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Eugène Cosmao Dumanoir

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Eugène Édouard Cosmao Dumanoir est un officier de marine français né le 7 novembre 1867 à Lo-rient, capitaine de frégate, mort pour la France dans le naufrage du cuirassé Bouvet coulé lors de la tentative de forcement du détroit des Dardanelles, le 18 mars 1915.

Une famille de marins.

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Eugène Edouard Cosmao Dumanoir est le dernier enfant de Léon Armand Cosmao Dumanoir (1828 - 1908), officier de marine, et d'Amélie Marie Cosmao Dumanoir (1836 - 1885), sa cousine germaine. Son grand-père, Louis Aimé Cosmao Dumanoir (1793 1864), contre-amiral, aide de camp de son oncle, le contre-amiral Julien Cosmao Kerjulien, pendant le 1er Empire, termina sa carrière comme préfet maritime de Lorient.

Début de carrière dans la Marine Nationale (1885 1894)

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Il entre à l'Ecole Navale, sur le Borda, en 1885. Il y fait preuve dès le début de peu d'intérêt pour les études, se retrouvant dans les derniers de sa promotion, si bien qu'à la fin de la 1ère année, le Commandant de l'école menace de le faire redoubler. Il se ressaisit suffisamment pour ne pas être renvoyé de l'école ou redoubler, mais il sort dans les derniers de sa promotion (94ème / 96). À sa sortie de l'école, il fait en 1888 la croisière d'application des aspirants de marine sur le vaisseau Iphigénie

En 1889, à l'issue, il est affecté comme aspirant de 1ère classe sur le croiseur Aréthuse, de la croisière de l'Atlantique.

En 1891, il est attaché à l'état-major général comme officier chargé des montres (1), sur le cuirassé Le Formidable, en Méditerranée orientale.

Promu enseigne de vaisseau, il est affecté en 1892 sur l'aviso-torpilleur Le Léger, basé à Lorient, où il est chargé des détails, des torpilles et de la machine.

Campagne dans le Pacifique (1894 1897)

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De 1894 à 1896, il effectue un séjour dans le Pacifique sud (Nouméa) sur l'aviso-transport le Scorff, où il est responsable des montres, de la batterie et de l'instruction des aspirants. Au cours de ce séjour, il reçoit un témoignage de satisfaction du Ministre de la Marine « pour le zèle et l'activité dont il a fait preuve dans l'exécution d'un levé hydrographique aux iles Torrès (2) en 1895 ». Il participe égale-ment à la commission navale mixte des Nouvelles Hébrides (3).

Officier canonnier (1898 1908)

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De retour en France en 1897, promu lieutenant de vaisseau, il est nommé sur le cuirassé Le Redoutable, dans l'escadre de la Méditerranée, où il exerce les fonctions de commandant en second du réduit (4).

En 1898, il est stagiaire canonnier sur le vaisseau-école La Couronne à Toulon, puis à l'école de canonnage, sur le cuirassé Neptune où il reste en 1899 comme chargé d'une escouade de vétérans.

En 1900 et 1901, il est officier canonnier puis officier de tir sur le cuirassé Charlemagne, en Méditerranée.

En 1902, il est désigné comme membre titulaire de la commission de Gavres (5) où il reste jusqu'en 1906, tout en effectuant deux campagnes en 1904 et 1905 comme adjudant de la division navale de Terre Neuve.

En 1906, il assume les fonctions d'officier en second, chargé du service torpilles et électricité, sur le contre-torpilleur Javeline, à l'escadre d'Extrême Orient, puis commande en 1907 la canonnière Estoc à la station locale d'Haïphong.

En 1908, il est affecté comme officier chargé de la mousqueterie et de l'artillerie secondaire sur le cuirassé Hoche, dans l'escadre de la Méditerranée à Toulon.

Commandant la 2ème division de contre-torpilleurs (1908 1910)

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Il est ensuite de 1908 à 1910 commandant du contre-torpilleur Arquebuse dans l'escadre du nord à Brest, puis commandant de la 2ème division de torpilleurs. En 1909, il reçoit un témoignage de satis-faction du Ministre de la Marine, pour s'être « particulièrement distingué à l'occasion du concours d'honneur de lancement de torpilles des flottilles de torpilleurs et de sous-marins » (il avait remporté ce concours avec sa flottille).

À bord de cuirassés (1910 1915).

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En 1910 - 1911, il est chef du service de sécurité du cuirassé Jauréguiberry, dans l'escadre de Médi-terranée à Toulon.

Il a une solide réputation dans la marine et c'est vers cette époque qu'il obtient de ses chefs les appréciations suivantes : « Officier très travailleur et sérieux, mais aussi d'une gaité et d'une bonne humeur qui font la joie des carrés qui ont la chance de le posséder », ou encore : « Excellent marin qui possède le calme et le sang-froid nécessaires pour le temps de guerre ».

Attendant sa promotion au grade de capitaine de frégate - il est lieutenant de vaisseau depuis 1897 - il demande à retourner à la commission de Gavres où il reste jusqu’à sa promotion en juillet 1914. Il est alors affecté comme adjoint au commandant en second, chargé de la sécurité, sur le cuirassé Bouvet, dans l'escadre de la Méditerranée.

Les Dardanelles (18 mars 1915).

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Le 18 mars 1915, il disparait avec son navire dans la tentative de forcement du détroit des Dardanelles.

Après une première attaque franco-britannique sans succès le 19 février 1915 contre les forts défendant l’entrée du détroit des Dardanelles, l'attaque principale est renouvelée, sans le bénéfice de la surprise cette fois-ci, le 18 mars. Vers midi, l'escadre française de l'amiral Guépratte s’engage. Composée du Suffren (navire amiral), du Gaulois, du Charlemagne et du Bouvet

  • La section Suffren - Bouvet contre les forts de la rive asiatique,
  • La section Gaulois - Charlemagne contre les forts de la rive européenne.
  • Les navires britanniques en deuxième échelon, prêts à relever les Français.

Le plan consistait, pour le premier navire de chaque section, à stopper en travers du courant le plus près possible des objectifs pour les canonner, puis, une fois entraîné par le courant hors de la position de tir, à être remplacé par le second navire, et ainsi de suite.

À 13 h 25, alors que le Bouvet est en pleine action, les navires français reçoivent l'ordre de se retirer et de laisser la place aux cuirassés britanniques chargés de poursuivre l'action.

Le commandant Rageot de la Touche, commandant le navire, à l'instar de Nelson à Copenhague (en 1801), fait semblant de ne pas voir le signal de son amiral, estimant être en bonne position de tir et devoir parachever son action de destruction. Rappelé à l'ordre, il se décide à l'exécuter.

Au cours de cette manœuvre de retrait, le Bouvet navigue à vive allure au milieu du détroit, malgré la présence de mines dérivantes. Il voit passer une mine à sa gauche, une à sa droite. Il veut passer entre les deux mais n'aperçoit pas une troisième qui venait à l'avant, juste entre les deux autres. C’est sa perte. À 13 h 58, touché à tribord vers le milieu par la mine qui fait exploser ses soutes à munitions (défaut de conception ?), le navire chavire aussitôt sur le côté tribord jusqu'à se retourner complètement, puis se dresse et coule par l'arrière, le tout en moins de deux minutes. On ne voit plus qu'une fumée noire qui plane pendant presque une heure au-dessus de l'endroit où le navire a disparu, engloutissant par 65 mètres de fond la presque totalité de son équipage (71 rescapés seulement sur 709).

Voici le témoignage du premier maître torpilleur Coquin, rescapé, sur Eugène Cosmao Dumanoir :

« Le commandant en second (capitaine de frégate Autric - disparu) rencontre l'officier de sécurité (capitaine de frégate Cosmao - disparu) et lui dit : “C'est une mine, je vais voir” et se précipite vers l'arrière de l'entrepont cuirassé. Le commandant Cosmao, lui, reste au pied de l'échelle du compartiment des mines et encourage les hommes qui commencent à monter, simples matelots d'abord, puis quartiers-maîtres et gradés, officiers en dernier. Il disait : “Pas de panique! Pas de panique!” et il y avait plein de monde dans l'échelle, mais pas de cris ni de bousculades. M. Cosmao qui montait derrière moi m'a poussé pour m'aider (dans un semblable moment !) ». (D'après la tradition familiale, Eugène, en poussant d'un coup d'épaule ce marin un peu corpulent qui avait du mal à franchir l'échelle, lui aurait dit : «On n'a pas idée d'avoir un c… pareil !» et ce seraient les dernières fortes paroles qu'on aurait entendues de lui.)

Eugène Cosmao Dumanoir est cité à l’ordre de l’armée de mer :

« Lorsque le bâtiment a été touché par une mine, est resté au pied de l’échelle de l’avant du poste central, encourageant le personnel au calme jusqu’à ce qu’il soit englouti lui-même avec le bâtiment. »

La postérité.

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Pour honorer son enfant, et aussi sans doute la famille Cosmao Dumanoir, installée à Lorient depuis 1793 et très estimée, la ville a donné le nom d'Eugène Cosmao Dumanoir à un de ses boulevards. Aujourd'hui, c'est une artère très connue de la ville, en particulier, c'est le siège de nombreuses asso-ciations et organisations syndicales. Une salle, baptisée « Espace Cosmao Dumanoir » a pendant des décennies été utilisée pour des spectacles et des manifestations culturelles. En 2018, la munici-palité de Lorient a décidé de la détruire en raison de sa vétusté et de son manque de rentabilité. Eugène Cosmao Dumanoir avait épousé, tardivement (il avait 42 ans), en 1910, Agnès Coquelin de l'Isle (1878 - 1970). Ils n'ont pas eu de descendants. La veuve, qui survécut 55 ans à son mari, était une figure dans la famille et dans la société locale. Elle habitait "Le Verger", à Lorient (Kérentré), la propriété achetée par Louis-Aimé Cosmao Dumanoir pour sa retraite. Vendue par les héritiers en 1970 à la ville de Lorient, elle est maintenant un établissement d’accueil pour adultes autistes baptisé : « Villa Cosmao ». Le parc est devenu un jardin public appelé : « Jardin Cosmao Dumanoir ».

[1]1. L'officier chargé des montres sur un navire était en général un jeune officier dont la mission était de veiller sur les montres et chronomètres du bord, pour les conserver en bon état de marche, les remonter et s'assurer de leur synchronisation à l'heure exacte. 2. Les iles Torrès sont situées au nord des Nouvelles Hébrides. 3. La France avait mené à partir de 1880 une politique de « prise de possession pacifique » des Nouvelles Hébrides, heurtant ainsi les intérêts britanniques dans la région et sur les iles. En 1887, est dé-cidée la création d'une commission navale mixte franco-britannique, comprenant deux officiers de marine de chaque nationalité, pour apaiser les tensions et régler les problèmes de sécurité des ressortissants des deux pays. On s'achemine en fait vers la création d'un condominium franco-britannique qui est concrétisée par un accord en 1906. En 1980, les iles acquièrent leur indépendance sous le nom de Vanuatu. 4. Les premiers cuirassés étaient des cuirassés « à réduit », les principaux canons étant rassemblés dans une sorte de casemate, le « réduit », au centre du navire. Par la suite, on passa aux cuirassés « à tourelles » où les canons étaient répartis en différentes tourelles orientables sur tout le navire. 5. Gavres est un terrain d'essais situé à l'est de Lorient où étaient effectués les recettes et essais des équipements destinés à la marine. Cet établissement dépend aujourd'hui de la Direction Générale de l'Armement (DGA). 6. Pour la petite histoire, c'est sur une mine Breguet de 350 kg, de fabrication française, vendue aux Turcs avant la guerre, que saute le Bouvet.

[3]

  1. Maurice Dupont Etienne Taillemite, Les guerres navales françaises du Moyen Âge à la guerre de Golfe, Paris, SPM, , 391 p. (ISBN 2-901952-21-6), p. 264 à 267
  2. Paul Chack, Des Dardanelles aux brumes du nord, Paris, Editions de France, , 151 p., p. 1 à 129
  3. Jean Randier, La Royale, La Falaise, Editions Babouji MDV Maitres du vent, , 887 p. (ISBN 2-35261-022-2), p. 576

[2]

  1. Guy Le Moing, Les 600 plus grandes batailles navanes de l'histoire, Rennes, Marines Editions, , 620 p. (ISBN 978-2-35743-077-8), p. 528 529
  2. Jean Meyer Martine Acera, Histoire de la marine française des origines à nos jours., Rennes, Editions Ouest France, , 428 p. (ISBN 2-7373-1129-2), p. 314 à 318