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Léonard de Vinci s'est notamment passionné pour l'étude de la turbulence.

La turbulence désigne l'état de l'écoulement d'un fluide, liquide ou gaz, dans lequel la vitesse présente en tout point un caractère tourbillonnaire : tourbillons dont la taille, la localisation et l'orientation varient constamment. Les écoulements turbulents se caractérisent donc par une apparence très désordonnée, un comportement difficilement prévisible et l'existence de nombreuses échelles spatiales et temporelles. De tels écoulements apparaissent lorsque la source d'énergie cinétique qui met le fluide en mouvement est relativement intense devant les forces de viscosité que le fluide oppose pour se déplacer. Pour cette raison, les turbulences sont plus faciles à produire au sein de fluides à faible viscosité et inversement[1].

À l'inverse, on appelle laminaire le caractère d'un écoulement régulier.

La découverte et l'étude de la turbulence est très ancienne, elle a été décrite par exemple par Léonard de Vinci qui, après lui, n'a pas progressé durant presque 400 ans, avant que l'ingénieur irlandais Osborne Reynolds prolonge ses travaux en 1883.

Description

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Osborne Reynolds, qui a relancé à la fin du XIXe siècle l'étude de la turbulence.

Il est très difficile de donner une définition précise de la turbulence. La communauté scientifique qui étudie ces écoulements font consensus pour leur définir des caractéristiques communes, leur conférant ainsi une certaine universalité. Ces caractéristiques, qui servent de critères pour une définition analytique des écoulements turbulents, sont les suivantes[2] :

  • L'écoulement est tridimensionnel. Bien que le concept de turbulence bidimensionnelle existe. Il est né dans le monde de la recherche océanographique et météorologique, dans lequel on étudie des films de fluides (atmosphère, océan) dont la profondeur est très petite devant les autres dimensions. En dehors de ces très grandes échelles (de plusieurs centaines ou milliers de kilomètres), les plus petites (de l’ordre du centimètre ou du mètre) sont rigoureusement tridimensionnelles.
  • L'écoulement est instationnaire (ce qui exclus les écoulement stationnaire, bien qu'il peuvent présenter des propriétés complexes comme le chaos lagrangien) .
  • Le rotationnel (et donc la vorticité) est non nul.
  • L'écoulement est fortement diffusif, ce qui se traduit par des fluctuations de vitesses qui assurent un mélange rapide et efficace.
  • L'écoulement présente une grande gamme continue d'échelles dynamiquement actives, ce qui signifie que l'énergie cinétique (ou la densité spectrale d'énergie cinétique pour être exacte) dans l'écoulement est continue et non nulle à différentes échelles.
  • L'écoulement est chaotique, en ce sens qu'une petite perturbation apportée à un écoulement sera continuellement amplifiée avec le temps. Cela implique qu'une description strictement déterministe d'un écoulement turbulent a peu d'intérêt, car les champs instantanés issus à différents instants d'un même écoulement peuvent être très différents. Par conséquent, cette propriété implique que l’étude des écoulements turbulents doit être réalisée au moyen d’outils statistiques.

En raison de sa complexité, la turbulence a longtemps résisté à une analyse physique détaillée. Les interactions au sein de la turbulence créent un phénomène très complexe. Richard Feynman a décrit la turbulence comme le plus important problème non résolu de la physique classique[3].

Nombre de Reynolds

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Le régime d'un écoulement (laminaire ou turbulent) peut être prédit par le nombre de Reynolds, nombre sans dimension qui fait état du rapport entre l'énergie cinétique et l'amortissement visqueux existant dans un écoulement fluide donné. Les valeurs de nombre de Reynolds communément admise (pour les écoulement en charge) sont :

  • implique un régime laminaire,
  • implique un régime de transition entre laminaire/turbulent,
  • implique un régime turbulent.

En pratique, le nombre de Reynolds doit être convenablement choisi pour l'application désirée. Souvent, pour des écoulements en charge dans des applications industriels on cherche à obtenir un régime d'écoulement turbulent (notamment pour sa capacité à optimiser les effets diffusifs et les mélanges).

Méthodes et outils statistiques

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Le comportement complexe des écoulements turbulents doit la plupart du temps être abordé par la voie statistique. On peut ainsi considérer que l'étude de la turbulence fait partie de la physique statistique. L'analyse statistique des écoulements turbulents est souvent réalisée en considérant les équations d'évolutions de grandeurs statistiques. Ces équations d'évolutions sont obtenues en combinant les moyennes statistique et manipulations algébriques aux équations de Navier-Stokes. Les grandeurs statistiques sont plus intéressantes car plus stables que les grandeurs fluctuantes instantanées et peuvent admettre un caractère plus universel permettant de développement de théorie physique à partir de celles-ci.

Soit des variables muettes qui représente de manière générique les variables physiques associée à un écoulement turbulent (vitesse, vorticité, pression...). Pour utiliser les outils statistiques usuels, on fait l'hypothèse que les fluctuations turbulentes sont telles que les variables peuvent être assimilées à des variables aléatoires et qu'elles sont statistiquement stables dans le temps.

Soit une vitesse variable, de sorte que ce soit un évènement correspondant à .

En turbulence on distingue les valeurs moyennes et les valeurs fluctuantes de grandeurs physiques. Les outils statistiques sont utilisés pour l'études des grandeurs fluctuantes qui se répartissent autour d'une valeur moyenne, et comment les fluctuations adjacentes sont liées. L'étude des distributions autour d'une valeur moyenne nécessite l'introduction de la densité de probabilité et de sa transformée de Fourier (appelée fonction caractéristique). L'étude entre fluctuations voisines nécessite l'introduction de l'autocorrélation[2].

La transformée de Fourier permet d'analyser comment les quantités physiques se répartissent parmi les différentes échelles d'un écoulement en passant d'un domaine temporel à un domaine fréquentiel.

Fonction de distribution

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La fonction de distribution cumulée d'une variable aléatoire , notée est définie par :

représente la probabilité que prenne une valeur inférieure ou égale à X.

Cette fonction admet les propriétés suivantes [4] :

  • , pour

La densité de probabilité

Cette fonction admet les propriétés suivantes :

  • , car elle représente une fraction de temps.

Normalisation

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Il est parfois plus arrangeant de travailler avec des variables aléatoires normalisées. La normalisation de ces variables aléatoires signifie que leur moyenne est nulle et leur variance vaut 1. Par exemple, la variable aléatoire normalisée de , notée , est :

Sa densité de probabilité devient :

Moments des Variables Aléatoires

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Moyenne

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La première grandeur a définir est la moyenne (définie comme une moyenne d'ensemble) :

Ou de manière générale, si est une fonction de , la moyenne de est[4] :

Cette moyenne existe seulement si cette intégrale converge absolument.

La fluctuation de est définie comme étant : .

A noter :

  • La moyenne de la moyenne donne la moyenne, c'est-à-dire : .
  • Dans la littérature on peut retrouver la moyenne écrite .

Variance

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La variance est définie comme étant la fluctuation quadratique moyenne[4] :

Écart type

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En considérant une série de mesures en un point, l'écart type peut être défini tel que :

Si est une vitesse instantanée à l'instant et une vitesse moyenne associée au même écoulement.

Par commodité on peut exprimer un taux de turbulence. La turbulence exprimée en %, souvent notée , correspond alors à :

Moments d'ordre supérieurs

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Les moments d'ordre supérieur des distributions de probabilités sont des statistiques utilisées pour décrire différentes caractéristiques de la distribution au-delà de la moyenne (moment d'ordre 1) et de la variance (moment d'ordre 2). Les moments d'ordre supérieur couramment utilisés incluent le moment d'ordre 3 (asymétrie, ou skewness en anglais) donne des information sur sur l'asymétrie de la fonction de distribution par rapport à sa moyenne, et le moment d'ordre 4 (l'aplatissement, ou kurtosis en anglais) mesure le pic de distribution par rapport à une loi normale.

Les moments d'ordre supérieur à l'ordre 4 existent et peuvent fournir des informations supplémentaires sur la forme des distributions de probabilités, mais ils sont rarement utilisés dans la pratique en raison de leur complexité, de leur sensibilité aux valeurs extrêmes, et de leur utilité pratique limitée. Les moments d'ordre 1 à 4 suffisent généralement pour les besoins analytiques dans la plupart des domaines.

Pour pousser l'analyse plus loin d'autres méthodes existent comme l'analyse spectrale, les quantiles, les fonctions de densité de probabilité empiriques, ou les méthodes non paramétriques sont préférées pour obtenir des informations détaillées sur les distributions, sans recourir aux moments d'ordre très élevé.

Analyse spectrale

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Corrélation de variables

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Une analyse plus fine du champ fluctuant peut être obtenue en mesurant la corrélation en 2 points ( et ) et en 2 temps ( et ). Ainsi, une quantité souvent utilisée est le tenseur des corrélations en 2 points de vitesses : .

Pour un scalaire passif l'autocorrélation spatiale est : .

L'analyse statistique via la mesure des différents moments statistiques des champs fluctuants ne donne pas directement accès à des informations sur l'écoulement. Elle considère uniquement des couplages dynamiques entre les variables lorsque les corrélations sont élevées.

Spectre du nombre d'onde

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L'analyse des moments statistiques permet d'appréhender les mécanismes physiques mais ne donnent pas d'information sur le rôle des différentes échelles mises en jeu dans l'écoulement. Pour avoir accès à ces information il faut réaliser une étude spectrale des champs turbulents. Elle est classiquement réalisée à partir de la transformée de Fourier (en espace ou en temps).

Le tenseur de spectre de vitesse est la transformée de Fourier de la corrélation en 2 points de la vitesse :

La transformée inverse est donc :

Si on remarque que :

Et donc représente la contribution de la covariance des modes de vitesse associées au nombre d'onde . La corrélation en 2 points et le spectre contiennent 2 types d'informations différentes sur la direction :

  • La dépendance de sur et de sur donnent des informations sur la dépendance directionnelle de la corrélation.
  • Les composantes de et de donnent des informations sur les directions des vitesses.

Une quantité qui peut s'avérer utile (quantitativement parlant) est la densité spectrale d'énergie cinétique fluctuante (aussi appelée plus simplement spectre d'énergie), notée , et définit telle que :

Avec le symbole de Kronecker.

peut être considéré comme dépourvu d'information directionnelle. Ainsi, représente la contribution de l'énergie cinétique turbulente de tous les modes, et donc la répartition de cette énergie à chaque échelle de l'écoulement. Cette densité est définie par intégration sur une sphère de rayon constant . En intégrant le spectre d'énergie sur tous les nombres d'ondes, on obtient l'énergie cinétique fluctuante telle que :

Ce qui correspond à la demi trace du tenseur de Reynolds.

Le raisonnement est identiques pour des scalaires passifs.

Décomposition de Reynolds

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Osborne Reynolds propose de décomposer chaque variable associée à un champ turbulent comme la somme de sa moyenne et de sa fluctuation :

Où l'opérateur de moyenne est un opérateur vérifiant les axiomes de Reynolds :

  1. Conservation des constantes :
  2. Linéarité :
  3. Commutativité :
  4. Structure de projecteur :

Équation du champ moyen

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Le premier niveau de description qui est le plus employé pour les applications en ingénierie, consiste à décrire l'évolution du champ moyen de la solution turbulente. Les équations d'évolution du champ moyen sont obtenues à partir des équations de Navier-Stokes (ici pour un fluide incompressible) :

Ce système peut être compléter par l'équation d'évolution d'un scalaire comme la température par exemple :

On remarque que les termes convectifs dans ces équations font apparaître des produits moyennés qui ne sont pas exprimés en fonction des champs moyens et fluctuants. Pour obtenir une telle décomposition (appelée décomposition de Reynolds) on doit remplacer chaque terme par la décomposition "champ moyen" + "champ fluctuant".

D'après les axiomes de Reynolds alors on a et .

De la même façon, pour un scalaire on a :

Attention, n'est pas nulle, cette corrélation forme le tenseur de Reynolds.

Il vient alors :

et pour le scalaire :

Les équations pour le champ moyen écrite précédemment ressemblent aux équation d'origine, écrites pour les champs moyens au lieu du champ complet (u ou T). La différence est l'apparition de termes de flux supplémentaires qui font apparaître les champs fluctuants et T'. Ce sont des termes qui peuvent être interpréter comme des flux turbulents modifiant les équations de bilan des champs moyens. Ces termes sont les seuls termes d'action du champ fluctuant sur le champ moyen. Lorsque ces termes fluctuants sont nuls, le champ moyen n'est donc pas modifié par le champ fluctuant et les solutions laminaires peuvent être retrouvées.

A partir des équations précédentes on peut retrouver l'équation de bilan de l'énergie cinétique du champ moyen en posant et en multipliant l'équation précédente par :

Équation du champ fluctuant

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Les moments statistiques d'ordre 2 en 1 point dans l'espace et en 1 temps jouent un rôle important car il traduit le couplage entre champ moyen et champ fluctuant dans les équations de bilan du champ moyen, ce qui explique l'importance de son étude. Pour cela il est nécessaire de trouver les équations qui décrivent les champs fluctuants et . Pour cela, on utilise la propriété de linéarité de la dérivée :

Ces équations sont obtenues en retranchant les équations du champ moyen aux équations génériques de départ :

et pour le scalaire passif :

À partir de ces équations on peut obtenir l'équation d'évolution des tensions de Reynolds et celle pour l'énergie cinétique du champ fluctuant  :

Avec .

Idem pour le flux de chaleur turbulent, pour le cas où le scalaire passif est la température.

On remarque que l'énergie cinétique du champ fluctuant est égale à la demi-trace du tenseur de Reynolds,

Symétries, homogénéité et isotropie

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Les écoulements turbulents peuvent admettre des symétries statistiques, c'est-à-dire que leur moments statistiques ont des symétries particulières. Cela permet de simplifier grandement les analyse (annulation de termes dans les équations de bilan), et permettent aussi de poser une base pour les écoulements plus complexes. De manière générale on distingue :

  • Les écoulements statistiquement stationnaires : les moments statistiques de toutes les variables sont invariantes en temps, .
  • Les écoulements statistiquement homogène au sens de Craya : Les moments statistiques d'ordre 2 et plus sont invariants par translation dans l'espace. Les équations bilan se simplifie car les termes de flux spatiaux turbulents s'annulent. L'avantage des écoulements homogènes est que l'analyse n'ait besoin d'être réalisée qu'en un seul point de l'espace pour pouvoir décrire complètement l'écoulement.
  • Les écoulements statistiquement isotropes : ce sont des écoulements homogène qui ont des moments statistiques qui sont invariant par rotation du repère et par les symétries miroir sur les axes du repère. Ce sont des écoulements qui n'admettent aucune direction privilégiée.

En considérant le cas d'une turbulence isotrope, l'équation d'évolution pour l'énergie cinétique du champ fluctuant se simplifie en :

Ces écoulement isotropes servent de base pour l'étude d'écoulements plus complexes et sont donc essentiels.

Échelles caractéristiques de la turbulence

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Afin de caractériser la turbulence il faut identifier les échelles caractéristiques des mécanismes physiques ou des quantité de matière. Dans le cas isotrope, les composantes de vitesse ont la même dynamique et il n'existe pas de direction privilégiée, ce qui permet d'avoir une définition unique pour chaque échelle caractéristiques.

Échelle intégrale

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Les grandes échelles ou échelles intégrales (notées ) correspondent aux structures tourbillonnaires de grande taille dans un écoulement turbulent. À ces échelles, l'énergie cinétique turbulente est injectée dans le système à partir des forces d’écoulement ou des contraintes extérieures. Ces grandes structures contiennent la majeure partie de l'énergie cinétique turbulente, et leur taille est souvent proche des dimensions caractéristiques de l'écoulement (par exemple, diamètre d'un tuyau ou la taille d'un obstacle dans un écoulement). Le taux de dissipation d’énergie est principalement déterminé à ces grandes échelles, et l'énergie se transfère de ces grandes structures vers des échelles plus petites.

L'échelle intégrale est calculée à partir de la fonction d'autocorrélation des composantes de vitesse (toute variable fluctuante peut être utilisée). La fonction d'autocorrélation spatiale est :

Avec cette définition on peut définir une échelle caractéristique pour chaque direction d'espace suivant . L’échelle intégrale longitudinale ​ est alors donnée par l’intégrale de cette fonction d’autocorrélation :

De manière similaire on peut définir une telle échelle pour les autres directions spatiales. Physiquement, cette échelle mesure la distance dans la direction sur laquelle les fluctuations du champ sont corrélées. En général on note cette échelle dans la direction , de façon générale on peut définir jusqu'à 27 échelles intégrales avec un seul champ de vitesse. Dans le cas isotrope on peut se limiter à définir seulement 2 échelles intégrales : une échelle intégrale longitudinale (notée ) et une échelle intégrale transversale (notée ).

Micro-échelle de Taylor

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La micro-échelle de Taylor, notée généralement ​, est une échelle intermédiaire dans le spectre de la turbulence, située entre les grandes échelles de l'écoulement et les plus petites échelles dissipatives de Kolmogorov. Elle représente une transition entre les structures tourbillonnaires de grande taille, qui contiennent la majorité de l'énergie cinétique turbulente, et les petites structures où cette énergie est dissipée par la viscosité. La micro-échelle de Taylor est souvent utilisée pour décrire la taille des tourbillons dans lesquels l'énergie cinétique fluctuante se dissipe par effet Joule.

Pour le cas isotrope on peut définir l'échelle de Taylor longitudinale et transverse comme :

Avec une fonction paire qui prend son maximum en avec . Ainsi, et .

L'échelle de Taylor caractérise le mécanisme de dissipation de l'énergie cinétique fluctuante par effet Joule, qui intervient principalement pour des structure dont la taille est de l'ordre de . Cela est démontrable, et on obtient la relation suivante :

Elles caractérisent également les échelles turbulentes qui portent la plus grand partie de l'enstrophie du champ fluctuant.

Il est également possible de définir de manière similaire une échelle de Taylor pour le scalaire passif.

Il existe une relation entre la micro-échelle de Taylor λT​, le nombre de Reynolds turbulent ReL​ (basé sur les grandes échelles), et les grandes échelles L de la forme : λT​∼ReL​​L

Cela montre que la micro-échelle de Taylor est plus petite que les grandes échelles, mais elle augmente lorsque le nombre de Reynolds diminue. Lorsque l'écoulement devient plus turbulent (grand ReL​), λT​ devient plus petite et se rapproche des petites échelles.

Échelle et théorie de Kolmogorov

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L’échelle de Kolmogorov, notée , représente la plus petite échelle de la turbulence où les effets dissipatifs de la viscosité dominent. À cette échelle, les tourbillons sont si petits que l’énergie cinétique turbulente est entièrement dissipée sous forme de chaleur par les forces visqueuses. Définie par la dissipation d’énergie turbulente et la viscosité cinématique , les échelles de Kolmogorov s’exprime comme des variables adimensionnées (principalement composées par une échelle en espace, une échelle en temps et une échelle de vitesse) :

en espace,

en temps,

en vitesse.

Ces petites structures marquent la fin de la cascade d’énergie, un processus par lequel l’énergie injectée dans les grandes échelles de l’écoulement est transférée vers des échelles de plus en plus petites avant d'être dissipée à l’échelle de Kolmogorov. Ainsi, ces échelles définissent la plus petite taille de tourbillons de l'écoulement, on parle de tourbillons dissipatifs.

Selon la théorie de Kolmogorov (1941), dans un écoulement turbulent pleinement développé (souvent on considère ) et homogène, l’énergie est d'abord injectée dans les grandes échelles, où elle est ensuite transférée de manière continue vers des échelles intermédiaires et plus petites par la cascade turbulente. Entre les grandes et petites échelles se trouve la plage inertielle, où les effets dissipatifs sont négligeables et où le transfert d’énergie se fait sans pertes. Kolmogorov a postulé que les caractéristiques statistiques de cette plage sont universelles, indépendantes des propriétés spécifiques du fluide ou des conditions initiales. Dans cette plage appelée zone inertielle, le spectre d’énergie suit une loi de puissance 5/3​, où la densité spectrale d’énergie est proportionnelle à , k étant le nombre d’onde associé à l’échelle des tourbillons. Ce modèle a apporté une compréhension fondamentale des mécanismes de la turbulence pleinement développée (à très grand nombre de Reynolds). Cette théorie est basée sur l'analyse dimensionnelle, et admet les hypothèses suivantes :

  1. Aux petites échelles , les moments statistiques en 2 points séparés par une distance et en 2 temps séparés par un délai peuvent être exprimés au moyen des seules quantités .
  2. Aux petites échelles , les moments statistiques en 2 points séparés par une distance et en 2 temps séparés par un délai peuvent être exprimés au moyen des seules quantités . La dissipation de indique que ces échelles ne sont que très peu directement affectées par la dissipation par effet Joule, et ne sont soumises qu'aux effets non-linéaires représentés par .
  3. Hypothèse d'isotropie locale : Pour tout écoulement turbulent, si le nombre de Reynolds est suffisamment grand, les petites échelles sont isotropes.

La forme du spectre d'énergie cinétique fluctuante peut être déterminée grâce aux hypothèses de Kolmogorov et par analyse dimensionnelle :

Avec est la constante de Kolmogorov.

Il est à noter que la solution découle de la théorie de Kolmogorov, mais qu'elle n'a pas été formulée par Kolmogorov lui-même, mais par son élève Obhoukov. Cette solution a également été découverte 2 autres fois de manières indépendantes par Onsager (1945) et Von Weizsäcker (1948).

La théorie de Kolmogorov est une théorie asymptotique valide pour , qui ne donne aucune indication sur la forme du spectre à très grande échelle, lorsque . La détermination d'une forme complète du spectre reste un domaine de recherche actuel, bien que certains modèles aient été proposés.

Relations entre échelles caractéristiques

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Les différentes échelles sont donc reliées par des relations qui dépendent principalement du nombre de Reynolds turbulent. Voici quelques relations typiques entre ces échelles :

  • Relation entre l’échelle de Kolmogorov et la micro-échelle de Taylor : η∼λT​ReT−1/2​ où ReT​ est un nombre de Reynolds basé sur la micro-échelle de Taylor, donné par : ReT​=νλT​uλ​​ avec uλ​ représentant la vitesse caractéristique à l’échelle λT​.
  • Relation entre la micro-échelle de Taylor et les grandes échelles : λT​∼LReL−1/2​ Cette relation montre que la micro-échelle de Taylor est intermédiaire entre les grandes échelles et l’échelle de Kolmogorov.
  • Relation entre l’échelle de Kolmogorov et les grandes échelles : η∼ReL3/4​L​ Cette relation souligne que plus le nombre de Reynolds est élevé, plus l’échelle de Kolmogorov est petite par rapport aux grandes échelles.
    • Le nombre de Reynolds turbulent global ReL​ (basé sur les grandes échelles) est défini par : ReL​=νUL​ où U est une vitesse caractéristique à grande échelle, L une longueur caractéristique et ν la viscosité cinématique.
    • Le nombre de Reynolds basé sur la micro-échelle de Taylor, ReT​, est donné par : ReT​=νλT​uλ​​ où uλ​ est une vitesse caractéristique à l’échelle de Taylor. Ces relations montrent que les différentes échelles (grandes échelles, λT​, et η) sont toutes liées entre elles et dépendent du nombre de Reynolds. À mesure que ReL​ augmente, l’échelle de Kolmogorov devient beaucoup plus petite que les grandes échelles, tandis que la micro-échelle de Taylor reste intermédiaire, caractérisant les gradients de vitesse avant que les effets de la viscosité ne deviennent dominants à η.


Les grandes échelles d’un écoulement turbulent injectent de l'énergie dans le système, qui est transférée à travers la micro-échelle de Taylor (λT​) vers les petites échelles. L’énergie est finalement dissipée à l’échelle de Kolmogorov (η) sous forme de chaleur par la viscosité. Les relations entre ces échelles sont gouvernées par le nombre de Reynolds de l'écoulement, avec un ReL​ élevé entraînant une grande séparation entre les grandes échelles et l’échelle de Kolmogorov.

Méthode de Comte-Bellot et Corrsin

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Méthode expérimentale

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La méthode de Comte-Bellot et Corrsin est une technique expérimentale utilisée en mécanique des fluides pour mesurer le spectre d’énergie dans un écoulement turbulent. Développée par Geneviève Comte-Bellot et Stanley Corrsin en 1971, cette méthode repose sur l'utilisation de deux sondes ou d'une sonde mobile pour enregistrer les fluctuations de vitesse à différents points dans le temps ou dans l'espace. Elle permet de déterminer la distribution de l'énergie cinétique turbulente en fonction de l'échelle spatiale, en particulier dans la plage inertielle, où l'énergie est transférée des grandes aux petites échelles sans dissipation notable.

Principe de base

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La méthode se base sur le concept de la fonction d'autocorrélation temporelle des fluctuations de vitesse. En pratique, les expérimentateurs placent une ou plusieurs sondes de fil chaud dans l'écoulement turbulent, et les mesures des vitesses fluctuantes sont enregistrées au cours du temps. L’idée est d’utiliser soit une sonde fixe (et de mesurer les fluctuations au cours du temps) soit deux sondes fixes à des positions différentes dans l'écoulement, pour mesurer les corrélations spatiales des fluctuations de vitesse entre deux points distincts.

Dans la configuration classique avec une seule sonde fixe, le signal mesuré est interprété en utilisant la "théorie de Taylor de la congélation" (Taylor’s frozen turbulence hypothesis). Cette hypothèse suppose que les structures turbulentes se déplacent à une vitesse moyenne constante, ce qui permet de relier les variations temporelles observées par la sonde aux variations spatiales, en particulier dans les écoulements avec un nombre de Reynolds élevé. Cela permet de calculer les caractéristiques spatiales de la turbulence à partir des données temporelles mesurées.

Application au spectre d'énergie

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Les enregistrements obtenus à partir de la sonde sont analysés pour calculer la fonction d'autocorrélation des fluctuations de vitesse, puis transformés en spectre d'énergie à l'aide de la transformée de Fourier. Le spectre d’énergie en fonction du nombre d’onde k (qui représente l'inverse de la taille des structures turbulentes) est alors déterminé. Cette technique permet d'explorer le comportement de l'énergie turbulente à différentes échelles, en particulier dans la plage inertielle où le spectre d’énergie suit la loi de Kolmogorov ∼k−5/3.

Avantages et limites

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La méthode de Comte-Bellot et Corrsin est particulièrement utile pour étudier les écoulements isotropes et homogènes, où l’hypothèse de congélation de la turbulence est valide. Elle permet d’obtenir des mesures précises du spectre d’énergie turbulente et est fréquemment utilisée dans les études de turbulence isotrope, par exemple dans les écoulements dans des grilles ou dans des souffleries.

Cependant, l'une des limites de cette méthode est qu'elle repose sur l'hypothèse de turbulence "gelée", qui peut ne pas être toujours exacte dans des écoulements fortement non homogènes ou anisotropes. De plus, la précision des résultats dépend de la qualité des sondes et des conditions de mesure, telles que le positionnement des sondes et la vitesse de l'écoulement.

Résultats marquants

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Les expériences originales de Comte-Bellot et Corrsin ont permis de valider la loi spectrale 5/3​ de Kolmogorov dans la plage inertielle, fournissant ainsi des preuves expérimentales importantes pour la théorie de Kolmogorov sur les écoulements turbulents. Leurs résultats ont servi de base pour de nombreuses études ultérieures en turbulence.

En résumé, la méthode de Comte-Bellot et Corrsin est une technique expérimentale clé pour mesurer le spectre d’énergie en turbulence, avec une application particulièrement importante dans la validation expérimentale des théories de la turbulence isotrope.

Méthode par l'analyse dimensionnelle

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Dans cette approche, l’objectif est de vérifier si le spectre d’énergie suit la loi en fonction de l’échelle spatiale dans le régime inertiel, en utilisant des principes d’analyse dimensionnelle.

Kolmogorov (1941) a utilisé l’analyse dimensionnelle pour prédire que, dans un écoulement turbulent isotrope et homogène, l’énergie cinétique est transférée des grandes aux petites échelles par un processus dit de "cascade d’énergie". Dans la plage inertielle, ce transfert d'énergie se fait sans dissipation, et Kolmogorov a supposé que le taux de dissipation d'énergie par unité de masse, ε, est le seul paramètre pertinent pour décrire la dynamique dans cette gamme d’échelles.

L'analyse dimensionnelle se fait de la manière suivante :

  • On considère que le spectre d’énergie E(k), qui donne la distribution de l’énergie cinétique turbulente en fonction du nombre d'onde k (lié à l’inverse de la taille des tourbillons), dépend uniquement du taux de dissipation d’énergie ε et du nombre d’onde k, dans la gamme inertielle.
  • En utilisant ces deux grandeurs, l’analyse dimensionnelle consiste à combiner ε (qui a des dimensions de [L^2T^−3]) et k (qui a des dimensions de [L^−1]) pour obtenir la dimension correcte pour l’énergie par unité de masse et par unité de nombre d’onde E(k), qui doit avoir des dimensions de [L^3T^−2].

Cette contrainte dimensionnelle donne :

E(k)∼ε2/3k−5/3

Cascade d'énergie cinétique

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Une propriété classiquement mise en avant d'un écoulement turbulent réside dans un processus appelé cascade turbulente (ou cascade de Richardson) : la division des grands tourbillons en tourbillons plus petits permet un transfert d'énergie des grandes échelles vers les petites échelles données par la dimension de Kolmogorov. À l'issue de ce transfert, les tourbillons les plus petits dissipent l'énergie qu'ils ont reçue des plus grands tourbillons (comme les dépressions météo et cyclones tropicaux par exemple). Pour ces petits tourbillons, en effet, la dissipation moléculaire freine les variations de vitesse trop importantes du fait de la viscosité du fluide considéré. Cette cascade turbulente explique, par exemple, l'atténuation progressive et la mort des cyclones tropicaux et dépressions météo, ainsi que la transformation de leur énergie cinétique en chaleur. Mais elle explique aussi, à plus petit échelle, la dissipation du sillage d'une voiture ou d'un avion[N 1].

Le tourbillon de rue de l'image ci-dessous peut ainsi être vu comme la dernière métamorphose du cyclone de l'image précédente (ou d'ailleurs le dernier effet local du passage d'un camion).

Notons que sans la dissipation permanente qu'entraîne cette cascade de Richardson, les phénomènes météo tels que dépressions, tornades et tourbillons de poussière demeureraient indéfiniment. L'apport en énergie solaire, qui est la source d'énergie de la machine planétaire (océanique et atmosphérique), ne s'interrompant jamais, on ne pourrait qu'aboutir à un renforcement continu des courants océaniques et atmosphériques. En pratique, ce processus de dissipation de l'énergie (la cascade turbulente) n'est cependant pas obligatoirement à sens unique, le phénomène d'appariement tourbillonnaire (en anglais backscatter) permettant le transfert ponctuel de petites structures tourbillonnaires (qui fusionnent) vers une ou plusieurs structures plus grandes.

Depuis les années 1970, la modélisation numérique de la turbulence permet aux chercheurs d'étudier le phénomène à petite échelle, en utilisant notamment l'approche appelée Simulation des Grandes Structures (SGS) de la Turbulence, ou Large Eddy Simulation (LES) en anglais.. La physique et la connaissance de la turbulence sont en plein essor grâce :

  • à la généralisation des instruments de mesure (comme les free falling optical profilers[5] ou les sondes à effet Doppler-Fizeau pour l'étude de la turbulence en milieu aquatique) ;
  • à la réduction progressive du coût de ces instruments ;
  • aux apports de l'intelligence artificielle (apprentissage profond) appliquée aux fluides géophysiques, en particulier dans le domaine météorologique et plus encore pour la compréhension, la paramétrisations et la modélisation des turbulences, des courants et du relatif mélange océanique en zone tropico-équatoriale (qui reste l'un des principaux biais des logiciels de modélisation des océans et du climat)[6]. Un réseau neuronal artificiel entraîné « sous contrainte physique » et à l'aide de l'enregistrement décennal d'observations hydrographiques et de turbulence dans le Pacifique tropical a par exemple récemment permis de mieux paramétriser les modèles actuelles[6].

Dans les transports

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Tourbillon marginal (turbulence) d'une aile d'avion.

La turbulence augmente la traînée de friction des objets en mouvements pour des nombres de Reynolds élevés (ceux qui régentent les mouvements des objets du quotidien : véhicules, aéronefs et projectiles de sports). Cependant, provoquer la transition de la couche limite existant autour d'un corps depuis le régime laminaire jusqu'au régime turbulent peut permettre de retarder le décollement de cette couche limite et de ce fait diminuer la traînée de pression du corps (avec une légère augmentation de la traînée de friction, le bilan restant cependant largement positif). Par exemple certaines combinaisons de nageurs sont munies d'écailles, pour générer de la turbulence ; les concavités présentes à la surface des balles de golf jouent le même rôle (voir la crise de traînée de la sphère), ainsi que les turbulateurs à la surface des avions, autrement appelés générateurs de vortex. Ces dispositifs visant à modifier l'écoulement fluide passant autour de l'objet (aéronef, projectile...) entrent dans la catégorie du contrôle des écoulements.

En météorologie et océanographie

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Onde de Kelvin Helmholtz au sommet des nuages dans le ciel de San Francisco.

Il existe plusieurs phénomènes turbulents dans l'atmosphère et les océans. Certains sont reliés à convection lors du réchauffement des basses couches de ces fluides. Celles-ci deviennent moins denses que les couches supérieures et vont s'élever ce qui va changer la distribution de vitesse du fluide tant dans la verticale que dans l'horizontale.

D'autres sont reliés au glissement de couches stables, mais ayant des densités différentes, l'une sur l'autre. On parle alors de cisaillement. Les ondes de Kelvin-Helmholtz sont générés de cette manière et introduisent une rotation semblable à une vague qui déferle à l'altitude de la jonction des couches. Il y a également des turbulences mécaniques qui se produisent quand le fluide atmosphérique ou océanique est forcé de surmonter un obstacle. On obtient alors d'une onde de gravité qui peut générer de la turbulence sous forme de rotors. Il s'agit d'un phénomène météorologique complexe appelé onde orographique. Les rotors sont alors formés dans la couche sous-ondulatoire.

La turbulence explique donc les variations locales des courants marins et des vents atmosphériques.

Dans l'environnement

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Modification (par le balancement d'un arbre) des turbulences qu'il génère dans le vent (allée de Kármán). La réalité est bien plus complexe (percolation du flux dans les branches et feuilles qui sont des obstacles plus ou moins élastiques)

Elles ont un rôle écologique important.

  • Dans l'eau les turbulences contribuent au mélange des couches thermiques, salines, acides ou plus ou moins oxygénées ou anoxiques, mais aussi à une érosion non-homogène et par suite à la turbidité, la remise en suspension ou dans les zones de moindre turbulence aux dépôts différentiés de particules (selon masse et granulométrie). Beaucoup d’organismes aquatiques savent utiliser des turbulences et notamment les contre courants qu'elles génèrent localement pour se déplacer en consommant moins d'énergie.
  • Face au vent, la rugosité du paysage et en particulier la rugosité dite "molle" de la végétation (par opposition à celle des roches et des constructions par exemple) a un impact important sur les vents (atténuation de la force du vent dans les basses couches de l'atmosphère), la turbulence et, indirectement, sur les envols ou dépôts de poussières, la température, l'évaporation, le mélange de la partie basse de la colonne d'air (de la hauteur des pots d'échappement à la hauteur où sont émis les panaches de cheminées d'usine ou de chaudières urbaines par exemple), la régularité du vent (important pour les installations d'éoliennes ou de fermes éoliennes), etc.

Kalnay et Cai dans la revue Nature avaient en 2003 posé l'hypothèse que les arbres freinaient significativement le vent. En effet, en forêt tropicale dense, hormis lors des tempêtes, les effets du vent sont quasiment imperceptibles depuis le sol. La plupart des arbres n'y produisent leurs puissants contreforts que quand ils émergent au niveau de la canopée où ils sont alors exposés à un éventuel déracinement par le vent.

On a récemment réanalysé les données météorologiques de mesure des vents de surface (jusqu'à 10 mètres de hauteur) qui confirment dans l’hémisphère nord une tendance au ralentissement ; il semble que les forêts puissent, dans une certaine mesure, freiner le vent alors que la désertification l'exacerbe. Là où la forêt a regagné du terrain, la force du vent a diminué (de 5 à 15 %)[7], et ce, de manière d'autant plus visible que le vent est fort. Les vents géostrophiques (induits par les variations de pression atmosphérique) n'ont pas diminué, et les aéroradiosondes ne montrent pas de tendance au ralentissement en altitude[8].

  • Le bocage est une structure écopaysagère qui modifie également les effets du vent en créant des microclimats atténuant le vent, mais aussi les chocs thermohygrométriques et l'érosion des sols. Les turbulences générées par les arbres, haies et forêts ont une grande importance pour les microclimats bocager et forestiers, pour la circulation aériennes des pollens, d'invertébrés et microorganismes aéroportés, de propagules (ex : spores de mousses, lichens et autres épiphytes), mais aussi de phytohormones et d'odeurs aéroportées (parfum floral qui attire abeilles ou papillons pollinisateurs ou hôtes par exemple, ou hormones de stress qui attirent d'autres espèces). Le mouvement des feuilles laisse la lumière pénétrer plus profondément dans le houppier et au sol. Les buisson, bosquet, haie, ou massif forestier auront des effets différents, assez importants parfois pour freiner le vent de 5 à 15 % dans la couche des 10 à 20 m au-dessus du sol ;
  • Inversement, dans l'eau, la mobilité de certains animaux aquatiques (poissons, têtards en particulier, mais aussi petits organismes tels que daphnies, crustacés) sont source de turbulences et microturbulences qui jouent un rôle dans le mélange de couches. On peut parler de microturbulence ou de nanoturbulence pour les mouvements induits par les bactéries à flagelle. Le système nerveux de certains poissons est très sensible aux turbulences, ce qui leur permet notamment de détecter l'attaque proche d'un prédateur.

En astronomie

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La turbulence atmosphérique est le frein majeur aux observations astronomiques effectuées depuis la Terre. Elle a pour effet de disperser la lumière de façon fluctuante et aléatoire. Les dispositifs d'optique adaptative permettent de compenser en partie ces distorsions parasites.

La turbulence atmosphérique change chaque milliseconde.

Autres domaines

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Elle est aussi étudiée en aéronautique (jets des réacteurs, chambres de combustion, sillages des aubes et compresseurs, etc.), dans l'industrie chimique (efficacité considérable du processus de mélange turbulent), ainsi qu'en acoustique, en géophysique, etc.

Notes et références

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  1. Le rythme des décollages dans les grands aéroports est déterminé d'après la durée d'atténuation des sillages.

Références

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  1. Schmiegel, Jürgen Barndorff-Nielsen, Ole, Lévy-based tempo-spatial modelling : with applications to turbulence, MaPhySto, (OCLC 474586660, lire en ligne)
  2. a et b Tennekes, H., & Lumley, J. L. (1972). A First Course in Turbulence. MIT Press.
  3. I. Eames et J. B. Flor, « New developments in understanding interfacial processes in turbulent flows », Philosophical Transactions of the Royal Society A, vol. 369, no 1937,‎ , p. 702–705 (PMID 21242127, DOI 10.1098/rsta.2010.0332 Accès libre, Bibcode 2011RSPTA.369..702E, lire en ligne)
  4. a b et c Pope, S. B. (2000). Turbulent Flows. Cambridge University Press.
  5. (en) « Free-falling Optical Profiler », sur SEA-BIRD Scientific
  6. a et b (en) Yuchao Zhu, Rong-Hua Zhang, James N Moum et Fan Wang, « Physics-informed deep-learning parameterization of ocean vertical mixing improves climate simulations », National Science Review, vol. 9, no 8,‎ (ISSN 2095-5138 et 2053-714X, PMID 35992235, PMCID PMC9385460, DOI 10.1093/nsr/nwac044, lire en ligne, consulté le )
  7. Robert Vautard (CEA/CNRS/UVSQ), Julien Cattiaux, Pascal Yiou, Jean-Noël Thépaut, Philippe Ciais, Northern Hemisphere atmospheric stilling partly attributed to an increase in surface roughness, ; Nature Geoscience, en ligne : 17 oct 210 (Résumé en anglais, graphiques)
  8. Gruber, C. and Haimberger, L. On the homogeneity of radiosonde wind time series. Meteorologische Zeitschrift,17, 631-643 (2008).

Voir aussi

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Bibliographie

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  • (en) Roberto Benzi et Federico Toschi, « Lectures on turbulence », Physics Reports, vol. 1021,‎ , p. 1-106 (DOI 10.1016/j.physrep.2023.05.001 Accès libre)
  • (en) H. Tennekes et J.L. Lumley, A First Course in Turbulence, MIT Press,
  • (en) S.B. Pope, Turbulent Flows, Cambridge University Press,
  • (en) P. Sagaut et C. Cambon, Homogeneous Turbulence Dynamics, 2nd,
  • (en) G.K. Batchelor, Homogeneous Turbulence, Cambridge University Press,



Articles connexes

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Liens externes

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