuple du Tibet, 1987) ainsi que des personnes qu'elle a interrogées rendent ce mot par « roturier » ou « citoyen », ajoutant que « serf » serait alors une subdivision de miser[60].

En , la tibétologue Katia Buffetrille confirme que dans l'ancien Tibet, « effectivement, il y avait du servage, de l'esclavage[note 1] même », précisant que « la société était très hiérarchisée, seul le clergé et les nobles pouvaient être propriétaires terriens ». Elle ajoute cependant « Mais, à la fin du XIXe siècle, des réformes ont été entreprises par le 13e dalaï-lama (1876-1933), qui a même aboli la peine de mort en 1898 » et que pour décrire la situation en 1949 « Le mot esclave est parfaitement impropre » et qu'« Il ne s'agissait pas du tout d'un système idéal, mais il n'avait rien à voir avec de l'esclavage. »[5], en nuançant également ce qui relevait alors du servage : « Le terme de serfs, appliqué aux paysans, est contesté par certains tibétologues, qui préfèrent celui de gens du commun ou sujets », les seigneurs n'avaient aucunement pouvoir de vie et de mort sur eux »[61]. Pour elle, quel que soit le terme employé, il est primordial de savoir ce qu'il signifie. Les paysans étaient, de fait, héréditairement liés à la terre et travaillaient gratuitement pour un seigneur ou un monastère qui leur fournissait en échange une terre dont, il est vrai, ils n'étaient pas propriétaires. Elle indique que le « paysan » avait une « identité légale », il avait des devoirs mais aussi des droits. Ainsi le seigneur ne pouvait pas modifier la superficie des parcelles attribuées au paysan, le seigneur ne pouvait pas réévaluer le montant des taxes dues. En cas de conflit, le paysan pouvait demander un arbitrage au-dessus de son seigneur. Ce dernier devait régler les conflits entre différents paysans. Si un d'entre eux quittait le domaine sans accord, le seigneur pouvait le faire poursuivre et le punir[62].

Alice Travers, chargée de recherche en histoire au CNRS, préfère éviter tout « amalgame » entre les sociétés européenne et orientale a fortiori tibétaine. Elle considère qu'il est préférable d'évoquer une « société à domaines », sur lesquels des « misers » travaillaient. Le terme de « miser » peut se traduire par « roturiers » ou « gens de commun » et ce sans la connotation européenne de « serf ». Il existe bien des similitudes entre le serf européen et le miser tibétain en particulier sur le « degré de dépendance (privation partielle des libertés) vis-à-vis du domaine d’origine ». Toutefois certains « misers » pouvaient prospérer économiquement avec donc la présence d'une « sorte de classe moyenne aisée » [19],[63].

Travaux de Melvyn C. Goldstein sur le servage

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Le système de servage en vigueur dans le Tibet d'avant 1959 a été étudié dans le détail par le tibétologue américain Melvyn C. Goldstein à partir de 1965, à une époque où il n'était pas trop tard pour interroger un grand nombre de personnes ayant connu ce système, en l'occurrence des Tibétains ayant pris le chemin de l'exil et installés à Bylakuppe, dans l'État du Karnataka, en Inde. Au bout de deux ans d'enquête dans ce village de réfugiés, Goldstein en vint à la conclusion que l'organisation sociale traditionnelle du Tibet était, selon ses termes, une variante du servage (serfdom en anglais) comportant divers sous-statuts et marquée par des souplesses ainsi que des rigidités[3]. L'universitaire Christopher I. Beckwith, spécialiste du Tibet médiéval, considère à propos de ce travail une « dépendance trop large de récits oraux d’une fiabilité incertaine »[64].

Les domaines fonciers

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L'organisation des domaines fonciers au Tibet était en gros analogue à celle des manoirs de l'Angleterre et de l'Europe occidentale médiévales dans la mesure où l'une comme l'autre avait pour caractéristique le fait que les terres étaient détenues par des seigneurs que faisait vivre une paysannerie liée juridiquement à ces domaines ou manoirs. Au Tibet, les domaines (shiga) étaient détenus par des familles nobles, des monastères, des lamas réincarnés ou par le gouvernement lui-même. Ces domaines leur étaient accordés par le souverain (le dalaï-lama ou son régent), lesquels avaient le pouvoir de les confisquer (ce qu'ils faisaient parfois) malgré le fait que les détenteurs de domaines en jouissaient de façon héréditaire. Le souverain avait aussi le pouvoir d'attribuer de nouveaux domaines, en particulier à la famille de chaque nouveau dalaï-lama, laquelle se trouvait ainsi anoblie.

Dans les domaines tibétains, les moyens de production – les terres cultivées – étaient associées à une main-d'œuvre paysanne liée héréditairement au domaine. Ces terres étaient de deux sortes : la terre du seigneur (ce qu'on appelle « réserve seigneuriale ») et la terre du paysan (ce qu'on appelle « tenure »). La réserve seigneuriale occupait généralement la moitié ou les trois quarts des terres cultivables du domaine et était travaillée entièrement par le biais de corvées des paysans liés héréditairement au domaine[65].

En 1951, entre 37 % et 50 % des terres les plus fertiles du Tibet étaient détenues par les monastères et les lamas réincarnés, 25 % du restant étant détenu par la noblesse laïque. Le reliquat était la propriété du gouvernement. Au cours des siècles, l'État avait alloué aux institutions religieuses de vastes étendues de terre cultivable et de pâturages pour leur subsistance ainsi que les serfs pour cultiver ces terres[66].

L'attachement héréditaire au domaine

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Selon les résultats de ses recherches, le trait fondamental du domaine ou manoir tibétain est le fait que les paysans n'avaient pas le droit d'abandonner leur terre et de chercher fortune ailleurs. Ils n'étaient pas libres et, s'ils s'enfuyaient, le seigneur était en droit de les poursuivre et de les forcer à retourner au domaine (droit de suite). Cet assujettissement du paysan à un domaine et à son seigneur se transmettait de façon héréditaire par transmission en parallèle : les fils d'un homme devenaient sujets du domaine ou du seigneur auquel celui-ci appartenait ; les filles d'une femme devenaient sujettes du domaine ou du seigneur auquel celle-ci appartenait[67]. Si un domaine changeait de mains, les paysans qui y étaient attachés restaient sur place et devenaient les sujets du nouveau seigneur. Presque toute la paysannerie était attachée héréditairement aux domaines ou seigneurs soit directement, soit par le statut du « bail humain » (mibo). Seule exception : les moines et nonnes. Si un paysan voulait entrer dans les ordres, la permission du seigneur lui était accordée systématiquement et toute obligation à l'égard de ce dernier était levée[68].

Selon Goldstein, le seigneur pouvait également transférer ses paysans chez un autre seigneur ou un riche paysan, pratique toutefois peu fréquente. il cite un transfert opéré par le monastère de Drepung à la fin des années 1940. Ayant besoin d'une très grande quantité de bois pour le thé servi quotidiennement à ses 10 000 moines, le monastère fit appel à sa main-d'œuvre corvéable, 12 jeunes hommes célibataires, envoyés dans l'un des domaines du monastère dans une montagne éloignée pour y vivre sous la tente et couper et transporter du bois pendant 10 ans. Ayant été choisis sur la base de l'obligation de leurs familles à fournir des corvées au seigneur, ils ne reçurent ni salaire ni nourriture pendant toute la durée de leur corvée mais tous les jours une journée de corvée/homme était portée au crédit de chaque famille[69].

Cette organisation non seulement fournissait aux élites des ressources matérielles mais elle leur garantissait aussi une main-d'œuvre captive. Ils n'avaient pas à se disputer les travailleurs sur un marché du travail ni à se soucier de les nourrir, vêtir et loger comme dans l'esclavage. Le seigneur, qu'il fût lama réincarné, monastère, noble ou gouvernement, n'avait besoin que de fournir un intendant ou maître pour diriger la main-d'œuvre liée héréditairement à son domaine. Goldstein précise que c'est cet aspect de la société tibétaine traditionnelle qui l'a amené à classer celle-ci comme variante de la seigneurie européenne et à désigner les paysans sous le nom de « serfs »[68].

Les catégories de serfs

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Le fait que quasiment toute la paysannerie était attachée à un domaine et à son seigneur ne signifiait pas qu'elle était homogène quant au statut et au niveau de vie. À l'intérieur de la catégorie générale des serfs, des différences importantes existaient. Il y avait :

  • les serfs qui louaient des terres d'un domaine moyennant redevances et avaient de lourdes obligations (les khral-pa),
  • ceux qui étaient attachés à un domaine mais ne détenaient pas de terres soumises à redevances (les dud chung) et de ce fait avaient moins d'obligations vis-à-vis du domaine,
  • les serviteurs attachés de façon héréditaire au seigneur (les nangsen)[70].

Les khral-pa étaient liés aux terres qu'ils détenaient de façon héréditaire. Ils ne pouvaient pas en être expulsés tant qu'ils s'acquittaient de leurs obligations mais n'avaient pas le droit d'abandonner ces terres de façon unilatérale. Leurs obligations étaient les plus variées et les plus lourdes de toutes les catégories de serfs, en particulier la corvée de transport (sa tshig) des fonctionnaires traversant le domaine[71].

Les terres détenues par les dud chung ne l'étaient pas à titre permanent et n'étaient pas très étendues. Ils n'avaient pas à payer de lourdes redevances en nature ou en espèces et n'étaient pas soumis à la corvée de transport due aux fonctionnaires. Les dud chung se répartissaient en deux classes :

  • d'une part, ceux qui étaient physiquement attachés à un domaine (presque toujours monastique ou noble) dont la réserve[note 4] devait être cultivée par le biais des corvées ;
  • d'autre part, ceux qui, grâce au statut particulier dit de « bail humain », n'étaient plus attachés à un domaine et pouvaient se déplacer à leur guise et travailler à ce qu'ils voulaient et pour qui ils voulaient ; en contrepartie, ils étaient tenus de verser au propriétaire de leur domaine d'origine une redevance annuelle en espèces, et souvent de lui fournir également quelques journées de corvée[72].

Enfin, certains serfs étaient choisis dès l'enfance pour servir, leur vie durant, de soldats, de moines, de nonnes ou de serviteurs dans le cadre de leurs obligations de corvée[73].

L'Office de l'agriculture du 13e dalaï-lama

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Pendant la première décennie du XXe siècle, le 13e dalaï-lama, sur les recommandations, dit-on, du représentant de la Chine impériale, créa un nouvel office gouvernemental et promulgua de nouvelles lois qui changèrent radicalement la structure du servage. La fonction de l'« Office de l'agriculture » ainsi qu'on l'appela, était de trouver de nouveaux bras et de nouvelles terres. Avec le temps, le nombre de serfs qui s'étaient enfuis et ne voulaient pas demander de « bail humain » où n'étaient pas en mesure d'en obtenir un, était devenu considérable. Parallèlement, en raison du sous-peuplement, nombre d'anciennes tenures restaient inoccupées. L'Office fut autorisé à délivrer une franchise à tout ancien serf en fuite depuis trois ans. Ces individus sans seigneur devinrent de ce fait les serfs de l'Office lui-même. Pour la première fois, un serf avait la possibilité, sur le plan juridique, de changer de seigneur et d'éliminer l'attachement à la terre. En contrepartie, le serf devait payer un droit minime de 5 zho pour les hommes et de 2 zho 1/4 pour les femmes. Il y eut foule pour obtenir la franchise et devenir serf de l'Office de l'agriculture. Cependant, la portée de cette innovation devait bientôt être réduite pour ne pas porter préjudice au système de servage. Les serfs bénéficiant de la franchise furent rattachés à des domaines ou à des villages de serfs dépendant du gouvernement et manquant de bras[74].

Beatrice Miller vs. Melvyn Goldstein

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La validité d'application du mot et du concept de servage au Tibet fut contestée par quelques chercheurs, dont Beatrice Miller, qui en débattit avec Melvyn Goldstein dans une série d’articles publiés dans la revue The Tibet Journal de 1986 à 1989[75]. Miller fit valoir qu'un seigneur avait aussi des obligations envers le gouvernement central, et donc que les obligations d'un paysan envers son seigneur n’étaient qu’un exemple des obligations sociales qui étaient échues à tout le monde ; que les obligations dues au seigneur l'étaient collectivement par la famille, et non pas individuellement ; que les obligations d'un paysan n'étaient pas si pénibles car il lui était facile de fuir[76],[77].

Goldstein répondit que la nature des rapports seigneur-gouvernement central était radicalement différente des rapports paysan-seigneur et non pertinente ; que la relation paysan-seigneur ne pouvait pas être contractuelle puisqu'elle était héréditaire et que le serf était privé du droit de rompre cette association même en acceptant de remettre au seigneur son lopin de terre[78] ; que si les obligations de corvée incombaient principalement aux ménages, le statut juridique du serf était lié à sa personne, héréditaire et non annulable ; que s'il était vrai que nombre de serfs s'enfuyaient, cela ne changeait rien au fait que fuir était illégal et punissable, et que c’était un acte de désespoir coupant le serf de ses attaches familiales, sociales et économiques[79],[80],[81].

Quant à la forme d’affranchissement partielle ou « bail humain », Goldstein précise qu'elle libérait seulement temporairement du service quotidien, mais non du service occasionnel, laissé à l'appréciation du seigneur, et qu'elle impliquait le paiement de redevances annuelles nettes fixées par le seigneur et révocables selon sa volonté. C’était donc une forme très faible d’affranchissement[81].

Servage et misérabilisme

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Pour Melvyn Goldstein, employer le concept de servage à propos de l'ancien Tibet n'implique pas l'idée que les seigneurs maltraitaient ou torturaient leurs serfs et que ceux-ci étaient sous-alimentés ou mouraient de faim. Le seigneur avait tout intérêt à ce qu'il y ait assez de bras valides pour cultiver sa réserve, que ses serfs soient en mesure de produire de quoi se nourrir et qu'il n'y ait pas d'interruption dans la production agricole du domaine. Dire qu'une société connaît le servage ne revient pas à dire que les serfs sont dans le dénuement complet[82]. Dans Nomads of Western Tibet: the survival of a way of life, Goldstein et son coauteur Cynthia M. Beall font état de la richesse de nombre des nomades de Pala, sujets ou serfs du panchen-lama dans son domaine ou fief de Lagyab Lhojang dans l'ouest du Tibet : tout en s'acquittant de leurs redevances et de la corvée de transport, certains d'entre eux possédaient des troupeaux de plusieurs milliers de moutons et de chèvres et des centaines de yacks[83].

Fin des domaines

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Selon Melvyn C. Goldstein et Matthew T. Kapstein, l'arrivée des communistes chinois au Tibet en 1951 ne changea rien au départ à la vie monastique ou à la possession de domaines et de paysans (serfs) par les monastères mais, à la suite du soulèvement avorté de 1959, Pékin renonça à sa politique des petits pas au Tibet. Il s'agissait désormais d'abattre la domination politique, économique et idéologique des détenteurs de domaines fonciers, dont les monastères[84].

Le Comité préparatoire à l'établissement de la région autonome du Tibet, devenu, après l'abolition du Kashag le , le nouveau gouvernement tibétain, adopta, sous la direction du 10e panchen-lama, un train de mesures dit « des trois abolitions et des deux réductions », les « abolitions » concernant la rébellion, le travail forcé et la servitude individuelle, et les « réductions » le loyer de la terre et les taux d'intérêt. Les terres de tous les insurgés furent confisquées et les récoltes restituées aux cultivateurs[85]. Goldstein et Kapstein rapportent l'exemple de Drepung, dont un certain nombre de moines avaient défendu le palais d'été à Norbulingka et combattu dans la ville. Drepung fut déclaré monastère insurgé et vit tous ses domaines et silos à grain confisqués sans recevoir de compensations. De même, tous les prêts qu'il avait octroyés et étaient encore en cours furent annulés. Le flot des revenus en nature et en argent se tarit complètement[86]. Les terres appartenant aux propriétaires de serfs qui n'avaient pas participé à la rébellion furent rachetées par l'État pour être ensuite distribuées à leur tour[87].

Analyses de Tom Grunfeld

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Dans son livre The Making of Modern Tibet (1996), l'historien américain Tom Grunfeld affirme que la très grande majorité des gens du Tibet étaient des serfs ou, comme on les appelait alors, des mi-ser. Les serfs étaient « liés » à leur maître. Celui-ci leur octroyait le droit de travailler la terre en échange de redevances et de corvées. Pour entrer dans les ordres ou pour se marier, le serf devait en demander l’autorisation à son maître ; de même pour quitter le domaine et partir en pèlerinage, voir de la famille ou commercer. Le maître donnait son accord seulement après que le serf se soit acquitté de toutes ses obligations[88].

Grunfeld reprend la distinction entre les deux catégories de serfs dépendant des noblesses monastique et laïque : les tre-ba et les du-jung. Catégorie aisée, les tre-ba étaient titulaires, de façon héréditaire, d'une tenure qu'on ne pouvait leur enlever, sauf en cas de refus de leur part de s'acquitter de leurs redevances et leur corvée de transport, de loin les plus lourdes de leurs obligations. Du fait de leur statut, ces serfs avaient leur mot à dire dans les affaires du village et parfois même devenaient chefs de village. Les du-jung n'étaient pas titulaires d'une tenure mais avaient le statut de serf avec ses obligations afférentes (redevances, corvées, etc.). Ils prenaient de la terre en bail ou s'engageaient chez des tre-ba. Une troisième catégorie de serfs était celle formée par ceux qui appartenaient au gouvernement. Ils habitaient dans un village du gouvernement dont ils ne pouvaient s'absenter sans permission[89].

Selon lui, il y avait très peu de mobilité sociale dans l'ancien Tibet et les serfs étaient obligés d'accepter la situation où ils se trouvaient à la naissance. Même enrichi, un serf restait un serf[90]. Il y avait cependant une échappatoire à cette situation : la pratique du « bail humain ». Un serf pouvait aller où il voulait et faire ce qu’il voulait tant qu’il s’acquittait d’une prestation annuelle dont le seigneur et lui-même étaient convenus. Ainsi, dans le cas où le contrat dit « bail humain » était passé entre un seigneur et une serve qui souhaitait épouser le serf d'un autre seigneur et aller habiter sur le domaine de son mari, comme l'obligation féodale se résumait à une somme d'argent annuelle ou à une corvée restant à définir, pour l'accomplissement de laquelle le serf pouvait engager quelqu'un d'autre, ce n'était pas une charge pesante. Mais les seigneurs ne se montraient guère favorables à ce genre d'accord[91].

Il est difficile d’établir des statistiques sur les pourcentages respectifs des trois groupes de serfs (tre-ba, du-jung, serfs du gouvernement). En 1959, le gouvernement chinois donnait la répartition suivante : noblesse 5 %, clergé 15 %, nomades 20 %, serfs 60 % (dont 45 % devant s’acquitter de redevances, 45 % sous « bail humain » et 10 % divers)[6].

Les redevances dues par les serfs l’étaient soit au gouvernement de Lhassa, soit aux monastères, soit aux seigneurs féodaux. Toutefois, les serfs des domaines monastiques n’avaient pas à s’acquitter de redevances aux nobles, ni les serfs des villages gouvernementaux. Les redevances versées annuellement au gouvernement consistaient en tsampa (pour les moines), redevances pour la fête des prières, foin, fleurs (pour la préparation du papier), ustensiles, viande, redevances subsistant de l’année précédente, corvées (réparation de digues, construction de canaux d’irrigation), redevances militaires (soldes et provisions de la troupe). Les redevances dues aux monastères pour le maintien des fonctions religieuses consistaient en beurre, viande, laine, tissus laineux, tsampa. Les monastères en outre avaient le droit de prendre des enfants pour en faire des moines si les vocations étaient insuffisantes[92].

L'existence d'esclaves domestiques est signalée par Grunfeld, qui fait remarquer, au passage, qu'elle est niée avec virulence par les défenseurs de l'ancien régime[93].

Grunfeld s'étonne du fait que malgré les preuves accablantes d'une société fortement stratifiée où un abîme séparait les classes sociales, les auteurs continuent à passer ces preuves sous silence ou cherchent à les justifier en arguant que cette société était bienveillante[94].

Analyses de Katia Buffetrille

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La société tibétaine avant 1959

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La tibétologue Katia Buffetrille[95] indique que la société tibétaine était composée de strates (rig) très hiérarchisées. Outre les religieux, il y avait les laïcs, lesquels présentaient trois strates : « la noblesse, le peuple et la strate inférieure (bouchers, pêcheurs, dépeceurs de cadavres et forgerons ». Trois groupes sociaux seulement pouvaient être propriétaires : l'État, le clergé et la noblesse (les « Trois Grands Seigneurs » de la propagande chinoise) mais, en fin de compte, on considérait que la terre appartenait au souverain, c'est-à-dire au dalaï-lama dans la région administrée par Lhassa[96].

Pour Katia Buffetrille, que l'on emploie le terme de « serfs » ou ceux de « gens du commun » ou de « sujets », il est primordial de savoir ce que recouvrent exactement ces termes. Les paysans étaient, de fait, héréditairement liés à la terre et travaillaient gratuitement pour un seigneur ou un monastère qui leur fournissait en échange une terre dont, il est vrai, ils n'étaient pas propriétaires. Ils devaient des taxes qui étaient versées en argent, en nature mais la plupart étaient sous forme de travail, essentiellement le travail de la terre. Lorsqu'un domaine changeait de propriétaire, le serf restait attaché à la terre, et s'il s'enfuyait, son maître avait le droit de le faire rechercher et de le punir. Les modalités régissant ces obligations réciproques étaient consignées dans des actes écrits.

Il existait chez les paysans (ou serfs) deux grands ensembles à savoir les « payeurs de taxes » (trelpa) et les « petits foyers » (düchung). Les « payeurs de taxes » travaillaient et bénéficiaient du fruit de leur travail sur des terres qu'on ne pouvait pas leur retirer tant qu'ils effectuaient leurs corvées et payaient leurs taxes. Ils pouvaient même sous-louer ces terres. Les membres des « petits foyers », tout en étant attachés à un seigneur, pouvaient se déplacer comme ils le souhaitaient, ils pouvaient travailler pour le donneur d'ordres de leur choix. Par contre, ils devaient payer une somme annuelle, fixée à l'avance, à leur seigneur[62].

Les nomades avaient les mêmes droits et devoirs que les paysans. Ils devaient aussi des taxes et des corvées au seigneur. Ils ne devaient pas non plus quitter le domaine. Mais comme les paysans, certains nomades étaient riches avec des troupeaux importants et des serviteurs travaillant dans la maisonnée[97]. Ainsi dans le Tibet central, au nord du bourg de Nyêmo (Xian de Nyêmo), vivent toujours les nomades Lhalu qui était les sujets de Lhalu Tsewang Dorje, ils étaient « libres de leurs mouvements une fois leur travail accompli »[98].

Le système des taxes

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Les taxes pouvaient être réglées en nature avec des grains, des tissus, des produits du lait, en argent ou par l’intermédiaire d'un travail. Il était parfois demandé aux paysans d'intervenir dans le village pour réparer une route ou une digue. Certains villageois étaient de corvée de bois pour le seigneur ou devaient repeindre le monastère local. Lorsque des jeunes enfants étaient recrutés pour la troupe de danse du dalaï-lama alors la famille était exemptée de taxes[99].

Katia Buffetrille précise que les taxes et les corvées étaient redevables par les familles et non par les individus. Ainsi il était possible de partir en pèlerinage pourvu que le reste de la famille s'acquitte des charges dues<[62]. L'écrivain Gilles Van Grasdorff, précise que « ces taxes ou corvées n'étaient pas très élevés. [...] Le paysan avait également le droit de louer, d'hypothéquer son lot. Mais cette situation était rare »[100].

Esclavage

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Katia Buffetrille reconnaît qu'une forme d'esclavage se pratiquait couramment dans les régions limitrophes orientales et méridionales durant la première moitié du XXe siècle : « [elle] consistait essentiellement pour les Tibétains à maintenir en esclavage des membres des tribus voisines »[101].

Organisation de nouvelles classes sociales

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Katia Buffetrille indique que les autorités chinoises organisèrent la nouvelle société, après l'abolition de l'ancien système, avec de nouvelles classes sociales. Sur le plan économique, les familles présentant plus de 50 % de revenus après déduction des charges courantes sont alors classées comme « propriétaires de serfs », celles qui conservaient entre 45 % et 50 % sont des « agents de propriétaires de serfs », entre 35 % et 45 % ce sont les « fermiers riches », de 25 % à 35 % ce sont les « fermiers de classe moyenne ». Le restant de la population tibétaine appartient à la classe pauvre. Sur le plan politique, les « agents de propriétaires de serfs » comprenaient les militaires au-dessus des chefs de section de 25 soldats (zhelngo), les moines au-dessus de préfet de discipline et les représentants des propriétaires fonciers[102]. Deux groupes sont créés : les « oppresseurs » et leurs descendants, les « opprimés » et leur descendants. Ces derniers accèdent alors « en haut de l'échelle sociale » et bénéficient d'avantages importants de par leur appartenance à une nouvelle classe privilégiée[62].

Analyses de Robert Barnett

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Le tibétologue Robert Barnett[103] indique que de nombreux chercheurs réfutent l'analogie entre les conditions du miser tibétain et du serf européen[104]. Par exemple, les misers pouvaient réduire les « obligations envers leur seigneur » en remboursant une partie de leurs dettes, ils pouvaient ainsi changer de domicile. Robert Barnett précise que « la force de l'argument chinois » se situe dans « le sous-entendu que le servage et avec lui le féodalisme, sont inséparables de l'excès de mauvais traitements ». Or le lien entre les mauvais traitements et la conditions des paysans n'a pas été démontré, sauf par les chercheurs proches des autorités chinoises[105].

Pour Barnett certains fermiers qui louaient les terres aux monastères en « étaient de facto devenus propriétaires, nul ne pouvait leur en retirer la jouissance ou en modifier la taille tant qu'ils s'acquittaient des taxes et des corvées ». Le fils héritait des terres au décès du père et des documments précisaient les rapports entre les fermiers et les propriétaires juridiques des biens[106].

Robert Barnett considère que si l'on retient l'hypothèse du servage et du féodalisme dans l'ancien Tibet, cela signifie qu'il existe « une relation particulière d'endettement entre paysans et propriétaires ». Cette situation est similaire aux autres organisations de la paysannerie « prémoderne » et c'est aussi le cas d'une partie importante de la Chine à cette époque[105].

Robert Barnett indique que la Chine n'a aucunement prétendu, à l'époque de son invasion ou libération du Tibet, vouloir libérer les Tibétains de l'injustice sociale. Elle a déclaré qu'elle ne faisait que les libérer de l'« impérialisme » (c'est-à-dire des immixions britanniques et américaines). La question de libérer les Tibétains de la féodalité et de l'oppression de classe n'est apparue que vers 1954 dans le Tibet oriental et en 1959 dans le Tibet central[107].

Selon Barnett l'État chinois a besoin de montrer que la grande majorité des Tibétains était opprimée, afin de tenir pour une « libération » l'arrivée des armées chinoises à Lhassa, en 1951. De plus, il lui est nécessaire de présenter cette oppression comme considérable, et la société comme très primitive, afin d'expliquer pourquoi, dans le passé, il n'y a eu guère ou pas de soulèvements au Tibet, et apparemment aucun appel significatif de la paysannerie tibétaine pour une intervention chinoise en sa faveur. La question de l'histoire sociale du Tibet est donc hautement politisée[108]. Pour Robert Barnett, les « érudits tibétains et chinois ne sont pas autorisés à mettre en doute ouvertement le point de vue officiel selon lequel le Tibet était une société féodale oppressive »[109].

Les esclaves domestiques

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Le tibétologue indo-britannique Charles Alfred Bell, qui de à eut sous sa responsabilité la vallée de Chumbi, située à l'intersection du Sikkim, du Bhoutan et du Tibet, et alors occupée par les Britanniques, rapporte que l'esclavage continuait à y être pratiqué à l'époque tout en ayant fortement décliné les trente années précédentes. Il ne restait qu'une ou deux douzaines d'esclaves, contrairement à la situation du Bhoutan voisin où l'esclavage était plus répandu. Ces esclaves provenaient, pour la plupart, du Tibet du Sud-est et des territoires tribaux entre le Tibet et l'Assam. Certains avaient été enlevés, encore enfants, à leurs parents, ou vendus par ces derniers à des étrangers qui les élevaient pour les garder ou les revendre. Ils étaient nourris, habillés par leur maître à l'instar de serviteurs, mais non rémunérés. Bell rapporte avoir vu deux esclaves provenant de ces territoires tribaux. Ravis à leurs parents à l'âge de cinq ans, ils avaient été vendus à Lhassa pour environ sept livres chacun. Bell note également que l'esclavage dans la vallée du Chumbi était d'un type très atténué. Si l'esclave n'était pas bien traité, il lui était facile de fuir et de chercher refuge au Sikkim ou en Inde britannique[110].

L'orientaliste tibétologue Alexandra David-Néel rapporte, en 1953, qu'une sorte d'esclavage assez bénin subsistait encore, dans les années 1950, dans maintes parties du Tibet. Attachés à une famille particulière, les esclaves en constituaient une grande partie de la domesticité. Cet esclavage, qui n'était pas légal, reposait sur la coutume, laquelle, au Tibet, avait force quasiment de loi[111].

Dans son livre The Tibetans, paru en 2006, le spécialiste du bouddhisme Matthew Kapstein écrit que « l'esclavage existait dans le monde tibétain principalement sous la forme de servitude ancillaire »[112]. Dans la région de Tsari, à la frontière du Tibet et de ce qui est aujourd'hui l'état indien de l'Arunachal Pradesh, le terme du cru désignant l'esclave était nyomi, littéralement « marchandise humaine », quoique souvent les individus qui avaient été achetés par des familles fussent désignés par euphémisme sous le vocable de « serviteur » (yogpo). La pratique tibétaine de garder en esclavage des membres des tribus Subansiri était courante dans la première moitié du XXe siècle dans toutes les régions frontières du Sud et de l'Est, de Dzayül au Sikkim. De jeunes filles et de jeunes garçons de ces tribus étaient disponibles comme esclaves. Dans les années 1940 et 1950, l'acquisition d'esclaves se faisait parfois au moyen du troc, contre des instruments rituels tibétains, très appréciés des Subansiri. On préférait comme esclaves les enfants aux adolescents et aux adultes car moins tentés de s'enfuir. L'esclave acheté ne recevait aucun salaire mais vivait en tant que « serviteur » au sein de la famille étendue[113].

La corvée de transport (oula)

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La corvée de transport gouvernementale (ou corvée de poste) dans l'ancien Tibet est abordée par l'anthropologue et journaliste William Montgomery McGovern dans son livre To Lhasa in Disguise, publié en 1924. Le paysan tibétain, à ce qu'il rapporte, est soumis à une forme d'imposition indirecte appelée oula. Chaque famille, en fonction de sa richesse, doit prêter gratuitement à tout dignitaire gouvernemental détenteur du permis ad hoc, un certain nombre d'animaux de monte et de transport pour son usage personnel et celui de ses domestiques lors de leurs déplacements. Les paysans sont tenus également de prévoir le fourrage pour les bêtes, d'accompagner ces dernières et d'en prendre soin, sans compensation financière. Enfin, ils ne doivent pas récriminer devant la perte ou la mort d'un poney ou d'une mule (souvent maltraités par les serviteurs). Et McGovern de préciser que l'oula n'est guère prisée de la population[114]. Quand, en , le dalaï-lama et sa cour se réfugièrent à Yatoung dans la vallée de Chumbi, à la frontière du Sikkim, les paysans de la ville et des environs, non sans parfois quelques récriminations durent nourrir gratis, plusieurs mois durant, le pontife, sa cour et son troupeau de mules[115].

L'origine mongole du terme oula s'explique par le fait que la corvée de transport aurait été instaurée au Tibet sous l'empire mongol et sous la dynastie Yuan : elle fut d'abord un service postal servant aux Mongols à envoyer des messages d'un bout à l'autre de leur empire. Parfois, les messages étaient acheminés par des courriers qui avaient le droit d'exiger logement, nourriture et transport dans les villages traversés. D'autres fois, c'est aux villageois eux-mêmes qu'il incombait de transmettre les messages. Les autorités tibétaines et chinoises ultérieures héritèrent de ce système mais celui-ci s'altéra par la multiplication tant des personnes en mesure d'en exiger la prestation que des prestations elles-mêmes[116].

Seigneurs laïcs et ecclésiastiques pouvaient, eux aussi, exiger de leurs serfs la corvée de transport[117]. Wim Van Spengen, dans son livre Tibetan Border Worlds, paru en 2013, souligne le fait que les nombreux monastères qui faisaient du commerce et avaient des agents dans les villes frontière du Tibet, imposaient la corvée de transport aux populations se trouvant sur les itinéraires commerciaux[118].

Le système de la corvée s'appliquait non seulement au transport des notables mais aussi à la construction et à la réparation de routes et de bâtiments au bénéfice du gouvernement. C'est ce que rapporte Alexandra David-Néel en 1953 dans Le vieux Tibet face à la Chine nouvelle, en évoquant les corvées auxquelles étaient soumis tous les paysans du Tibet. Les villageois ne recevaient en échange ni salaire ni nourriture[119].

Historiographie chinoise

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Des chercheurs chinois se sont penchés sur les questions du servage et de l'esclavage dans le Tibet des dalaï-lamas, notamment les sociologues Rong Ma, Li Sha et Hui Jin, l'historien Qabai Cedain Puncog et les auteurs (sous les pseudos Wang Jiawei et Nyima Gyaincain) du livre Le Statut du Tibet de Chine dans l'histoire.

Les serfs et les esclaves

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Selon le sociologue chinois Rong Ma, avant 1959, la société tibétaine se divisait en deux grands groupes, d'une part les abbés et les nobles, d'autre part les mi-ser, répartis en trois sous-groupes :

  • les tre-ba[120], serfs attachés de façon héréditaire au domaine d'un monastère ou d'une famille noble ; outre un lopin personnel, ils travaillaient la terre du seigneur gratuitement et fournissaient divers services (corvées) au seigneur ou au gouvernement ;
  • les du-jung (petits feux)[121], au statut de serfs héréditaires mais qui, moyennant une redevance et la fourniture de corvées à leur seigneur d'origine, pouvaient louer de la terre ou s'embaucher auprès d'un tre-ba ; avec les tre-ba, ils représentent 90 % de la population ;
  • les nangsan[122], domestiques attachés de façon héréditaire à un manoir et ayant le statut d'esclaves (5 % de la population) (leurs enfants devenaient eux aussi des nangsan)[123]. Ils appartenaient au propriétaire d'un domaine et travaillaient gratuitement pour lui. Ce dernier leur fournissait logement, nourriture et vêtements, le plus souvent de façon sommaire. Présents dans un petit nombre de domaines, ils correspondaient, selon Liu Zhong, à une forme ancienne d'exploitation, antérieure à l'apparition du système féodal[124].

Dans le district d'Amdo, dans le nord du Tibet, les familles riches avaient des serviteurs à vie, appelés cheyer, qui travaillaient gratuitement pour elles et étaient dépourvus de toute liberté individuelle. Pour s'absenter, même pour un laps de temps très court, ils devaient demander la permission de leur maître. La majorité de ces cheyer étaient à l'origine des orphelins ou des veuves. Ces serviteurs à vie étaient toutefois différents, par certains côtés, des esclaves de famille : le maître n'avait pas le droit de les céder à un autre. Certains cheyer, techniquement compétents, pouvaient même devenir membres de la famille[125].

Les seigneurs

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Selon le sociologue chinois Li Sha, avant les « réformes démocratiques » de 1959, les trois classes principales de seigneurs – responsables féodaux, aristocrates et moines - jouissaient de la totalité des terres, champs ou pâturages, des friches, des forêts, des montagnes, des rivières, etc. Des quelque trois millions de gram ou hectares de terres cultivées, 30,9 % étaient exploitées par les responsables féodaux, 29,6 % par les aristocrates et 30,5 % par les moines. Il y avait environ 200 seigneurs, et plus de 20 gros propriétaires de serfs, dont 7 ou 8 très gros qui possédaient chacun une douzaine de manoirs et jusqu'à 10 000 gram de terre. Ces seigneuries féodales, qui représentaient à peine 5 % de la population, non seulement possédaient toutes les terres mais avaient la haute main sur le pouvoir politique et tous les leviers pour préserver leurs intérêts de classe tandis que les serfs et les esclaves, qui représentaient 95 % de la population, ne possédaient ni terres ni liberté individuelle[126].

Contrats d'échange, d'acquisition ou de cession de serfs

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Selon l'historien tibétain Qabai Cedain Puncog, l'étude des registres d'état civil des fonctionnaires, des aristocrates, des monastères et du bureau d'administration des affaires agricoles du gouvernement de l'ancien Tibet, révèle que les fonctionnaires, aristocrates et monastères avaient le droit d'échanger leurs serfs. Une fois que les deux parties avaient donné leur consentement, elles pouvaient fixer les conditions d'échange, définies en fonction des biens et des compétences de leurs serfs, puis elles signaient le contrat indiquant clairement combien de serfs étaient échangés de part et d'autre[127].

Un contrat conservé aux Archives de la région autonome du Tibet et provenant du monastère de Drepung, règle l'échange de quatre serves et de leur progéniture de son domaine de Ludo, contre trois serfs et leur progéniture de son domaine de Senggong : « Comme convenu lors des consultations entre les intermédiaires du domaine seigneurial de Senggong et celui du domaine seigneurial de Ludo : Dorje Wangmo, Drolma Lhazon, Butri et Lhazom, quatre domestiques féminines et leur progéniture résidant dans le domaine seigneurial de Ludo, dépendant du monastère de Drepung, contre trois serviteurs : Baico, Losang et Dorje et leur progéniture résidant dans le domaine seigneurial de Senggong du monastère de Drepung »[128].

Un autre acte, daté de 1914, est un contrat de cession, par un propriétaire de serfs, d'une mère et de ses trois filles, à un noble en paiement d'une dette : « Moi, Gykangba, dans l'impossibilité de rembourser les soldes des militaires empruntées au noble Rampa, dispose de la femme Qoizin Drolma et de ses trois filles pour l'acquittement de ma dette. Dès ce jour, ces quatre personnes sont à la disposition de Rampa qui devient leur propriétaire légal. En cas de violation de cet engagement, je suis prêt à accepter de plein gré la sanction selon ce contrat »[128].

Dans un acte écrit en vieux tibétain, conservé aux Archives du Palais culturel des nationalités (référence : MC 1015), un couple de serfs cède un fils et une fille à leur créditeur en remboursement de leurs dettes : « Étant dans l'impossibilité de rembourser l'argent et les grains que nous devons à Nedong Dekhang, nous, Tsewang Rabten et notre épouse, serfs du manoir de Dusong, donnons notre fille Gensong Tonten et notre plus jeune fils Padma Tenzin à Dekhang en remboursement de nos dettes. Les descendants de nos fils et fille seront serfs de Dekhang »[129].

Selon l'écrivain américain Foster Stockwell, qui passa son enfance à Chengdu dans le Sichuan, aussi tard qu'en 1945, un noble de haut rang du nom de Tsemon Norbu Wangyal céda cent serfs à un moine de la région de Drigung au prix seulement de 4 dollars d'argent par serf[130].

Différence entre paysans tibétains et paysans Han

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Selon Rong Ma, à la différence des paysans tibétains, les paysans Han étaient juridiquement libres. Même lorsqu'ils étaient très pauvres et avaient à payer un loyer élevé pour la terre qu'ils prenaient en bail au seigneur, même lorsqu'ils vivaient dans des conditions effroyables, il y avait une différence de taille entre ces derniers et leurs homologues tibétains : s'ils ne louaient pas de terre à un seigneur, ils n'étaient pas tenus de payer quoi que ce soit à ce dernier, et ils étaient libres de s'en aller. Aucun paysan Han ne souhaitait s'installer au Tibet pour se retrouver serf : il n'en existe aucun exemple dans la littérature. L'absence de migration interne d'agriculteurs Han au Tibet explique la grande homogénéité ethnique au Tibet[131].

Serfs en fuite

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Les serfs étaient tenus de ne pas quitter le domaine auquel ils appartenaient. Ceux qui s'enfuyaient pouvaient être repris et punis. Selon Rong Ma, qui cite le tibétologue Lhapa Phuntso, des enquêtes effectuées dans quatre domaines du comté de Taksé indiquent que sur un total de 395 serfs, 44, soit 11 %, avaient pris la fuite de 1940 à 1950. Des archives montrent que de 1949 à 1957 le taux de fuite dans le comté de Medro Gongkar était encore plus élevé (45 %) au sein des familles serves[132].

Même au plus haut niveau de l'élite tibétaine, on ne plaisantait pas avec le délit de fuite. Au mois de , le 13e dalaï-lama en personne donna l'ordre d'arrêter des serfs qui n'avaient pas versé leurs redevances et s'étaient enfuis de leur domaine : « Norbu Drolma et son fils, Gonpo Dargye et son épouse, Agyel et ses deux fils, Bale et son épouse et leur fils, trois membres de la famille Garba, un membre de la famille Phupa, lesdites personnes originaires de la région d'Oserchang de Medro Gongkar, n'ayant pas versé leurs redevances, ont fui leur domaine. Il est interdit à tout propriétaire de domaine, que celui-ci appartienne au gouvernement, à la noblesse ou à un monastère, de les accueillir et de les cacher. Ces personnes, une fois reprises, doivent être retournées à leur seigneur »[133].

Révoltes de serfs (1re moitié du XXe siècle)

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L'ancien Tibet aurait connu à maintes reprises des jacqueries spontanées de serfs contre des responsables du gouvernement tibétain ou des propriétaires de serfs[134]. Selon Wang Jiawei et Nyima Gyaincain :

  • En 1938, des paysans et des éleveurs de la zone des 39 tribus étaient soumis à de lourdes corvées et impositions. 150 foyers de la tribu Gata firent remettre par un des leurs une pétition aux autorités du comté : il fut jeté en prison par le juge. Quelque 40 membres de la tribu cernèrent les bâtiments des autorités locales, étranglèrent le juge et s'emparèrent des armes de 45 soldats. Le gouvernement envoya des renforts, qui se livrèrent à une répression sanglante[135].
  • En 1926-1928, des habitants du comté de Bome livrèrent bataille contre les taxes exorbitantes imposées par le Kashag : ce fut la plus grande jacquerie contre le gouvernement en un siècle. Le prince Gelang réunit 300 personnes pour attaquer nuitamment le campement de l'armée tibétaine, tuant 30 officiers et hommes de troupe. Le Kashag envoya des renforts et régla la question par un bain de sang[136].
  • En 1931, Caiba, un noble de Gyadiu dans le Shannan, avait des visées sur Gyamei, région fertile et très peuplée et à l'époque sous la juridiction du Kashag. Au moyen de pots-de-vin, il obtint le droit de contrôler les taxes et la location des terres. Les serfs de Gyamei, furieux d'avoir des taxes à payer à la fois au gouvernement et à Caiba, tuèrent celui-ci à coups de pierres et de gourdins. Lorsque le gouvernement voulut réprimer la révolte, les serfs s'enfuirent. La lutte dura 28 ans. Ce n'est qu'en 1951 que le gouvernement tibétain consentit à ce que Gyamei ne soit plus sous la houlette de Caiba[137].

Si pour les auteurs de The Historical Status of China's Tibet, de tels événements sont trop nombreux pour en dresser une liste exhaustive, par contre Robert Barnett considère qu'il a eu « peu ou pas, de soulèvement au Tibet » et a priori aucun appel des paysans pour une interventions des Chinois en leur faveur[138].

Point de vue du gouvernement de la République populaire de Chine

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Le gouvernement de la République populaire de Chine déclare qu'avant 1959, 95 % de Tibétains vivaient dans un système de servage féodal[139]. Un livre blanc, publié en 2009, affirme qu'avant la « Réforme démocratique », le Tibet abritait 2 676 monastères hébergeant 114 925 moines dont 500 petits et grands bouddhas vivants et autres lamas de haut rang, et plus de 4 000 moines détenant le pouvoir économique. À cette époque, un quart des hommes étaient moines. Les trois grands monastères de Drepung, Sera et Ganden accueillaient plus de 16 000 moines et possédaient 321 domaines, 9 800 ha de terre, 450 prés, 110 000 têtes de bétail et 60 000 serfs[140]. La famille du 14e dalaï-lama possédait 27 manoirs, 30 pâturages, et plus de 6 000 serfs[141]. Monastères et nobles disposaient de prisons privées pour leurs serfs et leurs esclaves[142].

Selon le livre Fifty Years of Democratic reform in Tibet publié en 2009 par le Conseil des affaires de l'État de la République populaire de Chine, nombre d'éléments montrent qu'au milieu du XXe siècle le servage féodal était assailli de nombreuses contradictions et agité de crises récurrentes. Les serfs pétitionnaient leurs maîtres pour obtenir l'allègement de leur fardeau, s'enfuyaient des domaines, refusaient de s'acquitter des redevances et des corvées, voire recouraient à la lutte armée[143].

Le site officiel Les droits de l'homme au Tibet, rapporte un dicton populaire tibétain disant que « les serfs n'ont que leur ombre à emporter, et que leur empreinte de pied à laisser »[144]. De même, sur le site officiel de Radio Chine Internationale (CRI online), Wang Gui, un tibétologue âgé de plus de 70 ans, ayant travaillé et vécu au Tibet de 1950 à 1981, cite un proverbe local pour évoquer les conditions de vie avant la Réforme démocratique : « Trois couteaux frappaient les serfs : les corvées, les impôts et les intérêts des prêts, trop élevés. Les paysans d'alors avaient alors trois options : l'exode, l'esclavage ou la mendicité »[145]. Un troisième dicton, à ce que rapporte le site La Chine aujourd'hui, disait : « Les parents donnent la vie, mais les fonctionnaires possèdent le corps. On ne dispose ni de sa vie ni de son corps »[146].

Point de vue du gouvernement tibétain en exil et du dalaï-lama

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À l'historiographie officielle chinoise, le gouvernement tibétain en exil répond :

« […] Les justifications chinoises n’ont aucun sens. Tout d'abord, le droit international n'accepte pas ce type de justification. Aucun pays n’est autorisé à en envahir, occuper, annexer et coloniser un autre simplement parce que sa structure sociale ne lui plaît pas. Deuxièmement, la RPC a apporté plus de souffrance au nom de la libération. Troisièmement, des réformes nécessaires étaient engagées et les Tibétains sont tout à fait capables de s'en charger »[147],[148].

Le 14e dalaï-lama écrit dans ses mémoires publiées en 1962 : « ce serait induire le lecteur en erreur de dire que les paysans étaient locataires de leur terre, car ce n'était qu'en apparence que celle-ci appartenait à l'État. En fait, le paysan pouvait léguer sa terre à ses enfants, la louer à d'autres, l'hypothéquer ou même vendre le droit qu'il avait de la cultiver, droit dont il n'usait guère, d'ailleurs, car son premier devoir était de la conserver intacte pour ses descendants »[149].

En 2007, le dalaï-lama déclare à Thomas Laird que « le système de réincarnation comportait un aspect négatif : dans les richesses transmises au nom de l'institution, il y avait les serfs détenus par les monastères, ce qui entraînait bien des souffrances »[9].

Aspects historiques

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Abolition du servage en 1907 dans le Kham oriental

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Dès 1907, des mesures d'abolition du servage et de remplacement par du travail rémunéré sont décidées dans le Kham oriental, sous administration chinoise de la dynastie Qing, par Zhao Erfeng, vice-roi par intérim de la province du Sichuan[150]. Cependant, cet affranchissement des populations n'aboutit finalement qu'à un transfert des obligations, la corvée due aux seigneurs locaux étant dans les faits remplacée par une corvée due à l'administration locale : ils deviennent en quelque sorte des serfs d'État[151].

Un statut inchangé (1951-1959) ?

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Entre 1951 et 1959, selon Hu Yinan et Wu Jiao, le statut des serfs dans le territoire administré par le gouvernement tibétain (Tibet central et Kham occidental), est resté inchangé d'un commun accord entre ce gouvernement et les responsables chinois en vertu de l'Accord en 17 points sur la libération pacifique du Tibet[152]. L'article 11 de l'accord stipule que sur la question des diverses réformes à apporter au Tibet, les autorités centrales n'exerceront aucune contrainte et le gouvernement local du Tibet exécutera ces réformes de son plein gré et, lorsque le peuple exigera des réformes, la question sera réglée en prenant l'avis des instances dirigeantes du Tibet[153].

Cependant, selon l'historien Tsering Shakya, au début des années 1950, certains Tibétains introduisirent eux-mêmes des réformes dans leurs domaines. Ngabo fut le premier, libérant de son manoir 2 500 mi ser appartenant à son domaine. Nombre de ses sujets reçurent des compensations de ses propres fonds. Le frère du 14e dalaï-lama, Gyalo Dhondup démembra aussi les domaines de la famille du dalaï-lama. Ces changements, eu égard à la forte opposition notamment des monastères, dont les sources de revenus dépendaient de leurs domaines, indiquent que les Tibétains sentaient que des réformes étaient nécessaires[154].

Le Comité des réformes (années 1950)

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Le dalaï-lama mit en place, dans les années 1950, le Bureau ou Comité des réformes (en tibétain Legchoe Lakhung ou Legjö Leygung), présidé par Ngabo et Surkhang Wangchen Gelek et ayant pour but d'introduire des réformes sociales et terriennes. Le dalaï-lama affirme que le nouveau comité réduisit la corvée de transport puis les dettes héréditaires. Il ajoute que d'autres réformes étaient projetées, par exemple le retour au gouvernement des domaines possédés par les familles fortunées, mais que les Chinois s'y opposèrent[155]. Pour Melvyn Golstein, l'affirmation selon laquelle les Chinois dans les années 1950 auraient empêché le gouvernement tibétain de faire des réformes ne repose sur rien[156].

Le journaliste anglais Johann Hari affirme que le dalaï-lama, durant les quelques années où il dirigea le Tibet « dans une alliance difficile avec les Chinois », aurait établi un système judiciaire indépendant et aboli le système de la dette héréditaire, qui était, expliquait-il, « le fléau de la communauté paysanne et rurale », emprisonnant celle-ci dans un état de servitude vis-à-vis de l'aristocratie[157]. Warren W. Smith Jr. mentionne des réformes restées à l'état de projet, qui prévoyaient la dévolution à l'État des droits de la noblesse à percevoir l'impôt et à rendre la justice[158].

Abolition du servage en 1959

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En 1959, après avoir réprimé en mars ce qu'il qualifie de révolte de l'ancienne classe privilégiée de l'ancien Tibet (pour l'universitaire chinois Chen Jian, ce soulèvement est une « révolte populaire anti-chinoise et anti-communiste »[159]), le gouvernement communiste a mis en place au Tibet une série de « réformes démocratiques », ainsi que les appelle l'historiographie chinoise, notamment l'« abolition du servage », ou « émancipation des serfs et des esclaves »[160],[161].

Approuvées par le gouvernement central en , ces réformes se dérouleront en deux étapes selon une résolution adoptée par le Comité préparatoire à l'établissement de la Région autonome du Tibet le à Lhassa après avoir été votée à l'Assemblée nationale populaire à Pékin le [162],[163],[164] :

  • la première se focalisera sur la suppression de la corvée obligatoire (ulag) et de l'esclavage, ainsi que la réduction des loyers et des intérêts des prêts ;
  • la deuxième se concentrera sur la distribution des terres.

Les propriétaires de grands domaines n'ayant pas participé à la révolte virent leurs biens rachetés par l'État, les autres propriétaires furent expropriés[165]. Les domaines furent ensuite redistribués aux paysans sans terre.

Citant Melvin Goldstein, le tibétologue Sam van Schaik rapporte que l'abolition de la main-d'œuvre servile se traduisit par l'effondrement brutal de l'institution monastique. Comme les monastères étaient les plus gros propriétaires terriens du Tibet et qu'ils ne pouvaient plus entretenir leurs armées de moines et de nonnes sans les redevances imposées aux communautés locales, ils furent contraints, pour la plupart, de fermer leurs portes. Ainsi prit fin la domination exercée par les lamas depuis des siècles[166].

La réforme agraire au Tibet ne se fit pas sans difficultés : le sinologue britannique Bill Brugger fait état du fait que les paysans tibétains, soucieux de protéger leur karma, avaient le sentiment que le prix de la mise à bas d'un seigneur ou d'un abbé allait se traduire par une réincarnation sous une forme de vie inférieure[167].

Les « serfs émancipés »

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Plusieurs décennies après les réformes démocratiques, il existe encore au Tibet, ainsi que le signale Wang Lixiong, nombre de gens connus sous la désignation de « serfs émancipés » : alors qu'ils étaient en bas de l'échelle sociale du Tibet féodal avant 1959, ils ont pu obtenir, grâce au parti communiste, des terres et une amélioration importante de leur statut social[168]. À la suite des réformes démocratiques, un grand nombre d'anciens serfs, et leurs enfants, occupent ou ont occupé des postes de premier plan aux différents niveaux du gouvernement régional du Tibet[169]. C'est le cas de l'homme politique Lekchog, né en 1944 dans une famille de serfs de la région de Gyantsé, et qui fut président du gouvernement régional de 1998 à 2003[170], ou encore de Raidi, né en 1938, qui, enfant, servit de domestique à des chefs tribaux et à un Bouddha vivant et devint plus tard président du Comité permanent de l'Assemblée populaire de la région autonome du Tibet[171].

La Journée d'émancipation des serfs

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En 2009, les législateurs tibétains désignèrent le comme date officielle de la journée d'émancipation des serfs dans la région autonome du Tibet[172].

Pour sa part, le gouvernement tibétain en exil considère l'anniversaire du comme une « tragédie », affirmant que 87 000 Tibétains étaient décédés lors de la rébellion de 1959[173].

Controverse autour de l'usage politique du servage au Tibet

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La controverse sur le sujet du servage au Tibet repose sur une question de terminologie dans un débat politique entre la République populaire de Chine et le Gouvernement tibétain en exil et dans un débat universitaire sur la notion même de servage dans le cadre de l'ancien Tibet. D'un côté, la partie chinoise cherche à convaincre l'opinion internationale que le Tibet appartient historiquement à la Chine, et que les affaires du Tibet sont des questions internes à la RPC. De l'autre côté, les Tibétains cherchent à internationaliser leur cause, en partie en cherchant à convaincre l'opinion internationale que le Tibet était indépendant de l'empire chinois[174].

Outre la volonté de chasser les impérialistes du Tibet, l'existence d'un « servage féodal » est l'un des arguments principaux de la République populaire de Chine pour justifier sa prise de contrôle du Tibet :

« …se débarrasser de l'agression des impérialistes et briser le joug du système de servage féodal étaient devenus une nécessité historique du progrès social au Tibet et le désir ardent du peuple tibétain. La fondation de la République populaire de Chine en 1949 apporta un espoir aux Tibétains plongés dans un abîme de souffrance. Conformément à la règle du développement historique et en procédant dans tous les cas dans l'intérêt des Tibétains, le gouvernement populaire central concourut activement à la Libération pacifique du Tibet et adopta de grandes résolutions et d'importantes mesures comme la réforme démocratique, l'application de l'autonomie régionale des minorités ethniques, la mise en place du processus de modernisation sur une grande envergure, ainsi que la réforme et l'ouverture, etc. pour changer radicalement le destin du Tibet et stimuler énergiquement le développement de la société tibétaine. La Libération pacifique a ouvert la grande porte à la modernisation du Tibet »[175].

Le tibétologue Alex McKay, pour sa part, fait remarquer que les enregistrements de l'agent commercial britannique à Gyantsé en 1933, Meredith Worth, évoquent une image du Tibet plus proche de celle présentée par les sources communistes chinoises que celle proposée par les sources britanniques. Interrogé en 1980, Worth déclarait : « J'ai souvenir de nombreuses réceptions joyeuses au Fort [de Gyantsé] et dans les résidences des familles riches, de la domination et de la brutalité des lamas et des responsables envers la population serve et de l'omniprésence des maladies vénériennes... Ce fut donc pour moi un soulagement que de lire récemment, dans le livre de Han Suyin, Lhassa the Open City, que cet état de choses n'est plus »[176].

Thomas Laird note que des spécialistes débattent de la validité d'application du terme « serf » au Tibet et sont confrontés à un manque de données[177]. À la suite de A. Tom Grunfeld, Thomas Laird conteste le pourcentage de 95 % de serf allégué par les autorités chinoises. Il estime ce pourcentage à 60 %. Soit 30 % de la population pour le nombre de paysans jouissant de terres et s'acquittant de redevances en nature et de corvées dues au gouvernement, à un monastère ou à des nobles et également à 30 % le taux de serfs sans terres mais inféodés à une famille aristocratique, à un monastère ou au gouvernement[8].

Notes et références

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  1. a et b La convention de 1926 définit l'esclavage ainsi : « L'esclavage est l'état ou la condition d'un individu sur lequel s'exercent les attributs du droit de propriété ou certains d'entre eux ».
  2. Adoptée en 1956 en complément à la « Convention relative à l'esclavage » de 1926, la « Convention supplémentaire relative à l'abolition de l'esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l'esclavage » définit ainsi le servage : « Le servage, c'est-à-dire la condition de quiconque est tenu par la loi, la coutume ou un accord, de vivre et de travailler sur une terre appartenant à une autre personne et de fournir à cette autre personne, contre rémunération ou gratuitement, certains services déterminés, sans pouvoir changer sa condition ».
  3. « Attaché au domaine » – en anglais tied to ou bound to the domain – signifie que le serf ne peut pas unilatéralement et juridiquement quitter le domaine, cf (en) Melvyn C. Goldstein, Electrogenesis and Resource Competition among Tibetan Refugees: A New face to the Indo-Tibetan Interface, in James F. Fisher (ed.), Himalayan Anthropology: The Indo-Tibetan Interface, Walter de Gruyter, 1978, 567 p. : « Under the system the serfs were tied to the estate (ie. they could not unilaterally and legally leave the estate). »
  4. La « réserve » est le nom donné à la partie du domaine foncier que le seigneur ne concède pas à des tenanciers et qu'il exploite directement à son profit. Au Tibet, selon Melvyn Goldstein, la réserve seigneuriale représentait entre la moitié et les trois quarts des terres arables du domaine ; toute sa production revenait au seigneur, les terres restantes servant aux serfs pour obtenir leur propre subsistance.

Références

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  1. (en) Melvyn C. Goldstein, The Revival of Monastic Life in Drepung Monastery, pp. 15-52 de Melvyn C. Goldstein, Matthew T. Kapstein (eds), Buddhism in Contemporary Tibet: Religious Revival and Cultural Identity, Motilal Banarsidass Publisher, 1999, 207 p., pp. 21-22 : « Drepung, for example, owned 151 agricultural estates and 540 pastoral areas, each of which had a population of hereditarily nound peasant families who worked the monastery's (or college's) land without wages as a corvée obligation. »
  2. a et b Goldstein 1971 : « With the exception of a handful of aristocrats, all laymen in Tibet were serfs hereditarily linked by ascription to estates and lords. [...] Demographically, with the exception of approximately 250-300 aristocratic families, the remainder of the lay population were serfs. »
  3. a et b Goldstein 2009.
  4. Florence Perret, « La répression est très féroce », sur le site helvétique « 24 heures » (entretien avec Katia Buffetrille), 25 mars 2008.
  5. a et b Katia Buffetrille, Chine et Tibet, une si longue histoire, Le Monde, 23 mars 2008 : « Le mot "esclave" est parfaitement impropre. Très schématiquement, on peut dire que le Tibet était une société à strates, très hiérarchisée, dans laquelle existait une séparation nette entre religieux et laïcs. Les laïcs étaient divisés en trois strates : la noblesse, le peuple, la strate inférieure (bouchers, pêcheurs...). Trois groupes seulement pouvaient être propriétaires : l'Etat, le clergé et les nobles. Le terme de "serfs", appliqué aux paysans, est contesté par certains tibétologues, qui préfèrent celui de "gens du commun" ou "sujets". En fait, les paysans, la grande majorité du peuple, étaient héréditairement liés à la terre et devaient des taxes qui étaient versées en argent, en nature, mais la plupart étaient sous forme de travail, essentiellement le travail de la terre. En dépit de cette structure qui peut paraître rigide, il y avait en fait une grande flexibilité. [...] Les seigneurs n'avaient aucunement pouvoir de vie et de mort sur eux. Il ne s'agissait pas du tout d'un système idéal, mais il n'avait rien à voir avec de l'esclavage. »
  6. a et b Grunfeld 1996, p. 14.
  7. (en) Li Sha, Contribution of “Abolishment of Serf System” in Tibet to Human Rights Campaign - In Memory of the Fiftieth Anniversary of Democratic Reform in Tibet, in Asian Culture and History, vol. 1, No 2, July 2009 : « those serfs and slaves who accounted for 95 % of the population had no land or personal freedom »
  8. a et b Laird 2006, p. 318 : « Grunfeld gives some credence to Chinese claims, made in 1959, that 60 percent of the population were serfs, not 95 percent, as the Chinese widely claim today. But when we look at the number, we find that half of the 60 percent were landowning peasants who paid taxes in labor and in kind to the government, a monastery, or nobles. That leaves only 30 percent who might be classified as landless serfs, indentured to aristocratic families, a monastery, or the government. »
  9. a b et c Laird 2006, p. 97 : « "Now with the reincarnation system, one aspect is negative," he continued. "Wealth was being passed down in the name of the institution, and this included serfs who were held by the monastery, so there was a lot of suffering there. There is no doubt about this. »
  10. (en) Thomas Laird, Into Tibet: The Cia's First Atomic Spy and His Secret Expedition to Lhasa, p. 324 : no fact about Tibet is more colored by political motivations of modern observers than a discussion about serfdom in Tibet.
  11. Smith 2009, p. 144 : « there can be only black and white in China’s portrayal of Tibet (…) any ambiguity about the nature of Tibet’s former social system might allow political issues to emerge ».
  12. (en) Warren W. Smith Jr., “Serf Emancipation Day” and China’s New Offensive on Tibet, The Rangzen Alliance, Blogs, 13 mars 2009 : « The class theme of China’s justifications for its rule over Tibet has become the most fundamental of its arguments. »
  13. (en) John Powers, History as Propaganda: Tibetan Exiles versus the People's Republic of China, Oxford University Press, 2004, (ISBN 978-0195174267), p. 163.
  14. Cf. Quelle solution politique pour le Tibet?, rapport présenté par M. Louis de Broissia, sénateur, série Relations interparlementaires France-Tibet, 2006, p. 17 : « Le territoire revendiqué par le gouvernement tibétain en exil depuis 1959 correspond au Pö Chölka Sum, c’est-à-dire au « Tibet des trois provinces » : Ü-Tsang, Kham et Amdo. Ce Grand Tibet a une superficie d’environ 3,8 millions de km2, soit sept fois la France. Il représente donc près de 40 % de la superficie de la Chine dans ses frontières actuelles (9,6 millions de km2) ».
  15. (en) Stephanie Roemer, The Tibetan Government-in-Exile. Politics at large, Routledge, 2008, pp. 8-10 (Definition of the area of Tibet) : « The definition of ethnic Tibet goes beyond these natural frontiers. It represents all those regions that were once entirely, or at least by a majority, of people of Tibetan origin, i.e. geographical Tibet, Bhutan, the eastern and western territories of Nepal and the present northern Indian regions of Ladakh, Lahul, Spitti and Kinnaur, parts of Arunachal Pradesh and Sikkim (Clarke 1997:7-9; Dhondup 1977; Shakya 1982; Samuel 1993:100-12) ».
  16. (en) Margaret Evelyn Miller, « Educational Practices of Tibetan Lama Training »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), B - Definitions of Terms, p. 189 : « Such areas as Sikkim, Ladak, and Tibetan populated areas of adjoining Chinese provinces provide religious training similar or almost identical with Tibet proper. Including this wider area, which is sometimes called ethnological Tibet, makes possible a more complete discussion of the lama training ».
  17. Shakya 1999, p. 481 : « There has been a protracted debate among Social Anthropologists about the exact translation of the Tibetan term 'miser'. Melvyn Goldstein prefers to translate the term as a 'serf' »
  18. Fabienne Jagou, Le 9e Panchen Lama (1883-1937) : enjeu des relations sino-tibétaines, Paris, EFEO, (ISBN 2855396328), p. 317{{commentaire biblio|« Une polémique s'est développée quant à la traduction à donner au terme tibétain miser : serf ou sujet. »
  19. a et b L’histoire du Tibet du XVIIe au XXIe siècle, Compte rendu de la journée de conférences organisée au Sénat le 3 mars 2012
  20. Goldstein 2007, vol. 1, p. xxvii, glossary : « Miser: a term that can refer to a serf or a bound subject as well as a citizen, depending on the context. For example, "miser of a lord" connotes the serfs of the lord, whereas "miser of Tibet" connotes citizens of Tibet ».
  21. (en) Geoffrey Samuel, Civilized shamans: Buddhism in Tibetan societies, 1995, p. 118, : « The generic term for all these people was miser, which Aziz translates as 'commoner' and Goldstein as 'serf. »
  22. « The Discourse of Serfdom in Tibet » (consulté le ), p. 20–22
  23. Diki Tsering, Dalai Lama, My Son : A Mother's Story (Livre numérique Google), Penguin, 2001, 208 pages, chap. 5 (Amdo Society), p. 24-26, p. 25.
  24. (en) G. Ts. Tsybikoff, Lhasa and Central Tibet, Smithsonian (Washington D.C. National Museum) Report for 1903, Government Printing Office, Washington, 1904, pp. 727-746, p. 730 : « The social classes are the nobility, the clergy, and the peasantry. The nobility consists of the descendants of former rulers of separate principalities and descendants of the fathers of dalai Lamas and Panchems, who are invested by the Manchu court with the rank of prince of the fifth degree. The princes, together with the monasteries and their parishes, are large landowners, and the peasants are serfs to them. The central government, or the Dalai Lama, owns, of course, more land and serfs than the classes named. »
  25. (en) Edmund Candler, The Unveiling of Lhasa, Longmans, Green, & Co, 1905, p. 304 : « The country is governed on the feudal system. The monks are the overlords, the peasantry their serfs ».
  26. (en) Percival Landon, The opening of Tibet; an account of Lhasa and the country and people of central Tibet and of the progress of the mission sent there by the English government in the year 1903-4, New York, Double Day and Co, 1905, p. 437 : « throughout the country there are two classes — the great landowners and the priests — which exercise each in its own dominion a despotic power from which there is no appeal. The peasant on an estate is in almost every sense a serf. He is bound to furnish the greater part of his agricultural produce for the use of his landlord, keeping only enough for the bare support of himself and family. He cannot without his lord's permission leave the soil or the country, and he is compelled to furnish free transport and supplies to all official travelers or visitors — Chinese or Tibetan. But in spite of this state of affairs, it need not be supposed that, administratively, the Tibetan peasant is crushed and ground beneath a tyrannical yoke. »
  27. Joëlle Désiré-Marchand, Alexandra David-Néel, vie et voyages : Itinéraires géographiques et spirituels, Arthaud, 704 p., Carte 13 : L'excursion clandestine à Shigatsé, Été 1916, lettre du 7 juillet 1916 (livre numérique).
  28. Alexandra David-Néel, À l'ouest barbare de la vaste Chine, Plon, 1947, 301 p., p. 86.
  29. Propos recueillis en 1992 et publiés dans Goldstein 2009, vol. 2, p. 191-192 : « I was influenced by Gendün Chompel. He gave us advice. At that time, we were saying that the way the Tibetan government was ruling should be reformed. Gendün Chompel especially was saying that the system of people owning other people (tib. dagpo gyab) should be reformed. / Q. What do you mean "people owning people"? / I mean the aristocrats had serfs (tb. miser) and estates, and they owned the people. For example, the serfs of the Tsarong family had to seek permission when they wanted to leave, right ? ... And they did not own the land. So we were saying that the feudal system should be reformed... Gendün Chompel was a monk who had left the monastery, and he was saying monasteries didn't need to have their manorial estates at all. »
  30. (en) Alex C. McKay, "Truth", Perception, and Politics. The British Construction of an Image of Tibet, in Thierry Dodin et Heinz Räther, Imagining Tibet. Perceptions, Projections and Fantasies, Wisdom Publications, 2001, 465 p., p. 74 (ISBN 0861711912 et 9780861711918) :« One (trade agent) recalls "the dominance and brutality of the lamas and officials towards the serf population" ».
  31. (en) Alex McKay, We Want a United Tibet, in The History of Tibet, vol. III, The Modern Period: 1895-1959, the Encounter With Modernity, Routledge, 2003, 737 p., p. 653.
  32. David Macdonald, Cultural heritage of Tibet: a description of a country of contrasts and of its cheerful happy-go-lucky people of hardy nature and curious customs, their religion, ways of living, trade, and social life, Light & Life Publishers, 1978, 267 pages, p. 123 : « Very few of the smaller farmers labour for their own benefit, most of them being the tenants of the great landowners and monasteries who grind the uttermost farthing from their dependents. Hardly any cultivator owns his own land, nor has he any prospect of ever doing so. Serfdom is customary throughout the country. A person born into a family who are serfs of a great house may never break away. Some in desperation do attempt to abscond ».
  33. Heinrich Harrer, Seven Years in Tibet, with a new epilogue by the author. Translated from the German by Richard Graves. With an introduction by Peter Fleming, First Tarcher/Putnam Hardcover Edition, 1997 (ISBN 0-87477-888-3). Détenu dans un camp de prisonniers britannique en Inde, Harrer rêve de gagner le Tibet interdit : « I wanted to get away to reach something, maybe even to reach that forbidden country lying beyond the highest mountains of the world ». Dans ses mémoires, abordant le refus systématique des autorités de délivrer des autorisations aux étrangers souhaitant se rendre dans le pays, il écrit : « The unchangeable policy was to present Tibet as the Forbidden Land ».
  34. (en) Heinrich Harrer, Seven Years in Tibet, E. P. Dutton, 1954 : « He insisted that I should immediately begin to teach him English » et « My young pupil was not yet in a position to travel, but that did not diminish his interest in world geography, which was soon his favorite subject ».
  35. Heinrich Harrer, Sept ans d'aventures au Tibet, Arthaud, 1954.
  36. Heinrich harrer, Seven Years in Tibet, op. cit. : « The estates of the landed gentry are often very large. It sometimes takes a whole day to ride across a property. Many serfs are attached to every estate; they are given a few fields to cultivate for their own profit, but are obliged to spend a certain time working for their landlord. The estate managers, who are often merely trusted servants, boss the serfs like little kings. Their own master lives in Lhasa, where he works for the government and has little time to bother about the property ».
  37. Robert W. Ford, Tibet Rouge. Capturé par l’armée chinoise au Kham, Olizane, 1999 (ISBN 2-88086-241-8), p. 20.
  38. (en) Robert W. Ford, Wind between the Worlds, David McKay Company, Inc., New York, 1957, p. 337 : « Already the oppressive system of requisitioning transport has been abolished and no doubt serfdom will go too. But they are all serfs now » (Tibet Rouge. Capturé par l’armée chinoise au Kham, pp. 287-288).
  39. Goldstein 2007, vol. 1, p. 220-221 : « If we put this agreement into practice, Tibet's economy and political system will change little by little but not the position of Dalai Lama. We feudal lords will lose our serfs, but our livelihood will increase, not decrease. »
  40. (en) Anna Louise Strong, When Serfs Stood Up, New World Press, Peking, 1960.
  41. (en) Anna Louise Strong, When serfs stood up in Tibet, chap. VII, Village East of Lhasa : « The Kumtan manor in which we stood, and the lands and serfs around it, had belonged to Khemey, one of the bigger nobles of Tibet whose family had been in government for generations, and who owned many manors and serfs. (...) Khemey had owned 303 souls in this manor, counting the children. He had twenty-two tsaiba families, forty-five duichun families and eighteen nantsam families. Every year they sowed 2,500 kes (420 acres) of land. Of these about 96 acres were managed by Khemey's steward directly, with the nantsams doing the labor; twenty-two acres were allotted to twenty-two tsaiba families in return for labor, and the remaining three hundred and more acres were rented out to tsaiba and duichuns and paid for by a part of the crop. The official terms for these rentals did not sound onerous, being around one fourth of the crop, but when the serfs finally paid what they owned on seed loans, implements and cattle loans and food loans, all at exorbitant interest, about seventy percent of what they took in went to Khemey, either as rent for land and house, or in payments on debts. All three types of serfs were subject to the lord's orders, to forced labor of various kinds, to flogging for whatever the lord considered misconduct. All had to get permission to marry or to leave the manor for even a short absence. If a lord had a serf tortured or even killed, the lord would not be punished ». »
  42. (en) Stuart et Roma Gelder, The Timely Rain: Travels in New Tibet, Hutchinson, London, 1964, 248 p., p. 113 : « Tsereh Wang Tuei had the tall lithe body of an athlete but where his eyes should have been were two sore holes and one hand was a twisted claw. Without emotion he told us that he was born a serf of Drepung in the village of Peichang, on the edge of the grasslands where we met him. He became a herdsman, looking after sheep and yaks. When he was twenty years old he stole two sheep belonging to a petty official of the monastery, named Gambo. For his crime he was taken before the monastic magistate who orderd that both his eyes should be put out. [...] adding a little private punishment of his own, Gambo instructed the "executioner" to tie up Tsereh's left hand with rope and twist and pull it until parts of two fingers came off. »
  43. Smith 2009 : « They also recognized that "Tibetans were very ready to tell listeners what they think they would like to hear," without knowing that some former serfs with the worst stories of abuse had been encouraged to elaborate their stories and had made careers out of telling their tales to Chinese, Tibetans and foreign visitors ».
  44. Goldstein 2007, vol. 1, p. 12 : « I will use this term [serfs] in the subsequent chapters rather than reportedly using bound peasants or Tibetan terms such as miser, treba, düjung, and nangsen ».
  45. (en) Diki Tsering, Dalai Lama, My Son : A Mother's Story (Livre numérique Google), Penguin, 2001, 208 pages : « in Lhasa the miser (bonded laborers) did all the work, while the masters lived off them. It angered me to see that some families treated their miser with contempt. »
  46. Diki Tsering, op. cit. : « Before he left, Gyalo Thondup made a tour of all our landed property and gave whatever we had in our stores to the miser, telling them that they no longer owed us anything. In front of them he burned all the papers that defined their former status. »
  47. (en) HHDL, Freedom in Exile: The Autobiography of the Dalai Lama of Tibet, Abacus, London, 1991, p. 101 : « The relationship between landlord and serf was much milder in Tibet than in China and conditions for the poor were much less harsh ».
  48. Laird 2006, p. 316 : « "You had earlier ideas to reform government and liberate the serfs?" I Asked. / "That is right, (but) serfs I don't know. This word is too much," the Dalai Lama said abruptly. / "You have used the word serf," I interjected, recalling the time when he secretly watched a serf of the Pala family who had come to lodge a complaint about his treatment with officials of his regent. / "Yes, I use these words today," the Dalai Lama continued, "but at that time we had no particular words. These words became popular only later. »
  49. Jules Sion, Le Tibet méridional et l'expédition anglaise à Lhassa, in Annales de géographie, 1907, vol. 16, No 85, pp. 31-45 : « D'une part, le peuple est misérable, et ne peut acheter beaucoup; resté dans une condition voisine du servage, le paysan entretient par les redevances, les réquisitions, la corvée, un lama par deux habitants mâles, sans compter l'aristocratie laïque. »
  50. Hugues-Jean de Dianous, Le Tibet et ses relations avec la Chine, in Politique étrangère, 27e année, 1962, no 1, p. 38-72, p. 49.
  51. Claire Marquis-Oggier, Jacques Darbellay, Courir pour Dieu. Le bienheureux Maurice Tornay 1910-1949. Martyr au Tibet, Éditions du Grand-Saint-Bernard, 1999, pp. 62 : « Dans la théocratie qu'ils ont instaurée, ils possèdent l'autorité temporelle et spirituelle ; de vastes terrains leur appartiennent ; de plus, ils imposent un régime féodal qui réduit le peuple au servage et même à l'esclavage. »
  52. Claire Marquis-Oggier, Jacques Darbellay, Courir pour Dieu. Le bienheureux Maurice Tornay 1910-1949. Martyr au Tibet, Éditions du Grand-Saint-Bernard, 1999, pp. 88 et 93 : « En remontant assez haut la vallée de Kionglong, on aperçoit la lamaserie de Karmda [...] - leur chef ou Bouddha-Vivant Gun-Akio. [...] - « les tributaires veulent reprendre gratuitement ce que leurs prédécesseurs ont vendu très cher » [...] en récupérant les terres, il [Gun-Akio] espère asservir à nouveau leurs occupants et ainsi repousser la menace sociale que l'Église lui inflige en luttant précisément contre le servage. La possession ou non des terres représente pour l'habitant un statut très différent. Comme elles appartiennent presque toutes aux lamaseries, donc aux chefs religieux et politiques et à de rares privilégiés, il était important pour l'ancienne mission d'acquérir des champs qui devenaient sa propriété et sur lesquels elle pouvait établir ses fermiers chrétiens, les délivrant des redevances féodales aux lamaseries. »
  53. Diki Tsering, Dalai Lama, My Son : A Mother's Story, Penguin Books India, 2000, non paginé : « Duntse was our own property. On this land we had about three hundred miser families » ; « The miser and peasants along the way... » ; « It angered me to see that some families treated their miser with contempt. Sometimes the miser traveled six or seven days from their land, merely to bring us produce, and my chang-zo and nyerpa would not even speak to them or acknowledge their presence. After a few scoldings from me, this treatment stopped among the members of my household. I insisted that they call the miser by their names, rather than kei and mei (man and woman. » ; dans le lexique : « miser — bonded laborer. »
  54. Pierre Chapoutot, Géopolitique du Tibet: Tibet imaginaire, Tibet réel, site Cafés géographiques, 27 février 2002.
  55. (en) Bill Williams, A Timely Profile Of An Icon, Hartford Courant, 20 avril 2008 : « "The Open Road" reflects Iyer's 30 years of keen observation and extensive reporting about the Tibetan leader. ».
  56. (en) Pico Iyer, The Open Road: The Global Journey of the Fourteenth Dalai Lama, 2008, (ISBN 0-307-26760-1), p. 176 : Les Chemins du Dalaï-Lama, Albin Michel, 2011, (ISBN 9782226219206), p. 183.
  57. Smith 2009, p. 14 : « The Chinese communists defined Tibet as a serf society, which is accurate, but their depiction of the nature of this society was darkened by the need to justify the legitimacy of Chinese rule over Tibet. »
  58. Michel Soutif, Fondements des civilisations de l'Asie, EDP Sciences, 2012, 384 p., p. 142.
  59. Bruno Philip, « Au Tibet, c'est le paradis ! » Le Monde, 3 avril 2009 « Le terme de serf lui-même - qui se dit miser en tibétain - est controversé dans sa traduction, certains spécialistes estimant qu'il faut y voir avant tout la notion de "sujet" lié aux seigneurs féodaux ou aux monastères, même si une partie d'entre eux étaient soumis à l'impôt ou à la corvée. »
  60. Heidi Fjeld, Commoners and nobles: hereditary divisions in Tibet, NIAS Press, 2005, (ISBN 8791114179 et 9788791114175) p. 26 : « Where as Goldstein translates miser as serfs, both the main Chinese source on Tibet's social history (Xizang Renmin Chubanshe 1987) and the informants I interviewed translate miser as 'commoner' or 'citizen', and we might understand 'commoners' as a translation of miser and see 'serf' as a subdivision of miser. »
  61. Katia Buffetrille, Le Monde, 2008, op. cit..
  62. a b c et d Blondeau et Buffetrille 2002, p. 350 et suiv..
  63. Alice Travers, La structure sociale et foncière du Tibet des dalaï-lama [sic] (1642-1959) « Les domaines consistaient donc en terre arable et en pâturages, auxquels un certain nombre de paysans et d’éleveurs étaient liés de façon héréditaire par document écrit. Il existait des différences importantes de statut à l’intérieur de ces populations. Deux catégories principales se dégagent : – Les « payeurs de taxes » (khral pa). – Les « petits locataires » ou « petites maisonnées » (dud chung, littéralement « petite fumée »). Les premiers étaient supérieurs aux seconds en prestige, droits, ressources économiques et souvent en richesse. Les « payeurs de taxes » recevaient en bail de façon héréditaire une quantité de terres cultivables, en échange de quoi ils devaient s’acquitter de divers impôts, le plus souvent en nature et en corvées (comme le transport par exemple), destinés à la fois à leur seigneur et au gouvernement. »
  64. Françoise Aubin rapporte l'analyse de l'universitaire Christopher I. Beckwith Écrits récents sur le Tibet et les Tibétains (1993) page 16/34. « dépendance trop large de récits oraux d’une fiabilité incertaine ; adoption subreptice de points de vue proches de ceux de Pékin, ce qui jette un certain doute sur l’impartialité finale de l’auteur, ainsi le recours à des termes très contestés en Occident, tels que ”serf”, ”servage”, ou encore ”Etat lamaïste” ; et quelques autres critiques factuelles ou théoriques »
  65. Goldstein 2007, vol. 1, (The Estate System).
  66. Goldstein 2007, vol. 1, (The Monastic System and Mass Monasticism), p. 13.
  67. Goldstein 2009, vol. 2, p. 10 : « The peasants' linkage to an estate and lord was transmitted hereditarily by parallel descent: that is, a man's sons became the subjects of the estate/lord to which he belonged, and a woman's daughter s became subjects of the estate/lord to which she belonged (if they were different). »
  68. a et b Goldstein 1989, p. 9-13. : « The defining feature of the Tibetan estate system was that the peasants did not have the right to relinquish their land and seek their fortunes elsewhere. They were not free; they belonged to their estate hereditarily, and if they ran away, the lord had the right to pursue and forcibly return them to the estate.… If an estate changed hands as sometimes happened, its bound peasants remained with the land and became the subjects of the new lord. … In essence, therefore, virtually the entire Tibetan peasantry was hereditarily tied to estates/lords either directly or through “human lease” status. / Monks and nuns, however, were partly an exception to this. Peasants seeking to become monks or nuns required the permission of their lord. This was invariably granted, and so long as the person remained in the monastic order, he/she had no obligations to the estate/lord. … / The Tibetan political economy, therefore, not only provided elites with productive resources but critically guaranteed them a “captive” labor force. From the lords’ vantage point, this was an extremely efficient system that required miniscule expenditures of their money or time. Lords did not have to compete for workers in a labor market, nor did they have to worry about the feeding, clothing, and housing of the workers as in a slavery system. The lord, whether an incarnate lama, a monastery, an aristocrat, or the government itself, needed only to supply a manager or steward to organize the hereditarily bound labor force on its estate. It is this feature of Tibet’s traditional society that has led many, including myself, to classify it as a variant of European manorialism and to refer to these peasants as serfs. I will use this term in the subsequent chapters rather than repeatedly using bound peasants or Tibetan terms such as miser, treba, düjung, and nangsen. »
  69. Goldstein 2009, vol. 2, p. 11-12 : « Lords could also physically move their peasants to other locations in accordance with their own labor requirements. / An example of this occurred in the late 1940s on one of Drepung monastery's estates. Drepung required large quantities of firewood for the daily "mangja" tea it served its ten thousand monks and decided to use its corvée peasant labor force to provide this at no cost to the monastery. It did so by moving twelve young unmarried men from one of the monastery's estates to a noncontiguous mountain area, where they lived in tents and were responsible for cutting and transporting firewood for a ten-year period. These youths were drafted on the basis of their families' obligation to provide corvée labor to the lord, so they received no salary or food during the ten years the monastery kept them there, although their families did receive credit for providing one corvée laborer per day to the estate. The peasant households, of course, did not have the option to refuse to send their son for this task. »
  70. Goldstein 2009 : « Finally, the fact that virtually the entire peasantry was hereditarily bound to an estate and lord did not mean that the peasantry was homegeneous in terms of standard of living and status. [...] Second, significant differences existed within the general category of serf, which included (1) the subcategory “taxpayers”, who held land from their estate and had [page 7] heavy obligations, (2) the subcategory called düjung, who were tied to estates but did not possess taxable arable land and therefore had fewer obligations to the estate, and (3) the subcategory of hereditary servants of the lord, called nangsen. »
  71. (en) Melvyn C. Goldstein, Taxation and the Structure of a Tibetan Village, in Central Asiatic Journal, 15 (1), 1971, pp. 4-5 : « They were characterised by being tied to agricultural land which they held hereditarily. They could not be unilaterally evicted from their land by the lord so long as they fulfilled formalized obligations, but concomitantly, could not unilaterally and permanently leave their land. [...] their tax obligation was the most varied and heaviest and in particular included the difficult corvée carrying tax. In general, tre-ba serfs held relatively large amounts of land but had very large obligations. »
  72. Melvyn C. Goldstein, Taxation and the Structure of a Tibetan Village, op. cit., pp. 4-5 : « on the one hand, they did not hold significant amounts of land and on the other, what they did hold was not as permanent as that of the tre-ba. Furthermore, they were not required to pay heavy taxes either in-kind or money, nor were they liable for the very difficult corvée animal carrying tax. The "tied" type of dü-jung serfs were bound to estates in the same fashion as the tre-ba although [...] they possesed only very small plots of land. They were almost always attached to either monastic or aristocratic estates on which they were the main source of corvée agricultural labor on the estate's (the lord's) demesne fields. The second type of dü-jung is the mi-bo holding one. The key feature of this status was that it did not tie the incumbent to an estate. Mi-bo literally means "human lease", [...]. The serf, in a manner analogous with the leasing of land, leased his freedom of movement from his lord. He was still tied to his lord, and often was liable for intermittent minor corvée obligations. The status was transmitted to same-sex offspring in the same fashion as the other serf statuses. The mi-bo holding serfs, then, were the only one who had territorial mobility. They could go where they wanted and work at whatever and for whomever they desired. »
  73. Goldstein 1989, p. 3 : « Some serfs, moreover, were selected in childhood for lifetime labor obligation as soldiers, monks, nuns or house servants. »
  74. Goldstein 1971, p. 533.
  75. (en) Tibetan History and Social & Political Structure, 2008-07-03.
  76. (en) Beatrice Miller, Letter. A response to Goldstein's "Reexamining Choice, Dependency and Command in the Tibetan Social System", The Tibet Journal, vol. XI, 1986, no 4, p. 79-112, in The Tibet Journal, vol. XII, 1987, no 2, pp. 65-67).
  77. (en) Beatrice Miller, Last Rejoinder to Goldstein on Tibetan Social System, in The Tibet Journal, vol. XIII, 1988, No 3, pp. 64-67.
  78. Goldstein 1987, p. 64 : « While there clearly were rules and norms governing the relationship between a serf and his/her lord, to call these contractual is incorrect. A contractual relationship is one in which both parties freely enter and freely leave. The serf-lord relationship was absolutely not contractual, since it was hereditary and the serf had no legal right to unilaterally leave that relationship, even if he was willing to return the land he controlled to his lord. »
  79. Goldstein 1987, p. 62.
  80. Goldstein 1987, p. 64 : « while it is true that many serfs ran away from their estates, this does not alter the basic fact that it was illegal to do so and that the serfs could be punished by the lord if he or she was caught. Moreover, this Tibetan "fact" is not substantially different from traditional serfdom in Europe where serfs also ran away from abusive lords and estates. »
  81. a et b (en) Melvyn C. Goldstein, Freedom, Servitude and the "Servant-serf" Nyima: a re-rejoinder to Miller, The Tibet Journal, Vol. XIV, 1989, No 2, pp. 56-60.
  82. Goldstein 1987, p. 64-65 : « the use of the concept "serfdom" for Tibet does not imply that lords tortured and otherwise grossly mistreated their serfs. [...] the serf system in Tibet did not result in serfs being relegated to the level of semi - or real starvation. There is no theoretical reason why serfdom should be inexorably linked to such abuses, since the essence of the system was for a lord to ensure that he had enough serf labourers to farm his part of the estate and continue the flow of food and other products without interruptions, and to do so he needed a viable peasant labor force. It was to the lord's advantage to have serf households which could produce their own subsistence and work his land - a starving serf population would be unable to do this. To say a society was characterized by serfdom, does not mean that the serfs were destitute [...]. »
  83. (en) Melvyn C. Goldstein et Cynthia M. Beall, Nomads of Western Tibet: the survival of a way of life, University of California Press, 1990, (ISBN 0520072111 et 9780520072114), 191 p., p. 54 : « The nomads of Pala, therefore, were the subjects of a religious lord, the Panchen Lama, to whom they paid taxes and provided corvee labor services [...]. To be a subject ("serf"), moreover, did not imply poverty. Many of the Panchen lama's subjects in Lagyab Lhojang were wealthy, some owning very large herds of several thousand sheeps and goats and many hundred yaks. »
  84. (en) Melvyn C. Goldstein et Matthew T. Kapstein, The Revival of Monastic Life in Drepung Monastery, University of California Press, , 207 p. (lire en ligne), p.15 : « The arrival of the Chinese communists in Tibet, therefore, did not change monastic life or the monastery's ownership of estates and peasants/serfs during the initial period. The abortive uprising in 1959 ended Beijing's gradualist policy in Tibet, changing overnight all facets of monastic life in Drepung. Beijing now moved to destroy the political, economic and ideological dominance of the estate-holding elite, including the monasteries. »
  85. (en) Bill Brugger, China: Liberation and Transformation 1942-1962, Rowman & Littelfield, 1981, 288 p., p. 199 : « Upon the dalai Lama's departure, the State Council moved, on 28 march, to abolish the traditional government (the Kashag) and transfer power to the Preparatory Committee for the Tibet Autonomous region. [...] Though the titular head of the committee remained the Dalai Lama, its effective head was now to be the Banqen Erdini who celebrated his installation by reciting sutras with two living Buddhas. [...] Following the first session of the new government in April, the Banqen Erdini left for Beijing &, on his return in July, the second session approved a series of measures for 'democratic reform'. The operative slogan was 'sanfan shuangjian' (three abolitions and two reductions). The 'abolitions' here referred to rebellion, forced labour and personal servitude and the 'reductions' to land rent and interest. The land of all rebels was confiscated and the crops handed over to the tillers. The land of other nobles was made subject to rent restrictions and later compulsory purchase. »
  86. Goldstein et Kapstein 1998, p. 115 : « a number of monks from Drepung had defended the Dalai Lama's summer palace and fought in Lhassa. Because of that, Drepung was classified as a rebellious monastery and had all its estates and granaries confiscated without compensation. Similarly, all the loans it had made which were still outstanding were cancelled. [...] The flow of income to Drepung (in kind and cash) totally ceased. »
  87. Le cinquantenaire de la réforme démocratique au Tibet (résolution sur l'abolition de la propriété foncière des propriétaires de serfs du 29 septembre 1959), Pékin, Office d'information du Conseil des Affaires d'État de la République populaire de Chine, , 29 p., p. 17.
  88. Grunfeld 1996, p. 13.
  89. Grunfeld 1996, p. 13-14.
  90. Grunfeld 1996, p. 14-15 : « Historically there was very little class mobility in Tibet, and, for the most part, serfs were forced to accept the position they found themselves in upon birth. Recent statements such as "there is no class system and the mobility from class to class makes any class prejudice impossible" are inaccurate and reflect politics rather than fact. A serf might acquire wealth, but he would always remain a serf. »
  91. Grunfeld 1996, p. 14-15 : « There was, however, one avenue of escape that was possibly unique to Tibet – the practice of “human lease.” It was possible for a serf to arrange with his/her lord to allow the serf to take out a lease on himself/herself. This agreement allowed the serf to go anywhere and do anything as long as he or she continued to fulfill some mutually agreed yearly obligation. For example, a lord of a female serf could grant such a contract if she were marrying a male owned by another lords and wished to move to her husband's estate. Since the feudal obligation in this case consisted of a yearly sum of money or some open-ended corvée service, for which the serf could possibly hire someone, it was not a particularly onerous situation. It is not surprising that the lords did not favor these deals and did not enter into such arrangements willingly. »
  92. Grunfeld 1996, p. 14-15.
  93. Grunfeld 1996, p. 15: « Note should be made of the existence of slavery in Tibet. Although vehemently denied by apologists for the old order, there is evidence that slaves existed – usually as private household servants. »
  94. Grunfeld 1996, p. 15 : « In spite of the overwhelming evidence of a highly stratified society with a huge gulf between the classes, writers continue to ignore this or attempt to justify it on the grounds that it was benevolent. »
  95. Katia Buffetrille est ethnologue et tibétologue, spécialiste de la culture tibétaine. Elle est docteur en ethnologie et ingénieur de recherche de l’EPHE (5e section).
  96. Anne-Marie Blondeau, Katia Buffetrille (eds.), Authenticating Tibet: Answers to China's 100 Questions, University of California Press, 2008, 364 pages, p. 294: « Only three groups could be landlords : the state, the clergy, and the aristocracy (the "Three Great Lords" of Chinese propaganda), but ultimately the land was regarded as belonging to the ruler, and thus to the Dalai Lama in the region under the control of Lhasa. ».
  97. Blondeau et Buffetrille 2002, p. 355 et suiv..
  98. Blondeau et Buffetrille 2002, p. 355.
  99. Blondeau et Buffetrille 2002, p. 354.
  100. Gilles Van Grasdorff, Panchen Lama, otage de Pékin (en collaboration avec Edgar Tag), préface de Louis de Broissia et Claude Huriet, Ramsay, 1998, p. 206.
  101. Katia Buffetrille, compte rendu de Fauconnet-Buzelin Françoise, Les martyrs oubliés du Tibet. Chronique d'une rencontre manquée (1855-1940), Paris, Les éditions du Cerf, 2012, dans Études mongoles et sibériennes, centrasiatiques et tibétaines, No 43-44, 2013, Le pastoralisme en Haute-Asie : la raison nomade dans l'étau des modernisations.
  102. Blondeau et Buffetrille 2002, p. 350.
  103. Robert Barnett est un universitaire, professeur tibétologue, sinologue, et journaliste britannique.
  104. Barnett 2008, p. 81
  105. a et b Blondeau et Buffetrille 2002, p. 134 et suiv..
  106. Jean-Pierre Barou, Sylvie Crossman, Tibet, une autre modernité
  107. Robert Barnett, in Authenticating Tibet: Answers to China's 100s Questions, réponse à la question « What were the conditions regarding human rights in Tibet before democratic reform? » [Questions 12, 13, and 92, 2001], p. 83 : « In any case, China made no claims at the time of its invasion or liberation of Tibet to be freeing Tibetans from social injustice. It declared then only that it was liberating them from "imperialism" (meaning British and U.S. interference). The issue of freeing Tibetan from feudalism appeared in Chinese rhetoric only after around 1954 in easter Tibet and 1959 in Central Tibet. »
  108. (en) Robert Barnett, in Anne-Marie Blondeau, Katia Buffetrille (ss la dir. de), Authenticating Tibet: Answers to China's "One Hundred Questions"', University of California Press, 2008, 364 p., p. 84 : « Chinese references to preliberation conditions in Tibet thus appear to be aimed at creating popular support for Beijing's project in Tibet. These claims have particular resonance among people who share the assumption — based on nineteenth-century Western theories of "social evolution" that are still widely accepted in China — that certain forms of society are "backward" and should be helped to evolve by more "advanced" societies. This form of prejudice converges with some earlier Chinese views and with vulgar Marxist theories that imagine a vanguard movement liberating the oppressed classes or nationalities in a society, whether or not those classes agree that they are oppressed. Moreover, the Chinese have to present that oppression as very extensive, and that society as very primitive, in order to explain why there were no calls by the Tibetan peasantry for Chinese intervention on their behalf. / The question of Tibet's social history is therefore highly politicized, and Chinese claims in this respect are intrinsic to the functioning of the PRC, and not some free act of intellectual exploration. They have accordingly to be treated with caution. From a human rights point of view, the question of whether Tibet was feudal in the past is irrelevant. A more immediate question is why the PRC does not allow open discussion of whether Tibet was feudal or oppressive. Writers and researchers in Tibet face serious repercussions if they do not concur with official positions on issues such as social conditions in Tibet prior to its "liberation," and in such a restrictive climate, the regime's claims on this issue have little credibility. »
  109. Blondeau et Buffetrille 2002, p. 138. Citation : « La question de l'histoire sociale du Tibet est donc hautement politisée, et les proclamations chinoises à ce sujet constituent la partie cruciale d'un "fonctionnalisme" d'État, et non pas un acte d'exploration intellectuelle libre. Elles doivent, par conséquent, être traitées avec prudence. En fait, du point de vue des droits de l'homme, la question la plus immédiate n'est pas de savoir si le Tibet était une société féodale, mais si l'État chinois tolère actuellement des discussions ouvertes sur la féodalité du Tibet. D'évidence, les érudits tibétains et chinois ne sont pas autorisés à mettre en doute ouvertement le point de vue officiel selon lequel le Tibet était une société féodale oppressive. (...) Ces restrictions sur la discussion des questions historiques font qu'il est difficile d'accepter les déclarations du gouvernement chinois et des savants écrivant sur le sujet à l'intérieur des frontières chinoises »
  110. (en) Charles Bell, Tibet Past and Present, Motilal Banarsidass Publ., 1992, 376 pages, pp. xviii et 78-79 : « Slavery was not unknown in the Chumbi Valley during our occupation, but proximity to British India had greatly lessened the numbers of the slaves, so that only a dozen or two remained. Across the frontier in Bhutan there were a great many. / Slaves were sometimes stolen, when small children, from their parents. Or the father and mother being too poor to support their child, would sell it to a man, who paid them sho-ring, 'price of mother's milk', brought up the child and kept it, or sold it, as a slave. These children come mostly from south-eastern Tibet and the territories of the wild tribes who dwell between Tibet and Assam. / Two slaves whom I saw both appeared to have come from this tribal territory. They had been stolen from their parents when five years old, and sold in Lhasa for about seven pounds each. [...] / Slaves received food and clothing from their masters on the same scale as servants, but no pay. [...] / The slavery in the Chumpi valley was of a very mild type. If a slave was not well treated, it was easy for him to escape into Sikkim and British India. »
  111. Alexandra David-Néel, Le vieux Tibet face à la Chine nouvelle, op. cit., p. 985.
  112. (en) Matthew Kapstein, The Tibetans, Wiley, 360 p., p. 183 (cité par Rong Ma in Population and Society in Contemporary Tibet, Hong Kong University Press, 2010, 390 p., p. 145 : « Slavery existed in the Tibetan world as well [...] mostly took the form of household servitude. »
  113. (en) Toni Huber, The Cult of Pure Crystal Mountain: Popular Pilgrimage and Visionary Landscape in Southeast Tibet, Oxford University Press, 1999, 320 p., p. 217 : « The other compensatory measure, this time a less frequent and informal one, was the keeping of domestic slaves as an additional source of household labor. The local term for "slave" was nyomi, literally "human commodity," although often persons who had been purchased by a household were referred to euphemistically as "servants" (yogpo). All known slaves at Tsari were Subansiri tribal peoples and were kept mainly in Lo Mikyimdün and Chikchar. The Tibetan practice of keeping neighboring tribal peoples in slavery was common in the first half of this century throughout the southern and eastern borderlands, from Dzayül to Sikkim.13 [...] Both young tribal girls and boys were available as slaves, and the only record of the exact prices charged by tribal dealers at Tsari comes from earlier this century; "At Migyitün they also sell slaves to the Tibetans who cost 45 sangs (about Rs. 75).16 In the 1940s and 1950s, the local acquisition of tribal slave labor was sometimes done in barter deals for the Tibetan ritual instruments so highly valued by the Subansiri tribes. A young tribal boy could be traded for a Tibetan bell of fine quality with ritual formulae into it.17 Young tribal children were preferable to adolescents and adults, being less likely to try and escape, as they often did at Tsari.38 Once a slave had been completely purchased, he or she received no wages for any work they did but lived as "servants" as part of the extended family in the household. Tribal children could, if they did not run away, eventually becomme fully Tibetanized as a result. »
  114. (en) William Montgomery McGovern, To Lhasa in Disguise : A Secret Expedition Through Mysterious Tibet, Asian Educational Services, 1924, 462 p., en part. p. 287 : « The Tibetan peasant suffers under the system of indirect taxation known as the ula. According to the ula law, every family, in proportion to its wealth, must supply free of charge to every government official armed with a permit a certain number of riding- and transport-animals for the use of himself and his servants while traveling along the roads. Not only do the peasants have to lend their animals to the official free of charge, but they must also supply all the food for the animals in order to feed and attend to them, and finally they must silently bear the loss of their animals should any of them die on the road, as very frequently happens on account of the outrageous usage which the ponies and mules receive at the hands of the officials' servants. Needless to say, this ula system is none too beloved by the populace. »
  115. Alexandra David-Néel, Le vieux Tibet face à la Chine nouvelle, op. cit., p. 980-981 : « Le Dalaï-lama, ses gens et sa caravane s'arrêtèrent donc à Yatung, le dernier village tibétain situé à l'extrême pointe sud du pays, à la frontière du Sikkim et y attendirent les événements. [...] Les paysans de Yatung et des environs commençaient à trouver encombrants le Précieux Protecteur, sa horde et son troupeau de mules qu'ils avaient à nourrir, gratis bien entendu, et des murmures s'élevaient parfois au lieu des formules habituelles de vénération. »
  116. Smith 2009, p. 137-138 : « Ula is a Mongolian word meaning the same as the French word corvée, or conscripted transport. Ula was instituted in Tibet during the Mongol Empire and the Mongol Yuan dynasty (1250-1368 in Tibet, 1274-1368 in China). It began as a postal service by means of which the Mongols sent messages throughout their empire. [...] Sometimes messages were sent by couriers, who had the right to demand lodging, food, and transport from the village through which they passed. Other times, messages had to be passed by villagers themselves. The system was inherited by later Tibetan and Chinese authorities and corrupted by a proliferation of both those who could demand such services and the services they could demand. »
  117. Smith 2009, p. 137-138 : « Feudal lords and monasteries had the right to demand transport from their serfs, but this was not the same as government ula. »
  118. (en) Wim Van Spengen, Tibetan Border Worlds: A Geo-historical Analysis of Trade and Traders, Routledge, 2013, 256 p., p. 138 : « References to monasteries engaged in trade are numerous in the Tibet literature. Monastic trading institutions had agents and stewards in all Tibetan border towns, and relied on the 'free' transport services (ula) forced on populations living near the through-going trade routes. »
  119. Alexandra David-Néel, Le vieux Tibet face à la Chine nouvelle, op. cit., p. 1035 : « Les corvées qui les arrachaient souvent aux travaux des champs aux époques où ceux-ci étaient les plus urgents ne différaient d'ailleurs en rien de celles auxquelles étaient soumis tous les paysans du Tibet. Partout, les travaux à effectuer pour le gouvernement : routes ou bâtiments à construire ou à réparer, incombaient aux villageois qui ne recevaient de ce fait ni salaire ni nourriture ».
  120. On trouve aussi les graphies tral-pa ou khral-pa.
  121. On trouve aussi la graphie dud chung ou duigoin.
  122. Orthographié également nang-gzan.
  123. (en) Rong Ma, Population and Society in Contemporary Tibet, Hong Kong University Press, 2010, 350 p., p. 145 : « The dominant group consisted of senior monks and aristocrats. [...] Serfs (mi ser) made up the second group, which also had several subgroups. Tre-ba cultivated hereditary "duty land" owned by an aristocratic family or a monastery; they were attached to the land. They worked on the land without payment while providing many other services for their lord and the government. Du-jung "had no hereditary land, held hereditary serf status for which they were compelled to pay taxes, perform corvee and other feudal obligations. Du-jung had little power and usually rented land or worked as hired hands for taxpayer serfs (tre-ba) [...]. The third group, Nangsan, was classified as slaves by the Chinese authority and this was also accepted by Western scholars. [...] Their position was hereditary and as a result their children also became Nangsan (Tanzen and Zhang Xiangming, 199Aa:86-88). »
  124. (en) Liu Zhong, On the K'ralpa Manors of Tibet « Copie archivée » (version du sur Internet Archive), Bureau of International Cooperation, Hongkong Macao and Taiwan Academic Affairs Office, Chinese Academy of Social Sciences, 23-5-2003 : « Abstract: Feudal manors in Tibet consisted of the manors that employed dudc'un[1], which constituted the majority, and the manors that employed k'ralpa[2], which also made up a considerable proportion of the manors. There was another kind of manor that employed nanggzan[3]; but, these were few in number and did not represent a major form but only the remnants of manors of the older slavery system. These three kinds of manors differed in their objects and froms of exploitation, and cannot be classified in parallel categories. Products of different historical periods, they reflected the various stages and the imbalance of the development of feudal society in Tibet. The nanggzan manors inherited the external forms of the slave manors and their traditional methods of exploitation with the following peculiarities: the manor's land did not divide into the self-managed land and allotted land; the manor provided the slaves with all their food and clothing; exploitation was not through land rent, but through enslavement; some slaves had their families while others did not, all with very weak or even without any private economy; complete personal occupation served as the foundation of exploitation in these manors[4]. On the other hand. the dudc'un manors evolved on the basis of the disintegration of the slavery system and had the following features: the manor's land was divided into self-managed land and inner-service land; exploitation was carried out through pure labor-rent with yearlong service as the major form; the personal economy of the dudc'un was extremely weak; the manor took part of its income to pay the necessary labor of the dudc'un; the dudc'un had strict, medieval style personal dependence on the lord[5]. Three features show that this kind of manor, though still retaining certain traces and influences of the slavery system, had become a typical form of the feudal manor. The k'ralpa manors came into being rather late, taking shape at the advanced stage of the feudal system. This paper will deal with the basic characteristics of the k'ralpa manor and the historical periods of its emergence and development. »
  125. Zhagyai, Lu Mei, Eleveurs tibétains. Rapport d'enquête sur cinq villages au district d'Amdo dans le nord du Tibet, China Intercontinental Press, 1998, 78 p., p. 19.
  126. (en) Li Sha (Department of Social Sciences, Shenyang University), Contribution of “Abolishment of Serf System” in Tibet to Human Rights Campaign - In Memory of the Fiftieth Anniversary of Democratic Reform in Tibet, in Asian Culture and History, vol. 1, no 2, juillet 2009 : « Before the democratic reform in 1959, the three major seigniors in Tibet, namely, feudal officials, lords and temple monks, occupied all Tibetan land, including arable land, pasture, forests, wasteland, mountain ranges, and rivers, etc. There was almost three million Tibetan Gram (15 Tibetan Gram equals to one hectare) of tilled land, among which feudal regimes occupied 30.9 %, lords occupied 29.6 %, and temples occupied 30.5 %. There were a couple hundred of lords in Tibet, and more than 20 major serfowners, among which 7 or 8 serfowners were the superior, each occupying dozens of manors, and up to 10 thousand Tibetan Gram of land. Those feudal seigniors, who accounted for only about 5 % of the population, not only possessed all land, but controlled the political power, army and all reigning machines for maintaining their class interests, while those serfs and slaves who accounted for 95 % of the population had no land or personal freedom, and were attached to “the three major seigniors”. »
  127. Qabai Cedain Puncog, Aperçu des droits humains au Tibet d'hier et d'aujourd'hui, in Reportage de témoins de l'histoire du Tibet, publié par « China Intercontinental Press », 五洲传播出版社, 2005, 196 p., pp. 60-64, en particulier p. 62.
  128. a et b Cinq contrats retranscrivent fidèlement les souffrances de l'ancien Tibet, Beijing Information, 17 juillet 2008.
  129. (de) Hui Jin, Dokumente und Illustrationem zur Sozialgeschicte Tibets, China Intercontinental Press, 1995, 93 p., p. 69.
  130. (en) Foster Stockwell, Tibet - Myth and Reality, in China Today, April 1998, vol. 47, issue 4 : « As late as 1943, a high-ranking aristocrat named Tsemon Norbu Wangyal sold 100 serfs to a monk in the Drigung area for only four silver dollars per serf. »
  131. (en) Rong Ma, Population and Society in Tibet, Hong Kong University Press, 2010, 350 p., p. 154 : « In comparison, Han farmers were legally free. They might have been very pooor and have to pay a high rent for the land they rented from their landlord. They might have lived in dismal conditions. But if they did not rent land from the landlords, they did not need to pay anything to these landlords and were free to leave. This was the significant difference between the Tibetan serf-estate system and the tenure systems in Han regions. No Han farmer wanted to move to Tibet and turn himself into a serf; no such records have been found in literature. The difference in system[s] was a key factor in keeping Han agricultural in-migrants out of Tibetan areas and maintaining a high degree of ethnic homogeneity in Tibet. »
  132. Rong Ma, Population and Society in Contemporary Tibet, op. cit., p. 147 : « Serfs were forbidden to leave the estates to which they belonged. Serfs who escaped were punished seriously. [...] Surveys in four estates in Takse County suggested that there were 44 serfs who had escaped among the total 395 serfs (11 percent) from 1940 to 1950; records show the escape rate in Medro Gongkar County was even higher (45 percent) among serf households from 1949 to 1957 (Lhapa Phuntso, 1984: 354-355). »
  133. Rong Ma, Population and Society in Contemporary Tibet, op. cit., p. 147 : « Even top leaders considered escaping a serious crime. In December 1922, the 13th Dalai Lama himself issued an order as follows : "Norbu Dolma and her son, Gonpo Dargye and his wife, Agyel and her two sons, Bale and his wife and son, three members of Garba family, one of Phupa family, the above from Oserchang area of Medro Gongkar have escaped from their estates because they did not pay taxes. Any estate lords, regardless belonging to government, aristocracy, or monasteries, are forbidden to accept them or hide them. They must be sent back upon their capture and this order should not be disobeyed (Lhapa Phuntso, 1984: 265) ».
  134. Wang et Gyaincain 1977, p. 260-261 : « In old Tibet, serfs, no longer able to bear the exploitation and oppression, had spontaneously risen to oppose Tibetan government officials and serf owners many times. »
  135. Wang et Gyaincain 1977, p. 260 : « In 1918, peasants and herdsmen in the 39-Tribe area suffered heavy corvee taxes and other excessive burdens. A representative was elected by some 150 households in the Gata Tribe to present a petition to the county government, but instead was locked up by county magistrate. Local people felt it would be better to kill the county magistrate and find a way out, when death would befall them sooner or later under such heavy corvee taxes. Gathering some 40 people, they surrounded the county government, strangled the county magistrate and seized the arms of 45 Tibetan soldiers. The Tibetan government sent heavy troop reinforcements to carry out bloody suppression of the Gata tribe. The resistance of the masses failed in the end. »
  136. Wang et Gyaincain 1977, p. 261 : « Between 1926-28, people in Bome waged a struggle against Gaxag government's exorbitant taxes. This was regarded as the biggest among the anti-Tibet government struggles in the last 100 years. Prince Gelang in Bome, making use of the rebellious spirit of the masses, gathered 300 people at night to attack the encampment of the Tibetan army and killed some 30 officers and men. Later, the Gaxag government sent troops to suppress and inflict a bloodbath on many villages in Bome. In some villages of dozens of households, only three survived. »
  137. Wang et Gyaincain 1977, p. 261 : « In 1931, Caiba, a local noble in Gyadui, Rongzi County, Shannan, took a liking to the fertile and densely populated Gyamei area, under direct jurisdiction of Gaxag, and intended to occupy it as his own. Through bribes, he was given the right to control its taxes and land leasing. Serfs in Gyamei were furious about having to turn over dual taxes to both the Gaxag and Caiba, saying that "one horse can't afford two saddles," and so they beat him to death with stones and cudgels. When the Gaxag government started to suppress this revolt, the serfs there escaped. The struggle lasted 22 years. The Gaxag didn't make the decision that Gyamei was no longer under control of Caiba until Tibet was peacedully liberated in 1951. ».
  138. Blondeau et Buffetrille 2002, p. 137 et suiv..
  139. (en) « White Paper on Tibet's March Forward » (consulté le )
  140. (en) White Paper, 2009 : « Statistics show that before the democratic reform in 1959 Tibet had 2,676 monasteries and 114,925 monks, including 500 senior and junior Living Buddhas and other upper-ranking lamas, and over 4,000 lamas holding substantial economic resources. About one quarter of Tibetan men were monks. The three major monasteries — Drepung, Sera and Ganden — housed a total of more than 16,000 monks, and possessed 321 manors, 147,000mu (15mu equal one hectare, it is locally called ke in Tibet — ed.) of land, 450 pastures, 110,000 head of livestock, and over 60,000 serfs. »
  141. White Paper, 2009 : « Before 1959, the family of the 14th Dalai Lama possessed 27 manors, 30 pastures and over 6,000 serfs. »
  142. White Paper, 2009 : « There were penitentiaries or private jails in monasteries and aristocrats' houses, where instruments of torture were kept and clandestine tribunals held to punish serfs and slaves » ».
  143. (en) A stagnant society on the edge of collapse, in Illustrated White Paper: Fifty Years of Democratic reform in Tibet, Beijing : « Plenty of evidence demonstrated that by the middle of the 20th century the feudal serfdom of theocracy was beset with numerous contradictions and plagued by crises. Serfs petitioned their masters for relief from their burdens, fled their lands, resisted paying rent and corvee labor, and even waged armed struggle »
  144. Le développement économique et les droits du peuple à la vie et au développement, site Les droits de l'homme du Tibet, 328 tibet.cn, 18 février 2009.
  145. Tibet : l'émancipation des serfs, « grande victoire des droits de l'homme », jugent des experts, CRI online, 18 mars 2009.
  146. La vie misérable des serfs au Tibet avant la Libération, La Chine aujourd'hui. Toute l'actualité de Chine que les médias ignorent, 20 février 2010.
  147. (en) « Traditional society and democratic framework for future Tibet », Tibetan Government-in-Exile, (consulté le )
  148. Tibetan Government-in-Exile, Traditional society and democratic framework for future Tibet, op. cit. : « Whatever the case may be, for several reasons the Chinese justifications make no sense. First of all, international law does not accept justifications of this type. No country is allowed to invade, occupy, annex and colonize another country just because its social structure does not please it. Secondly, the PRC is responsible for bringing more suffering in the name of liberation. Thirdly, necessary reforms were initiated and Tibetans are quite capable of doing so. »
  149. 14e dalaï-lama Ma terre et mon peuple, traduit par Yves Massip, Éditeur John Didier, 1963, p. 62.
  150. Laurent Deshayes, Histoire du Tibet, Fayard, 1997 (ISBN 978-2213595023), p. 247 : « En janvier 1907, Zhao présente un plan en quarante-trois articles dont l'ambition est de modifier radicalement le mode de vie des Tibétains et de les siniser. En premier lieu, des mandarins remplaceront les chefs locaux ; dans chaque village, un représentant bilingue sera élu et chaque résidence mandarinale accueillera un conseil mixte sino-tibétain. [...] Zhao ne se contente pas de ces réformes. Il décide d'abolir le servage et de le remplacer par le travail rémunéré ».
  151. Laurent Deshayes, Histoire du Tibet, op. cit., p. 248 : « Une capitation en argent pèsera désormais sur tous, et assurera des revenus à l'administration locale. Les pauvres sont certes affranchis du servage, mais ils vont devenir en quelque sorte des serfs d'État, car ils doivent payer la capitation en corvées ou en fourniture de bêtes de somme pour le service des mandarins ».
  152. (en) Hu Yinan et Wu Jiao, Holiday to mark end of Tibet serfdom, China Daily, 16 janvier 2009 : « Although Tibet was peacefully liberated in 1951, the evil Statu(t)e of old Tibet had still been in place as per the 17-Article Agreement between the Central People's Government and the local government of Tibet ».
  153. « In matters relating to various reforms in Tibet, there will be no compulsion on the part of the central authorities. The local government of Tibet shall carry out reforms of its own accord, and, when the people raise demands for reform, they shall be settled by means of consultation with the leading personnel of Tibet. »
  154. Shakya 1999, p. 116-117.
  155. Laird 2006, p. 317-319 : « when we started the reform committee, the first act was relieving the horse taxes. And then (hereditary) debts. »
  156. Goldstein 2007, vol. 1, chap. « Tibet's First Steps toward Socioeconomic Reform », p. 454-463 : « Although some Tibetans and Westerners have claimed that the Chinese side prevented the government from making reforms in the 1950s, the evidence does not support this. The Chinese side was in favor of this reform process [...]. »
  157. (en) Johann Hari, « Dalai Lama interview », The Independent,‎ (lire en ligne) : « In the brief years he was in charge of Tibet, in uneasy alliance with the Chinese, the Dalai Lama instituted major reforms of his own. He established an independent judiciary and abolished inheritable debt, which was, he explains, "the scourge of the peasant and rural community", trapping them in servitude to the aristocracy ».
  158. Smith 2009, p. 15 : « The Fourteenth Dalai Lama had planned a reform in the 1950s whereby taxing and judiciary power of the nobility would have reverted to the government ».
  159. (en) Chen Jian, The Tibetan Rebellion of 1959 and Chinas Changing Relations with India and the Soviet Union : « On 10 March 1959 an anti-Chinese and anti-Communist popular revolt erupted in Lhasa, the capital of Tibet, which had been under the reign of the Chinese Communist Party (CCP) since 1951. »
  160. Cent questions sur le Tibet, publication du gouvernement chinois, 2001. Extrait de la réponse à la question 13 : « Des gens de l'échelon supérieur du Tibet considéraient comme une faiblesse l'attitude du gouvernement central d'attendre patiemment la réforme du système social du Tibet, et ils déclenchèrent sans vergogne une rébellion armée en 1959. Dans ces circonstances, se conformant au désir de la majorité de la population du Tibet, le gouvernement central réprima rapidement la rébellion et lança une réforme démocratique. Celle-ci abolit le régime féodal du servage, extrêmement corrompu et ténébreux, et la théocratie, et elle permit à un million de serfs et d'esclaves de s'émanciper. Ces derniers n'étaient plus considérés comme les biens individuels des propriétaires de serfs, c'est-à-dire pouvant être vendus, achetés, transférés, échangés et utilisés pour payer une dette, et ils n'étaient plus forcés à travailler pour leurs propriétaires. Ces serfs et ces esclaves, traités depuis longtemps comme des « bœufs et des chevaux doués de la parole », devinrent dès lors des « êtres humains » à part entière. Ils obtinrent la jouissance de la liberté individuelle et devinrent les maîtres de leur propre destin et de la société. C'est une transformation qui fait époque dans l'histoire du Tibet et aussi un grand progrès dans l'histoire de son développement des droits de l'homme. »
  161. Le cinquantenaire de la réforme démocratique au Tibet Office d'information du Conseil des Affaires d'État de la République populaire de Chine, Beijing, mars 2009.
  162. (en) Strong, Anna Louise, When Serfs Stood Up in Tibet, Pékin, New World Press, (lire en ligne), « VIII Lhalu's serfs accuse » : « All "feudal debts" had been outlawed by the resolution passed July 17 by the Preparatory Committee for the Tibet Autonomous Region ».
  163. (en) Tibet fights for freedom: the story of the March 1959 uprising as recorded in documents, despatches [sic], eye-witness accounts and world-wide reactions, ’’Times of India’’, July 21 : « "DEMOCRATIC reforms" in Tibet will be carried out in two stages, according to a resolution adopted at the second plenary session of the Preparatory Committee for the Tibet Autonomous Region. The resolution […] was passed in Lhasa on July 17. »
  164. Robert Barnett, Shirin Akiner, Resistance and reform in Tibet, C. Hurst & Co. Publishers, 1994 : « Mackerras notes that the resolution calling for reforms to take place in Tibet was passed by the National People's Congress in Beijing on April 28, 1959, and formally adopted by the Preparatory Committee on July 17. »
  165. Wang et Gyaincain 1977, chap. IX: The Historical Status of China's Tibet], Chapter IX - Tibetan People Acquired Ultimate Human Rights Through Quelling of Rebellion and Conducting the Democratic Reform, (2) Democratic Reform : « On March 22, 1959, the Central Government [...] stressed that the system of feudal possession must be abolished, but in different ways. The property of serf owners who participated in the rebellion must be confiscated and distributed to peasants; that of those who did not participate could be redeemed. »
  166. (en) Sam van Schaik, Tibet. A History, Yale University Press, 2013, p. 242 : « The most obvious and alarming development was the sudden collapse of the monasteries. The monastic estates were the biggest landowners in Tibet, and it was through the taxation of the local community that they were able to support such vast numbers of monks. Since the land reforms stripped Tibet's monks and nuns of the mens to support themselves, almost all of Tibet's monasteries were now forced to close. In the space of a few years, the Party effectively ended the dominance of monks and monasteries in Tibet. »
  167. (en), Bill Brugger, China: Liberation and Transformation 1942-1962, Rowman & Littlefied, 1981, 288 p., p. 199 : « As in land reform, the aim was to raise the level of class consciousness but here there were many more problems. During the Civil War, work-teams and peasant associations did not have to contend with peasants anxious to protect their karma. The price of overthrowing a Tibetan lord or abbot was felt to be reincarnation as a lower being. »
  168. (en) Wang Lixiong, A True “Middle-Way” Solution to Tibetan Unrest, China Security, Vol. 4, No. 2, Spring 2008, p. 27-37, p. 33 :« Currently in Tibet, there are still a large number of people called “liberated slaves.” Before 1959, they were at the bottom stratum of feudal serfdom. It was precisely the Communist Party that has helped them to get land and raise their economic and political positions. »
  169. (en) He Baogang, The Dalai Lama's Autonomy Proposal : A One-Sided Wish?, in Barry Sautman, June Teufel Dreyer (eds.), Contemporary Tibet: Politics, Development and Society in a Disputed Region, M.E. Sharpe, 2006, 360 p., pp. 67-84, p. 76 : « A large number of ex-serfs and their children have taken up leading posts at various levels of government in Tibet, including chief leaders of the people's congresses, governments, courts, and procuratorates at various levels. »
  170. (en) Hu Yinan et Wu Jiao, Holiday to mark end of Tibet serfdom : « Legqog chair of the regional congress standing committee grew up in a serf family in Tibet autonomous Region Gyantse county ».
  171. (en) Tibet won't forget gift of freedom, The People's Daily, December 22, 2003 : « Redi, [...] was a servant to tribal chiefs and living Buddha when he was a little child ».
  172. (en) Tibet sets 'Serfs Emancipation Day' , China.org.cn, 19-01-2009 : « Tibetan legislators endorsed a bill Monday to designate March 28 as an annual Serfs Emancipation Day, to mark the date on which about 1 million serfs in the region were freed 50 years ago. »
  173. Pascale Nivelle, « L’émancipation des serfs tibétains » fêtée, Libération, 22 janvier 2009 : « Pour le gouvernement tibétain en exil à Dharamsala, le 28 mars est l’anniversaire d’une tragédie. Entre mars et octobre 1959, la répression chinoise avait fait, selon lui, quelque 87 000 morts. Lundi, Sonam Dagpo, secrétaire aux Relations internationales du gouvernement en exil, a protesté à l’annonce de la nouvelle journée d’« émancipation des serfs » : « Si les Tibétains étaient vraiment des esclaves, pourquoi leurs descendants se battent-ils pour la liberté aujourd’hui ? » »
  174. (en) John Powers, History as Propaganda: Tibetan Exiles versus the People's Republic of China, Oxford University Press, 2004, (ISBN 978-0195174267), p. 8. « Chinese authors indicate that their goal is to make their readers understand that Tibet is an integral part of China and that therefore any criticism of China’s actions in Tibet is illegitimate because these are “internal affairs”. Tibetan writers want to internationalize the issue of Tibet’s historical status and indicate that they hope their works will convince readers that Tibet was an independent nation that was brutally and illegally invaded by its imperialist neighbor and that this will spur readers to join the Tibetan cause and agitate for their country’s independence. »
  175. (en) « Tibet's March Toward Modernization », People's Republic of China, (consulté le )
  176. Alex McKay, We want a United Tibet, op. cit., p. 653 : « The recorded memories of 1933 Gyantse Agent Meredith Worth suggest an image of Tibet closer to that presented by Communist Chinese sources than that offered in British sources. Interviewed in 1980, Worth recalled that My memories are of many cheerful parties in the Fort and in the homes of wealthy families, the dominance and brutality of the lamas and officials towards the serf population and the prevalence of venereal diseases... It was, therefore, for me, a relief to read recently in Han Suyin's book "Lhasa, the Open City" [which promotes a polemically positive view of Communist rule in Tibet] that those conditions non longer exist. »
  177. Laird 2006, p. 317-319 : « Entre spécialistes, les discussions sont vives. Les paysans payaient, à la fois en nature et sous forme de corvée, divers impôts au gouvernement, aux monastères, aux nobles locaux. Mais est-ce que pour autant ça faisait d'eux des serfs ? Et si oui, combien y en avait-il ? (...) Malheureusement, les discussions sur ce sujet sont souvent entravées par l'absence de données précises, de plus dans certaines provinces, comme le Kham et l'Amdo, beaucoup de paysans n'avaient pas de seigneurs. »

À voir

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Bibliographie

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Filmographie

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  • Serfs, film de Li Jun (1963)

Articles connexes

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Liens externes

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