Loi d'amnistie espagnole de 1977

La loi d'amnistie espagnole de 1977 [1] est une loi adoptée par le Parlement espagnol et ayant reçu la sanction royale le 15 octobre 1977, deux ans après la mort du Général Francisco Franco[2]. La loi a libéré les prisonniers politiques et permis aux exilés de retourner en Espagne, mais a également garanti l'impunité à ceux qui ont participé à des crimes[3], pendant la guerre civile et durant le régime franquiste[2]. La loi est toujours en vigueur et a été utilisée comme prétexte pour ne pas enquêter et poursuivre les violations des droits humains franquistes[4].

La loi était le symbole le plus clair explicite du « pacte de l'oubli » de l'Espagne [5] — une décision des partis et acteurs politiques espagnols, pendant et après la transition démocratique espagnole , de ne pas s'attaquer aux atrocités commises par l'État espagnol[6],[7]. La loi d'amnistie de 1977 a été critiquée par les universitaires pour avoir assimilé « victimes et agresseurs » et pour avoir protégé les auteurs de violations des droits de l'homme de poursuites pénales et des sanctions[2]. L'Espagne a fait valoir que les auteurs de crimes contre l'humanité ne peuvent être poursuivis pour des crimes commis avant 1939; cependant, les Nations Unies ont soutenu que les crimes de l'ère franquiste devraient pouvoir faire l'objet d'une enquête[8]. En février 2012, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme a demandé l'abrogation de la loi d'amnistie de 1977, au motif qu'elle viole le droit international relatif aux droits de l'homme. Le Commissaire a évoqué l'obligation de l'Espagne de respecter le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. En vertu du droit international des droits de l’homme, il n’y a pas de délai de prescription pour les crimes contre l’humanité[9]. En 2013, un groupe de travail d'experts des Nations Unies a de nouveau appelé l'Espagne à abroger la loi de 1977[10].

En 2008, le juge Baltasar Garzón a brièvement ouvert une enquête officielle, tenant symboliquement Franco et son régime pour responsable de la disparition de plus de 100 000 citoyens espagnols. En 2009, Manos Limpias, un syndicat d'extrême droite pro-franquiste, a porté plainte contre le juge pour avoir violé la loi d'amnistie[10],[11]. Garzón a été acquitté des accusations d'« avoir sciemment agi sans en avoir la juridiction», liées à son enquête sur les crimes franquistes, mais a ensuite été radié du barreau pendant 11 ans par la Cour suprême espagnole en 2012, pour une accusation sans rapport[12].

Depuis 2010, la juge argentine María Servini de Cubría a enquêté sur les violations des droits civiques sous le régime franquiste. En 2018, elle a accepté d’étendre son enquête aux crimes spécifiquement contre les femmes[13].

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Notes et références modifier

  1. (es) . «  »
  2. a b et c Ackar, Kadribasic (2010) Transitional Justice in Democratization Processes: The Case of Spain from an International Point of View, International Journal of Rule of Law, Transitional Justice and Human Rights, pp. 120-121.
  3. Miriam M. Basilio, Visual Propaganda, Exhibitions, and the Spanish Civil War (Ashgate, 2013), p. 220.
  4. Paloma Aguilar, "The Timing and the Scope of Reparation, Truth and Justice Measures: A Comparison of the Spanish, Argentinian and Chilean Cases" in Building a Future on Peace and Justice: Studies on Transitional Justice (eds. Kai Ambos, Judith Large, and Marieke Wierda: Springer, 2009), pp. 505, 521–522.
  5. (en) Julián Casanova et Carlos Gil Andrés, Twentieth-century Spain. A History., Cambridge University Press, (ISBN 978-1-107-60267-0, OCLC 870438787), p. 310
  6. Omar G. Encarnación, Spanish Politics: Democracy After Dictatorship (Polity, 2008), p. 133.
  7. Ofelia Ferrán & Lisa Hilbink, "Introduction: Legalities of Violence in Contemporary Spain" in Legacies of Violence in Contemporary Spain: Exhuming the Past, Understanding the Present (Routledge, 2016), p. 2.
  8. La ONU da la razón a Garzón y pide investigar el franquismo, Público (Publico.es), 10/02/2012
  9. Spain must lift amnesty for Franco era crimes – U.N., Reuters (February 10, 2012).
  10. a et b U.N. tells Spain to revoke Franco-era amnesty law, Reuters (September 30, 2013).
  11. Editorial, Truth on Trial in Spain, New York Times (February 5, 2012).
  12. Sarah Leggott, Memory, War, and Dictatorship in Recent Spanish Fiction by Women (Bucknell University Press, 2015), p. 20.
  13. Guardian Oct 26, 2018, Judge investigates Franco era crimes