Siège de Lyon (1310)
Le siège de Lyon de 1310, parfois qualifié de « guerre de Lyon », est une expédition armée envoyée par le roi de France Philippe IV le Bel pour conquérir Lyon, alors officiellement partie intégrante du Saint-Empire, mais en pratique, principauté indépendante sous la tutelle de l'archevêque Pierre de Savoie. Il se solde très rapidement par la défaite des troupes épiscopales et par le rattachement de Lyon à la France le au traité de Vienne.
Date | |
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Lieu | Lyon |
Issue |
Victoire royale Rattachement de Lyon à la France |
France | Lyon |
Charles de Valois Louis Ier de Navarre |
Pierre de Savoie |
Coordonnées | 45° 45′ 32″ nord, 4° 50′ 29″ est | |
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Contexte
modifierLyon est, depuis 1032, intégrée dans le Saint-Empire, rattachement plutôt artificiel et sans grand impact, le pouvoir de l'empereur étant quasiment insensible sur ces confins. En pratique, et surtout depuis la bulle d'or de 1157, la ville est sous le contrôle de l'archevêque et du chapitre cathédral.
Cependant les appétits territoriaux de Philippe le Bel lui font rechercher le contrôle de cette ville-clef, qui verrouille le confluent de la Saône et du Rhône. En 1292, il se déclare « protecteur de la ville ». En 1307, Louis de Villars doit accepter la mainmise du roi sur la ville et la création d'un conseil de douze consuls élus. Cependant, le successeur de Louis à l'épiscopat lyonnais, Pierre de Savoie, n'accepte pas cet état de fait et pousse les Lyonnais à la révolte[1]. Le chapitre est intéressé à l'affaire par la possibilité de revenir dans ses anciennes fonctions et les privilèges qui y sont liés[2].
Les habitants de la ville prennent le château de Saint-Just et reconstruisent les murailles de la ville pour se défendre contre une agression royale. Pendant ce temps, le roi est actif sur le plan diplomatique et négocie avec Henri VII sa non-intervention dans l'affaire[3].
Les opérations militaires
modifierPhilippe le Bel envoie contre la ville son frère Charles de Valois et son fils, le futur Louis le Hutin. Il a d'autant plus de latitude à la faire qu'en dehors de cette opération, la France vit une période où l'activité militaire est très faible (les seules autres opérations notables entre 1309 et 1312 sont les prises de Nevers et de Rethel en 1311 et les quelques troubles qui suivent la guerre de Flandre)[4]. L'armée royale est puissamment armée, face à une troupe lyonnaise dépareillée et mal formée. Par ailleurs, l'oncle de Pierre de Savoie, Amédée V, marche avec les troupes royales contre son neveu[5].
Entrés en juin sur le territoire lyonnais, l'armée royale se rend maîtresse de la ville le [5], par une manœuvre inattendue, une invasion par bateaux descendants la Saône[6] ; l'archevêque se réfugie au château de Pierre Scize, où il est ensuite enfermé[7]. Ce n'est que par l'intervention du pape Clément V qu'il en est libéré[1].
Les conséquences
modifierTous les bâtiments du clergé de Lyon sont confisqués par l'armée royale en [8]. La ville reste deux ans sous tutelle militaire, période durant laquelle de nombreux bourgeois sont pendus et des clercs emprisonnés à Mâcon[5] ; d'après la supplique Grauamina rédigée par Pierre de Savoie, « les gens du roi [...] torturent [les hommes de l'Église de Lyon] et les maltraitent si cruellement qu’ils meurent dans leurs cachots »[9].
En 1312, contraint par les troupes royales de donner son accord à la cession lyonnaise, Pierre de Savoie abandonne la souveraineté de la ville à Philippe le Bel. Le rattachement est officialisé par le traité de Vienne signé durant le concile qui se tient dans cette même ville, le .
Restent les compensations financières dues par le roi à l'archevêque de Lyon, notamment pour les ravages commis par ses troupes lors du siège de Lyon. Celles-ci font l'objet de deux mémoires rédigés, l'un par des clercs lyonnais entre l'ouverture du concile de Vienne () et le traité du , nommé Grauamina, l'autre par le procureur du bailli de Mâcon, entre ce traité et la fin de l'année 1312, et nommé Avisamenta[8]. Le premier cherche à démontrer que les déprédations royales ont été colossales (elles sont estimées à 150 000 livres tournois) ; le second les minimise au contraire, les estimant à 10 000 livres tournois seulement. De cette somme, le trésor royal ne donnera en fait que 2 000 livres tournois, auxquelles le roi ajoutera, par « munificence royale » (de sua regalis munificentia) 500 autres livres[10]. Ces compensations sont versées à l'archevêque le [10].
Références
modifier- M. Peyraud, « La Savoie aux portes de Lyon au Moyen Âge (XIIe au XIVe siècle) », sur umas.pagesperso-orange.fr, Savoyards du monde, (consulté le ).
- « Pierre de Savoie †1332 », sur museedudiocesedelyon.com, Musée du Diocèse de Lyon (consulté le ).
- Jean de Sismondi 1836, Chapitre XXIII, « Dernières années et mort de Philippe-le-Bel. — 1310-1314 », p. 443.
- Harry A. Miskimin, « L'or, l'argent, la guerre dans la France médiévale », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, t. 40, no 1, , p. 180 (ISSN 0395-2649, lire en ligne, consulté le ).
- Gerbaix de Sonnaz & Sangiuliani di Gualdana 1902, p. 52.
- Bernard Demotz, « Les relations entre la Savoie et Lyon », sur savoyards-lyon.pagesperso-orange.fr, Association Savoisienne Philanthropique, (consulté le ).
- Ernest Cuaz, Le château de Pierre-Scize et ses prisonniers, Lyon, A. Rey, , 168 p. (présentation en ligne), p. 20.
- Alexis Charansonnet 2012, § 1, « Les documents du Trésor des chartes comme sources pour l’étude des négociations entre le roi et l'archevêque de Lyon », p. 443.
- Alexis Charansonnet 2012, Annexe II, « Supplicatio quedam lugdunensis », p. 467.
- Alexis Charansonnet 2012, § 2, « “Enquêtes” sur Lyon ? Des objets textuels mal identifiés », p. 443.
Voir aussi
modifierBibliographie
modifier- [Jean de Sismondi 1836] Jean de Sismondi, Histoire des Français, vol. 6, Bruxelles, H. Dumont, , 551 p. (lire en ligne), p. 163-165 ;
- [Gerbaix de Sonnaz & Sangiuliani di Gualdana 1902] Carlo Alberto Gerbaix de Sonnaz et Antonio Cavagna Sangiuliani di Gualdana, Un incident peu connu de l'histoire de Savoie au commencement du XIVe siècle : le comte Amé V de Savoie & les Savoyards à l'expédition de l'empereur Henri VII de Luxembourg en Italie et à Rome, 1308-1313, Thonon-les-Bains, A. Dubouloz, , 222 p. (ISBN 978-1-103-89277-8, lire en ligne) ;
- [Alexis Charansonnet 2012] Alexis Charansonnet, « Les tractations du roi, du pape et de l'archevêque concernant le rattachement de Lyon à la France (1311–1312) », Francia. Forschungen zur westeuropäischen Geschichte, no 39, , p. 439-471 (ISSN 0937-7743, lire en ligne, consulté le ).