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Le Théâtre Expérimental De Montréal

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Le Théâtre Expérimental de Montréal (TEM) était une compagnie de théâtre de création située à Montréal. Celle-ci a été fondé en 1975 par Jean-Pierre Ronard, Robert Gravel et Pol Pelletier[1], puis s'est dissoute en 1979 pour devenir la même année, le Théâtre expérimental des femmes (TEF) et le Nouveau Théâtre expérimental de Montréal (NTE).[2]

Contexte de la création du TEM

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Au début des années soixante-dix, le milieu artistique et théâtral du Québec est en période de renouvellement et de croissance. Ceci se fait en partie par la montée du mouvement féministe, ainsi que par l'arrivé du mouvement de la contre-culture américaine au Québec. [3]Plusieurs comédiens et comédiennes commencent à rejeter le théâtre d'auteur et les textes de ceux-ci, ainsi que le théâtre considéré plus institutionnel. Il y a donc rejet de la tradition théâtrale au Québec, puis une démocratisation de la création collective. Il y aura donc naissance de plusieurs jeunes troupes de théâtre qui partiront sur la route avec simple but de jouer, de changer et d'améliorer la société québécoise. Dans les théâtres, on y retrouve aussi une différente représentation artistique qui permet de délaisser la forme traditionnelle et réaliste québécoise, afin de laisser place à de la nouveauté sur scène[4]. C’est dans ce contexte que le théâtre expérimental de Montréal pourra voir le jour.[5]

En 1970, le dramaturge Jean-Pierre Ronfard, qui est le secrétaire général du Théâtre du Nouveau Monde (TNM), voit un manque à ce théâtre québécois sur la scène de cette institution. Il découvrira lors de son mandat le poète automatiste et surréaliste Claude Gauvreau. Il trouvera ensuite son texte intitulé, Les oranges sont vertes. Jean-Pierre Ronfard travaillera sur la mise en scène et la présentation de cette pièce en 1972. Ce moment deviendra historique pour le théâtre québécois. Le texte de Gauvreau deviendra une figure marquante du théâtre pour Ronfard.[6] De plus, c’est lors de la saison des années 71-72 que Jean-Pierre Ronfard travaillera en tant que directeur artistique avec la troupe des Jeunes Comédiens du TNM.[7] Il y rencontrera Robert Gravel, qui est une figure emblématique du théâtre québécois.[8] Éventuellement, le travail de Ronfard sera jugé trop marginal pour le TNM. Une fois son mandat terminé, il quittera le Théâtre du Nouveau Monde. Pendant cette période, il aura créé des liens avec Pol Pelletier et Robert Gravel. C'est par la suite que ceux-ci commenceront plus précisément leur collaboration.[1] En somme, la création d’un théâtre expérimental à Montréal ce fut en partie grâce à l’émancipation de la société québécoise et d’un théâtre plus libre. Cette évolution artistique a donc pu laisser aux artistes un point d’entrée à un art qui se voyait anticonformiste et en réaction à un théâtre qui se voulait traditionnel.[3]

Historique

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C’est lors d’un souper en 1974 que Jean-Pierre Ronfard, Robert Gravel et Pol Pelletier discutent sur le théâtre québécois. Ceux-ci veulent changer leur art et mettre sur pied un théâtre qui se veut expérimental. Selon eux, le théâtre est ce qu’il est. Il est majoritairement du pareil au même. C’est-à-dire qu’ils souhaitent un théâtre qui se veut sur l’expérimentation, par le biais d’essais, de recherche et de laboratoire loin d’un large public. Le seul objectif du TEM est de faire ce qui n’a jamais été fait ailleurs.[7] Le premier local de recherche sera un local sur la rue Laurier, qu’ils nommeront la Charade. Ce lieu sera un simple local pour du travail de recherche. La Maison Beaujeu sera le premier local officiel de ce groupe où ils pourront travailler ensemble et éventuellement présenter des pièces et le résultat de leurs recherches. D’autres comédiens, tel qu’Anne-Marie Provencher, Robert Claing et Pierre Pesant se joindront entreront un an plus tard à la compagnie.[1] C’est à ce moment que le TEM prendra officiellement son envol. Il faudra attendre plusieurs années avant de voir apparaître différentes compagnies de théâtre qui pourront expérimenter comme l'ont fait le TEM. C'était donc une compagnie avant-gardiste qui s'est permis d'aller dans les essais et erreurs du travail, plutôt que dans la perfection de la représentation. L'idéologie derrière cette troupe a su en marquer d'autres. Elle a posé les structures pour un plus grand théâtre expérimental au Québec.[9]

Fonctionnement, principes et pratiques

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La compagnie fonctionnera par principe d'autogestion. C’est-à-dire que toutes décisions doivent être prises à l’unanimité par le groupe afin d’être adoptées, puis le pouvoir et les responsabilités sont partagés également par les pairs. Ce groupe expérimental arrivera éventuellement à présenter des pièces. Le moteur principal est la création collective. En choisissant cette voie, les membres respectent un système d’autogestion d’un théâtre qui se veut laboratoire. C’est donc avec plaisir qu’ils rejettent les rôles de base au théâtre. Pour le TEM, il n’y a pas d’auteurs, chacun est un metteur en scène, chacun est scénographe, concepteur, etc. Le Théâtre Expérimental de Montréal permet donc à son équipe d’avoir une approche ludique de leur art. Cependant, il est faux de prétendre que le TEM s’est permis de toujours rejeter le texte comme moteur de travail. Même si le texte n’était pas toujours présent dans le travail, Ronfard a souvent agi comme auteur au sein de la troupe. C’est-à-dire qu’il dirigeait la direction ou le résultat que le travail pouvait prendre.[10] La vision du public est aussi importante pour le Théâtre Expérimental de Montréal. Il est vrai que selon eux, il serait plus efficace de travailler et de pratiquer leur théâtre loin d’un public. Cependant, leur perception sur cette entité est importante. Le TEM a toujours bâti un rapport important avec le public. Dans l’ensemble de leurs créations présentées, le public a toujours été en participation avec les comédiens. Que ce soit dans une écoute qui se fait dans la proximité des comédiens, dans une intimité théâtrale, ou dans une participation active ou passive lors des représentation, bref la relation avec le public a toujours été de pair avec leur travail expérimental. [7]

Réalisations et théâtrographie sommaire

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Le Théâtre Expérimental de Montréal a présenté dans la maison Beaujeu, plusieurs spectacles, des essais, des ateliers, des rencontres et plus encore. Cette section permet de sommairement présenter différentes œuvres du TEM, ainsi que la dynamique de certaines de leurs réalisations, puis de nommer sur une liste toutes les œuvres du TEM. [10]

Réalisations sommaires :

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Une des premières créations du TEM est Une femme, un homme. Cette pièce a exploré le personnage de la femme et de l’homme au théâtre. Tout au long de la pièce, il est question des différentes relations que ceux-ci peuvent avoir entre eux, puis plus l'intrigue de la pièce passe, plus il y a de la violence qui nait entre ces deux personnages. Éventuellement, on y voit aussi l’échange de sexe. L’homme devient femme, puis la femme devient l’homme. Il y a un contexte de domination qui est aussi installé dans l’œuvre.[10] Ensuite, il y a la pièce Zoo. Cette pièce représente très bien le travail de relation avec le public que le TEM tentait d’explorer. Pour la pièce, le billet était de 1 dollar, rendant une performance accessible à tous. Le spectateur pouvait retourner voir le spectacle qui était donné autant de fois qu’il le voulait. Pour Zoo, le public se promenait dans un parcours déambulatoire, comme s’ils se promenaient réellement dans un zoo. C’est dans cet endroit que les spectateurs pouvaient rencontrer différentes espèces d’animaux. Cependant, l'identité de l’animal change au fil du parcours. Celle-ci rejette l'animal au sens propre, puis se développe ensuite vers l'anthropomorphisme pour se tourner de plus en plus vers l’identité humaine dans un cadre de l'étrangeté, puis le côté contemplatif qu'un humain peut avoir dans un tel endroit qu'est un zoo. C’est une première pièce du genre où la structure théâtrale n’est simplement pas respectée et où elle crée un effet de distanciation auprès du public.[11] Une autre création du TEM est le 12 heures d’improvisation (1976),  qui s’est ensuite concrétisé en 24 heures d’improvisation (1976). C’est avec cette création de Robert Gravel, que l’improvisation théâtrale est explorée sous une autre vision. Empruntant la patinoire et les règles du hockey, Robert Gravel, invente un jeu qui se veut plaisant et amusant. Cette présentation est devenue tellement populaire qu’elle a fini par laisser place à la création de la Ligue Nationale d’Improvisation avec Yvon Leduc. La LNI est par la suite devenue indépendante, mais intimement liée au TEM et au NTE.[12] Elle a pu permettre à plusieurs comédiens de faire leurs débuts au théâtre et à la télévision. Ce phénomène de jeu improvisé s’est même rendu en Europe. Cette forme d'improvisation a aussi gagné de la popularité en France et en Belgique. Au Québec, plusieurs écoles possèdent maintenant des équipes d’improvisations qui jouent de manière compétitive ce jeu. À Montréal, il y a plusieurs bars qui présentent aussi un grand nombre de ligues de tous types de calibres. En somme, la LNI et l’improvisation de Robert Gravel ont fini par devenir des icônes connues du Québec qui se présente encore aujourd’hui. De plus, le TEM a été dans les premières compagnies à produire quelques-unes des premières présentations de spectacles de théâtre féministe québécois, comme Essai en trois mouvements pour trois voix de femmes (1976), Finalement (1977) et À ma mère, à ma mère, à ma mère, à ma voisine (1978). Le TEM a donc pu servir comme espace laboratoire d'exploration et de création d'un théâtre expérimental et féministe au Québec. [13]


Théâtrographie sommaire :

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  • Une femme, un homme (1975)
  • Garden Party (1976)
  • Essai en trois mouvements pour trois voix de femmes (1976)
  • 12 heures d'improvisation (1976)
  • 24 heures d'improvisation (1976)
  • Le secret du colonel (le théâtre de deux couilles) (1976)
  • Lumière s'il vous plaît (1976)
  • Finalement (1976)
  • Lear (1977)
  • Zoo (1977)
  • Tournée Européenne de Garden Party (2ième version) et Happenings Beau Jeu (1977)
  • La Ligue Nationale d'Improvisation (1977)
  • En Pleine Table (1978)
  • À ma mère, à ma mère, à ma mère, à ma voisine (1978)
  • Orgasme I (1979)
  • Orgasme II (1979)
  • Inceste (1979)[10]

Précisions sur la création du Théâtre Expérimental des Femmes et du Nouveau Théâtre Expérimental

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À la fin des années soixante-dix, Pol Pelletier souhaitait travailler le théâtre expérimental avec les femmes. Elle jugeait que celles-ci n’avaient pas une vraie place dans le théâtre qui était fortement dominé par l’homme. C’est avec l’accord des autres membres de la compagnie qu’elle s’est mise à tenir des rencontres avec des comédiennes à la Maison Beaujeu. Ces rencontres avaient pour but de revisiter les possibilités que la femme pouvait amener au théâtre. Pol Pelletier a par la suite demandé à la troupe du TEM une proposition qui a causé de la discorde au sein du groupe. Elle souhaitait qu’aucun homme ne puisse regarder ces rencontres. Son opinion était que l’homme n’avait pas de place lors de ces échanges et que la présence masculine viendrait gêner l'émancipation du travail. Puisque le TEM fonctionne par principe d’autogestion, tous devaient être d’accord pour prendre une décision. Pour permettre à Pol Pelletier de créer son théâtre; quatre des six membres ont décidés de quitter le TEM, afin que chacun des projets puissent exister. Le Nouveau théâtre Expérimental (NTE) a donc par la suite été fondé par Robert Claing, Robert Gravel, Anne-Marie Provencher et Jean-Pierre Ronfard. Le NTE existe encore aujourd’hui et s'inscrit activement dans le milieu du théâtre québécois.[7] Suite à cette rupture, Pol Pelletier a par la suite fondé le Théâtre Expérimental des Femmes (TEF) avec Louise Laprade et Nicole Lecavalier. Cette compagnie finira par changer de nom pour l'ESPACE GO.[14][15]

Le TEM a donc directement donné naissance à deux troupes de théâtre expérimental au Québec, puis celles-ci ont par la suite continué le travail de création et d'expérimentation sur la scène théâtrale québécoise.

Notes et références

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Ouvrages généraux

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Lafon, D, (2001), Le Théâtre Québécois, 1975-1995. Montréal : Fides.

Schryburt, S, (2011),  De l'acteur vedette au théâtre de festival : Histoire des pratiques scéniques montréalaises, 1940-1980. Montréal : Presses de l’Université de Montréal.

Beauchamp, H. (2005). Les théâtres de création : Au Québec et au Canada français. Québec : VLB éditeurs.

Raymond, C. et Ronfard, J.-P. (1975-1997). Nouveau Théâtre Expérimental. Montréal : Nouveau Théâtre Expérimental.

Robert, G. et Lavergne, J.-M. (1987). Impro I : Réflexions et analyses. Montréal : Leméac.

Robert, G. et Lavergne, J.-M. (1989). Impro II : Réflexions et analyses. Montréal : Leméac.

Ronfard, J.-P. (1994). Cinq études. Montréal : Leméac

Documents audiovisuels

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c (1997). Un miroir sur la scène deuxième partie : Le questionnement. [DVD]. Montréal : Office national du film du Canada.

Coulbois, J.-C. (1997). Un miroir sur la scène première partie : L’affirmation. [DVD]. Montréal : Office national du film du Canada.

St-Pierre, A. (2005). Jean-Pierre Ronfard : Sujet expérimental. [DVD]. Montréal : Société de télédiffusion du Québec.

Coulbois, J.-C. (2001). Mort subite d'un homme-théâtre [DVD]. Montréal : Office national du film du Canada

Sites internets

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Nouveau Théâtre Expérimental. [s.d]. Historique. Récupéré le 20 octobre 2019 de http://www.nte.qc.ca/historique/

Pol Pelletier. [s.d]. Bibliographie. Récupéré le 20 octobre 2019 de http://www.polpelletier.com/fr/biographie.php

Encyclopédie du patrimoine culturel de l’Amérique française. [s.d]. Création collective, théâtre féministe et théâtre expérimental. Récupéré le 20 octobre 2019 de http://theatre.ameriquefrancaise.org/parcours4-1/

Nouveau Théâtre Expérimental. [s.d] Archives et cahiers  Récupéré le 22 octobre 2019 de https://archives.nte.qc.ca/catalogue

Ligue Nationale d’Improvisation. [s.d]. Mission et historique. Récupéré le 20 octobre 2019 de http://www.lni.ca/theatre-de-la-lni/mission-et-historique

Périodiques

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Paventi, E. (1997). L’improvisation, à la manière de Robert Gravel. Revue Jeu, 82(1), p. 94-97.

Ronfard, J.-P. (1989). Vous dites expérimental? Revue Jeu, 52, p.45-50.

Breault, M.-A. (2000). Le Nouveau Théâtre Expérimental devant la critique : La question de l’expérimentation. L’Annuaire théâtrale, 28, p. 151-162.

Camerlin, L. (1981). Chronologie fragmentaire des créations québécoises depuis 1975. Revue Jeu, 21, p. 129-169.

Forsyth, L. H. (1987) Introduction : Les Femmes dans le Théâtre du Québec et du Canada/Women in the Theatre of Quebec and Canada. Recherches théâtrales au Canada, 8(1), p. 3-8.

Lavoie, P. (1985). Nouveau Théâtre Expérimental : le 5-10-15 de l’expérimental. Jeu, (36), 114–118.


  1. a b et c Nouveau Théâtre Expérimental, « Historique. » (consulté le )
  2. Hervé Guay, « Sylvain Schryburt, De l’acteur vedette au théâtre de festival : histoire des pratiques scéniques montréalaises 1940-1980, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 2011 », Globe: Revue internationale d’études québécoises, vol. 15, nos 1-2,‎ , p. 352 (ISSN 1481-5869 et 1923-8231, DOI 10.7202/1014643ar, lire en ligne, consulté le )
  3. a et b Encyclopédie du patrimoine culturel de l'Amérique française., « Création collective, théâtre féministe et théâtre expérimental. » (consulté le )
  4. Irène Roy, « Hélène Beauchamp, Les théâtres de création. Au Québec, en Acadie et au Canada français, Montréal, VLB, 2005, 488 p. », Recherches sociographiques, vol. 47, no 3,‎ , p. 696 (ISSN 0034-1282 et 1705-6225, DOI 10.7202/014694ar, lire en ligne, consulté le )
  5. Coulbois, J.-C. (1997). Un miroir sur la scène première partie : L’affirmation. [DVD]. Montréal : Office national du film du Canada.
  6. Coulbois, J.-C. (1997). Un miroir sur la scène première partie : L’affirmation. [DVD]. Montréal : Office national du film du Canada.
  7. a b c et d St-Pierre, A. (2005). Jean-Pierre Ronfard : Sujet expérimental. [DVD]. Montréal : Société de télédiffusion du Québec.
  8. Coulbois, J.-C. (2001). Mort subite d'un homme-théâtre [DVD]. Montréal : Office national du film du Canada
  9. Lafon, D, (2001), Le Théâtre Québécois, 1975-1995. Montréal : Fides.
  10. a b c et d Nouveau Théâtre Expérimental, « Archives et cahiers »,
  11. Pierre Lavoie, « Nouveau Théâtre Expérimental : le 5-10-15 de l’expérimental », Jeu : revue de théâtre, no 36,‎ , p. 114–118 (ISSN 0382-0335 et 1923-2578, lire en ligne, consulté le )
  12. Ligue Nationale d'Improvisation, « Mission et historique » (consulté le )
  13. Hervé Guay, « Sylvain Schryburt, De l’acteur vedette au théâtre de festival : histoire des pratiques scéniques montréalaises 1940-1980, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 2011 », Globe: Revue internationale d’études québécoises, vol. 15, nos 1-2,‎ , p. 352 (ISSN 1481-5869 et 1923-8231, DOI 10.7202/1014643ar, lire en ligne, consulté le )
  14. Pol Pelletier, « Bibliographie » (consulté le )
  15. Forsyth, L. H. (1987) Introduction : Les Femmes dans le Théâtre du Québec et du Canada/Women in the Theatre of Quebec and Canada. Recherches théâtrales au Canada, 8(1), p. 3-8.