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Les arrêtés MIOT

Les arrêtés dits « Arrêtés Miot » sont un ensemble de textes pris par le conseiller d’Etat MIOT, nommé en Corse le 7 janvier 1801 (17 nivôse an 9) avec ses attributions précises : Article 1 « Un conseiller d’état sera nommé par le Premier Consul, administrateur général des départements du Golo et du Liamone ».

Article II « Il est autorisé à prendre toutes les mesures de gouvernement et d’administration qu’il jugera nécessaire et pourra les publier sous la forme d’arrêtés ou de proclamation. Tout individu chargé d’une fonction publique civile, militaires, maritime et de finances, est tenu d’exécuter immédiatement les arrêtés, ordres et décisions de l’administrateur général. Il aura une garde d’honneur dans les lieux où il résidera et recevra les honneurs militaires. »

JUSTICE

Article III « L’administrateur général des deux départements pourra faire des règlements portant même peine de mort. Il établira des tribunaux criminels extraordinaires et en déterminera le nombre, la résidence, la composition et le mode de procédure. Ces tribunaux jugeront sans appel, révision ou cassation. Il instituera un conseil particulier pour prononcer sur les prises conduites par les bâtiments de l’état ou par les corsaires dans les ports des départements du Golo et du Liamone, et dans ceux de l’île de Capraja. »

FINANCES

Article IV « L’administrateur général est autorisé à imposer, par forme de peine, des contributions extraordinaires sur les municipalités, arrondissements communaux et départementaux, et à prendre des mesures d’usage pour en assurer le paiement. Il pourra prononcer des dégrèvements ou remises sur celles qui existent, soit directes, soit indirectes. Il déterminera l’emploi des fonds provenant des contributions directes ou indirectes, ordinaires ou extraordinaires, et en appliquera le produit à toute destination qui lui paraîtra convenable ; il réglera également la répartition des fonds affectés aux différents services de l’administration. « 

GUERRE ET MARINE

Article V « Il disposera des moyens militaires et maritimes destinés à la défense des deux départements du Golo et du Liamone et en réglera l’emploi. Il pourra enjoindre, par mesure extraordinaire, à tout militaire du service de terre et de mer, quel que soit son grade, de se rendre sur le continent et il pourvoira provisoirement à son remplacement. »

Miot ne peut agir, administrativement, que par arrêtés, qui n’ont donc pas valeur législative. Il n’a pas non plus pouvoir d’établir des dégrèvements à titre individuel.

Mais Bonaparte lui avait déjà donné des instructions le 15 décembre 1800 (24 frimaire an 9 (Archives Nationales AF IV 862 n° 24) : « Vous vous embarquerez à Toulon sur la frégate La Justice ou sur l’Egyptienne, qui vous conduira à Ajaccio. Votre premier soin sera d’appeler auprès de vous les préfets du Golo (PIETRI), du Liamone (GALEAZZINI), et les commandants militaires (MULLER), et de proclamer la mise hors la Constitution de la Corse. Vous leur ferez connaître l’arrêté du gouvernement qui détermine vos relations envers les préfets, les commandants militaires, les agents des contributions directes et indirectes, etc. En même temps que vous, le Ministre des Finances (GAUDIN) envoie une somme de 3 à 400 000 francs pour mettre la troupe au niveau de sa solde. Vous aurez, pour vous appuyer, la 23° demi-brigade, un corps nombreux de gendarmerie, qui, se trouvant désormais soldé, sera dans le cas de faire un service sévère. Vous commencerez par instituer votre tribunal extraordinaire, et vous ferez juger et exécuter tous ceux qui seraient détenus dans les prisons d’Ajaccio comme voleurs, assassins ou provocateurs à la rébellion. Vous donnerez l’ordre à 60 gendarmes du Golo et à 100 gendarmes du Liamone de se rendre à Tallano avec le chef de brigade de gendarmerie, 600 hommes de troupe de ligne, et, s’il est nécessaire, vous ferez marcher les colonnes mobiles des gardes nationales. Le préfet du Liamone sera à la tête de cette colonne, et les forces militaires seront sous les ordres du général commandant dans l’île. On brûlera les maisons des principaux rebelles, telles que celles de QUENZA et de CESARE, et l’on ne reviendra de l’expédition que lorsque l’on aura pris les rebelles ou qu’on les aura forcés de quitter l’île. Le tribunal extraordinaire qui sera à la suite de cette expédition fera exécuter sur le champ quatre ou cinq des rebelles pris les armes à la main ; ce n’est qu’en s’annonçant par un acte de vigueur que le commissaire extraordinaire pourra ramener la tranquillité dans ces départements. Vous ferez voyager cette colonne dans tous les quartiers où il y aurait eu du trouble, de manière à ne pas rester plus de huit ou dix jours dans une préfecture. Elle aura à sa suite un tribunal extraordinaire qui fera exécuter sur le champ les assassins et les voleurs. Lorsque vous aurez rétabli la tranquillité dans l’île, vous tiendrez un conseil d’administration pour connaître de quelle manière la troupe est soldée et habillée. Vous ferez compléter la 23° demi-brigade, en y faisant entrer les conscrits des deux départements. Beaucoup d’abus se sont glissés dans la gendarmerie, vous y remédierez. Vous veillerez à ce qu’elle soit composée d’hommes actifs et capables de rendre des services. Vous tiendrez un conseil d’administration pour connaître l’emploi des contributions directes et indirectes des années VII, VIII et IX. Vous ferez jouir la Corse des principes du gouvernement sur les cultes et l’extinction des partis. Presque tout le produit des impositions indirectes est absorbé par les frais de perception. Vous les diminuerez, en ne considérant, pour cette perception, la Corse que comme un seul département, et en réduisant le nombre des employés. Les frégates La Justice et L’Egyptienne ont une mission extrêmement importante. Vous accélérerez leur départ deux ou trois jours après votre arrivée. »

Que renferme ces arrêtés ? (cote 1M74 – 4KI-2 aux Archives départementales de la Corse-du-Sud) Miot va en établir 138, entre le 3 avril 1801 (13 germinal an 9) et le 20 octobre 1802 (28 vendémiaire an 11), plus 15 décisions ayant valeur d’arrêtés dans ce laps de temps. Ces arrêtés concernent aussi bien la justice, les impôts que des nominations, des biens nationaux, etc…ce qui correspond à ses attributions.

Dans les commentaires que MIOT fait de ses arrêtés, il est à noter qu’il est très conscient de l’extrême pauvreté et misère des Corses ; il prend un arrêté concernant la police, notamment celui du 12 juillet 1801 (noté en marge » à la demande du général MULLER »), mais marque bien « arrêté inapplicable » : nous ressentons un certain désarroi, soit dans ses commentaires, soit dans ses lettres, et par voie de conséquence une certaine impuissance. Il se trouve en opposition avec les préfets, les autorités militaires, certaines des autorités municipales et civiles, des habitants. Il est obligé d’intervenir dans des querelles domestiques. Nous pensons que sa mission a été trop courte pour espérer avoir un début de réussite. Dans ses Mémoires, MIOT indique que c’est lui qui demande son rappel, mais il est plus que probable que c’est BONAPARTE, estimant que sa mission est un échec, qui le renvoie sur le continent. Et Napoléon ne choisit certainement pas MIOT pour ses qualités intellectuelles, mais plutôt parce qu’il est déjà allé en Corse (en 1796-1797) (à cette époque, Napoléon trouvait déjà MIOT trop mou) et est très en cour auprès de Joseph qui a peut-être encore une certaine influence sur son frère ; MIOT que Napoléon, dans une lettre à ce même Joseph, en 1808, taxera d’imbécile ! Bonaparte va désavouer Miot plusieurs fois, notamment auprès d’Abrial, ministre de la justice.

Miot va être rappelé par le décret du 14 septembre 1802-27 fructidor an 10 (3, B.215, n°1976) portant rétablissement de la Constitution en Corse (Le Moniteur Universel du 2° jour complémentaire an 10-19 septembre 1802, n° 362, p. 1476)

Article I « A dater du premier brumaire an 11 (23 octobre 1802), les départements du Golo et de Liamone rentreront sous l’empire de la constitution. »

Article II « L’administrateur général cessera ses fonctions. »

Miot va passer une convention (MAE. 18020012) avec la Sardaigne, le 18 octobre 1802, relative aux relations commerciales entre les deux îles. Miot avait informé Galeazzini, préfet du Liamone, de ses intentions par une lettre du 20 septembre 1802. Miot n’avait pas pouvoir pour signer un texte quelconque avec un état étranger. On ne sait pas si Paris a approuvé. En marge du document, il est écrit : » Renvoyé au Ministre des Relations Extérieures pour le premier consul en 27 frimaire ». Miot quitte la Corse le 7 novembre 1802, avec ses archives. Le 27 décembre 1802 (6 nivôse an 11) (ADCS 1M14), lettre du ministre de l’intérieur, Chaptal, à Galeazzini, préfet du Liamone : « J’ai reçu, citoyen Préfet, la lettre du 26 brumaire (17 novembre 1802) par laquelle vous m’inviter à vous tracer la marche que vous devez tenir dans l’administration de votre département aujourd’hui que la fonction du citoyen MIOT Administrateur général a cessé en vertu de l’arrêté des Consuls du 27 fructidor dernier (14 septembre). Cet arrêté, en mettant un terme à la mission extraordinaire du citoyen MIOT dans les départemens du Liamone et du Golo, replace ce pays sous l’empire de la constitution ; en conséquence, on doit se conformer à toutes les lois qui établissent le régime constitutionnel, et cesser d’exécuter les arrêtés qui y sont contraires. Néanmoins, je vous invite à me faire connaître préalablement ces arrêtés, en les accompagnant de vos observations afin que je puisse soumettre le tout aux Consuls qui statueront à cet égard ».

Le 11 mai 1803 (21 floréal an 11), arrêté relatif au rétablissement du régime constitutionnel dans les départemens du Golo et du Liamone (3, B. 277, n° 2759)/ Considérant que la Constitution a repris son empire dans les départemens du Golo et de Liamone, et qu’il ne doit plus exister dans ces départemens d’autres autorités administratives et judiciaires que celles instituées par les lois, ni d’autres attributions à aucune d’elles que celles qui leur ont été conférées par ces mêmes lois, Arrête :

Article I « : Toutes institutions d’autorités, toutes attributions aux autorités constitutionnelles, qui n’ont pas été faites ou données par la loi, dans les départemens du Golo et de Liamone, cesseront au moment de la publication dans les dits départemens, du présent arrêté ».

Article II : » Il n’est pas dérogé à l’arrêté du 22 nivôse dernier (12 janvier 1803) ».

Nous pouvons écrire que l’histoire de Miot avec la Corse se termine ce jour-là !