Utilisateur:Zarer/Brouillon

Montesquieu ou la raison naturelle au fondement de l'esclavage modifier

J'ai pris le temps de lire la discussion sur cette partie de l'article et permettez-moi de dire combien cette partie de l'article sur l'esclavage comme celle sur la théorie des climats chez Montesquieu, telles qu'elles sont rédigées, sont à la mesure de vos échanges : d'une légèreté insoutenable. Un exemple ?

Quand on lit, plus haut, ceci : « Plusieurs personnes ont accusé Montesquieu d'avoir des intérêts personnels dans la traite. Il s'agit, entre autres, de Louis Sala-Molins, Alain Guédé ou Laurent Estève, Nelly Schmidt ou le mouvement Freinet. Jean Erhard leur a demandé leurs sources : quelle était cette compagnie négrière et des preuves sur les liens financiers entre Montesquieu et cette compagnie ? »

Faut-il préciser que Louis Sala-Molins est lui aussi professeur émérite de philosophie politique et que Jacques Derrida, en 2001, dans la préface au livre d'Alain David, Racisme et antisémitisme / Essai de philosophie sur l'avenir des concepts, a cru bon de préciser combien le livre de Louis Sala-Molins, Le Code Noir ou le calvaire de Canaan,était important à ce sujet pour que vous prenez en considération ses analyses critiques ?

Mais avez-vous seulement pris le temps d'ouvir le livre de Louis Sala-Molins ? Non et c'est manifeste. Vous sauriez sinon que ce que Louis Sala-Molins pointe chez Montesquieu, ce ne sont nullement quelques « intérêts personnels dans la traite », mais fort justement le cœur dans sa doctrine sur l'esclavage, à savoir les « subtilités » en « climatologie » que Montesquieu (L. Sala-Molins, Le Code Noir ou le calvaire de Canaan, pp. 28-29, rééd. 2012) avancent pour fonder l'esclavage sur une « raison naturelle » (L'Esprit des Lois, XV, VII).

Et toute la partie critique que L. Sala-Molins consacre à Montesquieu, titrée "Les élégances de Montesquieu", fait l'analyse de ses « concessions à la théorie des climats » (Le Code Noir..., p. 217 et sq.) au-delà du seul chapitre V, pour montrer à quel point ce livre XV de L'Esprit des Lois est un « incroyable bric-à-brac » (Le Code Noir..., p. 227). Que dit Jean Erhard à ce sujet ? Le savez-vous seulement ? Non et c'est manifeste. Autant de légèreté ne laisse de surprendre sur un projet tel que Wikipédia et sur un article de cette importance.

Parce que oui... il est assez remarquable et, de ce point de vue l'article de Réné Pommier donné dans l'article en est une des plus belles illustrations, que pour fonder une lecture anti-esclavagiste de l'œuvre de Montesquieu, jamais au grand jamais, on ne fasse directement référence à autre chose que le fameux chapitre V du Livre XV, ou peu s'en faut.

Pourquoi prend-on autant de soin à effacer le reste du livre XV et le lien avec le livre précédent ? --- Tout simplement parce que Monstesquieu y justifie l'esclavage par une raison naturelle !

Pommier, comme la plupart des commentateurs, se contente de mentionner positivement quelques chapitres de L'Esprit de Lois sans citation directe ! Époustouflant ! Montesquieu a pourtant pris soin d'insérer ce chapitre V (devenu fameux) au beau milieu d'un livre entièrement consacré à l'esclavage ! Le titre de ce livre est d'ailleurs à lui seul des plus éloquents : « COMMENT LES LOIS DE L’ESCLAVAGE CIVIL ONT DU RAPPORT AVEC LA NATURE DU CLIMAT. »

Autrement dit, les lois qui organisent l'esclavage sont en lien étroit avec un fait de nature. Ce que justement Montesquieu veut démontrer, après Aristote, c'est le fondement naturel de l'esclavage : « Aristote veut prouver qu’il y a des esclaves par nature, et ce qu’il dit ne le prouve guère. Je crois que, s’il y en a de tels, ce sont ceux dont je viens de parler. » Bien que Montesquieu reconnaisse que « tous les hommes naissent égaux » et que « l'esclavage est contre la nature », il n'en affirme pas moins que « dans certains pays il [est] fondé sur une raison naturelle ; et il faut bien distinguer ces pays d’avec ceux où les raisons naturelles même les rejettent, comme les pays d’Europe où il a été si heureusement aboli » (chap. VII, Livre XV).

Sade ne s'y trompe pas quand il dit de Montesquieu qu'il est un « demi-philosophe » et dénonce, tout en ironie pour le coup, dans son Histoire de Juliette ce fondement naturel qui autorise la destruction de « tous les êtres » : « Qu’importe, comme dit Montesquieu, que d’une boule ronde j’en fasse une carrée ? qu’importe, que je fasse d’un homme un chou, une rave, un papillon ou un ver ? Je ne fais en cela qu’user du droit qui m’a été donné, et je puis troubler ou détruire ainsi tous les êtres, sans que je puisse dire que je m’oppose aux lois des règnes, par conséquent à celles de la nature. » Voir Donatien Alphonse François de Sade, Histoire de Juliette, 1799.

Cette amputation du texte de Montesquieu (ou lecture très partielle sans lien direct avec le reste du livre) est d'autant plus troublante que le fameux chapitre V du Livre XV est inséré au beau milieu d'une myriade de justifications de l'esclavage qui ne visent nullement à l'abolir universellement puisque l'esclavage est, selon Montesquieu, fondé par nature dans certains pays. Montesquieu le dit lui-même dans la lettre LXXXIV en réponse aux observations de Grosley : « Je n’ai point cherché au chap. VI du livre XV l'origine de l'esclavage qui a été, mais l'origine de l'esclavage qui peut ou doit être. »

Mais quelle est donc, selon Montesquieu, cette origine ou cette « raison naturelle » qu'Aristote n'a pas su prouver (Troisième partie, Livre XV, chap. VII) et que lui, Montesquieu, est persuadé d'avoir découverte ?

C'est pour le moins dérangeant, n'est-ce pas ? Voyez plutôt...

Ainsi, après avoir observé au microscope une langue de mouton soumise à des variations de température, Montesquieu affirme, chapitre II, Livre XIV, Troisième partie, que « dans les pays chauds », « le tissu de la peau est relâché » et « dans les pays froids, le tissu de la peau est resserré ». Et Montesquieu d'en conclure : « La chaleur du climat peut être si excessive que le corps y sera absolument sans force. Pour lors l’abattement passera à l’esprit même ; aucune curiosité, aucune noble entreprise, aucun sentiment généreux ; les inclinations y seront toutes passives ; la paresse y fera le bonheur ; la plupart des châtiments y seront moins difficiles à soutenir que l’action de l’âme, et la servitude moins insupportable que la force d’esprit qui est nécessaire pour se conduire soi-même. » Ce n'est pas assez clair ? Vraiment ? L'utilisation de la double négation est remarquable mais surtout trompeuse. Alors rétablissons : Dans les pays chauds, la servitude est plus supportable que la liberté.

La position de Montesquieu est souvent difficile à saisir parce qu'elle est changeante et souvent ambiguë. Un bel exemple de cette ambiguïté : « L'esclavage, proprement dit, est l’établissement d’un droit qui rend un homme tellement propre à un autre homme, qu’il est le maître absolu de sa vie et de ses biens » (L'Esprit des lois, troisième partie, Livre XV, chap. I).

La phrase ci-dessus est des plus amphibologiques : elle peut signifier que le dernier (l'esclave), celui qui est sous l'empire du premier (le maître), devient maître absolu de la vie et des biens du premier. Cette inversion toute paradoxale permet certainement de s'expliquer pourquoi, quelques lignes après, Montesquieu trouve que l'esclavage n'est pas nécessairement utile pour le maître ni bon pour l'esclave... mais tout de même une condition « tolérable » dans les pays despotiques dans la mesure où « chacun doit y être assez content d'y avoir sa subsistance et la vie. ». En somme, à choisir, la servitude est préférable à la mort ! D'autant que, selon Montesquieu, « les hommes s’accoutument à tout, et à la servitude même, pourvu que le maître ne soit pas plus dur que la servitude » (chap. XVI, Livre XV). Stupéfiant !

Lisez le texte ! Les exemples sont légions qui justifient l'esclavage ! On pourrait continuer comme ça longtemps, non à partir des commentaires sans lien direct avec le texte, mais en revenant au texte de Montesquieu lui-même qui est persuadé que l'esclavage a une origine ou un fondement par nature et le justifie. Ainsi au chapitre VIII, intitulé "INUTILITÉ DE L'ESCLAVAGE PARMI NOUS", voici comment Montesquieu, loin de dénoncer l'esclavage et d'en réclamer la suppression, propose de le limiter aux pays chauds où il serait fondé naturellement : « Il faut donc borner la servitude naturelle à de certains pays particuliers de la terre. »

Que dire ce « droit d'esclavage très doux », « juste, et conforme à la raison » que « l'on trouve dans certains pays » et que Montesquieu légitime parce qu'il serait « fondé sur le choix libre qu’un homme, pour son utilité, se fait d’un maître ; ce qui forme une convention réciproque entre les deux parties » ? (chap. VI, Livre XV)

Sade, dans son Histoire de Juliette, ne voit dans ce « droit d'esclavage très doux », « juste » et « conforme à la raison », cette « convention réciproque » entre maître et esclave soutenue par Montesquieu, rien d'autre qu'un « sophisme » : « Est-il au monde un sophisme plus grand que celui-là ? Jamais la justice ne fut un rapport de convenances existant réellement entre deux choses. »

Telle qu'elle est orientée et rédigée, cette partie est clairement construite sur du commentaire qui isole un chapitre d'un ensemble dont la cohérence est bien différente d'une condamnation de l'esclavage universellement puisque Montesquieu le justifie, par ailleurs, dans les pays chauds et modérés... mais avec « humanité » (L'Esprit des Lois, Troisième partie, Livre XV, chap. XVI).

En l'état, cette partie de l'article est proprement partisane. Pour rendre compte de la position de Montesquieu sur l'esclavage, il est nécessaire de montrer que, selon lui, l'esclavage est fondé sur une « raison naturelle », le climat, qui partage l'humanité en deux : les peuples du nord de l'Europe, où l'esclavage a été aboli, et les peuples du sud du monde, où l'esclavage est légitimé, en droit, par son fondement naturel.

Il est, par ailleurs, intéressant de remarquer que les extraits cités, hors chapitre V, dans cette partie sur l'esclavage, sont soit tronqués, soit faux.

Le premier extrait :

  • « [L'esclavage] n'est utile ni au maître ni à l'esclave ; à celui-ci parce qu'il ne peut rien faire par vertu ; à celui-là, parce qu’'il contracte avec les esclaves toutes sortes de mauvaises habitudes, qu'il s'accoutume insensiblement à manquer à toutes les vertus morales, qu'il devient fier prompt, dur, colère, voluptueux, cruel » (livre XV, chapitre Ier)

Suivi par un autre extrait du même chapitre :

  • « Dans les pays despotiques, où l'on est déjà fous d'esclavage politique, l'esclavage civil est plus tolérable qu'ailleurs. Chacun y doit être assez content d'y avoir la subsistance et la vie. Ainsi la condition de l'esclave n'y est guère plus à charge que la condition de sujet. Mais dans un gouvernement monarchique […] il ne faut point d'esclaves » (XV, I).

Voyons cette partie intégralement :

  • « L'esclavage proprement dit est l’établissement d’un droit qui rend un homme tellement propre à un autre homme, qu’il est le maître absolu de sa vie & de ses biens. Il n’est pas bon par sa nature : il n’est utile ni au maître, ni à l’esclave : à celui-ci, parce qu’il ne peut rien faire par vertu ; à celui-là, parce qu’il contracte avec ses esclaves toutes sortes de mauvaises habitudes, qu’il s’accoutume insensiblement à manquer à toutes les vertus morales, qu’il devient fier, prompt, dur, colere, voluptueux, cruel. Dans les pays despotiques, où l’on est déja sous l’esclavage politique, l’esclavage civil est plus tolérable qu’ailleurs. Chacun y doit être assez content d’y avoir sa subsistance & la vie. Ainsi, la condition de l’esclave n’y est gueres plus à charge que la condition du sujet. Mais, dans le gouvernement monarchique, où il est : souverainement important de ne point abbattre ou avilir la nature humaine, il ne faut point d’esclaves. Dans la démocratie où tout le monde est égal, & dans l’aristocratie où les loix doivent faire leurs efforts pour que tout le monde soit aussi égal que la nature du gouvernement peut le permettre, des esclaves sont contre l’esprit de la constitution ; ils ne servent qu’à donner aux citoyens une puissance & un luxe qu’ils ne doivent point avoir. »

Mettons de côté la faute : fous pour sous. On comprend mal pourquoi ce chapitre a été tronqué pour être cité, sinon parce que la première phrase est des plus ambiguës et que, par ailleurs, Montesquieu, loin de condamner l'esclavage, soutient tout au contraire que, dans certain régime politique (despotique), l'esclavage y est tolérable. On voit, dès lors, que Montesquieu ne rejette nullement l'esclavage universellement mais que l'esclavage est adapté à un certain type de régime politique et non à d'autres (despotique, démocratique, monarchique...).

On pourrait croire, par ailleurs, que Montesquieu est un démocrate et un défenseur des droits de l'Homme et que c'est à ce titre qu'il serait contre l'esclavage. Ne vous y trompez pas ! Voici : « Dans le gouvernement populaire, la puissance ne doit point tomber entre les mains du bas peuple » (Livre XV, XVIII). Dans ce livre consacré à l'esclavage, Montesquieu distingue deux États : civil et politique. Il va de soi, pour lui, et il n'a de cesse à le répéter, que l'affranchissement représente des risques et notamment celui d'augmenter la masse du bas peuple. Conséquemment, soutient-il, s'il l'on choisit d'affranchir les esclaves, dans une république, on ne peut leur accorder un statut de citoyen à part entière : « Il faut que les lois civiles fixent ce qu’ils doivent à leur patron, ou que le contrat d’affranchissement fixe ces devoirs pour elles. [...] Leur condition doit être plus favorisée dans l'État civil que dans l'État politique » (Ibid.). Il en va des affranchis comme des eunuques : « Ce n'est que par une espèce de fiction qu'on peut les considérer comme citoyens » (XV, XIX). Dans la mesure où « ils ne peuvent avoir de famille, ils sont, par leur nature, attachés à une famille » (ibid.). L'eunuque et l'esclave, selon Montesquieu, ne sont pas « dans la société » (XV, II) et n'y sont retenus que parce qu'ils sont attachés à une famille, c’est-à-dire soumis « par la loi du maître » (ibid).

L'autre extrait comporte une faute de plus singulière. Voici :

  • « Il y a des pays où la chaleur énerve le corps et affaiblit si fort le courage, que les hommes ne sont portés à un devoir pénible que par crainte du châtiment : l'esclavage y choque donc moins la raison. Aristote veut dire qu'il y a des esclaves par nature ; et ce qu'il dit ne le prouve guère. Je crois que, s'il y en a de tels, ce sont ceux dont je viens de parler. Mais, comme tous les hommes naissent égaux, il faut dire que l'esclavage est contre la nature, quoique, dans certains pays il soit fondé sur la raison naturelle ; et il faut bien distinguer ces pays d'avec ceux où les raisons naturelles même les rejettent, comme les pays d'Europe où il a été si heureusement aboli » (XV, VII).

Voici le chapitre VII jusqu'à la fin de la citation qui illustre cette partie de l'article :

  • « Voici une autre origine du droit de l’esclavage, & même de cet esclavage cruel que l’on voit parmi les hommes. Il y a des pays où la chaleur énerve le corps, & affoiblit si fort le courage, que les hommes ne sont portés à un devoir pénible que par la crainte du châtiment : l’esclavage y choque donc moins la raison ; & le maître y étant aussi lâche à l’égard de son prince, que son esclave l’est à son égard, l’esclavage civil y est encore accompagné de l’esclavage politique. Aristote veut dire qu’il y a des esclaves par nature ; & ce qu’il dit ne le prouve gueres. Je crois que, s’il y en a de tels, ce sont ceux dont je viens de parler. Mais, comme tous les hommes naissent égaux, il faut dire que l’esclavage est contre la nature, quoique, dans certains pays, il soit fondé sur une raison naturelle ; & il faut bien distinguer ces pays d’avec ceux où les raisons naturelles mêmes le rejettent, comme les pays d’Europe où il a été si heureusement aboli. »

Montesquieu s'inscrit dans la suite d'Aristote et soutient que l'esclavage serait fondé non sur la raison mais une raison naturelle : la chaleur du climat ! Curieuse erreur et, surtout, démenti à cette partie de l'article puisque Montesquieu y soutient une thèse naturaliste en faveur de l'esclavage !

--C. G. 19 juin 2016 à 14:21 (CEST)

Montesquieu était-il, aux yeux de ses contemporains, "raciste" et esclavagiste ? modifier

La question mérite, en effet, d'être posée : Comment le chapitre V du Livre XV de L'Esprit des Lois de Montesquieu a-t-il été reçu ? La charge ironique et dénonciatrice que beaucoup y lisent aujourd'hui a-t-elle été perçue unanimement ? La réponse est : non. Tous ne l'ont pas lu, ce chapitre V, de la même manière, contrairement à ce qui est affirmé dans la partie de l'article consacré à l'esclavage :

  • « On ne voit pas qu'il ait été interprété à l'époque comme raciste et esclavagiste. En 1777, dans son Commentaire sur l'esprit des lois, Voltaire loue bien en lui sa dénonciation de tous les esclavages dont l'esclavage négrier. Dans un concours présenté à Bordeaux en 1785 sur le meilleur éloge de Montesquieu, Marat admirateur de Montesquieu, souligna en lui l'efficacité dénonciatrice de sa méthode ironique. En 1791 et 1792, le fondateur de l'Ami du Peuple prendra parti contre l'esclavage des Noirs. Condorcet, célèbre anti-esclavagiste, dans ses Réflexions sur les nègres, écrites en 1788, relève aussi le persiflage du texte. Autre anti-esclavagiste réputé, l'abbé Grégoire en 1808 écrivit — malgré la régression napoléonienne — De la littérature des Nègres. Il produit en introduction une liste de personnalités du siècle des Lumières et de la Révolution française qui ont combattu pour les droits des « malheureux » Noirs et sang-mêlés, et à qui il dédicace son livre. Montesquieu figurait dans ce répertoire. »

On cite ici Voltaire, Marat, Condorcet et l'abbé Grégoire. Voyons ce qu'il en est.

  • L'abbé Grégoire : Effectivement, l'abbé Grégoire, en 1808, dans De la littérature des nègres..., mentionne Montesquieu dans sa dédicace « à tous les hommes courageux qui ont des malheureux Noirs et Sang-mêlés, soit par leurs ouvrages, soit par leurs discours dans les assemblées politiques, dans les sociétés établies pour l'abolition de la traite, le soulagement et la liberté des esclaves ». Il n'en précise pas la raison pas plus qu'il ne donne de référence précise.
  • Condorcet : Là, c'est plus difficile à soutenir. Il est préférable de donner le passage intégral des Réflexions sur l'esclavage des nègres (1781) pour en décider. Il s'agit d'une note au bas de la page 41 que je donne dans une orthographe modernisée pour que la compréhension n'en soit pas gênée : « Un officier général de la marine de France, distingué par ses lumières & son humanité, a proposé de déclarer libres tous les enfants qui naîtraient mulâtres. » La note est placée juste après « humanité » : « M. de Bori, chef d'escadre, ci-devant gouverneur des Îles françaises. Il y a quelque temps que les habitants de la Jamaïque s'assemblèrent pour prononcer sur le sort des mulâtres, & pour savoir si, attendu qu'il était prouvé physiquement que leur père était Anglais, il n'était pas à propos de les mettre en jouissance de la liberté & des droits qui doivent appartenir à tout Anglais. L'assemblée penchait vers ce parti, lorsqu'un zélé défenseur des privilèges de la chair blanche s'avisa d'avancer que les Nègres n'étaient pas des êtres de notre espèce, & de le prouver par l'autorité de Montesquieu ; alors il lut une traduction du chapitre de L'Esprit des lois sur l'esclavage des Nègres. L'assemblée ne manqua pas de prendre cette ironie sanglante contre ceux qui tolèrent cet exécrable usage, ou qui en profitent pour le véritable avis de l'auteur de L'Esprit des lois; & les mulâtres de la Jamaïque restèrent dans l'oppression. » --- Quel que soit le « véritable avis » de Montesquieu dans ce chapitre V, il ne fait aucun doute que ce texte, selon Condorcet, est inefficace pour lutter contre l'oppression de l'esclavage. Condorcet ne manque pas de préciser combien ce texte, dans sa réception, est des plus ambigus !

Suite à venir...

--C. G. 22 juin 2016 à 09:39 (CEST)

À propos de la portée ironique du passage de De l'esprit des lois sur l'esclavagisme modifier

Cette portée ironique ne fait aucun doute. Il suffit de fait d'aller lire le texte en contexte. Mais surtout le lien vers le site d'africamaat constitue en effet un exemple d'interprétation à contresens mais pour des raisons purement spectaculaires. En effet, si vous allez lire l'article détaillé consacré par ce site à Montesquieu, vous vous rendrez compte qu'il mène une critique intéressante du personnage fondée sur divers arguments (en rapport notamment avec la théories des climats) mais qu'il ne remet pas en cause une seconde la dimension ironique du texte cité ici. Pour des raisons que je ne connais pas, les gestionnaires de ce cite ont néanmoins décidé de mettre en vitrine une citation à contresens de De l'Esprit des lois. Je pense que c'est bête et que cela les dessert mais ce n'est pas un argument pour ajouter une demande de référence sur wikipedia. Cordialement. --Ptitchka (d) 3 juin 2008 à 12:12 (CEST)

Avez-vous seulement lu la totalité des livres concernant directement ou indirectement l'esclavage au sein desquels ce texte est inséré afin de mettre ce chapitre V en perspective et de décider si oui ou non il s'agit seulement d'ironie, de critique et, pourquoi pas, de complaisance amusée (par prétérition) ? Pour information, qu'est-ce que la prétérition ? Tout en ayant l'air de ne pas adhérer à l'énoncé que l'on produit, on en insinue le contenu dans l'esprit du lecteur ou de l'auditeur, sur le mode de la connivence ou de l'évidence partagée. Pour votre gouverne, la majeure partie des arguments soutenus dans ce chapitre trouve un fondement dans le reste de l'œuvre de Montesquieu. Mais pour s'en convaincre, il faut faire un effort de lecture... --C. G. 20 juin 2016 à 12:05 (CEST)